Sujet :

La visite de Hu Jintao en France

Xuan
   Posté le 05-11-2010 à 23:54:27   

La visite de Hu Jintao marque l’abandon de la politique d’ ingérence humanitaire en Chine.
Kouchner envoyé au Liban pour l’occasion a donc tout loisir de méditer sur sa prochaine éviction.

Mais à part les contrats commerciaux, cette visite d’inscrit dans le cadre de la guerre des devises, conséquence de l’hégémonisme US d’une part et de la crise économique d’autre part.

On se rappelle en effet que l’hégémonisme US repose entre autres sur une économie d’endettement, dont la valeur a décuplé entre 1980 et 2008, de sorte que la dette fédérale US (5244.5Md$) est presque équivalente à celle cumulée des pays émergents (5476 Md$) [ images économiques du monde - 2009].
Le blog Le Monde du 1er mai 2010 signalait que la notation négative de certaines économies européennes par les agences américaines visait à récupérer vers les USA les flux financiers.
Mais depuis un an le financement de la dette par des investisseurs officiels a décru, remplacée par un investissement privé. Par exemple la part de la Chine est passée de 26 à 21 %.

La politique monétaire US pourrait s’orienter vers l’inflation, de sorte que la question soulevée après la crise d’une monnaie internationale indépendante du dollar devient de plus en plus d’actualité.
Voir le post une nouvelle monnaie pour le monde ?



Les impérialismes européens et la France en particulier sont pénalisés par la valeur élevée de l’euro en face du dollar, et la dépréciation de l’euro remettrait en cause la politique de stabilité monétaire dont l’Europe ne veut pas démordre.
Aussi les contradictions entre la Chine et les USA paraissent aux capitalistes français une occasion de s’en sortir. Et de fait ils n’ont pas d’autre choix que de se ranger du côté de la superpuissance US ou bien du côté des pays émergents.
Ainsi, la thèse des Trois Mondes élaborée dans les années 70 reflète encore certaines des contradictions mondiales, alors que la situation a profondément été transformée, avec la dislocation de l’empire russe, l’émergence de certains pays du Tiers Monde et de la multipolarité .

Cet extrait d'un article de l’Express illustre ces contradictions et la tentative de la bourgeoisie française de s’appuyer sur la Chine contre les USA, à l’occasion du G20.

Par Reuters, publié le 02/11/2010 à 13:34] et sous le titre :
La Chine, clé de la présidence française du G20
On lit notamment :

« L'"HÉGÉMONIE" DU DOLLAR
"Les Chinois sont intéressés par la démarche française parce que ça leur permet de poser la question de l'hégémonie du dollar. C'est un point de convergence avec la France" , explique l'économiste Jean-Joseph Boillot, spécialiste de l'Asie.

Le gouverneur de la Banque de Chine, Zhou Xiachuan, a lancé le 23 mars 2009 un pavé dans la mare en proposant de faire des droits de tirage spéciaux (DTS) du Fonds monétaire international une monnaie de réserve "déconnectée des nations individuelles" .

Paris a pris la balle au bond : "Ce sera un des sujets que nous aborderons dans le cadre du G20" , a dit le 1er septembre dernier la ministre de l'Economie, Christine Lagarde.

La France sonde depuis quelque temps ses partenaires sur la transformation de cette unité de compte en monnaie de réserve et sur le développement d'un marché des DTS.

Selon une source gouvernementale française, Paris pousse également l'idée d'une introduction du yuan dans le panier de monnaies sur lequel repose la valeur des DTS, ce qui serait un pas vers une internationalisation de la monnaie chinoise. »


La visite de Hu Jintao doit donc être replacée dans le cadre de la guerre des devises , et la possibilité d’une grave rechute de l’économie mondiale.


Edité le 06-11-2010 à 00:05:09 par Xuan


Xuan
   Posté le 06-11-2010 à 00:00:54   

Ci-dessous une interview de Hu Jintao au Figaro.
Hu Jintao rappelle que la Chine soutient l’intégration européenne et demande le respect de l’intégrité de la Chine. En ce qui concerne le G20, la Chine avance quatre propositions pour la reprise économique mondiale.

«Comment la Chine veut coopérer avec la France»
LE FIGARO. - Vous effectuez une nouvelle visite d'État en France six ans après votre dernier voyage. Selon vous, que doivent faire la Chine et la France pour développer leur partenariat global stratégique dans le nouveau contexte ?

Hu JINTAO. - La relation sino-française a une dimension stratégique unique. Depuis l'établissement de leurs relations diplomatiques il y a quarante-six ans, nos deux pays ont mené une coopération fructueuse dans tous les domaines.
Aujourd'hui, dans une situation internationale en mutation profonde et complexe, ils ont à innover dans cette relation, surtout parce qu'ils sont membres permanents du Conseil de sécurité et grands pays responsables sur la scène internationale.
La Chine, de son côté, est prête à renforcer, par un dialogue franc et sincère, la connaissance et la confiance réciproques avec la France pour continuer à assurer, dans un esprit de respect mutuel et d'égalité, un développement sain et régulier de leurs relations, et à élargir les échanges commerciaux en faisant progresser, à pas assurés, la coopération traditionnelle que représentent l'électronucléaire et l'aéronautique, et en développant activement de nouveaux partenariats dans les secteurs de l'économie d'énergie, de l'environnement, des technologies de l'information, des industries haut de gamme, des nouvelles énergies et des nouveaux matériaux.
L'important, c'est de dépasser, dans notre coopération, le simple commerce-investissement pour créer un partenariat d'égal à égal, de valoriser nos atouts culturels en vue des échanges intellectuels et humains accrus, et de renforcer la coopération stratégique face aux défis planétaires.
Je suis convaincu qu'avec les efforts conjugués de part et d'autre, le partenariat global stratégique sino-français accédera à un nouveau palier dans l'intérêt des deux peuples et des autres peuples du monde.

Comment voyez-vous l'état actuel de la relation sino-européenne, qui célèbre cette année son 35e anniversaire ? Et qu'attendez-vous du développement ultérieur de cette relation ?

La relation sino-européenne a résisté à l'épreuve du temps et des aléas internationaux depuis l'établissement des rapports officiels entre la Chine et l'UE il y a trente-cinq ans. Aujourd'hui, les échanges de haut niveau entre les deux parties sont étroits et leur coopération est fructueuse.
L'UE est, depuis six ans, le premier partenaire commercial de la Chine, et la Chine est désormais le deuxième client de l'UE, avec un volume commercial bilatéral de 350 milliards de dollars américains pour les trois premiers trimestres de cette année grâce à une croissance de 34,4 % en glissement annuel.
Sur le plan culturel et humain, les échanges sont d'une grande diversité, grâce surtout à l'Exposition universelle de Shanghaï qui a offert une nouvelle plate-forme importante pour l'approfondissement des échanges sino-européens.

La Chine attache une haute importance au développement de ses relations avec l'UE. Elle respecte et soutient l'intégration européenne, et souhaite que l'UE voie d'un regard positif son développement, respecte et soutienne sa voie de développement, une voie adaptée à ses réalités nationales. La Chine et l'UE se doivent de respecter et de prendre en considération les intérêts vitaux et préoccupations majeures l'une de l'autre. Leur relation au XXIe siècle doit être une relation basée sur le respect mutuel, la confiance réciproque et l'égalité, une relation marquée par les avantages mutuels et le développement commun et une relation qui contribue à la construction d'un ordre politique et économique international plus juste et plus équitable, à l'avènement d'un monde harmonieux et au progrès de la civilisation humaine.

Nous sommes prêts à travailler ensemble avec l'UE pour enrichir sans cesse le partenariat global stratégique Chine-UE et porter la relation bilatérale à des niveaux toujours plus élevés.

Qu'attendez-vous du prochain sommet du G20 à Séoul ? Les États-Unis et certains pays d'Europe prêtent toujours une grande attention à la question du taux de change qui, selon eux, est étroitement liée au rééquilibrage du commerce international. Qu'en pensez-vous ?

Le sommet du G20, mécanisme efficace pour permettre à la communauté internationale de lutter ensemble contre la crise financière internationale, a joué un rôle important pour faire progresser la coopération économique internationale et promouvoir la reprise de l'économie mondiale.
Maintenant, cette reprise reste lente, fragile et inégale, avec beaucoup d'incertitudes. Pour sortir de l'ombre de la crise et promouvoir une croissance forte de l'économie mondiale, on a encore à affronter de sérieux défis.
Le prochain sommet à Séoul devra donc mettre l'accent sur le maintien de la solidarité pour résoudre les problèmes de fond à l'origine de la crise financière et consolider la dynamique de la reprise de l'économie mondiale.
Il peut agir notamment dans les quatre domaines suivants :

1) continuer à renforcer la coordination des politiques macroéconomiques dans l'esprit de solidarité et de gagnant gagnant pour envoyer un message rassurant de la solidarité des membres du G20 face aux défis majeurs de l'économie mondiale, accroître la confiance du marché et raffermir la reprise dans le monde ;

2) promouvoir la réforme du système financier international, renforcer la régulation du marché et accroître la représentation et le droit à la parole des pays émergents et des pays en développement au sein des institutions financières internationales ;

3) travailler à régler le déséquilibre entre le Nord et le Sud de façon à donner un appui politique à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement ;

4) lutter contre le protectionnisme pour favoriser une conclusion globale et équilibrée des négociations du cycle de Doha ainsi que la réalisation des objectifs du cycle de développement.

La Chine entend travailler ensemble avec la France, le Portugal et tous les autres pays du monde, pour relever ensemble les divers défis qu'affronte la communauté internationale et contribuer à une croissance forte, durable et équilibrée de l'économie mondiale.
Pour corriger le déséquilibre commercial, les parties concernées doivent transformer leur mode de développement, restructurer leurs économies et promouvoir un commerce juste et équitable en luttant contre toute forme de protectionnisme.

La politique de change de la Chine est cohérente et responsable. Nous avons toujours travaillé à faire avancer sûrement la réforme du mécanisme de formation du taux de change du yuan. De juillet 2005 à octobre 2010, le yuan s'est apprécié de 23,7 %.
Dans le futur, nous continuerons à perfectionner, selon le principe d'autonomie, de contrôlabilité et de progressivité, notre système de change flottant et régulé, à mieux faire jouer la loi de l'offre et de la demande et à accroître la flexibilité du yuan, de sorte à maintenir une relative stabilité de notre monnaie à un niveau raisonnable et équilibré.

Avec la montée en puissance de la Chine, sa voie de développement et son devenir attirent l'attention du monde entier et suscitent parfois des craintes. Comment y repondez-vous ?

La nation chinoise a plus de 5 000 ans d'histoire et a créé une culture brillante. Mais le chemin qu'elle a parcouru durant l'époque moderne était difficile et sinueux.
Depuis l'avènement de la Chine nouvelle il y a soixante et un ans, surtout au cours des trente-deux années qui ont suivi le lancement de la politique de réforme et d'ouverture sur l'extérieur, le peuple chinois multiethnique a mené dans l'unité une lutte ardue et réalisé de grands exploits reconnus de tous et marqués notamment par une nette amélioration de ses conditions de vie. Ces résultats n'ont été possibles que grâce à la persévérance de la nation chinoise, à la politique de réforme et d'ouverture, et surtout grâce au choix d'une voie de développement qui correspond à la réalité nationale.

Le développement de la Chine, composante importante du processus de développement de la société humaine, représente une grande opportunité aussi bien pour la France que pour toute l'Europe. Déterminée à avancer sur la voie de développement pacifique et à poursuivre sa stratégie d'ouverture de bénéfice mutuel et de gagnant gagnant, la Chine continuera à développer une coopération amicale avec tous les pays du monde pour contribuer à l'avènement d'un monde harmonieux de paix durable et de prospérité commune. Ce choix stratégique fait par le gouvernement et le peuple chinois s'appuie sur la réalité chinoise, correspond au courant de notre époque et témoigne de la cohérence des politiques intérieure et extérieure de la Chine.
Nous respectons le droit de chaque peuple de choisir librement sa voie de développement et refusons de nous ingérer dans les affaires intérieures des autres pays ou de leur imposer notre volonté.
Nous œuvrons au règlement pacifique des conflits internationaux, poursuivons une politique de défense nationale purement défensive et ne prétendons jamais à l'hégémonie ni à l'expansion.

La Chine et la France poursuivent toutes deux une politique extérieure d'indépendance et maintiennent depuis toujours d'étroites concertations et coordinations dans les affaires internationales.

R écemment, le président Nicolas Sarkozy a fait des propositions sur la gouvernance mondiale. Et vous, comment voyez-vous la construction de l'ordre international au XXIe siècle ?

Nous entrerons bientôt dans la deuxième décennie du XXIe siècle et, plus que jamais, les peuples du monde partagent un même destin.
Les différents pays doivent travailler, avec une large ouverture d'esprit et une haute vision stratégique, à l'instauration d'un nouveau type de relations interétatiques, marqué par le respect et la confiance mutuels sur le plan politique ainsi que le bénéfice réciproque et la complémentarité sur le plan économique, afin de promouvoir la multipolarisation du monde et la démocratisation des relations internationales.

Nous sommes d'avis que chaque pays doit faire sien le concept de gagnant gagnant, combiner les intérêts de son peuple avec ceux des autres, s'inspirer des expériences réussies d'autres pays et développer la coopération avec une attitude plus ouverte.
Nous estimons que les pays du monde doivent coexister en harmonie, s'en tenir au nouveau concept de sécurité, caractérisé par la confiance mutuelle, l'avantage réciproque, l'égalité et la coopération, et régler leurs différends aux moyens pacifiques, afin de préserver la paix et la stabilité dans le monde.

La communauté internationale et les pays développés en particulier doivent accroître leurs soutiens et aides aux pays en développement et les aider à atteindre au plus tôt les Objectifs du Millénaire pour le développement.
Il importe d'intensifier le dialogue et la coopération entre les pays en développement et les pays développés, de renforcer la représentation des pays en développement dans les mécanismes de gouvernance mondiale et d'instaurer un nouveau partenariat planétaire de développement.
Je suis sûr qu'avec les efforts communs de toute la communauté internationale, le XXIe siècle deviendra un siècle de paix, de développement et de coopération.