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 EMILE POUGET, SYNDICALISTE ANTICOLONIALISTE

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Xuan
Grand classique (ou très bavard)
18356 messages postés
   Posté le 25-06-2011 à 00:12:54   Voir le profil de Xuan (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Xuan   

Encore un article du Petit Blanquiste.

Le syndicalisme de classe et l’internationalisme prolétarien ne sont pas morts.
Au contraire, la crise du capitalisme conduit la bourgeoisie à scier la branche de la collaboration de classe où elle se tenait à l'abri de la colère ouvrière.
Les aventures impérialistes n'ont pas d'avenir.
Le mot d'ordre "prolétaires de tous les pays unissez-vous, nations et peules opprimés unissez-vous !" ne tardera pas à retentir de nouveau.


24/06/2011

EMILE POUGET : « BARBARIE FRANÇAISE »

A la fin du XIXème siècle, la République lançait son armée à la conquête d'un empire colonial qui puisse satisfaire les besoins du grand capitalisme français. Tous les moyens étaient bons pour conquérir de nouveaux territoires tant en Afrique qu'en Asie, y compris les crimes les plus abominables. Aujourd'hui, à défaut de pouvoir contester ces horreurs, certains « faiseurs d'opinion » - historiens, journalistes, politiciens - prétendent que tout le monde à l'époque acceptait qu’il en soit ainsi.
Pour l'historien Gilles Manceron, ce dernier argument témoigne d' « un aveuglement historique » [1], car il s'est toujours trouvé des hommes et des femmes pour s'élever contre les imposteurs qui massacraient des peuples au nom de la civilisation. Et Emile Pouget est de ceux-là.

EMILE POUGET, UN SYNDICALISTE ANTICOLONIALISTE



Emile Pouget (1860-1931), fondateur du premier syndicat d’employés de Paris, devient secrétaire général-adjoint de la Confédération générale du travail (CGT) de 1902 à 1908. Il défend la tendance révolutionnaire du syndicalisme et prend en charge le premier organe de presse de la CGT : La Voix du peuple. En 1906, il participe à la rédaction de la Charte d'Amiens qui est restée la référence du syndicalisme français.
Auparavant, il a été l'éditeur d'un journal pamphlétaire - Le Père Peinard - où il s'exprime dans une langue populaire très imagée. Le premier numéro sort le 24 février 1889.
C'est dans ce journal que, le 12 janvier 1890, Emile Pouget fait paraître un de ses articles anticolonialistes au titre explicite : BARBARIE FRANCAISE.



« Y a des types qui sont fiers d'être français. C'est pas moi, nom de Dieu ! Quand je vois les crimes que nous, le populo de France, nous laissons commettre par la sale bande de capitalistes et de gouvernants qui nous grugent [tromper] - eh bien, là franchement, ça me coupe tout orgueil ! »
Emile Pouget prend pour exemple les atrocités qui se passent alors au Tonkin. « Chacun sait que les Français sont allés là-bas pour civiliser les Tonkinois : les pauvres types se seraient bougrement bien passés de notre visite ! En réalité, on y est allé histoire de permettre à quelques gros bandits de la finance de barboter [voler] des millions... »
« Ah nom de Dieu, il est chouette le système qu'emploient les Français pour civiliser des peuples qui ne nous ont jamais cherché des poux dans la tête ! Primo, on pille et chaparde [voler] le plus possible ; deuxième, on fout le feu un peu partout ; troisième, on se paie de force, pas mal de gonzesses tonkinoises - toujours histoire de civiliser ce populo barbare, qui en bien des points pourrait nous en remontrer. »



Jours ordinaires au Tonkin

« Ça c'était dans les premiers temps, quand on venait d'envahir le pays ; c'est changé maintenant... Pour preuve, que je vous raconte l'exécution du Doi Van, un chef de pirates, qui avait fait sa soumission à la France, puis avait repris les armes contre sa patrie, à la tête de troupes rebelles.»
Pirates ? Rebelles ? Emile Pouget n'est pas dupe du discours officiel. « Les pirates, les rebelles, c'est des bons bougres qui ne veulent pas que les Français viennent dans leur pays s'installer comme des crapules ; c'est pas eux qui ont commencé les méchancetés, ils ne font que rendre les coups qu'on leur a foutus.»
Il raconte ensuite l'exécution de Doi Van. « On a décidé illico de lui couper le cou. Seulement au lieu de faire ça d'un coup, les rosses de chefs ont fait traîner les choses en longueur. Nom de dieu, c'était horrible ! Ils ont joué avec Doi Van comme un chat avec une souris.»
Un carcan au cou, Doi Van est enfermé dans une cage en bois « où il ne pouvait se remuer ». « Après quoi, huit soldats prennent la cage et la baladent dans les rues d'Hanoï. A l'endroit le plus en vue on avait construit une plate-forme ; c'est là qu'on a coupé le cou à Doi Van avec un sabre...
L'aide du bourreau tire Doi Van par les cheveux, le sabre tombe comme un éclair, la tête lui reste entre les mains, il la montre à la foule et la fait rouler par terre. On la ramasse car elle doit être exposée au bout d'un piquet, afin de servir d'exemple aux rebelles.»



Rebelles prisonniers de l'armée française


Implacable, Emile Pouget conclut : « Ah, nom de dieu, c'est du propre ! Sales républicains de pacotille, infâmes richards, journaleux putassiers, vous tous qui rongez le populo plus que la vermine et l'abrutissez avec vos mensonges, venez donc encore nous débiter vos ritournelles sur votre esprit d'humanité ?
Vous avez organisé bougrement de fêtes pour le centenaire de 89 [2] - la plus chouette, celle qui caractérise le mieux votre crapulerie, c'est l'exécution du Doi Van.
C'est pas sur un piquet, au fin fond de l'Asie, dans un village tonkinois, qu'elle aurait dû être plantée, cette tête. Foutre non ! Mais c'est bien au bout de la tour Eiffel, afin que dominant vos crimes de 300 mètres, elle dise, cette caboche, au monde entier, quesous votre républicanisme, il n'y a que de la barbarie salement badigeonnée... »



En notre temps de « partenaires sociaux » bien policés, on se plaît à regretter ces syndicalistes qui faisaient preuve d'un tel sens de classe et se montraient capables de dénoncer avec cette vigueur les turpitudes de la bourgeoisie et de ses chiens de garde.
Ce n'est pas que la République ait cessé ses aventures extérieures... Hélas !

JPD

[1] Gilles Manceron, 1885 : Le tournant de la République, Introduction, Ed. La Découverte.
[2] Le centième anniversaire de la révolution de 1789 avait donné lieu à une grande commémoration avec, à Paris, la présentation d'une exposition universelle qui accueillit plus de 32 millions de visiteurs. La tour Eiffel a été inaugurée à cette occasion.

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