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 17 avril 1975 - victoire du Kampuchea Démocratique

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Xuan
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   Posté le 26-04-2015 à 16:03:46   Voir le profil de Xuan (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Xuan   

Ci-dessous un texte très documenté de Abel Kelen permet de se faire une idée plus précise des conditions très dures de la victoire du Kampuchea démocratique et des falsifications et calomnies déversées alors et jusqu'à ce jour par les médias bourgeois.
Sur ce sujet, la reprise intégrale de ces mensonges par le parti révisionniste a donné à la propagande impérialiste le label fallacieux de l'unanimité.
Malheureusement le format du site ne m'a pas permis de reproduire les illustrations, je prie l'auteur de m'en excuser.
A l'exception d'une appréciation non démontrée sur la Chine de Deng Siao Ping, nous partageons intégralement ce texte qui rétablit la vérité historique.
On relira ici le témoignage de Jacques Jurquet, également cité dans cet article.




__________________


Il y’a 40 ans ; la victoire du Kampuchéa Démocratique


«Tout condamner, c’est considérer, sans esprit d’analyse, que tout est mal fait, que rien ne mérite d’être loué dans une œuvre aussi grandiose que l’édification socialiste, dans cette lutte menée par plusieurs centaines de millions d’hommes, et que tout n’y serait que gâchis.»
Mao Zedong Intervention à la Conférence nationale du Parti communiste chinois sur le travail de propagande - 12 mars 1957.



L’historiographie impérialiste a toujours sali la mémoire des révolutions passées qui ont ébranlé un temps sa domination. A cela, il n’y a rien d’étrange. On ne compte plus les intellectuels en tout genre, portes plume de l’impérialisme, « spécialistes » de l’URSS de Lénine et Staline, de la République Populaire de Chine du temps de Mao, chargés de faire partager aux peuples les peurs de la bourgeoisie. Leurs taches ; nous décrire combien la révolution est une chose affreuse, combien les dirigeants révolutionnaires furent des monstres assoiffés de sang et de chaos, et, Oh combien ; le Communisme est une abomination.

Parmi ces révolutions calomniées, celle du Cambodge occupe une place particulière. Nous avons à faire là, à une puissante et permanente entreprise de falsification historique. Elle est peut être la seule devant laquelle même des prétendus « communistes », qui rejettent le réformisme et prônent la nécessité de la révolution armée, cèdent devant la prolifique propagande mensongère et partagent l’indignation de la bourgeoisie, couvrent ses mensonges. Cette révolution a fait couler beaucoup de repentance, il est vrai. Et même les plus zélés défenseurs en parole de la lutte anti impérialiste deviennent timides lorsque le bourgeois agite le joker «Khmer rouge», devant lequel, tous , sont priés de s’agenouiller et de demander pardon, d’avoir soutenu, d’y avoir « cru » etc. Face à une révolution véritable, l’histoire même devient un tabou pour tous les propagandistes de l’impérialisme. Evoquer les causes de la lutte du peuple cambodgien, la lutte de classe dans la société cambodgienne, le contexte politique mondial d’alors, et le fait que le gouvernement des USA ait donné au Cambodge le triste record de pays le plus bombardé de l’histoire , tout le monde s’en fout ! (0)

Ecrivez, pleurez, chantez, récitez les mots « Génocide » et « Dictature ». C’est tout ce que la bourgeoisie vous autorisera sur le sujet. En dehors de la pensée dominante, on vous accusera de faire du révisionnisme ! Certains ont bien compris la leçon. Qu’on se rappelle Alain Badiou, s’excuser lors d’une émission télévisée d’avoir écrit « Kampuchéa Vaincra ! » à l’époque où le Viêt-Nam envahissait le pays. Une telle attitude de reniement déroule le tapis rouge à l’impérialisme qui tente de réduire l’histoire de la révolution au Cambodge comme le fait de fous sortis de nulle part et imposant une terreur aveugle sur leur peuple. Quoi de plus pratique comme schéma idéaliste pour dissimuler les crimes barbares des impérialistes et nier la lutte de classe qui a eu lieu dans ce pays, ainsi que l’héroïque lutte de libération nationale menée par le FUNK ? (1)
Mais comme l’a si bien dit Nuon Chea à son procès : «…des êtres mauvais, immoraux, ne sauront mentir et cacher la réalité aux yeux du peuple et des masses populaires. On ne saura cacher la réalité de la lutte courageuse du peuple cambodgien et du soutien obtenu des peuples du monde qui aiment la paix et la justice. » (2)

Même le repenti Suong Sikoeun, pouvait déclarer dans le Monde du 8 août 2014 :
« Je reste persuadé que l’analyse marxiste faite par Pol Pot de la situation socioéconomique du Cambodge, un pays pauvre et faiblement peuplé, était exacte. Les remèdes qu’il avait imaginés étaient aussi, à mon sens, les bons. La question était en effet : où trouver les moyens pouvant assurer le développement du Cambodge ? La réponse était claire : il fallait s’appuyer sur la riziculture, dans un pays où la culture du riz est essentielle. Celle-ci, qui pouvait dégager des surplus agricoles, aurait alors permis les moyens de jeter les bases d’une industrialisation. C’était en soi une bonne politique» .

Une politique que l’impérialisme, pire ennemi du Cambodge, sanctionnera. Du sous-développement causé par plusieurs décennies de colonialisme français, à la domination et à la guerre d’extermination menée par les USA, puis l’agression vietnamienne sous l’aile des impérialistes soviétiques, le Cambodge n’a eu de cesse de lutter pour une indépendance véritable. Et la seule indépendance réelle qu’il ait connu à l’époque impérialiste, fut celle trop courte du Kampuchéa Démocratique. C’est un fait qui dérange beaucoup de gens.

Aujourd’hui, les intellectuels réactionnaires s’efforcent à travailler l’opinion publique pour que Pol Pot soit comparé à Hitler, le Kampuchéa Démocratique, à l’Etat Islamique en Irak et au Levant. On tente par là, de nier le caractère fondamentalement différent des classes sociales derrière ces entités, et la nature de classe des conflits les impliquant. Jamais les médias bourgeois n’oseraient comparer la barbarie nazi au colonialisme français, ni à l’armée d’agression des USA. Pourtant il s’agit là de trois grandes forces d’agression et d’asservissement des peuples dans l’histoire universelle. Nul ne peut nier que ce que les fascistes allemands ont fait pendant la durée de la seconde guerre mondiale, les colonialistes français et britanniques l’ont fait pendant des siècles dans leurs colonies d’Afrique et d’Asie. Esclavagisme, viols de masse, massacres racistes, rafles de populations entière pour les travaux forcés et pour la guerre, déplacements de populations, famines organisées, ségrégation ethnique etc.
Les USA quant à eux, esclavagistes des noirs, génocidaires des indiens, auteurs des deux attentas civils les plus criminels de l’histoire à Hiroshima et Nagasaki, ont fait subir entre autres, une guerre terrible aux peuples du Viêt-Nam, du Laos et du Cambodge, détruit l’Irak, l’ayant plongé dans un chaos dont le pays ne sort plus depuis plus de 10 ans. Qui donc révise l’histoire ? Qui est le principal pourvoyeur de guerres et de génocides ? Qui est le garant de la survie de l’obscurantisme ? Le système impérialiste mondial, et lui seul !! Tandis que comparer le mouvement armé dirigé par le Parti communiste du Kampuchéa aux nazis, c’est mettre sur le même plan, les forces de Résistance et l’agresseur qu’elles combattent. C’est donner des cornes aux peuples en lutte pour leur liberté. C’est ce même procédé malhonnête qui est utilisé aujourd’hui pour mettre sur le même plan la Résistance armée palestinienne et les troupes d’occupation sionistes.

Aussi défendre la lutte héroïque qu’a menée le peuple du Cambodge contre l’impérialisme et ses laquais est une question de principes. Quant à toute critique légitime des erreurs des camarades du Cambodge – critique qu’il appartient à la classe ouvrière et aux paysans pauvres du Cambodge de mener à bien – elle ne saurait nous faire oublier la nécessaire recommandation de Mao Zedong sur l’importance de tracer la ligne de démarcation entre la révolution et la contre-révolution . Les «Khmers rouges » furent des révolutionnaires qui ont luttés pour l’indépendance et le socialisme. Face à tous les larbins de la bourgeoisie qui vont s’emparer de cette date du 17 avril 2015 pour attaquer la révolution et le Communisme, nous devons le réaffirmer encore, le réaffirmer toujours.

Cette tache est d’autant plus importante pour nous, communistes de France, en raison des liens historiques entre les peuples de France et du Cambodge. Notre pays où est née l’Association des Etudiants Khmers (AEK), qui s’efforçait de trouver les voies qui allaient sortir le Cambodge des griffes de l’impérialisme. Notre pays qui a abrité le siège du Comité des patriotes du Kampuchéa Démocratique à l’étranger et les divers camarades cambodgiens qui militaient alors dans les rangs du Parti communiste français. L’internationalisme prolétarien dû à nos camarades du Cambodge ; on ne l’oublie pas ! Les crimes commis contre un peuple frère, on ne les pardonne pas ! Du soutien à l’expérience révolutionnaire du Kampuchéa Démocratique ; on ne s’excuse pas !


I. UN PEUPLE HEROIQUE, UNE GRANDE REVOLUTION


Il est une chose à ne pas oublier. Toute la période historique traversant la fin de la seconde guerre mondiale à la fin des années 70 fut marquée par les luttes de libération nationale dans les colonies et semi-colonies dominées par l’impérialisme. De la victoire de l’insurrection qui proclama l’indépendance de la République Démocratique du Viêt-Nam en 1945, à celle de la guerre populaire sous la direction du Parti communiste chinois en 1949 ; de la révolution cubaine de 1959 aux guerres révolutionnaires pour l’indépendance des peuples du Cameroun, d’Algérie, des deux Congo, de Palestine, de Guinée Bissau et Cap Vert, de l’Angola et du Mozambique etc. La lutte du peuple cambodgien s’inscrit dans ces nombreuses luttes opposant les peuples opprimés à l’impérialisme.

Comprendre la révolution cambodgienne est impossible sans comprendre l’époque et le contexte dans laquelle elle émerge. Depuis 1930, année de création du Parti communiste indochinois qui réunissait les peuples de ce que l’on appelait alors « l’Indochine française » (Viêt-Nam, Cambodge, Laos), ces derniers durent organiser la lutte armée révolutionnaire contre le colonialisme français tout d’abord, contre les fascistes japonais ensuite, quand ceux-ci prendront la place de la France pendant l’occupation nazi, puis, l’impérialisme américain qui souhaitait prendre la succession des colonialistes français dans ce vaste territoire du sud-est asiatique.

Après la proclamation de la République Démocratique du Vietnam en 1945 et l’évolution de la lutte des trois peuples de « l’Indochine française », le parti communiste indochinois constatant les particularités de la lutte de chaque pays prend la décision de se dissoudre en 1951 et de laisser chaque pays organiser la lutte de manière autonome. En 1953, l’indépendance du Cambodge est reconnue par la France (Sihanouk l’avait proclamé en
1945). Une indépendance du type de celles qui seront accordées par le colonialisme français dans toutes ses colonies d’Afrique. Ce qui signifiait, la fin de l’administration directe du pays par la France, mais le maintien de la domination économique des monopoles français (3), et du fait, l’imposition faite au Cambodge de suivre une politique conforme aux intérêts de ces monopoles. Néanmoins, cette sortie du Cambodge de l’empire colonial français va profiter aux impérialistes américains pour se tailler dans le pays une place dominante. Pour le Parti communiste du Kampuchéa, fondé le 30 septembre 1960, il convient de déterminer correctement le caractère semi-colonial de la société cambodgienne :

« Le Kampuchéa à cette époque dépendait de l’impérialisme, en particulier de l’impérialisme américain…Cette analyse a-t-elle pu s’effectuer sans lutte ? Certes non ! Nous avons du lutter dans nos rangs, nous avons du lutter dans certains milieux de la société. A cette époque, au sein de la nation, certains soutenaient que le Kampuchéa était indépendant depuis 1949, d’autres affirmaient que l’indépendance avait été acquise en 1954 grâce aux accords de Genève. En définitive, ces deux opinions, à part la divergence sur la date affirmaient que le Kampuchéa était indépendant. Mais la véritable nature de la société d’alors, la véritable nature du pays permettaient-elles de parler d’indépendance ? Assurément non. Ni l’économie, ni la culture n’étaient indépendantes. Ni même la politique : certains secteurs en étaient indépendants, mais d’autres ne l’étaient pas.
Il en était de même pour la vie sociale »
. (4)

Une société semi-coloniale et semi-féodale, voilà ce qu’était le Cambodge dans lequel ont luttés les communistes cambodgiens. Un pays dominé par l’impérialisme et ses laquais. Lesquels sont principalement : la bourgeoisie compradore ; patrons d’entreprises d’import-export pour le compte des compagnies étrangères. La bourgeoisie bureaucratique ; fonctionnaires corrompus, notamment les officiers militaires qui s’enrichissent en faisant des affaires avec les commerçants, et quelques propriétaires fonciers.
Dans leur livre « Phnom Penh libérée », Jérôme et Jocelyne Steinbach décrivent ainsi l’exploitation vicieuse que la bourgeoisie compradore faisait subir aux paysans khmers :

« …cette bourgeoisie compradore collectait les richesses agricoles sous forme d’intérêt usuraires : entre deux récoltes, les paysans qui ne pouvaient faire face aux multiples dépenses familiales, administratives ou religieuses, se tournaient vers le commerçant du village, qui leur achetait alors le riz sur pied, à la moitié de sa valeur, ou prêtait l’équivalent de 15 kg de riz remboursables par…30 kg au moment de la récolte.
L’argent qu’elle réalisait ainsi (à partir du travail des paysans), elle le plaçait dans les banques étrangères, achetait des propriétés en France, de l’or ou des bijoux. Certains faisaient aussi construire à Phnom Penh des villas qu’ils louaient à des riches étrangers, notamment américains – location payable en devises étrangères, cela s’entend. »
(5)

Mais pour les révolutionnaires cambodgiens, la lutte de classe au Cambodge est un problème complexe et demande d’adopter une stratégie et une tactique juste. Le prince Norodom Sihanouk, champion de l’opportunisme et fin stratège politique, sait utiliser les réformes, mais aussi les contradictions entre différentes forces d’influences étrangères pour pérenniser son régime. D’une part, il consent à l’aide économique des USA et réprime le mouvement révolutionnaire. D’autre part, il participe à la conférence de Bandoung et reconnaît la Chine populaire. Il refuse de voir le Cambodge intégrer l’OTASE ; l’organisation militaire anticommuniste en Asie créée par les USA pour faire la guerre aux révolutionnaires du Viêt-Nam. Il entreprend la nationalisation du commerce extérieur et du secteur bancaire. Le danger que représentent les manœuvres de la CIA pour déstabiliser le gouvernement de Sihanouk (agressions armées par l’intermédiaire de l’armée thaïlandaise, soutien financier à l’organisation fasciste « Khmers Serei » ) oblige les révolutionnaires à déterminer les ennemis principaux et secondaires. Le PCK va donc comprendre la nécessité de jouer sur deux tableaux. Une lutte légale, en se servant de la tribune parlementaire pour défendre les droits des ouvriers et paysans et appuyer la politique de Sihanouk lorsque celle-ci porte des coups à l’impérialisme.
Une lutte clandestine qui s’appuie sur plusieurs facteurs : par nécessité d’échapper à la répression de la police de Lon Nol qui pourchasse les révolutionnaires, et en prévention d’un coup d’Etat de la clique Lon Nol-Sirik Matak. Le PCK mentionnera comment les tragiques évènements d’Indonésie en 1965 l’ont conforté d’avoir choisi la juste voie en se préparant à la lutte clandestine en même temps que l’organisation de la lutte légale. Il s’engage alors à prendre des mesures de sécurité très strictes. (6) Le parti entreprend un important travail politique au sein des masses :

« A la tombée de la nuit, cinq à dix hommes, pas tous armés entrent dans un village où le plus souvent quelques habitants sûrs les attendent. Les mesures de sécurité sont très discrètes et c’est en simple voyageurs qu’ils s’installent dans la maison, parfois dans la « sala » de la pagode, ou traditionnellement la population se rassemble pour écouter qui vient de loin. On bavarde, on plaisante et on rit, mais surtout on aide les paysans à exprimer leurs doléances à l’encontre des fonctionnaires et des policiers, à prendre conscience des injustices sociales. Puis après avoir glissé quelques suggestions sur les moyens de se protéger des agents de l’Etat et être allé saluer respectueusement le supérieur du monastère bouddhique, le petit groupe poursuit sa route. Mais quelques heures plus tôt il a envoyé un habitant au poste militaire le plus proche avec mission de rendre compte de la présence des rebelles, ceci avant que le village soit accusé de leur être favorable… La prochaine visite des rebelles permettra d’évoquer la corruption et les turpitudes des grands mandarins et de l’entourage du chef de l’Etat, en laissant pour l’édification de la population quelques tracts contre le régime et « la clique Lon Nol – Sirik Matak ».
« Les khmers rouges s’efforcèrent toujours d’éviter les accrochages avec les troupes gouvernementales, soucieux surtout de faire un travail en profondeur. »
(7)

Un travail en profondeur qui assurera au PCK la direction des luttes du peuple ; manifestation dans les villes de Phnom Penh et de Battambang, organisation des luttes de la paysannerie. Dans ce pays ou plus de 80% de la population sont des paysans, les luttes à la campagne étaient nombreuses. Les paysans se soulevaient contre les propriétaires fonciers et les fonctionnaires corrompus qui les chassaient de leurs terres pour faire des profits. Les révoltes paysannes à Samlaut et Stung Kragnoung en 1967 marquent un tournant. La répression des hommes de Lon Nol est terrible, les troupes réactionnaires massacrent des milliers de paysans. Les députés communistes qui jusqu’à présent continuaient à effectuer un travail légal à l’Assemblée sont attaqués par le régime qui les désignent comme responsables de la révolte. Lon Nol demande la levée de leur immunité parlementaire et leur comparution devant le Tribunal militaire. Khieu Samphan et Hou Yuon sont contraint de rejoindre les maquis révolutionnaires pour échapper à la répression. Plusieurs de leurs partisans les suivront.
En 1968, fort de l’appui des paysans, le PCK prend la décision de déclencher des insurrections armées dans plusieurs zones du pays, suivant la stratégie d’une guerre populaire. Dès lors, les communistes développent leurs bases d’appui et élargissent leurs bases de guérillas. (8)

Ne supportant plus les résistances de Sihanouk à leur politique, les impérialistes américains organisent avec l’aide de leurs serviteurs Lon Nol et le prince Sirik Matak un coup d’Etat contre le gouvernement alors que Sihanouk se trouve en France. Sihanouk est destitué le 18 mars 1970. Ce coup d’Etat donnera suite à une libéralisation de l’économie au profit des USA et à la constitution d’une base d’appui plus solide pour lutter contre les révolutionnaires vietnamiens. Les troupes de Lon Nol appuient les marines américains dans leur guerre contre le Viêt-Nam. A l’intérieur du Cambodge, elles pratiqueront des massacres contre les minorités nationales, en particulier les vietnamiens. Mais cette base d’appui se révélera peu solide. Sihanouk ayant trouvé refuge en République Populaire de Chine va appeler à la résistance armée contre le traitre Lon Nol et élargir la résistance dirigée par le PCK. Le 23 mars 1970, le Front Uni National du Kampuchéa est créé. Sihanouk annonce que le seul gouvernement légitime est le Gouvernement Royal d’Union National du Kampuchéa créé le 5 mai 1970. La résistance cambodgienne va déclencher une guerre populaire d’une formidable ampleur que ni l’intervention des troupes U.S, ni celle de Saigon à leurs bottes ne parviendront à faire reculer. Bombardements intensifs qui atteindront leurs plus hauts degrés en 1973, déversements de produits chimiques et de plusieurs tonnes de clous dans les rizières, sont les pratiques génocidaires par lesquelles le gouvernement des USA tentera de soumettre un peuple de 8 millions d’habitants. Hommes et femmes de la résistance du peuple, dans le feu de la guerre, organisent les coopératives agricoles pour subvenir aux besoins du front et du peuple, édifient des fabriques d’instruments aratoires et d’armements tout en élargissant les zones libérées. Les ouvriers les plus combatifs des luttes populaires rejoignent les maquis. Dans le cours de l’année 1970, la résistance s’impose déjà dans la moitié du pays. Dans les zones libérées, les paysans célèbrent leurs constructions hydrauliques et la production agricole par une chanson révolutionnaire aux paroles sublimes :


Ne dépendons plus du ciel pour nos cultures,
Appuyons-nous sur la force collective,
Saison sèche ou saison de pluie Cultivons le riz toute l’année !

Creusons, péchons,
Déplaçons les pierres gênantes,
Abattons les arbres encombrants,
Terres vierges deviennent champs fertiles !

Transportons sur notre dos, au bout de nos palanches,
Déclarons la guerre à la nature,
Anéantissons l’impérialisme et ses laquais,
Le grain en abondance, la vie toujours plus belle !

Le riz mûrit dans les champs,
Ses tiges ondoient sous le vent,
La révolution éclaire la terre,
D’immenses étendues dorées qui font notre joie. (9)




La révolution cambodgienne est ainsi ; une lutte de libération au cours de laquelle les masses commencent à édifier le nouveau pouvoir révolutionnaire, basé sur des rapports de production socialistes pour améliorer leurs conditions de vie. Des commentateurs bourgeois, pseudo experts comme seule la bourgeoisie peut en produire, se sont amusés à répandre la calomnie comme quoi les « khmers rouges » étaient des mauvais combattants ayant eu à faire à plus mauvais qu’eux. Ne nous trompons pas, cela n’a rien à voir avec la réalité mais plutôt avec la haine des laquais de l’impérialisme devant l’inefficacité des puissantes armes de leurs maitres face au peuple en lutte, moins bien équipé, mais menant une guerre juste. Les journalistes chinois qui couvraient le front de Phnom Penh avant la prise du pouvoir, nous ont offert un témoignage amusant :

« Le plus intéressant est qu’on utilise les carcasses d’avions et de chars pour produire des marmites. Une usine de quincaillerie de l’est du pays produit ainsi chaque mois 1500 à 1800 marmites en aluminium. Largement de quoi répondre aux besoins de la population locale. Le reste est livré au front. Quand nous sommes arrivés dans les régions libérées, un ami cambodgien nous avait dit : « Maintenant, les avions ennemis ne font plus peur aux gens.
Quand ils voient les avions, ils disent qu’on leur envoie de l’acier. » Quand les « jets » survolent les campagnes, les paysans rient en disant : « Vous pouvez toujours vous déchainer. Un jour vous deviendrez des marmites. » Voyez à quel point ces paroles font ressentir le dédain et l’ironie d’un peuple révolutionnaire à l’encontre des impérialistes qui se prévalent tant de la puissance de leurs armes modernes ! »
(10)

Des mauvais combattants qui transforment les avions en marmites ! Quant aux menaces de Kissinger de rayer le pays de la carte en 72h si les forces de libération ne désarment pas, elles ne témoigneront que de la nature de roquet de ce bourreau des peuples. (11)Sûrs de la victoire du peuple en armes qui mène une lutte sans concessions, les FAPLNK (Forces Armées Populaires de Libération Nationale du Kampuchéa) encerclent Phnom Penh, fief de Lon Nol, qui survit uniquement grâce à l’aide de l’impérialisme américain. Au mois d’avril 1975, Lon Nol doit se résigner. Les bénédictions des moines, les amulettes magiques, toute la superstition bouddhiste en laquelle il accordait tant de foi ne lui épargnera pas la défaite. Il apprendra à ses dépend que c’est le peuple seul qui fait l’histoire, et non pas les dieux ou les esprits. (12) Les USA ont cessé toute aide aux troupes réactionnaires de la « République khmère ». Apeurés par le sort que le peuple leur réserve, les traitres se défilent. Le maréchal
Lon Nol trouvera refuge aux Etats-Unis, le général Sosthène Fernandez se verra accorder l’asile politique en France. Le 17 avril 1975, les révolutionnaires libèrent Phnom Penh sans combattre, sinon de brefs échanges de tirs. Pour les masses la joie est grande. Et c’est un fait qu’il faut souligner, tant on veut nous interdire aujourd’hui, de dire que Phnom Penh fut « libérée ». Parmi les représentants de l’impérialisme vivant à l’intérieur de la ville, c’est la panique. Dans l’Ambassade de France, les époux Steinbach sont traités de « collabos ». Les bourgeois français de Phnom Penh qui voient la « fin de la civilisation » au Cambodge, qualifient les révolutionnaires de « nazis ». (13)
Les révolutionnaires auront raison de quelques traitres. Comme Sirik Matak, exécuté après sa capture.

La victoire du FUNK est assurée mais les difficultés ne sont pas finies. En raison des bombardements meurtriers des américains, la ville de Phnom Penh a vu s’entasser des millions de réfugiés venus des campagnes. De 600 000 habitants avant 1970, la population est passée à 3 000 000 d’habitants ! Le PCK avait prévu bien avant la libération de la ville que le ravitaillement de la population de Phnom Penh, entièrement dépendant des parachutages de nourriture organisés par les USA, poserait un sérieux problème. Il va alors prendre une décision historique, décrite par toutes les bourgeoisies du monde et leurs agents comme une des pires horreurs du siècle dernier : l’évacuation totale de la ville. Sur cet événement, les réactionnaires au service de l’impérialisme rivalisent de fables et de racontars. Folie des « Khmers rouges », « utopie agraire », barbarie gratuite etc. Rétablissons les faits à la lumière du matérialisme historique. Les déclarations des principaux acteurs de cette décision y contribuent :

Le 12 aout 1975, Khieu Samphan alors vice premier ministre et commandant en chef des FAPLNK, exposait ainsi la situation au représentant de l’Agence d’Information du Kampuchéa :

« Durant plus de 5 années, l’impérialisme américain et ses valets, à l’extérieur du pays, ont mené une guerre de destruction sans précédent, la plus barbare, la plus cruelle contre la nation et le peuple du Kampuchéa. Notre économie était, en grande partie, détruite, les usines, rizières, champs, voies de communication, écoles, hôpitaux, maisons d’habitation, pagodes des villes ou des campagnes étaient, en grande partie, anéantis.
Nos compatriotes, par millions, étaient racolés de force et enfermés dans des camps de concentration dans Phnom Penh et dans les autres villes sous contrôle provisoire de l’ennemi. Les victimes n’avaient pas de nourriture, le choléra les décimaient impitoyablement, des familles étaient douloureusement séparées et éparpillées dans tous le pays. Immédiatement après la libération, le GRUNK, le FUNK, tout le peuple et toute l’armée populaire se lancent avec détermination pour résoudre tous ces problèmes, séquelles de la plus sauvage guerre de destruction et d’agression de l’impérialisme américain et ses valets. Comment résoudre ces problèmes ?

D’une part, les populations à la campagne avaient consenti tous les sacrifices pour vaincre la guerre d’agression et de destruction des impérialistes américains et de leurs laquais, et ont souffert pendant de longues années. D’autres part, les populations des villes, par millions, qui venaient d’être libérées, souffraient de la famine du fait de l’ennemi et étaient dans un état lamentable. Ce problème est d’une gravité sans précédent, nous devons le résoudre sans perdre un instant, car c’est une question vitale pour notre nation et notre peuple. »


Le 4 septembre, le vice premier ministre du GRUNK, Ieng Sary, dans une interview accordée à « NEWSWEEK » Amérique Latine revient sur les deux raisons principales de l’évacuation de Phnom Penh :

« Il y avait deux raisons et, la première c’était les vivres. Nous avions estimé la population de Phnom Penh à 2 millions d’habitants, mais nous en avions trouvé presque 3 millions quand nous y étions entrés. Auparavant, les américains avaient amené, chaque mois, de 30 000 à 40 000 tonnes de vivres à Phnom Penh. Nous manquions de moyens pour transporter dans la capitale la même quantité de vivres. Aussi, la population doit-elle aller chercher les vivres là où ils se trouvaient. Et nous devions nourrir cette population tout en préservant notre indépendance et notre dignité sans demander l’aide d’un quelconque pays. »

La deuxième raison :

« Nous avions découvert un document ennemi révélant tous les détails d’un plan secret politico-militaire de la CIA américaine et du régime de Lon Nol pour provoquer des troubles après notre victoire. Ce plan comporte trois points :
1. Nous ne serions pas capable de résoudre le problème des vivres pour la population : l’ennemi ferait fomenter des troubles par ses agents infiltrés dans la population ;
2. De nombreux soldats de Lon Nol, qui se sont soumis, cachaient en réalité des armes. Ils avaient projeté de nous attaquer après que nous ayons pris Phnom Penh ;
3. Ils avaient prévu de corrompre nos combattants et d’émousser leur esprit combatif par les filles, l’alcool et l’argent. »


En prenant la décision d’évacuer la population de Phnom Penh, le PCK a pris une décision politique, peut être la plus difficile, mais aussi la plus courageuse et la plus audacieuse jamais prise. La mobilisation des masses pour l’agriculture dans les coopératives agricoles a permis d’échapper à la terrible famine que le gouvernement des USA avait prédite au pays (14).
L’évacuation de la population de Phnom Penh, à en même temps permis de réaliser un coup de maitre ; celui de neutraliser la contre-révolution organisée dans la ville en moins de 24h !
Mais, faute de moyens nécessaires, les conséquences seront tragiques pour beaucoup d’évacués. La majeure partie, des pauvres, plus particulièrement les paysans qui avaient fuient les campagnes bombardés, mais aussi mendiants et coolies verront leur niveau de vie amélioré dans les coopératives. Les ouvriers, et des paysans venus renforcer leur rang, reviendront progressivement dans la ville pour réparer et édifier de nouvelles usines. Une autre partie, une minorité infime qui vivait dans le luxe, quant à elle, devra partager à son détriment, le labeur du peuple pour la reconstruction du pays. La victoire militaire assurée, le problème majeur que posait Phnom Penh réglé, la révolution se voit imposer une priorité essentielle : Tout est à reconstruire.
L’un des pays les plus pauvres de la planète, avec une faible population, en partie décimée par plusieurs années de guerre va devoir se lancer dans une gigantesque bataille productive dont on ne souligne jamais assez la portée héroïque. Le travail sera dur, très dur. Mais cette fois, le peuple travaille pour lui, pour édifier un pays indépendant et prospère. Débarrassé des exploiteurs propriétaires fonciers, usuriers qui faisaient la misère des paysans, débarrassé des capitalistes de la ville et de la bourgeoisie bureaucratique et compradore au service des compagnies étrangères, le Cambodge récupère ses richesses et décide de sa propre voie. Ce qui ne manquera pas d’enrager tout les impérialistes qui avaient des intérêts dans ce pays. De plus qu’après la victoire de la révolution au Cambodge, suit la libération de Saigon par les troupes du FNL et la débâcle totale des marines américains.
C’est la fin de la guerre du Viêt-Nam. L’histoire à montré une nouvelle fois, que peu importe les capitaux investis dans la guerre, la technologie et les armes modernes de l’impérialisme américain ; la guerre du peuple est invincible !
Et l’espoir que les victoires des peuples d’Asie ont suscité parmi les autres peuples du monde en lutte est grand. Dans les métropoles impérialistes, les forces communistes et populaires fêtent la victoire des guerres révolutionnaires du sud-est asiatique.



Dès lors, la presse capitaliste entreprend une campagne de calomnies sur la révolution cambodgienne. Les accusations de « génocide » apparaissent très tôt. Le Figaro fut un des premiers canards bourgeois à parler de génocide. Dans un style raciste qui n’étonne pas de sa part, il déclarait le 12 mai 1975 :

« Ce que font les Khmers rouges (qui mêlent la barbarie asiatique au fanatisme révolutionnaire), est un génocide pur et simple » . (15)

Les journalistes rivalisent de mensonges tandis que le ministère de l’Intérieur français fait poser des scellés sur l’ambassade du Cambodge à Paris et investit les locaux. Les communistes du Cambodge n’ignorent pas les calomnies et les actions contre eux depuis l’étranger. Ils essayeront autant qu’ils peuvent par la presse, les visites d’hôtes étrangers et les reportages de montrer les conquêtes de la révolution. Mais nous l’avons évoqué plus haut, la lutte du peuple cambodgien s’inscrit dans ces nombreuses luttes opposant les peuples opprimés à l’impérialisme. Cependant, elle a quelques spécificités. Il s’agit d’une des rares révolutions dans un pays dominé, après la révolution chinoise, où la direction révolutionnaire n’a pas entrainée la conquête armée de l’indépendance par les masses, vers une nouvelle forme de dépendance envers des puissances étrangères. Elle a tout fait pour préserver son indépendance et ne pas se transformer en semi-colonie. Le cas des révolutions cubaine et vietnamienne par exemple est significatif. La révolution ne s’arrête pas à la prise du pouvoir. Une fois celle-ci acquise les transformations économiques et politiques revêtent un caractère indispensable pour bâtir une véritable indépendance. Celle-ci est impossible sans remettre radicalement en cause la division internationale inégale du travail . Dans le cas de Cuba, comme du Viêt-Nam, les dirigeants ont soumis leur pays et leur peuple à ces rapports inégaux au profit de l’URSS sociale-impérialiste en s’intégrant au Comecon. (16)
Cela à eu des conséquences dramatiques, tant du point de vue de leur développement économique, que des drames politiques qu’ils ont entrainés. Sans une direction ferme idéologiquement, s’appliquant les principes de compter sur ces propres forces, et ayant compris que le socialisme ne peut se résumer à la propriété étatique des moyens de production, il est impossible de mener à bien la construction du socialisme. C’est là que l’expérience du Kampuchéa Démocratique est importante.

Il ne faut pas oublier que le contexte de la construction du socialisme au Cambodge est inédit.
En effet, alors que les autres Etats socialistes avaient pu compter sur l’aide économique internationaliste de l’URSS de Staline, le Cambodge va faire sa révolution dans des conditions toutes différentes. L’URSS, à la suite de la prise de pouvoir par les révisionnistes khrouchtchéviens est devenue un « social-impérialisme ».
La République Populaire de Chine, jusqu’à présent seule aide conséquente des révolutionnaires cambodgiens, va chuter en 1976 au profit de la clique révisionniste dirigée par Deng Xiaoping. Et la coopération économique qui continuera d’exister avec le régime de Deng ne sera pas une garantie solide vu les nouvelles orientations des révisionnistes chinois.
Compter sur ses propres forces va être un principe vital pour le PCK qui de toute façon ne demande pas l’aumône. Prenant la tache qui lui incombe de se développer dans ces conditions déterminées, le PCK trace sa ligne économique dans les grands traits que voici :

« Dans l’œuvre d’édification nationale, nous nous appuyons sur les réalités de notre pays qui est un pays agricole arriéré et détruit par la guerre d’agression et de dévastation…Nous prenons l’agriculture comme facteur fondamental et nous nous servons du capital accumulé par l’agriculture pour édifier progressivement l’industrie et transformer en un court laps de temps le Kampuchéa ayant une agriculture arriérée en un pays moderne, puis en un pays industriel, en nous en tenant fermement à la ligne d’indépendance de souveraineté et de compter sur ses propres forces. »
« Dans le domaine agricole nous accordons la priorité à la solution du problème de l’eau, qui est le facteur clé pour obtenir au maximum la production du riz, notre culture vivrière de base. »
(17)


Collectivisation de l’agriculture mais aussi construction d’usines nouvelles pour le travail des métaux et développement des chantiers navals, l’économie est réorganisée, et même avec des difficultés évidentes va connaitre un essor. Un document d’une chercheuse, illustre bien ce fait. Même s’il souffre de certains préjugés bourgeois, il a le mérite d’exposer assez honnêtement les réalisations et la démarche du PCK en matière économique :

« Deux facteurs, toutefois, vont contribuer à la croissance du secteur industriel. C’est d’une part le principe d’autosuffisance selon lequel le pays doit produire, dans toute la mesure du possible, ce qui est nécessaire à sa survie. Ce principe sera largement suivi et les dirigeants ne feront appel aux étrangers (chinois, coréens, yougoslaves, roumains) que pour la fourniture de machines et l’éducation technique des ouvriers. Il ne s’agit pas d’importer des produits finis, il faut les fabriquer soi-même. C’est d’autre part l’extension gigantesque de l’agriculture et surtout de l’hydraulique et le besoin en outillage qui en résulte : pioches, pelles, motopompes, machines à battre, à décortiquer le riz, tracteurs… Phnom Penh va se spécialiser dans la construction de machines agricoles, dans la fabrication de pièces de rechange et dans le montage de gros matériel (tracteurs) » (18)

Mais cette édification économique se fait dans un contexte de menaces permanentes. En effet, le Viêt-Nam connait des difficultés. Mais il ne résout pas ces problèmes par la même voie que les cambodgiens ; par la mobilisation des masses pour la reconstruction du pays. Il va en choisir une autre, conséquence de la trahison politique de ses dirigeants. Le Viêt-Nam après y avoir résisté un temps, adhère au Comecon. Et celui-ci à des projets pour le Cambodge. Les soviétiques s’entendent alors avec la clique des traitres vietnamiens pour soumettre le Kampuchéa Démocratique à une spécialisation du travail auquel il se refuse. Dans leur cadre économique, le Cambodge devra être réduit à la monoculture du riz. Le même procédé par lequel l’URSS à soumis l’économie cubaine avec le sucre. Cela arrange les gouvernants vietnamiens. Avec une population de 50 millions d’habitants à nourrir et les destructions monumentales causées par la guerre impérialiste, ils entreprennent de soumettre leurs voisins, autrefois frères de luttes. L’occupation et le pillage du Laos et de ses 2 millions d’habitants, le Cambodge et ses 8 millions d’habitants et ses terres en abondances sont les objectifs qu’ils se sont fixés. Déjà, une tentative de coup d’Etat fomentée par des agents vietnamiens pour renverser le gouvernement du Kampuchéa Démocratique est déjouée en 1977. Dès lors, les enquêtes pour trouver les traitres qui agissent masqués sous les ordres du Parti du Travail du Viêt-Nam s’intensifient. Et avec elles, la répression. Certains comploteurs parviennent à prendre la fuite. Parmi eux, Hun Sen, actuel dirigeant du Cambodge qui reviendra en 1979 grâce aux chars vietnamiens. En décembre 1977, une première agression armée est lancée par l’armée vietnamienne, puis, une deuxième en avril 1978. Elles sont repoussées par les forces armées du Kampuchéa. En septembre 1978, une délégation du PCMLF (Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France) se rend au Kampuchéa Démocratique. A leur départ, le secrétaire général du PCK évoquera l’avenir du conflit en ces termes :




« Camarades français, vous allez repartir dans votre pays. Dans peu de temps vous apprendrez que le Viêt-Nam, soutenu par le social-impérialisme soviétique, aura lancé une nouvelle attaque de grande envergure contre le Kampuchéa et tentera de l’envahir.
A ce moment-là, deux possibilités existeront : ou bien nos forces s’effondreront et cela prouvera que le peuple n’était pas satisfait de notre politique. Ou bien nos forces résisteront victorieusement et repousseront les agresseurs vietnamiens. Cela prouvera que notre peuple était satisfait de notre politique et qu’en conséquence, il la soutiendra. »
(19)

Quelques mois plus tard, le Viêt-Nam lance une grande offensive sur le Cambodge. Une offensive puissante, 100 000 hommes débarqués, appuyés par le matériel soviétique. Ils parviennent à renverser le gouvernement du Kampuchéa Démocratique. Ils seront les premiers avec les soviétiques à fomenter une puissante machine de propagande contre Le gouvernement du Kampuchéa Démocratique et imposer un nouveau à leurs bottes.
L’empilement de crânes, dont toute la propagande réactionnaire se sert encore aujourd’hui pour témoigner de la barbarie des « Khmers rouges » sera une de leur mise en scène. Les cambodgiens doivent désormais réorganiser la lutte à travers la guerre de guérilla contre un parti et un peuple sensé être « frère ». Un événement tragique qui vient ternir les sacrifices de la lutte des peuples asiatiques pour leur libération. D’autant plus que l’armée d’invasion est dirigée par le général Vo Nguyen Giap, héro de Dien Bien Phu. Cette trahison de l’internationalisme prolétarien par la République « socialiste » du Viêt-Nam fut une dure leçon et une amère déception pour le mouvement communiste international. Elle intervenait de plus, au moment où l’économie et les conditions des travailleurs commençaient à s’améliorer, fruit de 3 années d’un très dur labeur. Les conséquences de l’adhésion du Viêt-Nam au Comecon illustre bien la politique impérialiste des révisionnistes soviétiques. Lors de l’invasion, les récoltes sont pillées, les machines industrielles démontées et ramenés au Viêt-Nam. Des paysans vietnamiens sont amenés par milliers pour occuper les terres du Cambodge. Le Viêt-Nam crée et impose un parti « communiste » et un nouveau gouvernement à sa solde avec l’aide de traitres cambodgiens et de khmers kroms (minorité cambodgienne du Viêt-Nam). Une pratique de colonisation visant à rendre les khmers minoritaires dans leur pays, voilà les pratiques des révisionnistes vietnamiens dans la trahison d’un peuple frère. Pour les révolutionnaires cambodgiens, malgré une forte résistance, c’est la débâcle. Cette situation nouvelle entraine un changement radical de stratégie. Faire face à cette agression demande l’organisation d’un « vaste front national de toutes les forces patriotiques et démocratiques tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays » contre l’envahisseur.
(20) Il est élaboré un programme politique pour la constitution d’un « Front de Grande Union Nationale Patriotique et Démocratique du Kampuchéa » . L’orientation démocratique bourgeoise du programme du Front, les alliances de classes passées pour la lutte de Résistance, témoignent que la société cambodgienne n’avait pas atteint la « grande concorde » que la constitution de 1976 semblait supposée naïvement.
La guerre khméro-vietnamienne va impliquer d’autres acteurs étrangers pour leurs intérêts propres. Les USA, soucieux de ne pas laisser l’influence de l’URSS s’étendre en Asie, va soutenir le gouvernement du Kampuchéa Démocratique contre le Viêt-Nam. La Chine de Deng Xiaoping, également à cause de ses conflits avec l’URSS.
Ce qu’il est important de souligner, c’est que les missions de l’ONU au Cambodge (MIPRENUC et APRONUC) (21) ne parvinrent pas à imposer le désarmement des résistants « Khmers rouges » et leur stratégie d’accords de paix en vue d’élections « démocratiques ». Et ce, malgré les compromis que tentaient de leur imposer les dirigeants chinois. L’occupation vietnamienne se retirera en 1991 et l’ONU mettra fin à sa mission en 1993, après avoir laissée, le triste souvenir des nombreux cas de viols d’enfants commis par les soldats de l’APRONUC. La mission de l’ONU fut un fiasco total. Les « Khmers rouges » restèrent une force de guérilla dominante, et ce, jusqu’à 1998, date de l’implosion du mouvement. En 1996, Ieng Sary prit la voie de la trahison emmenant avec lui 4 000 combattants. Le mouvement s’en trouvera affaibli avec une dernière poche de résistance à Anlong Veng. La trahison de Ta Mok, organisant une parodie de tribunal populaire contre l’ancien dirigeant Pol Pot et d’autres cadres entrainera la chute définitive des « Khmers rouges ». Les derniers « khmers rouges » qui ont jugés Pol Pot comme « traitre » seront les mêmes qui liquideront le mouvement armé en faveur de l’abandon des richesses du Cambodge et de sa force de travail au profit des impérialistes. L’histoire a jugé qui étaient les traitres.

(à suivre)


Edité le 26-04-2015 à 16:25:07 par Xuan




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contrairement à une opinion répandue, le soleil brille aussi la nuit
Xuan
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(suite et fin)

II. LA VENGEANCE DES IMPERIALISTES


L’impérialisme est miséricordieux. Il peut rendre des hommages à Mandela car celui-ci a tendu les bras aux oppresseurs de son peuple et rejoint leur cause. Mais comme le dieu de la Bible, sa miséricorde n’a d’égal que sa vengeance envers les insoumis. Il les condamne à l’enfermement à perpétuité dans leur vie matérielle et entreprend de salir leur mémoire et leur cause dans la tête des populations pour des siècles et des siècles. A défaut d’avoir put les assassiner comme Ernesto Guevara, Amilcar Cabral, Um Nyobé, Thomas Sankara, Edith Lagos, et tant d’autres dignes fils et filles de leur peuple.
Il convient de revenir sur la récente condamnation à perpétuité des derniers dirigeants encore en vie du Kampuchéa Démocratique prononcée par le tribunal impérialiste portant le nom de « Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens » (CETC). Il n’est pas un secret que ce tribunal à été mis sur pieds grâce aux poches des impérialistes parmi lesquelles se trouvent les exploiteurs du Cambodge. Les USA, la France (22).
Mais aussi d’autres pays ayant aidés à l’équipement et à la formation militaire du régime de Lon Nol, comme le Japon et l’Australie :

« Le paiement des salaires du personnel national dépend intégralement (souligné par nous) des contributions volontaires des pays amis des CETC. Les principaux pays donateurs pour la composante nationale sont le Japon, l’Union européenne, l’Australie, l’Allemagne et le Royaume-Uni. » (23)

On comprendra que ce tribunal n’est pas celui de la « Justice » avec un grand « J » que l’on nous présente. Mais bien la vengeance organisée des pilleurs impérialistes. Une vaste entreprise de criminalisation du Communisme et de soumission du Kampuchéa. L’avocat de Nuon Chea, Victor Koppe à eu le courage de remettre en cause la légitimité du tribunal et que celui-ci visait en fait « une offensive généralisée contre le communisme en tant que tel » . (24)
En effet, n’a-t-il pas été reproché à Nuon Chea d’avoir lu Staline et Mao, lui qui se revendique encore « marxiste-léniniste » ? Passons sur les manœuvres malhonnêtes du tribunal comme le fait que la majorité des témoins furent ceux de l’accusation « 35 pour les co-procureurs sur 75, contre 4 pour la défense » ( !) et que ni Norodom Sihanouk, ni six hauts fonctionnaires du parti au pouvoir n’ont répondus aux convocations des juges (25). Car l’essentiel est dans la sentence prononcée. Le 7 aout 2014 donc, Nuon Chea et Khieu Samphan sont condamnés à la prison à perpétuité. Leur crime ? « Crime contre l’humanité » bien sur ! Et voici selon les mots du tribunal, ce qui constitue un crime contre l’humanité :

« … Nuon Chea et Khieu Samphan, avec les autres membres du Comité permanent et du Comité central, les ministres du gouvernement et les secrétaires de Zone, ont participé à une entreprise criminelle commune, ce groupe de personnes ayant pour projet commun de réaliser une révolution socialiste rapide (26), par tous les moyens, à la faveur d’un « grand bond en avant » . La Chambre est convaincue que ce projet commun a été mis en œuvre à l’aide, entre autres moyens, de politiques ayant pour objet de transférer de force les habitants des villes et de procéder à des déplacements forcés de population entre les zones rurales. En conséquence, en avril 1975, durant la première phase de déplacements de population, les soldats khmers rouges ont procédé à l’évacuation forcée de Phnom Penh et déplacé au moins deux millions de personnes, sous des prétextes fallacieux et des menaces, souvent sous la pression des armes, pratiquement sans avertissement, et dans une situation marquée par la terreur et les actes de violence. Lorsqu’elle a été expulsée, la population de Phnom Penh avait vécu un siège prolongé caractérisé par des pénuries alimentaires, de sorte qu’elle était gravement affaiblie.
C’est dans un tel état d’affaiblissement que la population a été contrainte de marcher vers les zones rurales, durant le mois le plus chaud de l’année , pratiquement sans nourriture, sans eau, ni soins médicaux, ni hébergement ou moyen de transport. Toute la population de Phnom Penh sans exception a été évacuée, y compris les moines, les personnes âgées et les enfants, les malades et les blessés qui se trouvaient dans les hôpitaux, les femmes enceintes et celles qui venaient d’accoucher. Il y a eu de très nombreux cas où les soldats khmers rouges ont fusillé et tué des civils au cours de l’évacuation, et de nombreuses personnes sont mortes d’épuisement, de malnutrition ou de maladie. »

« La Chambre de première instance est également convaincue que Nuon Chea et Khieu Samphan ont mis en œuvre le projet commun en ayant recours à une politique ayant consisté à prendre des mesures spécifiques à l’encontre des anciens soldats et fonctionnaires de la République khmère. Cette politique a notamment eu pour résultat l’exécution à Tuol Po Chrey, immédiatement après le 17 avril 1975, d’au moins 250 soldats et fonctionnaires de la République khmère qui avaient été emmenés de Pursat. »


On notera bien, que nulle part , dans le compte rendu du tribunal, il n’est mentionné le mot « génocide ». Ce qui, soyons en sûrs, n’empêchera surement pas les médias bourgeois et les intellectuels réactionnaires de propager ce mot à chaque fois qu’ils évoqueront Pol Pot et le Kampuchéa Démocratique (le terme étant réservé pour effrayer l’opinion publique). Ce qui est retenu comme « crime contre l’humanité » c’est principalement :

1. L’évacuation de la population de Phnom Penh.
2. L’exécution d’anciens soldats et fonctionnaires du dictateur Lon Nol.

Nous avons vu plus haut, pourquoi les dirigeants du PCK avaient pris la décision de l’évacuation de Phnom Penh.
Pourtant les accusateurs font mines de ne pas connaitre les circonstances de cette décision. Ils ne se mouilleraient pas à donner leur avis sur ce qu’il aurait fallu faire. Alors que le document même de la sentence stipule :

« Lorsqu’elle a été expulsée, la population de Phnom Penh avait vécu un siège prolongé caractérisé par des pénuries alimentaires, de sorte qu’elle était gravement affaiblie » .

Mais bien sur, le tribunal fait semblant de ne rien savoir du fait que les évacués ont été amenés dans les coopératives, précisément pour régler le problème alimentaire, et qu’on ne les a pas déplacés gratuitement, dans le but de les faire mourir. Et de cette situation survenue à Phnom Penh, le tribunal voudrait en rendre responsable les « Khmers rouges » et non ceux qui ont causés cette situation ; les impérialistes américains et leurs terribles bombardements. Mais encore, la situation rencontrée dans tous les pays dominés, impliquant qu’un pays agricole qui pourrait s’autoalimenter est soumis - en vertu de la division du travail imposée par les grandes compagnies étrangères - à exporter sa culture vivrière au profit des pays impérialistes et être dans l’obligation d’importer sa nourriture de ces même pays. Mais loin des accusateurs - salariés des impérialistes – l’idée de remettre en cause une situation catastrophique créer par le système économique de leurs patrons. Sans parler du négationnisme écœurant en ce qui concerne l’intensité des bombardements américains et leurs conséquences sur l’économie du pays et le danger qu’elles représentaient pour l’avenir du peuple du Kampuchéa. Dans les conditions d’alors, ne pas évacuer la ville aurait signifié la mort pour tous ses habitants. S’il n’y a personne ou trop peu de bras pour cultiver la terre dans un pays ravagé par la guerre, et dont l’économie est essentiellement dominée par l’agriculture, il est évident que la famine aurait frappée et qu’une masse considérable de gens seraient morts. Qui ne reconnait pas cette vérité toute simple, est, soit un hypocrite, soit un abruti !
Ce que veulent vraiment dire les lâches qui s’horrifient de l’évacuation de la ville, c’est que les forces de la Résistance n’auraient pas du gagner la guerre. Que Phnom Penh aurait due rester sous le contrôle des américains et de leurs laquais de la clique Lon Nol-Sirik Matak. Ce qu’ils attaquent réellement, c’est le changement de classe au pouvoir dans la société qui est survenue suite à la chute de Phnom Penh.

Quant à l’accusation faite aux dirigeants d’avoir, en tant de guerre, tués leurs ennemis les plus dangereux, elle est bien sur ridicule. Elle sert ni plus ni moins à attaquer la révolution en tant que telle. Et on sent bien là, l’influence de la diaspora cambodgienne à l’étranger parmi lesquelles, les anciens fonctionnaires et partisans du régime de coup d’Etat Lon Nol-Sirik Matak. Ceux ayant trouvés refuge aux USA et en France. Pays nounous de Lon Nol, mort sous le soleil de Miami, et de Sosthène Fernandez, qui, après avoir mené une vie confortable au « pays des droits de l’Homme », s’en est retourné au pays, fleurant les bonnes affaires suite à la libéralisation de l’économie.

Evidemment, il est facile d’avoir raison lorsqu’on monopolise la parole, l’information etc. « Le mensonge voyage aux frais du gouvernement » disait Robespierre. Devant les moyens de propagande de l’impérialisme il est très difficile de rétablir la vérité historique sur le Kampuchéa Démocratique. L’histoire du Cambodge ne commence pas le 17 avril 1975, contrairement aux élucubrations sur « l’année zéro » du prêtre Ponchaud et du journal France Soir. Nous pouvons néanmoins partager quelques déclarations de Nuon Chea à son procès. Que le lecteur ne se formalise pas de leurs longueurs. Elles sont trop justes pour être bâillonnées. Quant aux autres versions, on n’a pas fini de les entendre.


« …j’aimerais répondre aux allégations des procureurs affirmant que le PCK employait la violence révolutionnaire même avant 1975. Ces affirmations nous montrent qu’ils abordent les évènements au Cambodge d’un seul point de vue. Ils prétendent ne rien savoir, ne rien avoir vu ou entendu d’un autre point de vue. Dans le jargon juridique, on appelle cela « la justice des vainqueurs ». Je vous rappelle qu’avant de décider de rallier la lutte armée pour la libération du pays de nombreux membres du PCK ainsi que des civils ont été clandestinement exécutés, arrêtés, torturés et ont disparu, tous les jours. Tous les cambodgiens se souviennent encore de ces événements. Ce type de violence existait sous tous les régimes au Cambodge, et les victimes étaient des paysans, et tous des innocents. Pour commencer, prenons le colonialisme français. La France a colonisé le Cambodge pendant près d’un siècle. Ce régime avait recours à la violence pour des arrestations, des exécutions de paysans non armés…au village de Krang Leav, dans la province de Kampong Chhnang, ces paysans qui n’avaient pas les moyens de payer les impôts et qui manifestaient pour exiger la justice. Mais, au bout du compte, les paysans étaient les perdants et le nom de leur village a été changé pour s’appeler « Village de la bestialité », ou « Phum Tearunakamm » en khmer. N’est-ce pas de la violence ?
Au Sangkum Reastr Niyum, des bulldozers ont démoli des maisons et des rizières qui appartenaient aux paysans d’Andaeuk Haeb, à Samlaut, dans la province de Battambang. Ils ont saisi les terres des gens qui y habitaient depuis des générations. Lorsqu’ils ont protesté afin de protéger leurs biens, des soldats ont tiré sur ces gens qui étaient sans armes sans se soucier de savoir si c’étaient des hommes, des femmes, des jeunes ou des personnes âgées. Et, pire encore, les autorités ont tenté de tuer d’autres personnes, qui ont pris peur et qui se sont enfuis dans la forêt. Par la suite les autorités ont accusé les propriétaires de ces terres d’être des khmers rouges. N’est-ce pas là les origines de la violence et de la souffrance de la population ?
Sous le régime de Lon Nol, soutenu par les Etats-Unis, les soldats de Lon Nol violaient les femmes, volaient les biens du peuple et tuaient partout où ils allaient. Ils décapitaient les gens, accrochaient les têtes sur des pieux, agissant simplement lorsqu’ils soupçonnaient les gens de s’opposer au régime ou d’être impliqués dans la révolution des khmers rouges. Les soldats de Lon Nol violaient systématiquement les femmes, pillaient leurs propriétés et évacuaient les gens de force de leurs foyers.
Les minorités vietnamiennes ont été massacrées partout au Cambodge. Les Etats-Unis ont largué des tonnes de bombes sur les villages, les maisons, les rizières, les pagodes ; des dizaines de milliers de personnes, des civils, parmi elles, les enfants, les personnes âgées et les femmes enceintes et les personnes handicapées, ont été tuées. N’est-ce pas là un crime contre l’humanité ou un génocide ?
En 1979, le Viêt-Nam a envahi et occupé le Cambodge. Dans les années qui ont suivi, ils ont déployé de l’artillerie afin de pilonner les camps de réfugiés le long de la frontière entre le Cambodge et la Thaïlande. Des maisons ont été brûlées, des propriétés détruites, de nombreuses vies ont été perdues, dont des enfants, des femmes, des personnes âgées et des personnes handicapées. » (…)

« Si on affirme que le PCK a eu recours à la violence avant 1975, pourquoi les coprocureurs ne présentent-ils pas la réalité concernant les événements qui se sont produits de l’autre coté, commis à l’encontre du peuple cambodgien ? Je constate que les coprocureurs ont insisté pour mettre en avant les actes d’exécution pendant la guerre et ont essayé de faire le lien avec les exécutions se produisant immédiatement après la fin de la guerre. En ce faisant, ils tentent de démontrer à la chambre que le PCK avait un plan systématique. Mais il est injuste de faire ce lien là. Si tuer pendant une guerre constitue un plan systématique, pourquoi donc la partie adverse dans cette guerre n’est-elle pas poursuivie par les coprocureurs ?
Le PCK avait un plan de faire la guerre afin de libérer le pays de la destruction. La stratégie du combat était de vaincre l’ennemi, ce qui n’est pas en soi un acte illégal. Dans de nombreux pays du monde, des gens se battent contre leur gouvernement au nom d’une cause à laquelle ils croient. Ils exigent des changements et surtout le droit de décider de leur propre sort…et celui de leurs pays.
Pour citer quelques exemples, le Sri Lanka, la Syrie, la Lybie, le Viêt-Nam et l’Irak. Tous ces pays ont connu la guerre civile, et, pendant ces guerres, des factions ont élaboré des plans pour détruire l’ennemi.
Si la Chambre estime que la planification d’une guerre constitue une intention criminelle, comme l’affirment les coprocureurs, alors, il faut poursuivre les dirigeants de ces pays, et des gouvernements…et les chefs de l’opposition, et surtout les Etats-Unis, le Viêt-Nam et les dirigeants cambodgiens. Il ne suffit pas de poursuivre uniquement le corps du crocodile et permettre à la tête et à la queue d’échapper à la loi. »

« Les procureurs prétendent que le PCK a encerclé Phnom Penh et que cela a provoqué des pénuries alimentaires. L’Accusation avance également qu’il était inhumain de pilonner les bases militaires de Lon Nol établies en ville. L’accusation ne dit toutefois pas que les soldats de Lon Nol étaient équipés d’artillerie fournie par les Etats-Unis et qu’ils ont largué des millions de munitions, ainsi plus de 500 000 tonnes de bombes larguées par les EtatsUnis, dévastant le pays, détruisant des maisons, des biens, des animaux, des fermes, tuant des dizaines de milliers de personnes (…) N’est-ce pas là un crime ou un acte inhumain ?
Les américains ont largué sur le Cambodge trois fois plus de bombes que sur le Japon pendant La seconde guerre mondiale. Pour le PCK, les citadins n’étaient pas des ennemis, contrairement à ce qu’avance l’Accusation. Les Phnompenhois étaient principalement des ouvriers, des paysans, des petits bourgeois, des intellectuels dont le PCK avait besoin de leurs forces pour construire la révolution.»

« J’aimerais également répondre aux allégations de l’Accusation comme quoi le régime du Kampuchéa Démocratique aurait été un Etat esclavagiste. Ce n’est pas vrai. Que mes compatriotes sachent que le PCK ne s’est pas battu pour libérer le pays dans le but d’asservir la population, comme allégués par l’Accusation. Bien au contraire, le PCK a libéré le peuple, qui était asservi.
Nous devons tous bien comprendre qu’avant la libération du 17 avril 1975 la plupart des paysans étaient pauvres. Ils ne pouvaient pas subvenir à leurs besoins au quotidien.
Ils étaient confrontés à de graves difficultés. Il n’y avait pas de services publics ni de protections sociales pour les pauvres. La corruption était omniprésente. La corruption et l’injustice étaient profondément enracinées dans la hiérarchie cambodgienne. Du coup, les gens sont devenus de plus en plus pauvres. Les pauvres devaient emprunter de l’argent aux riches pour pouvoir subvenir à leurs besoins, se faire soigner et payer leurs taxes. Les riches ont donc profité de la situation, persécutant les pauvres, exigeant des intérêts à leur guise, pratiquant des taux usuriers, les intérêts mensuels pouvaient atteindre pas moins de 50 pour cent du capital emprunté. Compte tenu de ce taux excessif, les gens n’avaient plus les moyens de rembourser leurs dettes. Ainsi, les créanciers confisquaient leur ferme, leur riz, leur maison. Quand les gens n’avaient plus ni ferme, ni riz, ni maison, ils étaient contraints de travailler comme des esclaves pour rembourser une dette dont ils ne pouvaient jamais venir à bout. Bien souvent, ils étaient obligés de vendre leurs enfants, qui travaillaient comme des esclaves pour d’autres personnes en échange de nourriture. Ce genre d’exploitation et la misère de la population…étaient l’un des nombreux problèmes que le PCK était déterminé à résoudre en libérant le pays et son peuple de l’esclavage, de l’exploitation des êtres humains et de l’invasion par d’autres pays. Et, ce, en construisant un pays où chacun vivait à égalité dans son pays, bénéficiant de l’indépendance, de l’autonomie, un pays où on décidait de son destin (…) le PCK n’a jamais conçu une quelconque politique ou plan destiné à réduire la population en esclavage, en « les » privant de nourriture, en « les » forçant à travailler ou en « les » tuant. Au contraire, mi-1976, le Comité permanent a préparé et adopté un plan sur quatre ans pour la construction du socialisme dans tous les domaines. »
(27)

Nuon Chea, comme Pol Pot avant lui, n’a jamais nié qu’il y’ai eu des erreurs et des crimes. Mais les resituent dans leurs contextes : mensonges de certains cadres locaux sur les conditions de travail dans les coopératives, vengeances personnelles sur des citadins de la part de paysans qui avaient soufferts pendant la guerre, l’inexpérience et les pressions exercées par les complots vietnamiens etc. Il est évident aussi, que les cadres du PCK ont des responsabilités grandes. Faiblesses dans l’application du centralisme démocratique, point de vue métaphysique de la lutte de classe sous le socialisme etc. Mais les conditions historiques objectives ne doivent pas être oubliées pour autant. « Les révolutionnaires sont les héritiers de situations empoisonnés » comme le disait très justement Catherine Quiminal. (28) Il faut garder en tète que le Kampuchéa Démocratique n’a eu que 3 ans et huit mois pour se reconstruire et se développer. Et l’isolement de la révolution cambodgienne comme le degré de destruction subit pendant la guerre, la trahison du Viêt-Nam, cela, les révolutionnaires du Cambodge ne l’ont pas choisi. Ils ont du faire avec. C’était ça ou ne pas poursuivre la révolution.

Et alors que les monopoles impérialistes imposent au Cambodge une division internationale inégale du travail que les masses ouvrières payent de leurs vies, le salopard de procureur Andrew Cayley (29) n’a pas eu honte de déclarer : « Les accusés qui sont devant vous sont des voleurs de temps et de vulgaires meurtriers d’une génération entière de Cambodgiens. Ils ont dérobé des décennies de développement et de prospérité à ce pays » .
On voudrait faire croire aux masses que ce n’est pas l’impérialisme qui est responsable de la misère passé et présente du Cambodge, que ce n’est pas lui qui « dérobe des décennies de développement et de prospérité à ce pays » . Evidemment le Kampuchéa Démocratique n’à pas entrepris la reconstruction de son pays à l’aide des institutions financières internationales qui remettent la richesse du peuple aux mains des monopoles impérialistes. Evidemment lorsque ni la terre, ni les usines appartiennent aux impérialistes et à leurs pantins locaux, lorsque les exploiteurs ne peuvent pas surexploiter la force de travail des peuples dominés, ils qualifient la production agricole du Kampuchéa Démocratique de « réduction à l’esclavage » .

Des mensonges énormes, des calomnies, il y’ en a, sur cette révolution ! Et nul besoin d’être communiste pour le reconnaitre. L’intellectuel américain Noam Chomsky, que l’on ne peut pas accuser de sympathie pour le Communisme déclarait cependant avec honnêteté, à propos du terme de « génocide Khmers rouge » :

«Il faut être un peu prudent à propos de cette affaire de « génocide » (…) il n’est pas évident que Pol Pot ait tué tellement plus de gens - ou même simplement plus de gens – que les Etats-Unis n’en ont tués au Cambodge dans la première moitié des années 70. Nous ne parlons de « génocide » que quand ce sont les autres qui massacrent.
[Les Etats-Unis ont bombardé et envahi le Cambodge à partir de 1969, et soutenu les forces de droites antiparlementaires dans une guerre civile qui a duré jusqu’en 1975 ; Pol Pot a gouverné le pays entre 1975 et 1978.] Il y a donc beaucoup d’incertitude quant à l’échelle exacte du massacre perpétré par Pol Pot, mais la meilleure étude qui existe aujourd’hui estime les décès au Cambodge, toutes causes confondues, durant la période de Pol Pot, à un chiffre de plusieurs centaines de milliers, un million au maximum. Alors, jetez simplement un coup d’œil au massacre qui a eu lieu au Cambodge entre 1970 et 1975, la période dont nous sommes responsables : c’était aussi dans les centaines de milliers. De plus, si on veut vraiment prendre cette histoire au sérieux – disons qu’un de personnes sont mortes pendant les années Pol Pot, pour prendre le chiffre supérieur il faut garder à l’esprit que lorsque Etats-Unis mirent fin à leurs attaques à l’intérieur du Cambodge en 1975, des officiels américains ont prédit que dans l’après guerre, environ un million de cambodgiens supplémentaires périraient des seuls effets de la guerre américaine. A l’époque où les Etats-Unis se retirèrent du Cambodge, rien qu’à Phnom Penh – oublions le reste du pays – les gens mourraient de faim au rythme de 100 000 personnes par an. La dernière mission de l’U.S.A.I.D [la coopération au développement américaine] au Cambodge prédisait qu’il faudrait deux années d’un travail d’esclaves et de famine avant que le pays puisse à peine commencer à refonctionner. Ainsi il n’est pas si simple de calculer le nombre de décès qu’on doit attribuer aux Etats-Unis durant la période Pol Pot, c’est manifestement un grand nombre : lorsqu’on anéantit le système agricole d’un pays et que l’on déplace un million de gens de chez eux vers des villes où ils deviennent des réfugiés, bien sûr que beaucoup de gens vont mourir. Et la responsabilité de leur mort n’est pas celle du régime qui a pris la suite, mais bien celle de ceux qui ont tracé le chemin. »
« Bref, si nous étions honnêtes à propos du terme « génocide », nous distinguerions dans les décès au cours de l’ère Pol Pot une partie principale qui est de notre responsabilité, de la responsabilité des Etats-Unis. »
(30)

Voilà qui est clair. Mais les impérialistes ont crées bien d’autres calomnies, répandus bien d’autres balivernes. Comme le mensonge stupide comme quoi les «Khmers rouges » réprimaient tous ceux qui portaient des lunettes ( !) Voilà un mensonge dans le plus pur style Goebbels ; plus c’est gros plus ça passe. Et « mentez toujours encore
et encore, il en restera bien quelque chose », comme le prônait le propagandiste nazi. Le Kampuchéa Démocratique n’aurait été que « chaos », « néant » et « obscurantisme ». Chaos ? Néant ? Comment peut-on qualifier de chaos et de néant, la lutte productive pour la reconstruction d’un pays ravagé par la guerre ? Les constructions hydrauliques, les œuvres du peuple qui permirent de donner deux récoltes par an – du jamais vu jusqu’alors dans ce pays. La reconstruction des routes et des ponts, l’apparition des premières infrastructures pour l’industrie lourde ? C’est une insulte faite à ce peuple et à son histoire. C’est une fleur offerte à ses ennemis. Obscurantisme ? En témoigne les héroïques partisanes du Kampuchéa Démocratique. Le rôle qu’elles ont joué dans la révolution est immense. Dans la lutte armée comme dans la production, dans un pays où les femmes n’avaient aucun droit. Aujourd’hui, on les a désarmées pour plus facilement les assigner à l’économie du tourisme sexuel que les capitalistes appellent le «secteur du divertissement». Et, preuve que le féodalisme et l’obscurantisme survivent grâce à l’impérialisme, on vend même les jeunes vierges. Pour les femmes ouvrières, l’assassinat vient répondre à leurs grèves dans l’industrie textile. Et on voudrait nous assimiler les « Khmers rouges » aux mercenaires de l’Etat Islamique !! Il est nécessaire de rappeler que la prostitution avait été éradiquée dans le Kampuchéa Démocratique. Et cela, parce que chacun pouvait trouver les moyens de vivre en ayant un
rôle à jouer dans cette tache commune de l’édification du socialisme. Les charlatans intellectuels décrivent la prostitution comme un mal inévitable de toutes sociétés humaine, sous prétexte d’être le « plus vieux métier du monde ». L’histoire montre que seul la Dictature du prolétariat parvint à balayer la prostitution en s’attaquant aux racines sociales de l’exploitation sexuelle et à la pègre, et ce depuis la Commune de Paris ! Mais évidemment, pour beaucoup de bourgeois occidentaux il vaut mieux partir en vacances au Cambodge des courtisanes qu’au Cambodge des partisanes. Une femme avec un fusil et un travail, c’est moins facile à prostituer…


Les Khmers rouges auraient été racistes. Il est certes facile d’accuser de racisme un peuple agressé par des forces armées étrangères. Nous nous passerons donc de réfuter l’accusation de racisme antivietnamien. Autant que nous ne pouvons porter d’accusations sérieuses de racisme des corses, des kanaks ou encore des comoriens envers les français par exemple. Pas plus que nous porterions l’accusation de racisme des français envers ceux que l’on appelait, dans les années 40 ; « les boches ». L’accusation de racisme envers les vietnamiens et les chinois du Cambodge rejette catégoriquement le fait que, dans un pays donné, les différentes nationalités peuvent revêtir un caractère de classe. L’histoire du Cambodge a fait que de nombreux – sinon la quasi-totalité des commerçants compradores étaient soit d’origine chinoise, soit sino-khmers. Et c’est bien dans ce fait objectif qu’il faut replacer la répression des « Khmers rouges » contre des chinois du Cambodge.

Et bien sur, il y a un autre fait qui exaspère nos intellectuels bourgeois : l’abolition de la monnaie. Les philistins élevés dans les préjugés bourgeois s’imaginent qu’elle est indispensable à l’humanité. Mais la monnaie n’est pas apparue dans la nature au même titre que les arbres et les oiseaux. Elle a une histoire sociale qui s’inscrit dans les rapports d’exploitations entre les humains. Introduite par le colonialisme entre autre, pour faire payer des impôts aux paysans, la monnaie à joué dans tous les pays colonisés un rôle destructeur. Cependant il est normal que la presse capitaliste fasse tout un tapage de cette question de la monnaie. En société capitaliste où tout s’achète et tout se vend, la monnaie est le Dieu suprême. Sans elle l’être humain est coupé de tout rapport social.
Nos adolescents même, sous l’influence de l’idéologie dominante, n’oublient pas de chanter ses louanges. Et on n’a pas fini d’entendre dire qu’on en manque et qu’on en veut. Il n’en est pas de même cependant dans des sociétés où subsistent des formations économiques précapitalistes, comme c’était le cas au Cambodge. Sur la monnaie et les salaires, Pol Pot répondit ainsi aux camarades français partis au Cambodge en 1978 :

« En ce qui concerne le rôle de la monnaie, le système des salaires et le commerce, je voudrais dire ceci : En 1970-1971, nous avions déjà libéré 75 à 80 % de notre pays. A ce moment-là, nous avions le pouvoir politique et le pouvoir militaire, mais nous n’avions pas le pouvoir économique : l’économie étaient entre les mains des propriétaires fonciers et des capitalistes. Aussi, ces derniers amassaient toute la production parce qu’ils avaient de l’argent (...) Quand à nous, nous n’avions rien. La population avait beaucoup de difficulté sur le plan des vivres. Notre armée également. Ces difficultés se répercutaient sur la guerre de Libération nationale. Après avoir bien étudié cette situation, nous avons décidé de créer des coopératives afin qu’elles tiennent en main l’économie, la production agricole à la campagne, s’occupe de la gestion, de la distribution, du ravitaillement et des échanges, d’une part entre les coopératives, et d’autres part entre les coopératives et l’Etat. C’est ainsi que nous avons pu tenir en main la production agricole, résoudre les problèmes des conditions de vie du peuple. Le peuple en a été enthousiasmé et a envoyé ses enfants dans l’armée pour combattre l’ennemi. Lorsque les coopératives se sont entraidées et ont développé entre elles les échanges de produits, le rôle de la monnaie a progressivement diminué. En 1974, il a diminué de 80%. Avant la libération, seul l’Etat utilisait la monnaie. Il l’utilisait pour acheter divers produits dans la zone non encore libérée pour les besoins de la zone libérée placée sous son contrôle. Après ces expériences, nous avons consulté le peuple qui a estimé que l’argent n’a aucune utilité parce que les coopératives ont déjà pu procéder à des échanges entre elles sans y avoir recours. Ainsi, à ce moment-là, dans la zone libérée qui s’étendait sur plus de 90% du pays avec près de six millions d’habitants, nous avions déjà résolu ce problème. Lorsque la population des villes a été transférée à la campagne, elle a été prise entièrement en charge par les coopératives. Cette pratique nous a conduits à ne pas faire usage de la monnaie jusqu’à présent. Qu’en sera-t-il à l’avenir ?
Cela dépend du peuple. Si le peuple estime qu’il faut utiliser à nouveau la monnaie, nous l’utiliserons. Mais s’il pense que cela n’est pas nécessaire, il décidera en conséquence (…)

En ce qui concerne le système des salaires, il y a aussi des habitudes acquises dans le passé, dans le mouvement révolutionnaire, surtout pendant la guerre de Libération nationale, que ce soit pour les cadres ou dans l’armée, il n’y avait pas de salaire. Quant aux habitants, ils n’avaient pas non plus de salaires. Avant la Libération, dans la zone libérée, les cadres, l’armée, la population, soit près de six millions de personnes, sont déjà habitués à vivre sans salaires. Nous avons remarqué que, auparavant, la majorité de notre peuple n’avait pas de salaire. Seuls les fonctionnaires avaient des salaires. Ainsi, avec ces habitudes acquises, la population des villes s’est incorporée dans les coopératives. Les cadres civils, les cadres, combattants et combattantes de l’armée et les ouvriers ont continué à vivre suivant le régime de ravitaillement en vigueur pendant la guerre. Nous estimons que cela évite qu’un lourd fardeau ne pèse sur le peuple et permet de réserver l’argent principalement pour la défense et l’édification nationales. Qu’en sera-t-il à l’avenir ? Cela dépend de la situation concrète et du peuple.»
(31)

Il n’est pas dit que le Cambodge n’aurait pas réussi son projet de développement en suivant cette voie, s’il n’y avait pas eu l’agression soviéto-vietnamienne. L’économiste Samir Amin avait fait, en 1977 une critique positive de l’orientation économique suivie par le PCK dans la construction du socialisme, en analysant qu’elle pouvait correspondre à d’autres pays dont les caractéristiques ressemblent à celles du Cambodge (notamment En Afrique).
Sans oublier que la construction du socialisme se mesure avant tout dans son orientation politique - c’est elle qui guide l’économie – l’expérience du Kampuchéa Démocratique, étudié de manière critique, pourrait néanmoins toujours servir aux luttes futures du prolétariat et des peuples des pays sous développés. (32)

Si les impérialistes et la réaction au pouvoir au Cambodge veulent salir les réalisations du Kampuchéa Démocratique, c’est d’une part, parce que le procès donne une occasion de propagande anti-communiste retentissante de par le monde, et d’autre part, parce que le Cambodge est un pays d’intense lutte de classes. Au point où Hun Sen a du recourir l’année dernière à l’Etat d’urgence devant les grèves ouvrières. Que feraient les paysans expropriés de leurs terres, les ouvrières du textile durement exploitées et réprimées si ils reprenaient leur héritage révolutionnaire en mains ? L’analyse marxiste de la société par les prolétaires du Cambodge ne manquera pas de leur faire comprendre où se situe la véritable indépendance, dans un pays déchiré entre l’impérialisme U.S et l’impérialisme chinois ? Lorsque qu’une filiale d’EDF gère l’électricité de Phnom Penh ? Lorsque l’australien Toll prend le contrôle des chemins de fer et de l’agriculture ? Pendant la période du Kampuchéa Démocratique, n’était-ce pas des enfants qui prenaient la charge des installations électriques ?
Aujourd’hui nos impérialistes nous diront sans doute qu’ils s’en occupent parce qu’ils ont le « savoir faire ». Les cambodgiens ont du oublier comment fonctionne l’électricité…

Le tribunal impérialiste n’a pas seulement condamné les anciens résistants « Khmers rouges ». Il annonce également des projets dont le but est la confiscation de la mémoire du peuple du Cambodge, afin de l’orienter dans la voie de la soumission : l’instauration d’une journée nationale officielle de commémoration et l’édification à Phnom Penh d’un monument commémoratif en hommage aux victimes des évacuations forcées notamment. Ainsi qu’un risible « centre d’apprentissage de la paix ». Ou comment apprendre « la paix » au peuple pour garder le monopole de la violence. Parions que le peuple cambodgien, héritier d’une longue tradition de lutte contre le colonialisme depuis le 19 siècle, ne se laisse pas dicter longtemps son histoire et son avenir par les exploiteurs de sa terre et de ses enfants. Pour ce qui est des communistes internationalistes, ils se doivent de célébrer le jour du 17 avril, comme le jour de la victoire d’un peuple héroïque sur l’impérialisme.

Abel Kelen, le 17 avril 2015.



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Notes


0) Jérôme et Jocelyne Steinbach noterons : « On à peine à imaginer l’équivalent des 7 bombes d’Hiroshima qui, chaque mois, s’abattait sur le pays ; ou encore les 240 000 tonnes larguées rien qu’entre février et août 1973. »
« Phnom Penh libérée. Cambodge l’autre sourire. » Editions sociales 1976.

1) Le Front Uni National du Kampuchéa. Organisme de la résistance fondé par le Parti communiste du Kampuchéa.

2) Nuon Chea, journée d’audience n°224. 31 octobre 2013.

3) Comme la banque d’Indochine, mais aussi la Compagnie du Cambodge et la Société financière des caoutchoucs, groupes aujourd’hui partie intégrante de l’empire Bolloré.

4) Pol Pot, Vive le 17 anniversaire de la fondation du PCK , éditions de Phnom Penh, 1977.

5) Jérôme et Jocelyne Steinbach « Phnom Penh libérée » Editions sociales 1976.

6) En 1965, eu lieu en Indonésie un coup d’Etat pour renverser le régime de Soukarno. Dirigé par les généraux fascistes avec à leur tête Suharto et avec l’appui de la CIA. Les massacres des troupes de Suharto firent plus de 500 000 morts parmi les communistes et progressistes. Ce fut une terrible leçon pour le PKI (Parti communiste d’Indonésie) qui lui démontra ses erreurs dans le manque de préparation à la lutte clandestine. Pour plus de détail sur le soutien de l’impérialisme français au régime des généraux indonésiens, voir la présentation de Régis Bergeron de la brochure « Pour une Indonésie libre et démocratique » (Jusuf Adjitorop) Edition du Centenaire 1975.

7) témoignage cité dans la revue COMMUNISME n°7 nov-déc 1973, dans l’article du MNSPI (Mouvement National de Soutien aux Peuples d’Indochine) « Cambodge : une lutte exemplaire pour les peuples opprimés »

8) Les bases d’appui désignent des zones inaccessibles à l’ennemi où la population est entièrement gagnée à la lutte de libération nationale. Les bases de guérilla désignent elles, des bases de confrontations armées appartenant aussi bien aux révolutionnaires qu’à l’ennemi.

9) cité dans « Le Cambodge en lutte. Reportage de la délégation des journalistes chinois sur sa visite au Cambodge. » Editions en langues étrangères Pékin 1975.

10) idem.

11) En 1972 ont lieu des négociations entre les révolutionnaires vietnamiens et les impérialistes américains pour faire cesser la guerre. « Les vietnamiens nous firent savoir que Kissinger a demandé à Le Duc Tho d’informer la partie du Kampuchéa que si elle ne cessait pas le feu, les avions stratégiques et tactiques US détruiraient le Kampuchéa en 72 heures » (cité dans Catherine Quiminal, « Le Kampuchéa. Viêt-Nam-Cambodge, guerres et indépendance. » Éditions anthropos 1982.

12) Lon Nol prodiguait ce genre de conseils à ses soldats : « En outre, il est recommandé à tous nos compatriotes de s’engager nombreux dans l’armée…Et une fois dans l’armée, nos compatriotes ont intérêt à apprendre les sciences occultes pratiquées par nos ancêtres, et qui pourront elles aussi, nous permettre d’échapper au feu de l’ennemi et d’avoir d’emblée raison de celui-ci » (Jérôme et Jocelyne Steinbach, op cité )

13) idem. Op cité.

14) Un rapport d’une organisation gouvernementale américaine rédigé par John Gunther Dean en avril 1975 stipula : « …un travail d’esclaves et des rations de famines seront cette année, le lot cruel et obligatoire de la moitié de la population (…) les privatisations et les souffrances générales dureront pendant les deux ou trois années à venir avant que le Cambodge ne soit capable de recommencer à se fournir en riz. » (Voir le livre de W. Shawcross « Une tragédie sans importance. Kissinger, Nixon et l’anéantissement du Cambodge » 1979.)

15) Le Figaro, 12 mai 1975

16) Le Comecon ou CAEM (Conseil d’Aide Economique Mutuelle). A l’origine créer en 1949 pour l’aide économique entre pays socialistes. Après la prise de pouvoir par Khrouchtchev, il fut transformé en un instrument d’asservissement économique des révisionnistes soviétiques pour imposer une division inégal du travail et un échange inégal avec les pays membres les moins développés.

17) Pol Pot, op cité.

18) Marie Alexandrine Martin « L’industrie dans le Kampuchéa Démocratique (1975-1978) . Etudes rurales, n°8991, 1983.

19) Propos de Pol Pot rapportés par Jacques Jurquet dans son autobiographie «A contre-courant » . Editions Le Temps des Cerises.


20) Projet du programme politique du Front de grande Union Nationale Patriotique et Démocratique du Kampuchéa. 21 août 1979.

21) MIPRENUC (Mission préparatoire des Nations unies au Cambodge) et APRONUC (Autorité provisoire des Nations unies au Cambodge).

22) «La France a soutenu cette juridiction depuis le début, notamment financièrement, pour un montant cumulé de 8,2 millions de dollars » . Cambodge-Verdict du procès des dirigeants khmers rouges (7 août 2014). www.diplomatie.gouv.fr

23)
Communiqué du Directeur par intérim du Bureau de l’administration des CETC relatif au manque de liquidités nécessaires au paiement des salaires du personnel national des CETC pour le mois de décembre 2012 ainsi qu’à la situation budgétaire pour 2013

24) « Introduction pugnace de la défense de Nuon Chea » mardi 22 octobre 2013, www.proceskhersrouges.net

25) idem.

26) Les passages en gras sont de la rédaction. Ils soulignent assez bien le caractère de classe du jugement et l’hypocrisie des juges.

27) Nuon chea, doc cité.

28) Catherine Quiminal, op cité.

29) Notons qu’Andrew Cayley fut un officier, procureur militaire de l’armée britannique !

30) Cité d’après Noam Chomsky « Comprendre le pouvoir. Premier mouvement . Editions aden.

31) Interview du camarade Pol Pot. L’Humanité rouge n°872 jeudi 20 avril 1978.

32) Voir le chapitre « La leçon du Cambodge » dans le livre « L’impérialisme et le développement inégal » . Samir Amin. Editions de minuit.


Edité le 26-04-2015 à 16:22:20 par Xuan




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   Posté le 26-04-2015 à 16:18:29   Voir le profil de marquetalia (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à marquetalia   

la guerre du cambodge n est pas terminée, les Cambodian Freedom Fighters voulant renverser Hun Sen,un ancien Khmer Rouge http://www.trackingterrorism.org/group/cambodian-freedom-fighters-cff

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marquetalia
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le groupe cité est inactif.

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Abel Kelen
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   Posté le 11-05-2015 à 10:00:58   Voir le profil de Abel Kelen (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Abel Kelen   

Merci d'avoir publié le texte.

J'en profite pour remercier les Éditions Prolétariennes dont la documentation m'a permis de trouver des sources importantes. Un camarade s'est proposé de traduire le texte en espagnol pour être partager plus largement en Espagne et Amérique Latine.

Pour ce qui est de l'appréciation de la Chine de Deng, cela mériterait tout un article que je présenterais dès que le temps me le permettra.
C'est un vieux débat qui ne semble pas fini vu les positions nombreuses qui défendent la Chine d'aujourd'hui encore comme socialiste.

Abel Kelen

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Abel Kelen
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Le texte en PDF est disponible sur la page facebook que voici:

https://www.facebook.com/legaliteou.lamort.3

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Mengistu
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Je remarque le décalage entre le marasme du KD qui n'a duré que 3 ans avant de s'écrouler (comme le dit Pol Pot lui-même dans ses propos à J. jurquet en mettant en cause la politique du KD) et l'excellente qualité de vie et le très haut niveau de développement des Etats que vous appellez révisionnnistes/capitalistes d'Etat qui ont réellement contribué à la libération anti-coloniale de l'Afrique Australe, qui ont lutté pour la Palestine libre..pendant que la Chine chauvine et le voyou Pol Pot se vautraient dans le soutien à l'impérialisme et à ses pires laquais locaux de type Mobutu, Savimbi, Pinochet, Hekmatyar..

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Voici ma revue en ligne : sartanroujo.art.blog
Xuan
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   Posté le 20-05-2023 à 22:32:22   Voir le profil de Xuan (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Xuan   

Je t'ai déjà répondu sur la "Chine chauvine" et sur le "soutien à l'impérialisme".

La Chine n'est pas "chauvine" elle est en butte à l'impérialisme depuis la colonisation.
Prétendre qu'elle est "chauvine" est un argument de colon de la même eau que le "péril jaune".
La Chine n'a pas "soutenu l'impérialisme" elle pratique la non-ingérence, principe qu'elle a défendu à Bandoeng et qu'elle maintient toujours.
S'opposer à la non ingérence aboutit à "l'ingérence humanitaire", c'est encore une position impérialiste.

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