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 A propos du "compte pénibilité"

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Xuan
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   Posté le 13-07-2014 à 23:32:56   Voir le profil de Xuan (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Xuan   

Après le report du compte pénibilité par Valls, il paraît qu’il s’agit de la pierre d’achoppement entre l’intransigeance patronale et les revendications salariales.
Rappelons quand même que cette mesure n’a été qu’une justification permettant de reporter les départs en retraites pour l’immense majorité des salariés et de délivrer des départs anticipés au compte goutte.
Egalement les conditions d'attribution rappellent un peu celles des taux d'invalidité
Le blog oùvalacgt met en ligne un dossier sur le sujet.


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Vendredi 4 juillet 2014
source

Décrets pénibilité : on en est où exactement ?




En ce début de juillet, la presse fourmille de déclarations, d’informations partielles, mais qu’en est-il réellement ?
Si on écoute les trompettes de la CFDT et de FO ( !!), le gouvernement est en plein recul, inadmissible etc. voilà qui surprend un peu… Si on écoute la CGT, hormis un communiqué absolument vide (on en reparlera dans un autre article, " Pénibilité : la CGT se fout de nous !"), on n’entend rien, juste rien et on n’a aucune explication précise.

Alors commençons par faire le boulot de décryptage à sa place, en poursuivant l’étude entamée autour du rapport Moreau en septembre dernier («La pénibilité et le rapport Moreau »), article que nous conseillons de relire pour commencer.
Tous les articles de ce blog sur la pénibilité , ICI

La loi du 20 janvier 2014 « garantissant l’avenir et la justice du système des retraites »
Défense de rire (jaune…) c'est le vrai titre de la loi. Cette loi comporte 11 articles (7 à 17) sous le sous-titre « mieux prendre en compte la pénibilité du travail » . On peut la consulter ICI sur Légifrance.
En gros, ces articles de loi introduisent des modifications au Code du Travail (et d'autres divers codes), en créant pour l’essentiel 27 articles supplémentaires, L4161-1 à L4163-4. Le blog « Où va la CGT ? » se les ait gavé pour vous…
On va aller à l’essentiel.
> Il est créé (L4161-1) une fiche individuelle de pénibilité pour chaque travailleur, selon des facteurs de risques et des seuils définis par décret. La pénibilité est individualisée , c’est l’essentiel de la loi, ce que demandait le MEDEF, ce qui escamote absolument ce qu’elle est réellement, l’illustration du rapport social qu’est l’exploitation capitaliste. On notera que c'était déjà le cas dans la loi Fillon de 2011.
Pour ce qui est des facteurs de risques, on sait que ce seront ceux déjà retenus dans le rapport Moreau, et discutés par les « partenaires sociaux » en 2011. Pour ce qui est des seuils, on en a désormais une vision claire avec le rapport de Virville remis le 10 juin au gouvernement (voir plus loin). Tous les décrets finaux sont attendus vers la mi-juillet, mais il en devrait pas y avoir de surprise.
On notera LA chose importante de cette fiche : c’est l’employeur qui élabore la fiche de pénibilité et la transmets ensuite au médecin du travail. C’est, en préambule, la création de conflits, on en reparlera.
> L’article L4162-1 crée sur cette base un « Compte personnel de prévention de la pénibilité » (appelons-le C3P pour la suite). C’est d’ailleurs déjà une manipulation de langage, il ne s’agit nullement de prévention, tout au plus de réparation. Ce compte donne droit à l’acquisition de points, selon les expositions relevées sur la fiche individuelle, et selon des critères fixés par décret du Conseil d’Etat.
> Ces points peuvent être utilisés : pour une formation de reconversion (L4162-5), pour financer une RTT (L4162-6), pour un départ en retraite avant l’âge légal (L4162-8). On notera pour la RTT que l’employeur peut la refuser si cela met en danger l’activité économique de l’entreprise… Et le recours est alors les Prud’hommes, en gros on sera à la retraite avant d’avoir le résultat, quoi.
> Plusieurs articles (L4162-11, L4162-17, L4162-19, L4163-1 à -4) définissent la création d’un Fonds paritaire, sous couvert de la CNAV, alimenté par des cotisations employeurs. Cotisations réduites s’il y a des accords d’entreprise et de groupe selon le procédé bien rodé sur d’autres sujets : il suffit qu’il y ait négociation, même s’il n’y a pas signature… Bon après, les signatures de la CFDT et de FO, elles ne sont pas difficiles à avoir, dans la logique du « c’est mieux que rien »… Quant au fond paritaire, voilà pour satisfaire toutes les bureaucraties syndicales qui trouvent là encore quelques fauteuils supplémentaires à se partager… histoire de les rendre plus conciliantes sur le fond !
> Les contestations sont prévues (L4162-14), sur la réalité et l’ampleur de l’exposition aux facteurs de risques professionnels, et ça ne va pas manquer, auprès de commissions spéciales régionales de la CARSAT, créées pour l’occasion. Sachant que les contestations sont impossibles au-delà de trois ans après les expositions supposées (L4162-16). Cela rend la contestation très difficile : on sait ce qu’il en est des salariés qui vont aux prud’hommes contre leur patron tout en étant toujours en poste…
> Enfin, l’article 16 de la loi prévoit une entrée en vigueur au 1er janvier 2015 sans aucune condition de rétroactivité, c’est-à-dire de reprise de carrière des salariés déjà au travail… Autrement dit, si t’as plus de 40 ans, t’auras juste rien…

Chacun aura remarqué que la loi crée une règle générale, sans précision. Tous les seuils, les durées d’exposition, les modalités précises sont renvoyées à des décrets. D’où le bazar de ces jours-ci, puisque les projets de décret ont été transmis pour avis avant publication aux divers « partenaires sociaux ».
Pour cette raison, le gouvernement a demandé à un médiateur, Monsieur de Virville de lui présenter un rapport et des préconisations sur les détails précis de chacun de ces éléments. Il convient de rappeler que ce médiateur, ancien DRH de Renault, liquidateur de l’usine de Vilvoorde, est déjà bien connu de nos services pour ce qui est de la réforme du Code du Travail… (voir ICI)

Les préconisations du rapport de Virville

Alors là, il convient de reprendre son souffle et de lire attentivement (et plusieurs fois) le document ci-contre (le texte complet des préconisations). Il n’y a que cinq pages, mais c’est du lourd, et le MEDEF n’a pas tort (et oui…) pour dire que c’est une énorme usine à gaz.
Qu’en retenir ?
> La pénibilité est définie comme à la fois une durée minimum d’exposition et le dépassement d’un seuil
. Par exemple, pour les vibrations, la durée minimum est fixée à 450h/an. Gag : si l’utilisation du marteau-piqueur est « limitée » à 2h par jour (c’est quand même pas mal…), cela fait 428h par an, ce n’est plus un travail pénible… Dans d’autres cas, il s’agit de 900h/an, par exemple les postures pénibles, autrement dit à 4h par jour on sort du critère, tous les électriciens industriels seront ravis de l’apprendre… Et ainsi de suite.
> La pénibilité est définie « après prise en compte des mesures de prévention collective et individuelle » . Exemple, vous travaillez en zone bruyante avec des bouchons d’oreille moulés plus le casque lourd, hop, plus de pénibilité… Vous travaillez toute la journée avec un masque à gaz en zone chimique hostile ? Hop, plus de pénibilité, et ainsi de suite…
> Les facteurs de pénibilité ne s’additionnent que jusqu’à deux… Mort de rire (de rage). Quand vous travaillez, par exemple dans une verrerie, au feu + au bruit + poussières et risques chimiques + travail posté ; ou dans une blanchisserie, à la chaleur, la poussière, gestes répétitifs et travail posté ; ou chez Goodyear, travail posté + geste répétitifs + toxiques chimiques ; ou sur un chantier bâtiment manutentions + vibrations + postures + poussières + etc. juste vous allez crever plus vite mais on n’en tient pas compte…
> Le travail en équipes alternantes n’est pris en compte que s’il comprend des postes de nuit… Vous allez vous détruire la vie en équipes inverses avec votre conjoint(e) pour pouvoir gérer les enfants, mais non, ce n’est pas un travail pénible…
> Le calcul des points, selon les expositions et les seuils, selon le bon vouloir du patron (voir la loi) est un monument d’hypocrisie. 4 points (ou 8 si plusieurs facteurs) par an maximum. Plafonné à 100 points (donc 25 ans d’exposition…). Les 20 premiers points (donc 5 ans) seront obligatoirement affectées à de la formation ; la belle manière de réduire encore la réparation pour avoir été cassé par l’exploitation ? Quelle formation peut avoir un sens quand on est détruit par le travail ? Le reste (donc 80 max) peut être affecté soit à une pré-retraite RTT, si le patron est d’accord (voir la loi), soit à une pré-retraite à raison de 10 points pour un trimestre. Autrement dit, 2 ans maximum, on revient à peine aux 60 ans, et donc pour 25 ans de travail reconnu pénible selon tous les critères énoncés plus haut.
Si on établit une comparaison, le temps de retraite "récupéré" par la pénibilité est égale au 1/10ème du temps travaillé . Pour mémoire, la pré-retraite amiante officielle et existante est calculée sur la base du 1/3 du temps travaillé...
> Mais attention, on veillera à ce qu’il n’y ait pas d’abus (des fois que les patrons exagèrent…) !!! La commission de la CARSAT vérifiera que les expositions déclarées ne sont pas surestimées… Sans déconner… Vous avez bien lu !
Bon, maintenant, relisez une nouvelle fois les préconisations de Virville (qui se retrouveront en fait grosso modo dans les décrets finaux) et vous comprendrez pourquoi aucun syndicaliste un minimum au courant de ce qu’est la vie ouvrière ne peut rentrer dans ce jeu. Enfin, la vraie vie ouvrière, pas celles des négociateurs qui parlent à leur place dans les négociations de ministères…

Par ailleurs, on comprend aussi (et oui…) la panique des petits patrons (par exemple du BTP) qui vont devoir gérer l’affaire. Eux, ils ne veulent rien du tout, la pénibilité ça fait partie du boulot, normal quoi, il y a l’invalidité en fin de carrière pour les prolos qui ne peuvent plus bosser. Et en plus ils vont devoir gérer une paperasse, des relations avec l’administration, des contentieux à n’en plus finir avec tout le monde, et en plus il va falloir payer ? Heureusement Valls est là et vient de reporter l’application de la loi pour six critères sur dix, en ne conservant que ceux plus directement liés à l’activité industrielle (voir l’article des Echos ICI). La CFDT et FO crient au scandale, mais c’est toute la loi qui est un scandale !
Maintenant qu’on a fait le tour de la loi et des mesures du gouvernement, on va pouvoir parler des revendications ouvrières et de la CGT là-dedans, mais c’est un autre article !

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suite :

Samedi 5 juillet 2014
Pénibilité : la CGT se fout de nous !


Titre provocateur ? Soit.
Mais c’est la réalité, et il est temps de mettre les points sur les i. Et ce n’est pas seulement la direction confédérale qui est en cause, mais toutes les directions intermédiaires.
(pour plus de compréhension, il est conseillé de lire l’article précédent en premier : « Décrets pénibilité : où en est-on exactement ? »).

1) Il n’y a aucune revendication précise en matière de pénibilité dans les positions de la Confédération. Nous avons cherché, fouillé partout : rien. C'est d'ailleurs un avis de recherche que nous lançons auprès de nos lecteurs pour nous transmettre les documents revendicatifs sur la pénibilité !
> Repères revendicatifs de la CGT
Fiche 23 : « un droit à départ à taux plein anticipé en retraite pour les salariés ayant exercé des travaux pénibles et astreignants doit être reconnu dans tous les régimes » Rien de plus précis. Aucune définition de ce qu’est un travail pénible, aucune proposition de prévention, aucun chiffre précis pour la réparation, aucun mot d’ordre.
>Texte d’orientation du 50ème Congrès de la CGT. La notion a quasi disparue, sinon pour souligner son coût économique (II-108), ce qui est un peu horrible et dérisoire au regard des dégâts humains qu’elle provoque, plus une vague référence (II-118) à « Un droit à départ anticipé à taux plein en retraite pour les salarié-e-s ayant exercé des travaux pénibles et/ou astreignants doit être reconnu dans tous les régimes » , reprise de la formule des repères revendicatifs. Là encore, strictement rien de plus précis, de mots d’ordres, rien.
> Cerise sur le gâteau, puisqu’on vient d’apprendre que la Confédération participera bien à la Conférence Sociale, nous avons donc regardé ce qu’il y avait comme « exigence forte » (défense de rire !) relative à la pénibilité parmi les 94 retenues… Un beau paragraphe ronflant (voir page 19 sur le document), mais à nouveau, rien : « La santé au travail ne saurait être abordée sans aborder la question de la pénibilité du travail. Au-delà du message désastreux de Manuel Valls cédant une nouvelle fois à la pression du patronat, le compte pénibilité paraît bien dérisoire au regard de l’enjeu de ce dossier. Loin de répondre aux besoins des salariés à court et long terme cela va sans nul doute créer des frustrations, du mécontentement. Pour la CGT, ce dossier est loin d’être clos comme le démontre d’ailleurs les mobilisations récentes dans certaines professions pour obtenir un départ anticipé. L’état lui-même, comme le Medef, en finançant des régimes de réparation de la pénibilité dont les critères ne correspondent pas au contenu de la loi en étant beaucoup plus larges reconnaissent implicitement tout le travail qui reste à accomplir dans ce domaine.
1. l’ouverture de véritables négociations dans les branches professionnelles non couvertes par des dispositifs pour s’attaquer réellement à la pénibilité du travail »

Bref, on ne sait pas précisément ce que la confédération défend, ce qui permet bien entendu toutes les manœuvres, tous les opportunismes au gré de l’actualité : un jour on peut se féliciter, le lendemain critiquer de manière ronflante, de toutes les façons on ne sait pas pourquoi et sur quoi : baratin, baratin, baratin, la confédération roule les militants dans la farine.

2) La Confédération CGT a abandonné le combat contre la pénibilité du travail , et même le combat pour un départ anticipé.
Depuis le printemps 2011 (dans le cadre de l’application de la loi Fillon sur les retraites), il n’y a plus eu d’expression, de campagne sur la question. La réforme Hollande de 2013 est passée sans même une référence précise et une mobilisation sur le sujet. On est bien loin des mobilisations fortes de 2007 et ensuite, qui montraient l’importance de cette question pour les ouvriers et les prolétaires…
On a même vu Thierry Lepaon se prononcer explicitement en août 2013 (voir ICI) en faveur du compte épargne pénibilité, c’est-à-dire l’individualisation et l’abandon des revendications ouvrières sur la question.

3) Là, pour l’occasion de la parution prochaine des décrets d’application, on a eu le droit à une déclaration juste scandaleuse (voir ci-contre).


Déjà le titre : « un immense espoir déçu »… Ah, oui, ça pète bien ! Mais de quel espoir parle-t-on, selon la CGT ? De quelles avancées ? De quelles revendications ? Quand on ne propose rien, on ne peut pas être déçu si on n’obtient rien, logique, non ? Plus loin : « Le dispositif ne pourra pas répondre aux attentes de la grande majorité des salariés concernés par la pénibilité et que les propositions que nous avons formulées n’ont pas été entendues » . OK, et la CGT aurait-elle le courage de dire quelles sont les attentes des salariés ? Par exemple concernant le travail de nuit, le travail posté, le travail à la chaîne ou sur machine, etc. ? Oserait-elle lancer une enquête pour connaître l’avis des masses ? Aurait-elle l’audace de nous rappeler les propositions qu’elle a formulées et qui n’ont pas été entendues ? Parce que nous non plus, on n’a rien entendu, rien du tout, silence radio !
On voit qu’il y a une annexe à la déclaration, on ouvre avec impatience pour voir les détails – et là on se demande si on s’est pas trompé de document tellement c’est minable (voir le texte ICI) : quelques constatations justes, des regrets, mais toujours rien de précis, aucune proposition, aucun axe de lutte, aucune revendication....
Simplement la confédération est parfaitement rentrée dans la logique du C3P et cherche seulement à grappiller quelques virgules. On est dans la pratique CFDT, en pire : elle au moins elle parle sur la question…

4) Les structures professionnelles de la CGT (fédérations) se sont alignées , et on a vu disparaître toute référence précise à la pénibilité au fil des congrès, alors que c’est une réalité vécue dans leur chair par tous les prolétaires, hommes et femmes, petite ou grande entreprise, grand groupe ou PME…

Une réserve : c’est un sujet toujours bien vivant dans la fédération Construction-Bois (qui n’est pas vraiment réputée en matière de démocratie interne, mais c’est une autre histoire). Lors de la journée d’action du 26 juin c’est sur le thème de la pénibilité que la fédération a mobilisé.

Pour son Congrès qui vient de se dérouler au mois de juin, tout un forum préparatoire avait eu lieu sur la question, du matériel est diffusé, la mobilisation se maintient. Il est vrai que c’est une fédération durement concernée (BTP), assez ouvrière et pour qui il est impensable d’oublier la dureté du travail…
Mais le travail à la chaîne dans la métallurgie ou l’agro-alimentaire ? Le travail posté ou de nuit dans la chimie, la logistique ou la santé ?
L’impression que donne la CGT à tous les niveaux, c’est qu’on est passé à autre chose. Que ça n’a pas bougé sur la pénibilité, alors que tant pis, quelque part c’est le triste lot du travail ouvrier et que si on n’a pas réussi à gagner quelques contreparties, et bien il faut se satisfaire de son sort en attendant des jours meilleurs… Et tant pis si les prolétaires sont cassé(e)s par milliers, broyé(e)s par l’intensification de l’exploitation…

5) Alors c’est à nous syndicalistes de classe de relever le défi . A nous d’empêcher qu’on referme la trappe du silence sur la vie des ouvriers et travailleurs exploités.
Nous devons élaborer des grandes revendications, déduites en négatif de ce qu’on nous propose. Voilà quelques propositions pour aujourd’hui.

> Collectiviser la pénibilité, et se battre pour la reconnaissance de la pénibilité au niveau d’une entreprise dans son ensemble, d’un atelier, sans distinctions. De la même manière qu’on s’est battus pour le classement des usines en site amiante. Revendiquons la notion « d’entreprise pénible » !!
> Se battre pour que la déclaration de pénibilité ne soit pas du ressort de l’employeur, mais de recours extérieurs (comme les sites amiante, une fois de plus), le tribunal administratif, les CARSAT ou la CNAV.
> Exiger des vraies réparations, et se battre pour la généralisation du « tiers temps » , encore une fois comme l’amiante : trois ans de travail pénible = un an de pré-retraite. Imposer le cumul des facteurs de pénibilité.
> Reprendre des vieilles revendications aujourd’hui oubliées, par exemple la retraite à 55 ans pour les travaux pénibles (voir photo),
voire moins comme pour les égoutiers qui peuvent partir à 52 ans (50 ans avant la réforme). Et sans conditions de trimestres !
> Faire vivre des revendications essentielles comme l’interdiction du travail à la chaîne, du travail de nuit (sauf métiers d’urgence sociale), la baisse drastique des cadences et le partage du travail, la suppression du travail posté .
> Mettre au premier plan la prévention collective, supprimer les causes de pénibilité à la source (bruit, toxiques, chaleur, manutentions, vibrations…), contre la généralisation des EPI (Equipements de Protection Individuels ) qui ne changent rien et

nous transforment en extra-terrestres insupportables : combinaison + masque + lunettes + casque + bouchons d’oreille et casque anti bruit + chaussures sécurité + gants et surgants, vous avez déjà pratiqué ???
Nous avons du grain à moudre, mais aussi de la matière. Nous savons que nous ne pouvons compter que sur nos propres forces, mais nous avons avec nous la « rage du peuple » et la colère contre cette lente destruction physique et mentale qu’on nous impose.
Notre confédération est clairement rangée du côté du gouvernement, et ne veut pas engager le fer contre le patronat – au moins c’est clair. C’est bien cela reconstruire le syndicalisme de classe, ce n’est pas dans les manœuvres d’appareil au sommet, c’est la reprise au premier plan des revendications ouvrières, celles qui mettent directement en cause le capitalisme et l’exploitation barbare que nous subissons !


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suite et fin

Mercredi 9 juillet 2014
Compte pénibilité : à quoi sert-il vraiment ?


Dans deux gros articles précédents, nous avons épluché les nouvelles règles en matière de pénibilité à la suite de la réforme des retraites de 2013 et des préconisations du rapport de Virville ("Décrets pénibilité : où en est-on exactement ?" et "Pénibilité : la CGT se fout de nous !").
Nous reproduisons un article d'un militant CGT de la construction de Tours qui mérite d'être connu. Il fait une analyse pertinente des nouvelles mesures portées par la loi, et ce qu'elles représentent comme forme de syndicalisme.
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Compte pénibilité : « La loi permet de toute façon de virer ceux qui sont essorés par le travail »


Juste avant l’ouverture d’une nouvelle conférence sociale dédiée à l’emploi, le premier ministre a annoncé le report de la mise en œuvre du compte pénibilité, réclamé à grands cris par le patronat, notamment dans le secteur du bâtiment. Échange sur ce sujet avec Karim, travailleur du bâtiment et militant du Syndicat Local de la Construction du Bois et de l’Ameublement CGT 37. Il intervient ici en son nom propre.

D’où vient le projet de « compte pénibilité » ?

Le compte pénibilité a été créé pour faire passer la pilule de la dernière réforme des retraites, qui a entraîné un allongement de la durée de cotisation. Il s’agit de mettre en place une reconnaissance de la pénibilité du travail pour organiser des départs en retraite anticipés [1].

Le compte pénibilité vient essentiellement d’une proposition de la CFDT. Cette confédération a réfléchi pendant des années à un système de reconnaissance de la pénibilité via un dispositif comparable à des fiches de poste, qui permettrait ensuite au travailleur de faire valoir son droit à la retraite. Dans le texte actuel, l’exposition à des facteurs de pénibilité permet d’acquérir des points autorisant un avancement de l’âge de départ en retraite. Notons que cette approche de la « pénibilité » comme cache-misère du recul de la retraite, aboutit à ne faire que de la réparation et laisse de coté tout le volet « prévention ».


Le compte pénibilité repose aussi sur l’idée de carrière aménagée. Les points acquis suite à l’exposition à des facteurs de pénibilité doivent permettre aux salariés de se former pour évoluer vers des postes moins pénibles. C’est l’utopie réformiste selon laquelle on bosserait dur en début de carrière, et on se verrait ensuite confier un poste moins pénible, un poste de formateur par exemple. Or, en général, les patrons refusent les aménagements de poste ou les évolutions vers des métiers moins exposés [2]. Aujourd’hui, les licenciements pour inaptitude sont parmi les plus fréquents : au syndicat local Construction CGT d’Indre-et-Loire, environ un cas sur deux de licenciement pour motif personnel est lié à l’inaptitude. Le patronat n’a pas besoin d’un nouveau dispositif pour l’aménagement des carrières : la loi permet de toute façon de virer ceux qui sont essorés par le travail...

On est face à une attaque coordonnée. Pensons à l’affaiblissement des prud’hommes, seul outil qui nous permettait jusque-là de faire payer un peu plus cher aux capitalistes les licenciements, et de les rendre moins intéressants ; ou encore à l’annonce d’une réflexion sur les « seuils sociaux » afin de réduire encore un peu plus des outils qui, bien utilisés et coordonnées dans une branche ou une localité, peuvent servir pour du contrôle ouvrier dans les boîtes (comité d’entreprise, délégués du personnel, comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail).


Tu peux revenir sur la prise en compte de la pénibilité ?

Depuis les années 2000, la Fédération Construction de la CGT est celle qui a le plus bougé sur la reconnaissance de la pénibilité – et même sur l’emploi de ce terme. Des négociations sur ce thème ont eu lieu en 2005-2006. Il a fallu ramer pour aborder ce sujet : le gouvernement et le patronat n’ont voulu aborder ce sujet sous un angle collectif. Même au niveau confédéral, au sein de la CGT, la question de la pénibilité a du mal à émerger ; il n’y a pas de réflexion de classe sur ce sujet, alors que la pénibilité découle de l’exploitation des travailleurs. Le 50ème congrès confédéral, en 2013, a refusé les amendements en ce sens.

Sur ce dossier, on récolte ce que l’on sème. D’abord, la CFDT écrit sa vision de la reconnaissance de la pénibilité ; ensuite, les patrons dictent la leur.


Cela fait plusieurs mois que les patrons du bâtiment expliquent que le compte pénibilité ne serait pas applicable...

C’est vrai ! C’est là qu’on voit les limites du « syndicalisme de proposition », qui donne naissance à de véritables usines à gaz. La fédération française du bâtiment (FFB, fédération syndicale patronale, adhérente du MEDEF) a édité un tract dans lequel il est indiqué : « Alerte ! pénibilité = fiches + complexité + coût ». Et 83 000 petits et grands patrons du bâtiment ont signé une pétition pour s’opposer à la mise en œuvre du compte pénibilité.

Une manifestation pour la reconnaissance de la pénibilité a été organisée par la fédération de la construction CGT à Paris en février. Des militants ont également occupé les locaux de la FFB au mois d’avril. Quelles sont les revendications de la CGT Construction ?

Comme toute la CGT, la fédération Construction revendique la retraite à 60 ans pour tous. Mais elle revendique également la possibilité de partir en retraite dès 55 ans et à taux plein pour tous les métiers pénibles. On demande aussi que la pénibilité soit appréciée de manière collective, et non de manière individuelle, comme le prévoit le compte pénibilité.

En ce qui concerne les actions de la CGT Construction, je dois rappeler que le camarade Philippe Christmann est la cible d’une plainte de la FFB, en tant qu’administrateur de la FNSCBA-CGT, pour les « dégradations » commises lors de l’occupation de son siège le 24 avril 2014. « Dégradation » faites à la peinture à l’eau… C’est évidemment le but de l’action de la fédération qui est visé : mettre en avant la revendication du départ à 55 ans pour tous les métiers pénibles.

Dans le bâtiment, dans les travaux publics, mais aussi dans les usines de matériaux de construction, des industries du bois et de l’ameublement, tous les métiers de production sont pénibles si l’on se base sur les critères retenus lors des négociations [3]. Le décret prévoit des durées minimales d’exposition aux facteurs de pénibilité pour acquérir des points, mais ces durées sont atteintes sans problème dans nos industries. L’individualisation des situations prévue par les textes n’a donc pas lieu d’être : ce n’est qu’une manière de nier l’exploitation de classe.

D’ailleurs, en l’état, même si le compte pénibilité était mis en place en 2016, il faudrait imaginer un contrôle syndical dans toutes les entreprises pour s’assurer que le patron remplit bien les fiches d’exposition et qu’il ne contourne pas la réglementation, par exemple en cachant des postes. Chaque patron pourra tricher : ni la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), ni la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT), ni l’inspection du travail ne seront en mesure d’effectuer les contrôles nécessaires au quotidien.

Et puis, il y a la menace pas du tout voilée de la FFB, de recourir à la sous-traitance internationale. C’est de toute façon déjà l’option choisie par tous, grands ou petits patrons, pour contourner les conventions collectives de nos branches (en matière de rémunération, de cotisations et de temps de travail), mais aussi pour externaliser le risque d’accident du travail et de maladie professionnelle (risque qu’actuellement la législation sociale leur fait en partie payer). Dans notre industrie, l’exploitation capitaliste est à nu. Et les patrons ne peuvent pas invoquer la concurrence internationale pour justifier cette exploitation, puisque par définition, un chantier ça ne se délocalise pas.


Comment tu analyses l’annonce du report de la réforme ?

La mobilisation face aux patrons étant très faible, ils auraient tort de se gêner. Autant crier un bon coup et gonfler les muscles. Ils avancent leurs pions, puisque personne n’est là pour leur résister de manière coordonnée. A ce compte-là, on peut imaginer qu’il y aura une nouvelle modification de la loi en 2016. De toute façon, même si elle va au bout, cette réforme porte déjà en elle-même les outils de son propre contournement.

Notes
[1] Dix critères de pénibilité ont été retenus : les manutentions manuelles de charges lourdes ; les postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ; les vibrations mécaniques ; les agents chimiques dangereux, y compris les poussières et les fumées ; les activités exercées en milieu hyperbare ; les températures extrêmes ; les bruits ; le travail de nuit ; le travail en équipes successives alternantes ; le travail répétitif.
[2] L’inaptitude à un poste conduit l’employeur a chercher un reclassement que bien évidemment il ne peut pas organiser. Au sein d’un groupe, il lui est facile de proposer un poste à l’autre bout de la France ou à l’étranger et d’obtenir le refus du salarié. Dans les petites boîtes, il n’y a aucune obligation de création de poste (par fusion de postes existants ou création ex nihilo ...). Les médecins du travail ont d’ailleurs beaucoup de mal à signer une feuille d’inaptitude et ferment les yeux sur la fatigue physique ou morale des salariés pour leur éviter le licenciement !
[3] Cf note 1.

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contrairement à une opinion répandue, le soleil brille aussi la nuit
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