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![]() Le gouvernement présente une réforme bancaire très édulcorée L'Expansion.com avec AFP - publié le 19/12/2012 à 08:00 Le texte sur la réforme bancaire présenté ce mercredi en conseil des ministre n'est pas aussi révolutionnaire que le discours du Bourget qui l'a inspiré. Le monde de la finance tant stigmatisé par le candidat Hollande semble d'ailleurs très bien s'en accommoder. C'était le 22 janvier 2012 au Bourget. François Hollande déclarait la guerre à "son véritable adversaire" . Une entité qui "n'a pas de nom, pas de visage (...) ne sera pas élu et pourtant (qui) gouverne": "le monde de la finance" . Face à cet ennemi qui "a pris le contrôle de nos vie" , le candidat socialiste promettait de faire voter une loi dans les premiers mois de son quinquennat qui obligerait les banques à "séparer leurs activités de crédit par rapport aux opérations spéculatives" . De fait, sept mois après son arrivée au pouvoir, un texte est présenté ce mercredi en conseil des ministre pour tenter de tenir cette promesse. Mais le contenu risque de ne pas être à la hauteur des attentes. Dès le lendemain du discours du Bourget, en effet, le lobby bancaire français a en pris contact avec l'équipe du candidat socialiste, puis, après l'élection, avec le gouvernement et les parlementaires les plus impliqués dans le dossier pour faire valoir ses vues. L'Express a détaillé par le menu comment ce travail d'influence a porté ses fruits, et comment, dès la mi-juillet, le gouvernement reprenait à son compte ses arguments: "la réforme ne portera pas atteinte au modèle français de banque universelle qui a démontré sa résilience face aux crises". Dès ce moment, réduite à une version a minima, la séparation menaçait de faire pschitt. >>Lire: Réforme bancaire: des lobbys très investis. Le texte présenté aujourd'hui se caractérise d'ailleurs par un "glissement sémantique" dénoncé par l'ONG Finance Watch. La promesse de François Hollande, en effet, "visait à isoler les activités de crédit" . Or le projet de loi parle à la place d' "activités utiles" . Un terme plus vaste qui englobe des activités de banque d'investissement, à condition qu'elles soient jugées utiles. C'est notamment le cas des activités de tenue de marché, de compensation et de couverture de taux ou de change. Mais cela peut aussi des activités purement spéculatives à condition qu'il ne s'agisse pas "d'opérations impliquant des risques de contreparties non garanties avec des sociétés de capital-investissement ou des fonds à effet de levier" . Une portée a priori limitée... Car au final, seules ces dernières seront soumises à cantonnement dans une filiale séparée d'ici le 1er juillet 2015. Ce qui ne représenterait que 0,5% du chiffre d'affaires global de BNP Paribas, selon Christian Nijdam, analyste du cabinet Alphavalue, défenseur d'une séparation plus ambitieuse des activités bancaires, cité par Mediapart. Les banques, elles, se seraient déclarées pour l'instant incapables de chiffrer l'impact de la réforme. Le gouvernement entretient par ailleurs un flou sur les activités qui seront purement et simplement interdites. C'est notamment le cas du trading haute fréquence (HTF), activité qui consiste à programmer des ordinateurs pour qu'ils tirent partie de minuscules écarts de prix entre places de cotation pour un même produit financier. A écouter Pierre Moscovici récemment, ont pourrait croire que l'interdiction est totale. Or elle ne concerne en fait que les transaction HTF "taxables". Un critère qui épargne de fait les opérations se déroulant en plus d'une demi seconde... En définitive, la seule activité vraiment proscrite concerne les transactions menées pour leur propre compte par les banques sur le marché des produits dérivés de matières premières agricoles. Ces produits permettent de se couvrir contre des variations de cours mais peuvent être aussi utilisés pour spéculer. Pour certains, le texte ne correspond donc pas aux attentes suscitées par le discours du Bourget. Cela va changer "très peu de choses" , estime ainsi un banquier interrogé par l'AFP, sous couvert d'anonymat. La mesure "aura une portée limitée donc elle ne sera pas gênante pour les banques" , ajoute-t-il, même si "elle a le mérite de créer la structure de filiales spécialisées" . Dans une lettre au ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, datée du 11 décembre, Finance Watch faisait manifestement le même constat et appellait à "revenir aux fondements de la promesse" de François Hollande. ... mais qui pourrait évoluer Face à ces "esprits chagrins ou aux grognons qui n'ont pas lu le texte" , la rapporteure du projet de loi et député PS Karine Berger, défend sur son blog une "séparation bancaire (qui) va bel et bien permettre de faire ce que jamais personne n'avait fait jusqu'à présent: séparer structurellement les activités plus ou moins rocambolesques des banques" . Certes, reconnaît-elle, "la liste des activités cantonnées à ce stade par le texte est limitée. Mais je veux dire à ceux qui s'inquiéteraient de la portée de la loi: il suffit de changer un tiret pour faire passer une activité de la maison mère vers la filiale... et vice versa. Si certains parlementaires souhaitent par exemple se plonger sur la délimitation des activités dites de "tenue de marché", ce sera très simple: un amendement d'une ligne" . D'après elle, la France, avec cette loi, se dote ainsi d'une "paire de ciseau" lui permettant de sanctuariser les activités bancaires qu'elle souhaite. Sachant que seules celle-ci seront sauvées en cas de crise systémique. Les autres feront faillite. [souligné par moi - Xuan] Car le projet se veut, également, être à l'avant-garde de la réforme financière sur le volet de la supervision et des mécanismes de résolution de crise. Il s'agit d'anticiper les crises et de contraindre les établissement à se doter d'un testament en cas de problème, précisant les modalités de leur démantèlement. Le texte entend notamment renforcer les pouvoirs d'intervention du superviseur national, l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP), en cas de défaillance d'un établissement. Côté supervision, une autorité ad hoc sera mise sur pied et dotée de la capacité d'agir si des risques systémiques (susceptibles de déstabiliser le système financier) sont identifiés. Edité le 20-12-2012 à 00:18:44 par Xuan |