Sujet :

Sur le gaz de schiste

Xuan
   Posté le 19-04-2014 à 23:34:47   

Gilbert Remond me transmet ce courrier sur le gaz de schiste :


carte des gisements autour de la Méditerranée : zoomer pour voir les détails
bonne réception


STOP GAZ DE SCHISTE !


13 avril 2014 | Par Jade Lindgaard

Sans effort supplémentaire, les températures pourraient s’élever de 3,7 à 4,8 °C d’ici 2100, selon le dernier volet du cinquième rapport du Giec, publié dimanche 13 avril. Consacré à la lutte contre le dérèglement climatique, il dresse un bilan catastrophique de l’insuffisance des politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Sans effort supplémentaire de réduction des émissions de gaz à effet serre, les températures pourraient s’élever de 3,7 à 4,8 °C d’ici 2100, selon le dernier volet du cinquième rapport du Groupe d’expert intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), publié dimanche 13 avril. Consacré à la lutte contre le dérèglement climatique, il dresse un bilan catastrophique de leur insuffisance à empêcher le réchauffement de la température à la surface du globe.
Pour autant, le « résumé pour les décideurs » , la synthèse d’une trentaine de pages de l’épais document, ne ferme pas la porte à l’action et insiste au contraire sur la nécessité de mettre en œuvre le plus tôt possible des actions massives et drastiques pour contenir l’ampleur du changement du climat. Le précédent volet (voir nos articles ici et encore là), paru il y a quinze jours, décrivait un dérèglement climatique déjà en train de se produire. Cette dernière livraison se concentre sur son « atténuation » (mitigation en anglais), c’est-à-dire les scénarios possibles d’émissions de gaz à effet de serre pendant les cent prochaines années, en fonction des efforts mobilisés par les sociétés pour les endiguer. En ce sens, c’est sans doute la partie la plus politique de l’énorme rapport des scientifiques réunis sous l’égide de l’Onu, et qui publient à intervalles réguliers cette somme sur l’état des savoirs concernant le climat. En voici ci-dessous le résumé pour les décideurs (en anglais), dans sa version finale, approuvée le 12 avril à Berlin, où chercheurs et représentants des États et de la société civile se sont réunis pendant toute la semaine.

Malgré les politiques de protection du climat mises en œuvre autour du monde, les émissions de gaz à effet de serre n’ont cessé de croître depuis 40 ans. Pire, elles s’accélèrent nettement depuis dix ans : une giga-tonne (soit un milliard de tonnes) de plus chaque année, entre 2000 et 2010, contre moins de la moitié (0,4 giga-tonne) entre 1970 et 2000. Si bien que la situation actuelle est sans précédent dans l’histoire humaine : l’atmosphère absorbe désormais chaque année près de 49 giga-tonnes de gaz à effet de serre (en équivalent CO2). Le ralentissement de l’activité dû à la crise économique de 2008 n’a que temporairement ralenti ces rejets gazeux. Les comparaisons historiques sont vertigineuses : près de la moitié de toutes les émissions d’origine humaine depuis 1750, à l’aube de l’ère industriel, se sont produites lors des 40 dernières années. La croissance démographique et l’activité économique sont les principaux facteurs explicatifs. Mais là aussi, le tableau empire : la production de richesses est de plus en plus néfaste pour le climat. Les bénéfices de l’amélioration de l’efficacité énergétique ont été effacés par l’explosion de la demande. Le boom de l’usage du charbon a inversé la tendance à long terme de décarbonisation de l’offre mondiale.

Emissions totales de gaz à effet de serre d'origine humaine, 1970-2010 .

Au point que, sans effort supplémentaire de réduction des gaz à effet de serre, la température moyenne à la surface du globe devrait augmenter de 3,7 à 4,8 °C par rapport à ses niveaux pré-industriels. Ce sont des moyennes : concrètement, les hausses pourraient s’échelonner de +2,5 à + 7,8 °C en fonction des régions. Nous basculerions dans un autre monde. Cette catastrophe ne résulterait pas de l’inaction des sociétés, mais bien de l’insuffisance de leur réponse, puisqu’elle se produirait même si nous poursuivions les efforts actuels. Pour contenir le réchauffement de l’atmosphère à un niveau auquel s’adapter sans trop de bouleversements et de destructions, il faut agir beaucoup plus, massivement, et tout de suite. Les rejets de gaz à effet de serre doivent avoir chuté dès 2050, soit d’ici 35 ans. Car plus nous attendons, plus il sera difficile de les réduire, et plus cela coûtera cher.

Porte ouverte à la géo-ingénierie


Scénarios d'évolution des émissions de gaz à effet de serre.
Comment ? Les auteurs du Giec se gardent de plaider pour un type de politique plus qu’une autre. Ils présentent des scénarios d’évolution des rejets de CO2 en fonction de différents critères, dont les modes de production de l’énergie. C’est la partie du rapport qui va sans doute susciter le plus de polémique, car les chercheurs prennent en considération les techniques à risque de « capture et stockage du carbone » (CSC), qui consiste à aspirer le dioxyde de carbone et à le séquestrer sous la terre pour l’empêcher de polluer l’atmosphère.
C’est une forme de géo-ingénierie, ce champ de recherche qui prétend apporter des solutions techniques, aussi surréelles semblent-elles parfois, à la crise climatique (voir ici notre article à ce sujet). Expérimentée à petite échelle par l’industrie électro-intensive, cette technologie est très coûteuse, peu fiable et risquée : comment empêcher les fuites, les pollutions souterraines, les risques de tremblement de terre ? Les auteurs du Giec ne nient pas les « inquiétudes concernant la sûreté opérationnelle et l’intégrité du stockage à long terme » du CSC. Mais y voient une possible solution pour faire « redescendre » la concentration des gaz à effet de serre en cas de dépassement des seuils jugés plus ou moins acceptables (ce que les anglophones appellent overshoot ).

Ils vont plus loin, et accordent du crédit aux perspectives d'application du stockage du carbone à la bio-énergie (électricité et chaleur produites à partir du bois, des déchets agricoles, mais aussi agro-carburants). Pour une partie des mouvements écologistes mais aussi de scientifiques, c’est une ligne rouge à ne pas franchir. L’ONG britannique Biofuelwatch, associée comme d’autres organisations à la rédaction du rapport, s’en est émue cette semaine, dans le quotidien The Guardian : ce type de technologie risque d’aggraver le changement climatique, les problèmes de l’agriculture, la pénurie d’eau, l’érosion des sols, plutôt que de les résoudre, selon elle.

En 2009, lors du sommet de l’ONU sur le climat à Copenhague, le Climate justice network (CJN), un réseau d’associations, avait fustigé les « fausses solutions » techniques à la crise climatique. La capture et le stockage du carbone en faisaient partie. Cinq ans plus tard, les scientifiques du Giec considèrent que « combiner la bio-énergie avec la CSC pourrait permettre de produire de l’énergie et d’obtenir des émissions négatives, ce qui jouerait un rôle important dans la stabilisation et la réduction » des émissions de gaz à effet de serre. Au sujet des perspectives du nucléaire, les auteurs démontrent un enthousiasme modéré : « Sa part dans la production mondiale d’électricité baisse depuis 1993 » , écrivent-ils, et les obstacles à sa renaissance sont multiples : risques liés à l’activité des réacteurs et à la gestion des mines d’uranium, incertitudes financières et réglementaires, absence de solution pour le stockage des déchets, prolifération, hostilité des opinions publiques. Ils se montrent plus optimistes quant au rôle du gaz et de la nouvelle génération des centrales à cycle combiné, plus économes en CO2.

Et surtout, ils croient au rôle croissant des énergies renouvelables, dont la performance a beaucoup augmenté et les coûts ont diminué, même si elles ont encore besoin de soutiens, analysent-ils. En 2012, environ la moitié des nouvelles capacités de production d’électricité installée dans le monde était de l’éolien, de l’hydraulique ou du solaire. Ils anticipent au passage une dévalorisation des capitaux investis dans les énergies fossiles, notamment le commerce du charbon et du pétrole. En cas de mise en place de politiques sévères de déplétion de gaz à effet de serre, les investissements dans les hydrocarbures servant à produire de l’électricité pourraient se réduire de 30 milliards de dollars chaque année.

Pour autant, les chercheurs refusent de s’en remettre aux seules technologies. C’est là un point crucial, et ils le martèlent : il faut agir sur la demande, « l’amélioration de l’efficacité énergétique et les changements de comportements pour réduire la demande sont essentiels pour réduire les émissions de gaz à effet de serre » . Les « comportements, le style de vie et les cultures ont une influence considérable sur l’utilisation de l’énergie, les émissions peuvent baisser drastiquement en changeant les modes de consommation : la demande de mobilité, la dépense énergétique chez soi, la consommation de produits plus durables, le changement de régime alimentaire et la lutte contre le gaspillage alimentaire » . Ils plaident pour une action collective, concertée, internationale, et en appellent aux pouvoirs publics pour agir sur les infrastructures, les stratégies d’urbanisation, les investissements de long terme.

Le Giec se réunit sous l’égide de l’Onu. Ses auteurs ne pouvaient pas ignorer les discussions se déroulant autour d’un accord international sur le climat, espéré pour 2015 à Paris. Leur verdict est, sans surprise, sévère : les bases de la négociation entre les États « ne vont pas dans le sens de trajectoires efficaces à long terme de réduction des émissions permettant au moins de se donner une chance de limiter la hausse des températures à 2 °C » . Un message adressé en particulier à la France, qui va accueillir le sommet décisif de la fin 2015 : même si la conférence du Bourget débouche sur un accord, il ne permettra pas d’endiguer la crise climatique. Avant que le rideau ne se lève sur le théâtre de la diplomatie, le nouveau rapport du Giec sonne comme un impitoyable rappel à la réalité.


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Xuan
   Posté le 16-08-2019 à 20:58:26   

Un article de Reporterre
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https://reporterre.net/L-exploitation-du-gaz-de-schiste-devaste-les-Etats-Unis?fbclid=IwAR1pwFgJAC5YF1RzecbLj3Y0BnoRT2ZXY_FdIgKIiA4BynKnHD-kJffOX14

L’exploitation du gaz de schiste dévaste les États-Unis


27 juin 2019 / Yona Helaoua (Reporterre)


Grâce à l’exploitation des roches de schiste, la production de gaz et de pétrole américaine explose. Et cause des dégâts environnementaux en pagaille : destruction des paysages, pollution des eaux, séismes locaux, voie migratoire des oiseaux chamboulée, émissions de méthane...

Washington (États-Unis), correspondance
En quelques années, les États-Unis sont devenus les rois du pétrole. L’Energy Information Administration (EIA) table sur une moyenne de 12,45 millions de barils produits par jour en 2019 et 13,38 en 2020. « La production américaine de pétrole est 2,5 fois plus importante qu’en 2008 » , calcule Daniel Yergin, de la société de consulting IHS. Si bien que le pays est devenu le premier producteur mondial, devant la Russie et l’Arabie saoudite. D’ici quelques années, il devrait même devenir exportateur net.

La production de gaz naturel a elle aussi connu son plus haut niveau en 2018, en hausse de 11% par rapport à 2017, elle-même déjà une année record, selon l’EIA. Le sous-secrétaire d’État à l’énergie a d’ailleurs trouvé un nouveau nom pour désigner cette ressource qui a vocation à s’exporter : le « freedom gas » ( « gaz de la liberté » ). Selon la Commission européenne, les exportations de gaz naturel liquide américain vers l’Europe ont augmenté de 272 % depuis juillet 2018.

Les paysages de plusieurs États américains ont été défigurés par les forages

À l’origine de ce phénomène, le boom de l’exploitation des roches de schiste depuis une quinzaine d’années. Le gaz de schiste a par exemple représenté 67 % de la production de gaz naturel sec en 2017. Et l’EIA prédit que le pétrole et le gaz de schiste fourniront encore la moitié des ressources énergétiques en 2050. Les apôtres de l’exploitation du gaz et du pétrole de schiste arguent qu’elle permet d’obtenir une énergie plus propre que le pétrole conventionnel ou le charbon tout en investissant pendant ce temps-là dans les énergies vertes. Les défenseurs de l’environnement dénoncent, eux, ses conséquences ravageuses : destruction des paysages, pollution des eaux, séismes locaux, émission de gaz à effet de serre… Ce nouvel eldorado a, aussi, un coût pour la santé (cancers, naissances prématurées, impacts sur le système nerveux et respiratoire…) puisque 17 millions d’Américains vivent désormais à moins de 1,6 kilomètre d’un puits de gaz ou de pétrole.


En Pennsylvanie, comme dans d’autres États, les forages trouent les forêts, les plaines ou les terres agricoles.

Pennsylvanie, Texas, Dakota du Nord… Les paysages de plusieurs États ont été défigurés par les forages. Une étude publiée dans la revue Science en 2015 estimait déjà que des millions d’hectares de Grandes Plaines des États-Unis et du Canada étaient « en train d’être transformés en paysages industrialisés ». « C’est l’échelle de cette transformation qui est importante, car l’accumulation de la dégradation des terres peut avoir un impact à l’échelle continentale qu’on ne peut pas détecter lorsqu’on se focalise sur une seule région » , écrivent les auteurs. Ils font état d’une « perte directe de végétation » au profit, par exemple, de la construction de routes d’acheminement d’hydrocarbures. Entre 2000 et 2012, c’est l’équivalent de plus de la moitié du pâturage annuel sur les terres publiques gérées par le Bureau de gestion du territoire américain (Bureau of Land Management) qui a disparu. Sur les terres agricoles, la perte est équivalente à 120,2 millions de boisseaux de blé, soit environ 6 % du blé produit en 2013 dans le Midwest. Les auteurs ont également estimé les conséquences sur la vie sauvage : voies migratoires chamboulées, comportement et mortalité de la faune modifiés, plantes invasives encouragées à s’implanter.

Autre coût environnemental : la pollution des eaux, engendrée par la technique utilisée depuis la fin des années 1990 pour extraire le pétrole et le gaz de schiste, appelée fracturation hydraulique (ou fracking). Pour briser la roche enfouie sous terre, il faut une quantité phénoménale d’eau et de produits chimiques injectés à forte pression. Le pompage sur place de cette ressource ou son importation depuis des lacs ou des rivières d’autres États menace les réserves d’eau potable. Des fuites risquent de polluer les nappes phréatiques, et le stockage des eaux usées ainsi que leur transport sont eux aussi des sources de pollution potentielle. Le problème n’a fait qu’évoluer avec le temps. Une étude publiée dans Sciences Advances a conclu que les entreprises de forage ont utilisé 770 % d’eau supplémentaire par puits entre 2011 et 2016. Conséquence : une augmentation de 1 440 % d’eaux usées toxiques relâchées.


Le stockage et le transport des eaux usées, utilisées pour fracturer la roche, sont des sources de pollution potentielle.

En décembre 2016, l’Agence de protection de l’environnement américaine (EPA) elle-même avait admis que la fracturation hydraulique pouvait mener à polluer les ressources en eau potable. « De nombreux chemins de contamination sont désormais prouvés, et les cas observés à travers le pays montrent que ces conséquences sont communes et inévitables » , indique un rapport publié en 2018 par deux organisations de professionnels de santé (Concerned Health Professionals of NY et Physicians for Social Responsability). En Pennsylvanie, un solvant utilisé lors de la fracturation hydraulique a été retrouvé dans des puits d’eau potable situés près d’opérations de forage. Autre exemple : des chercheurs ont trouvé 19 contaminants — dont du benzene, cancérogène — dans des échantillons d’eau prélevés près de la formation de schiste de Barnett, au Texas.

Une nuée de petits séismes au Texas proviendrait de lignes de failles où de l’eau a été injectée

Le même rapport a compilé plusieurs études sur les séismes locaux attribués à la fracturation hydraulique : « Une étude de 2017 du bassin de Fort Worth a montré qu’une nuée récente de petits séismes dans le nord du Texas provenait de lignes de failles longtemps inactives dans des formations rocheuses profondes où de l’eau usée était injectée ; l’activité humaine est la seule explication plausible. » Toujours selon ce rapport, on apprend que :

« Le nombre de tremblements de terre de magnitude 3.0 ou plus est monté en flèche en Oklahoma depuis le début du boom de la fracturation hydraulique, avec moins de deux séismes par an avant 2009 et plus de 900 rien qu’en 2015. »

Les émissions de méthane (95 % du gaz naturel) sont également montrées du doigt. Ce gaz à effet de serre est en effet 25 fois plus puissant que le CO2. Or les experts estiment qu’environ 4 % du méthane libéré lors du forage s’échappe dans l’atmosphère. Dans la formation de schiste de Barnett, au Texas, les émissions de méthane ont été 50 % plus importantes qu’estimées par l’EPA. La fracturation hydraulique et les infrastructures qui l’accompagnent contribuent à la grande majorité des émissions de méthane dans la région, note le même rapport.



Les émissions de carbone ne sont pas en reste. Une étude de la National Oceanic and Atmospheric Administration s’est intéressée en 2012 aux émissions des puits de gaz du comté de Weld, au Colorado. Les chercheurs ont conclu que ces installations produisaient l’équivalent en carbone de un à trois millions de voitures. Ces émissions ne devraient pas baisser de sitôt : l’administration Trump est revenue sur les régulations environnementales mises en place par son prédécesseur, dont plusieurs s’attaquaient aux hydrocarbures de schiste. Sur les quelque 300 gazoducs et oléoducs en développement dans le monde, la moitié sont en Amérique du Nord. Rien que pour les États-Unis, une étude de Global Energy Monitor s’attend à ce que ces nouveaux pipelines soient à l’origine de 559 millions de tonnes de CO2 par an d’ici à 2040.