Sujet :

Le passé génocidaire de la France en Algérie

Xuan
   Posté le 27-12-2011 à 18:30:44   

Article publié par de The International Solidarity Movement *

[* L'ISM a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Proche Orient.]


Algérie - 26 décembre 2011
Le passé génocidaire de la France en Algérie



Par Youssef Girard

La colonisation de l’Algérie par la France débuta en juin 1830 lorsque la soldatesque française débarqua à Sidi-Ferruch dans la région d’Alger. Après la capitulation du Dey d’Alger le 5 juillet 1830, face à la résistance du peuple algérien, la « pacification » du pays fut obtenue au prix de la systématisation des « razzias » par le général Lamoricière et de la mise en place d’une politique de la « terre brûlée » par le maréchal Bugeaud. La première phase de la conquête, appelée « pacification », se termina en 1857 après le « nettoyage de la Kabylie ». Durant la période allant de 1830 à 1871, la France se lança dans une politique génocidaire émaillée de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité plus horribles les uns que les autres.



Dans la nuit du 6 au 7 avril 1832, la tribu des Ouffia fut exterminée près d’El-Harrach (Maison-Carrée) par le gouvernement du duc de Rovigo. A ce moment, Pellissier de Reynaud affirmait : « Tout ce qui vivait fut voué à la mort ; tout ce qui pouvait être pris fut enlevé, on ne fit aucune distinction d'âge ni de sexe. Cependant l'humanité d'un petit nombre d'officiers sauva quelques femmes et quelques enfants. En revenant de cette funeste expédition, plusieurs de nos cavaliers portaient des têtes au bout de leurs lances et une d'elles servie, dit-on, à un horrible festin. » (1)

Par la suite, l’assassinat de tribus entières se renouvela à plusieurs reprises. En 1844, le général Cavaignac procéda à l’enfumage de la tribu des Sbéahs pour obtenir leur reddition. Décrivant cette « opération », le général Canrobert écrivait : « On pétarada l'entrée de la grotte et on y accumula des fagots de broussailles. Le soir, le feu fut allumé. Le lendemain quelques Sbéahs se présentèrent à l'entrée de la grotte, demandant l'aman à nos postes avancés. Leurs compagnons, les femmes et les enfants étaient morts. » (2)

En 1845, dans le Dahra, devant les difficultés à réprimer une insurrection menée par un jeune chef maraboutique surnommé Boumaza, le colonel Pélissier décida d’enfumer les Ouled Riah. Ceux-ci s'étaient retranchés par centaines dans des grottes de montagnes. De grands feux furent allumés et entretenus devant les issues des grottes. Loin d’être un acte isolé, l’« enfumade » des Ouled Riah fut encouragée par le gouverneur général d’Algérie, le maréchal Bugeaud, qui ordonna au colonel Pélissier d’employer cette méthode le 11 juin 1845 : « Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac aux Sbeha. Fumez-les à outrance comme des renards » (3)

Quelques semaines après l’« enfumade » des Ouled Riah, le colonel de Saint-Arnaud fit procéder à l’emmurement d’autres membres de la tribu des Sbéahs : « Alors je fais hermétiquement boucher toutes les issues et je fais un vaste cimetière. La terre couvrira à jamais les cadavres de ces fanatiques. Personne n'est descendu dans les cavernes ; personne... que moi ne sait qu'il y a là-dessous cinq cents brigands qui n'égorgeront plus les Français. Un rapport confidentiel a tout dit au maréchal simplement, sans poésie terrible ni images. » (4)

Au-delà de ces multiples crimes contre l’humanité, les correspondances et les mémoires des acteurs de la conquête abondent en témoignages qui attestent des velléités génocidaires des conquérants et du caractère systématique de l’entreprise exterminatrice. La chasse à l’homme fut le titre de l’ouvrage du Comte d’Hérisson (5). Dans ses Lettres, le lieutenant-colonel de Montagnac évoquait clairement son projet exterminateur : « Tous les bons militaires que j’ai l’honneur de commander sont prévenus par moi-même que, s’il leur arrive de m’amener un Arabe vivant, ils reçoivent une volée de coups de plat de sabre. » (6). Face à la résistance algérienne, l’anéantissement et la déportation étaient les solutions proposées par Montagnac : « Voilà, mon brave ami, comment il faut faire la guerre aux Arabes : tuer tous les hommes jusqu’à l’âge de quinze ans, prendre toutes les femmes et les enfants, en charger des bâtiments, les envoyer aux îles Marquises ou ailleurs ; en un mot en finir, anéantir tout ce qui ne rampera pas à nos pieds comme des chiens… » (7).

Gouverneur général de l’Algérie et à la tête du corps expéditionnaire, Bugeaud justifia toutes les exactions commises par les troupes françaises. En 1842, il affirmait : « Il n’y a pas d’autres moyens d’atteindre et de soumettre ce peuple extraordinaire. » (8). Parlant de la guerre exterminatrice menée en Algérie par l’armée française, le colonel de Saint-Arnaud affirmait : « Voila la guerre d’Afrique ; on se fanatise à son tour et cela dégénère en une guerre d’extermination. » (9). Ces citations des principaux acteurs de la conquête de l’Algérie illustrent les projets génocidaires des autorités coloniales françaises.

Les militaires français étaient loin d’être les seuls partisans de cette conquête génocidaire de l’Algérie. Médecin à Alger, le docteur Bodichon exprimait les mêmes velléités exterminatrices dans un article publié en 1841 : « Sans violer les lois de la morale, nous pourrons combattre nos ennemis africains par la poudre et le fer joints à la famine, les divisions intestines, la guerre par l’eau-de-vie, la corruption et la désorganisation […] sans verser le sang, nous pourrons, chaque année, les décimer en nous attaquant à leurs moyens d’alimentation. » (10).

Des intellectuels renommés et respectés, appartenant à des courants de pensée différents voire opposés, s’enthousiasmaient pour la colonisation et allaient jusqu’à justifier « philosophiquement » crimes et massacres. Un penseur « libéral » comme Alexis de Tocqueville écrivait en 1841 : « J'ai souvent entendu en France des hommes que je respecte, mais que je n'approuve pas, trouver mauvais qu'on brûlât les moissons, qu'on vidât les silos et enfin qu'on s'emparât des hommes sans armes, des femmes et des enfants. Ce sont là, suivant moi, des nécessités fâcheuses, mais auxquelles tout peuple qui voudra faire la guerre aux Arabes sera obligé de se soumettre. » L’auteur de De la démocratie en Amérique ajoutait : « Je crois que le droit de la guerre nous autorise à ravager le pays et que nous devons le faire soit en détruisant les moissons à l'époque de la récolte, soit dans tous les temps en faisant de ces incursions rapides qu'on nomme razzias et qui ont pour objet de s'emparer des hommes ou des troupeaux. » (11).

Défenseur du droit et des humbles, Victor Hugo n’en exprimait pas moins une ferveur coloniale débordante. Dans son journal, Choses vues, Hugo rapportait un débat qu’il avait eu avec le général Bugeaud en janvier 1841. Face au manque d’enthousiasme colonial de Bugeaud, Hugo expliquait : « Je crois que notre nouvelle conquête est chose heureuse et grande. C’est la civilisation qui marche sur la barbarie. C’est un peuple éclairé qui va trouver un peuple dans la nuit. Nous sommes les Grecs du monde, c’est à nous d’illuminer le monde. Notre mission s’accomplit, je ne chante qu’Hosanna. Vous pensez autrement que moi c’est tout simple. Vous parlez en soldat, en homme d’action. Moi je parle en philosophe et en penseur. » (12).

Un penseur révolutionnaire comme Friedrich Engels se montrait lui aussi favorable à la conquête de l’Algérie par les armées françaises même s’il en critiquait les « excès ». En janvier 1848, il écrivait à propos de la conquête génocidaire de l’Algérie : « C'est très heureux que ce chef arabe [Abd el-Kader] ait été capturé. La lutte des bédouins était sans espoir et bien que la manière brutale avec laquelle les soldats comme Bugeaud ont mené la guerre soit très blâmable, la conquête de l'Algérie est un fait important et heureux pour le progrès de la civilisation […]. Et la conquête de l'Algérie a déjà obligé les beys de Tunis et Tripoli et même l'empereur du Maroc à prendre la route de la civilisation. […] Le bourgeois moderne avec sa civilisation, son industrie, son ordre, ses « lumières » relatives, est préférable au seigneur féodal ou au voleur maraudeur, et à la société barbare à laquelle ils appartiennent. » (13).

Les positions de ces différents acteurs – militaires français, penseurs libéraux ou révolutionnaires – montrent l’enthousiasme quasi unanime que suscitaient les conquêtes coloniales au sein des opinions publiques européennes en général et de la population française en particulier. Les crimes les plus horribles étaient acceptés, voire soutenus et justifiés, car les colonisés n’étaient pas considérés comme des êtres humains à part entière mais comme une sous-humanité entièrement à part. Au mieux cette sous-humanité devait être « civilisée » pour avoir l’« honneur » d’être hissée, dans un futur improbable, au niveau de l’humanité occidentale. Pour les colonisés, l’inhumanité était érigée en règle par les Européens qui divisaient les Hommes en deux catégories : les occidentaux/humains et les autres/infrahumains.

Au niveau démographique, la conquête génocidaire menée par les troupes françaises provoqua une importante baisse de la population algérienne. En quelques années, le peuple algérien fut véritablement décimé. Avant la conquête française de 1830, l’Algérie comptait entre 3 et 5 millions d’habitants sur son territoire. La population algérienne a connu un recul démographique quasiment constant durant la période de la conquête jusqu'à son étiage le plus bas en 1872. La période de la conquête de l’Algérie (1830-1871) fut marquée par trois grandes phases démographiques d'évolution de la population algérienne. De 1830 à 1856, la population algérienne tomba d’environ 5 à 3 millions d’habitants à environ 2,3 millions. Par la suite, elle remonta jusqu'à 2,7 millions en 1861 avant de connaître sa chute la plus brutale à 2,1 millions d’habitants en 1872. La population algérienne ne retrouva son niveau d’environ 3 millions d’individus qu’en 1890 (14).

En se basant sur ces chiffres, nous pouvons établir que l’Algérie a perdu entre 30 et 58% de sa population au cours des quarante-deux premières années (1830-1872) de la colonisation française. Des pertes humaines d’une telle ampleur, volontairement provoquées par une autorité politique responsable, ne peuvent être qualifiées que par le terme de génocide (15).

Durant la première phase de la conquête de 1830 à 1856, la décroissance démographique de la population algérienne s’explique par l’extrême violence des méthodes utilisées par l'armée française. Les massacres de masse, les « enfumades » et autres procédés génocidaires décimèrent la population algérienne. De plus, la politique de la « terre brûlée », décidée par Bugeaud, eut des effets dévastateurs sur les équilibres socio-économiques et alimentaires de l’Algérie. Elle provoqua des famines et favorisa le développement d’épidémies qui permirent d’accélérer le processus de conquête du pays et de mettre en œuvre une politique d’éradication du peuple algérien.

Après une période de baisse d’intensité de la violence suite à la fin de la première phase de conquête en 1857, la période 1866-1872 a vu à nouveau la population algérienne fondre sous les coups de la politique coloniale française. De 1866 à 1872 – en raison du développement d'une épidémie de choléra en 1867, de typhus et de variole de 1869 à 1872 et de la famine en 1868, de la répression de l'armée française après la grande révolte de 1871 et d’un tremblement de terre – la population algérienne diminua de plus de 500.000 personnes. La famine de 1868 aurait été responsable de la mort de 300.000 à 500.000 Algériens alors que la répression de la révolte de 1871 aurait causé la mort d’environ 300.000 personnes. Etudiant cette période, Djilali Sarri estime qu’un million d’Algériens seraient morts durant les années 1866-1872. Il parle de véritable « désastre démographique » (16).


L'attaque de Constantine par les troupes coloniales françaises le 13 novembre 1837

En 1880, le déclin démographique de la population algérienne était tel que, dans une étude intitulée La démographie figurée de l’Algérie (17), le docteur René Ricoux, chef des travaux de la statistique démographique et médicale au bureau de statistique du gouvernement général de l'Algérie, prévoyait la disparition des Algériens. Selon lui, les Berbères et les Arabes, « races inférieures » et surtout « races dégénérées » , devaient tendre « à disparaître d’une façon régulière et rapide » (18).

Etudiant l’évolution démographique de la population algérienne depuis l’invasion française de 1830, le docteur Ricoux expliquait : « A notre arrivée, en 1830, la population indigène était évaluée à trois millions d’habitants. Les deux derniers recensements officiels, à peu près réguliers, donnent en 1866 : 2.652.072 habitants, et en 1872 : 2.125.051 ; le déchet en 42 ans a été de 874.949 habitants, soit une moyenne de 20.000 décès par an. Durant la période 1866-72, avec le typhus, la famine, l’insurrection, la diminution a été bien plus effrayante encore : en six ans il y a eu disparition de 527.021 indigènes ; c’est une moyenne non de 20.000 décès annuel mais de 87.000 ! » (19). Au regard de ces chiffres, le docteur Ricoux affirmait qu’ « un déchet aussi considérable (nous pouvons ajouter qu’il se reproduit régulièrement chaque année) suffit à démontrer […] que les indigènes […] sont menacés d’une disparition inévitable, prochaine. » (20).

Les prédictions apocalyptiques du docteur Ricoux ne se réalisèrent pas mais elles exprimaient clairement le « désastre démographique » frappant la population algérienne depuis le début de la conquête française en 1830. Même de farouches partisans de la domination française, comme le docteur Ricoux, reconnaissaient les conséquences dramatiques de la colonisation pour le peuple algérien qui était voué à disparaitre, à l’instar des Amérindiens ou des premiers habitants de la Tasmanie.

L’oppression du peuple algérien ne cessa pas après la période de la conquête (1830-1871). Elle se perpétua sous d’autres formes notamment par une politique de destruction de l’identité culturelle et civilisationnelle du peuple algérien. A la suite de la conquête génocidaire, la France mit en place une politique ethnocidaire visant à faire disparaître l’ensemble des caractères sociaux et culturels du peuple algérien en s’attaquant prioritairement à l’islam et à la langue arabe qui fut déclarée langue étrangère dans son propre pays. Les structures d’enseignement prévalant avant la colonisation, les mosquées et autres lieux de culte musulmans furent largement détruits.

Les massacres de masse reprirent au lendemain de la guerre 1939-1945 afin de lutter contre le mouvement national algérien qui voulait libérer l’Algérie du joug colonial français. Les massacres de mai 1945 dans le nord-constantinois firent plusieurs milliers de victimes. Après le déclenchement de la Révolution algérienne, en novembre 1954, les massacres de masse perpétrés par les troupes françaises prirent une nouvelle ampleur. Massacres, viols collectifs, tortures systématiques ou internement de populations civiles dans des camps de « regroupement » , la répression française fut, durant près de huit ans (1954-1962), une suite de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Dans sa lettre de démission adressée à Robert Lacoste, ministre résident en Algérie, le secrétaire général de la police d’Alger, l’ancien résistant Paul Teitgen, qui avait été torturé par la Gestapo, n’hésita pas à comparer l’action des militaires français à celle de la police secrète du Troisième Reich (21).

Au total, cent trente deux ans de colonisation française en Algérie (1830-1862) aurait fait, selon l’historien Mostafa Lacheraf, environ 6 millions de morts algériens (22).

Loin de s’interroger sur son histoire coloniale, la France officielle reste dans une attitude négationniste quant à son passé génocidaire en Algérie. Pour elle, la colonisation de l’Algérie est toujours vue sous un angle favorable malgré les travaux faisant état des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ayant été perpétrés durant cent trente deux années d’occupation française de la terre algérienne.

La loi du 23 février 2005 portant « reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés » est venue graver dans le marbre cette vision révisionniste de l’histoire de la colonisation française. Présenté par l’UMP, le projet de loi originel avait été discuté à l'Assemblée nationale le 11 juin 2004 sans qu’il n’y ait d’opposition particulière de la gauche parlementaire. Lors de la discussion du texte de loi au Sénat, le 16 décembre 2004, aucune objection ne fut soulevée et le groupe socialiste vota en faveur du texte main dans la main avec la droite. Finalement, le texte fut définitivement adopté le 10 février 2005 et la loi fut promulguée le 23 février 2005.

L’article 4 alinéa 2 de cette loi prévoyait que les « programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord et accordent à l’histoire et aux sacrifices des combattants de l’armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit. » Cependant, après de multiples protestations, le Conseil constitutionnel a constaté le caractère règlementaire de l’alinéa 2 de l'article 4 afin de permettre sa suppression par simple décret.

La suppression de l’article 4 alinéa 2 a permis de passer sous silence les autres articles de la loi du 23 février 2005 qui s’inscrivent tout autant dans une perspective révisionniste. Par exemple, l’article 1 stipule que « la Nation exprime sa reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont participé à l'œuvre accomplie par la France dans les anciens départements français d'Algérie, au Maroc, en Tunisie et en Indochine ainsi que dans les territoires placés antérieurement sous la souveraineté française. »

De quelle « œuvre » cette loi parle-t-elle ? Des « enfumades », des viols collectifs, des tortures et autres massacres de masse ? De quels crimes de guerre et de quels crimes contre l’humanité la loi du 23 février 2005 fait-elle l’apologie ? De l’ethnocide visant à détruire la culture arabo-musulmane en Algérie ? Qui sont ces femmes et ces hommes à qui la nation française exprime « sa reconnaissance » pour « l'œuvre accomplie » ? Bugeaud, Saint-Arnaud, Montagnac, d’Hérisson ou Cavaignac ? Bodichon, Tocqueville ou Lavigerie ? Naegelen, Soustelle, Lacoste, Massu, Salan ou Bigeard ? Tous ces hommes n’ont fait que planifier, commanditer, justifier et mettre en œuvre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité qui seraient reconnus comme tels si la France officielle reconnaissait les Algériens comme des êtres humains à part entière.

En effet, si les crimes d’Hitler sont pleinement reconnus comme tels par la France officielle, c’est avant tout parce que ses victimes sont considérées comme appartenant de plein droit à l’humanité. A l’instar de l’ensemble des peuples non-occidentaux, les Algériens n’ont pas ce privilège. Comme durant la période coloniale, la France officielle continue à traiter les Algériens et l’ensemble des non-occidentaux comme des sous-hommes. Le négationnisme de la France officielle quant à son histoire coloniale nous rappelle ce qu’Aimé Césaire dénonçait déjà au lendemain de la guerre 1939-1945 dans Discours sur le colonialisme. Selon lui, les Occidentaux ne reprochent pas à Hitler « le crime en soi, le crime contre l’homme, » « l’humiliation de l’homme en soi, » mais « le crime contre l’homme blanc » , c’est-à-dire « d’avoir appliqué à l’Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu’ici que les Arabes d’Algérie, les coolies de l’Inde et les nègres d’Afrique. » (23).

Dans une France postcoloniale structurée par le racisme, seuls les crimes de masse contre l’homme blanc peuvent être pleinement reconnus comme des crimes contre l’humanité puisque les attributs de l’humanité ne sont pas entièrement reconnus aux non-occidentaux.

Notes de lecture :

(1) Julien Charles-André, Histoire de l'Algérie contemporaine. La conquête et les débuts de la colonisation (1827-1871) , Paris, P.U.F, 2 édition, 1979, page 92. Cf. Sellam Sadek, « Conquête de l’Algérie : crimes de guerre et crimes contre l’humanité » , in. Parler des camps, penser les génocides, Paris, Albin Michel, 1999
(2) Ibid., page 320
(3) Nouschi André, Prenant André, Lacoste Yves, Algérie, passé et présent , Paris, Ed. Sociales, 1960, page 305
(4) Julien Charles-André, Histoire de l'Algérie contemporaine. La conquête et les débuts de la colonisation (1827-1871) , op. cit., page 321
(5) Comte d’Hérisson, La chasse à l’homme , Paris, Ed. Paul Ollendorf, 1866
(6) Colonel de Montagnac, Lettres d’un soldat , Paris, 1885
(7) Ibid.
(8) Maréchal Bugeaud, « A propos de la destruction des villages et des récoltes opérées chez les Béni Menaçer » (Lettre au Maréchal Soult, avril 1842)
(9) Saint-Arnaud, « Lettre du 28 mars 1843 » , in Lettres du Maréchal Saint-Arnaud, Cf. Le Cour Grandmaison Olivier, Coloniser exterminer, Sur la guerre et l’Etat colonial, Paris Ed. Fayard, 2005, page 190
(10) Cf. Kateb Kamel, Européens, « indigènes » et juifs en Algérie (1830-1962), Paris, Ined/PUF, 2001, page 40
(11) de Tocqueville Alexis, « Travail sur l'Algérie » , 1841. in Œuvres complètes, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, pages 704 et 705
(12) Hugo Victor, Choses vues , Paris, Ed. Gallimard, Folio Classique, 1972, page 168
(13) Engels Friedrich, Northern Star, 22 janvier 1848 .
(14) Cf. Kateb Kamel, Européens, « indigènes » et juifs en Algérie (1830-1962) , op. cit.
(15) Même s’il ne s’agit pas de comparer les crimes de masse entre eux, durant la guerre 1939-1945 les nazis exterminèrent environ 46% de la population juive européenne (environ 5,1 millions sur une population de 11 millions) et 33% de la population tzigane (environ 250.000 sur une population de 750.000).
(16) Kateb Kamel, Européens, « indigènes » et juifs en Algérie (1830-1962) ,op. cit., page 30
(17) Ricoux René, La démographie figurée de l’Algérie , Paris, Ed. Masson, 1880
(18) Ibid., page 260
(19) Ibid.
(20) Ibid., page 261
(21) Cf. Teitgen Paul, « Lettre de démission à Pierre Lacoste ministre résident en Algérie » , 24 mars 1957. Publiée dans le journal Le Monde le 1ier octobre 1960.
(22) Cf. Lacheraf Mostefa, L’Algérie : Nation et Société , Alger, Ed. Casabah, 2004
(23) Césaire Aimé, Discours sur le colonialisme , Paris, Présence Africaine, 2004, page 14
marquetalia
   Posté le 27-12-2011 à 20:05:42   

ces faits ne doivent pas etre mis en avant pour occulter le génocide arménien,qui lui,se poursuit ,en turquie meme .de plus ,sans l appui de la russie,ankara et bakou auraient détruit l arménie depuis la chute de l union soviétique il y a 20 ans.
Xuan
   Posté le 27-12-2011 à 20:58:34   

Ce n’est pas le but.

Evidemment la Turquie a commis un génocide en déportant et en massacrant de façon systématique le peuple arménien, en particulier à la faveur de la première guerre mondiale, d’une manière qui a inspiré le génocide des Juifs par les nazis.
D’ailleurs la complicité du pouvoir allemand dans le génocide des arméniens ne fait pas de doute non plus.

Or la Turquie a fait remarquer à Sarkozy que la France avait commis un génocide en Algérie et que le propre père de Sarkozy, légionnaire en Algérie, pouvait le lui confirmer.
En ce qui concerne le génocide en Algérie, j’ai repris sans le modifier le titre de cet article. Mais il n’est pas démontré qu’il s’agisse réellement en Algérie d’un génocide et non de massacres.
Le fait est que la notion de génocide est très souvent galvaudée afin de justifier une action en justice. Comme la CPI est dirigée par les pays impérialistes, l’accusation de génocide sert de prétexte pour mettre certains pays au banc des accusés.
Qu’ils se prennent en retour l’accusation de génocide leur va bien parce que les pays impérialistes occidentaux ont commis des massacres innombrables et qu’ils continuent.

D'autre part, il est évident que Sarkozy se contrefout des arméniens. Par contre cette opération lui rapporte des voix et retarde un peu l’entrée de la Turquie en Europe. A mon avis c’est le but visé parce que la Turquie est historiquement liée à l’Allemagne et que ça constituerait un bloc important un peu lourd à avaler.
marquetalia
   Posté le 27-12-2011 à 21:04:04   

en meme temps,ces dissensions entre paris et ankara vont empecher toute intervention atlantiste en syrie,la turquie étant la base arrière des insurgés syriens soutenus par l occident-juste pour rappel,la turquie fait partie de l otan et est une tete de pont impérialiste vers les balkans,le caucase,le moyen orient et l asie centrale.le fait qu israel va examiner un projet de loi sur le génocide arménien va encore envenimer ses relations avec la turquie,et creuser le fossé avec les rebelles syriens-soutenus de jure par tel aviv-


Edité le 27-12-2011 à 22:51:55 par marquetalia


marquetalia
   Posté le 27-12-2011 à 21:06:09   

la france n a pas pas perpetré de génocide en algérie,mais plutot un ethnocide,comme la turquie au kurdistan.
Xuan
   Posté le 28-12-2011 à 00:17:17   

On considère que l’ethnocide est "la disparition de l’ensemble des caractères sociaux et culturels d’un groupe d’humains" . Et Abdelaziz Bouteflika a plusieurs fois qualifié la colonisation française de « génocide culturel » .
Tandis que l’article ci-dessus montre bien comment la colonisation, notamment par ses massacres et les maladies qu’elle a transmises, a conduit à une nette diminution démographique.
Parler d’ethnocide ne reflète pas l’ensemble de cette réalité.
marquetalia
   Posté le 28-12-2011 à 08:53:58   

le fait est qu abdelaziz bouteflika est un maffieux qui a pactisé avec les islamistes,présents dans le gouvernement algérien,et que le fln gonfle les morts algériens jusqu a a 1.5 millions de morts ,voir meme des fois 2 millions,pour la période 54-62 (tout comme les trotskystes qui par ailleurs trouvent des excuses au gia).


Edité le 28-12-2011 à 10:53:29 par marquetalia


zorba
   Posté le 28-12-2011 à 11:23:08   

Que la Turquie se préoccupe des droits de l'homme est une bonne chose et qu'elle continue surtout en adhérant à l'Union européenne. Ce sera un excellent moyen pour renforcer les opposants de l'intérieur et faire couler ce navire de l'impérialisme germano américain.
Que Sarkozy prenne de temps en temps une bonne claque dans la figure est une bonne chose, toute sa politique de l'Union pour la Méditerranée était du vent, je fais confiance aux algériens, aux lybiens et aux turcs pour lui rafraichir la mémoire avec les crimes commis par la France, ses armées et ses colons. Faire réfléchir Sarkozy serait trop beau!
marquetalia
   Posté le 28-12-2011 à 11:59:10   

surtout quand on sait que des mercenaires allemands et américains partent en turquie combattre les kurdes du p.k.k,et que la turquie est l instrument des usa,qui essayent de la faire entrer dans l u.e pour contrer l influence russe! c est simple,si vous n arretez pas de cautionner les crimes turcs contre les arméniens et les kurdes,de soutenir les "antiimpérialistes" d ennadah et des moshlem brotherhood en egypte,de laisser certain(e)s poster des messages avec comme signature des propos judéophobes,je ne viendrai plus sur ce forum.les crimes coloniaux francais en algérie ne sont dénoncés par erdogan que parcequ il s agit de musulmans,pour semer le trouble dans l hexagon.la france a fait la meme chose en indochine et a madagascar sans que les "loups gris"qui ont revetu la peau d agneau ne s en soucient.


Edité le 28-12-2011 à 12:33:25 par marquetalia


marquetalia
   Posté le 28-12-2011 à 12:03:02   

de plus,en turquie le terme meme de "communisme" est interdit,les maoistes sont executés par des militaires sans scrupule ,avec la bénédiction u.s et l absolution de l allié allemand,comme lors de la guerre d algérie de 1954 a 1962,quand audin fut torturé par les paras.les algériens étaient regroupés comme du bétail dans des camps,comme les kurdes en turquie.et la turquie ne respecte pas les droits des minorités sexuelles-les gays y sont assassinés par les islamistes,en toute impunité-


Edité le 28-12-2011 à 13:03:49 par marquetalia


zorba
   Posté le 28-12-2011 à 14:13:44   

La préoccupation des impérialistes au pouvoir en Turquie, comme en Allemagne, c'est l'influence russe, plus exactement le danger de voir ou revoir des communistes aux affaires dans ce pays riche en ressources naturelles que le délabrement de l'état ex sovietique permet de piller sans risque.
Tout le reste est de la broutille.
Les USA ont une constante dans leur politique, écraser le communisme par tous les moyens, dictatures au besoins, comme en Turquie, au Chili et à bien d'autres endroits. L'expérience de la période soviétique leur a appris à être méfiants, car ce système peut se défendre et faire très mal à ceux qui s'y frottent.
Demandez aux soldats allemands qui ont fait la guerre de 1941à 1945.
D'où les appuis et l'encerclement du secteur de l'ex URSS.
marquetalia
   Posté le 28-12-2011 à 14:22:06   

idem pour chypre,où christofias est au pouvoir,ce qui renforce l appui impérialiste a l occupation turque de l ile.en russie,guennadi ziouganov a obtenu 19 pourcents des voies,et un split du pc russe pour sa part 1 pourcents.ainsi,les usa encerclent une russie où les communistes reviennent en force,forcant l ukraine a rejoindre l otan,et préparant l épuration ethnique des russes de transnistrie et des ossetes du sud,des abkhazes,fournissant des armes aux djihadistes du nord caucase,isolant la biélorussie de lukashenko,évincant la russie de libye et de syrie,....
marquetalia
   Posté le 28-12-2011 à 15:32:35   

pour en revenir au fil conducteur,l algérie,il n est plus necessaire de soutenir le régime fln,qui n est plus socialiste,et est allé jusqu a permettre l installation d une base u.s a tamanrasset dans le sahara a cause d aqmi qui fait le jeu de l impérialisme yankee.en meme temps,le colonisateur hexagonal doit reconnaitre ses crimes,50 ans après l indépendance-le 5 juillet 2012,d alger a oran,tout un peuple commemorera son martyr de 1.5 millions de morts.


Edité le 28-12-2011 à 20:46:40 par marquetalia


Xuan
   Posté le 02-03-2012 à 20:02:19   

Ci-dessous le témoignage de Jacques Tourtaux, appelé pendant la guerre d'Algérie et opposant à la guerre :


GUERRE D'ALGERIE : TEMOIGNAGE SUR DEMANDE DE MON CAMARADE COMMUNISTE ALGERIEN MOHAMED REBAH, ANCIEN COMBATTANT DE L'ALN, DONT LE FRERE EST MORT AU COMBAT CONTRE L'ARMEE COLONIALE FRANCAISE


Bonjour Jacques
Merci pour cet envoi et ce récit bouleversant. Les morts sont peut-être mes cousins, les Rebah de Mouzaïa. En tout cas, ce sont des frères de combat dont nous commémorons chaque année le sacrifice pour la Patrie. Ils sont morts "pour ce qui nous fait vivre" (Paul Eluard)

Pour les soldats français du contingent morts dans la guerre coloniale, je pense à la chanson d'Yves Montand, "Giroflé, Girofla" où il dit "et tout ça pour rien".
L'Algérie est indépendante. Le colonialisme en Algérie a capitulé grâce également à l'héroïsme de Raymonde Peschard, Henri Maillot, Fernand Iveton, Maurice Laban, Maurice Audin. Les Pieds-Noirs qui ont fait du mal ont fui comme des "ratons". Les fils de "leurs bougnouls" sont aujourd'hui des médecins spécialistes, des ingénieurs, des professeurs qui bâtissent un pays où au moins on ne connaît pas le racisme sur lequel la France impériale a construit l'exploitation.
Merci pour ce récit historique.
Fraternellement
Mohamed Rebah


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Camarade,
Vu du camp colonial de l'ETR 805. Si cela peut aider en tenant compte de certaines approximations et autres rumeurs colportées dans le camp. Mes notes furent écrites souvent plusieurs jours après l'évènement relaté. Ces notes figurent dans mon premier bouquin.
Fraternellement.
Jacques Tourtaux


Journées des 15 et 16 mai 1961 , à l’est du pic MOUZAÏA , dans la zone interdite, l’aviation a lancé des « bidons spéciaux » (Napalm) , des kilomètres de forêts grillent.
31 mai 1961 , à 500 mètres de la ferme Cleyne. (la seconde ferme dont notre unité a la garde), une ferme gardée par la biffe est attaquée par un petit groupe A.L.N.
Vers 22 h , échauffourée d’une demi-heure, pas de pertes.
07 juin 1961 , à MOUZAÏA , 5000 pieds de vigne sabotés à la ferme Bernardini.
09 juin 1961 , 7H30 , saut de paras près de la base. Dans les gorges de la CHIFFA , situées non loin de notre camp, un groupe de harkis à cheval tombe en embuscade. Un tué et un blessé (rumeur ETR805).
Trois membres de l’A.L.N. surpris par notre section de protection (S.P.). L’A.L.N. sabotait des pieds de vigne. La S.P. n’a pas tiré en raison d’une trêve décidée par les autorités françaises. Nos chefs ont très mal pris cette décision de trêve décidée par « des gens déconnectés du terrain » , disaient-ils. L’A.L.N. a continué ses actions de guerre. 19H30 , les T6 de la chasse tirent à la roquette sur l’A.L.N., retranchée dans des grottes, sur les flancs du pic MOUZAÏA . Les roquettes jaillissent des ailes des chasseurs, tels des traits de feu, suivis, à l’arrivée d’explosions et de fumées. Très vive riposte de l’A.L.N., dotée d'au moins une mitrailleuse. Les départs de leurs tirs montaient dans le ciel, vers les T6. Fin du combat vers 20H30 . Ensuite, jusqu’à 22H30 , des Nordatlas 2501 décollent de BLIDA et larguent des lucioles. De notre camp, nous avons suivi en direct la bataille.
15 juin 1961 , la base est consignée et en état d’alerte. Le peloton dont je suis forme une section d’alerte. Les gardes sont renforcées. Sous une chaleur torride, à la pioche, nous creusons des emplacements pour fusils-mitrailleurs. L’attaque du camp par l’A.L.N. est imminente, selon nos chefs. Celle-ci n’a pas eu lieu. Attendre une attaque, être sur le qui-vive, met les nerfs à rude épreuve. La tension est extrême.
Nuit du 15 au 16 juin 1961, vers 23 H . Ferme Féréol, trois tirs de mortier dirigés vers la ferme.
17 juin 1961 , un biffin tué à MOUZAÏA ? Une de leurs patrouilles est attaquée dans les gorges de la CHIFFA , entre le ruisseau des singes et le rocher blanc. Deux tués ( rumeur ETR805 ) .
A MOUZAÏA , à l’endroit où la route bifurque sur OUED-EL-ALLEUG , quatre voitures de pieds-noirs sont mitraillées par l’A.L.N. Quatre tués, cinq blessés graves (rumeur ETR805).
Nuit du 18 juin 1961, 22H . Explosion de plastic O.A.S. à BLIDA . 4H.du matin : de la ferme Féréol., nous entendons de nombreux coups de feu. Deux biffins tués (Rumeur E.T.R.805).
19 juin 1961 : violents combats à l’est de MOUZAÏA . Ils ont commencé vers midi et ont duré toute la journée (opération en cours).
23 juin 1961 , du début de l’après-midi jusqu’au lendemain matin, nombreux coups de feu et de mortier dans les gorges de la CHIFFA .
24 juin 1961 , idem à la journée du 23 juin 1961.
26 juin 1961, pilonnage intensif de la chasse (T6) dans le djebel MOUZAÏA , riposte de l’A.L.N. à la mitrailleuse, installée dans une grotte.
De 18H.30 à 19H.30 , violents combats notamment aux mortiers dans la vallée de la CHIFFA. Vers 20H.30 , à quelques centaines de mètres de notre camp, un garde musulman est tué dans le camp de regroupement.

LE CAMP DE REGROUPEMENT

Ce camp de regroupement jouxtait notre base. A l’arrivée des gendarmes, l’épouse leur aurait désigné le tueur. Froidement, un gendarme l’abat, à bout portant, à la MAT49. Les balles de son P.M. s’écrasent contre un hangar en tôle de la base, dans lequel étaient logés de nombreux gus de notre unité. Fort heureusement, peu de monde à l’intérieur, car il faisait très chaud, personne n’a été touché.
28 juin 1961, de 8H.15 à 8H.30 , rafales de F.M. près du camp.
30 juin 1961, 6H.30 , largage de paras près de la base, des combats se déroulent toute la matinée.

MANIFESTATIONS MUSULMANES

01 juillet 1961 , manifestations musulmanes à ALGER, BLIDA et autres petites localités d’Algérie . L’armée massacre des dizaines de familles musulmanes.
La wilaya IV a appelé à cette manifestation. A BLIDA , fief de cette wilaya, nous avons appris que les légionnaires du 2° Régiment étranger de parachutistes de la légion (2° REP) ont tiré à la mitrailleuse 12,7 sur les manifestants, tuant plusieurs dizaines de personnes.
02 juillet 1961 , la base est consignée. De 21H. à 21H.30 , rafales de F.M. secteur Féréol.
03 juillet 1961 , le peloton patrouille dans MOUZAÏA , important lieu de passage de l’A.L.N. Le peloton est survolé par un avion d’observation. Le F.L.N. a lancé un ordre de grève. Manifestations dans de nombreuses villes d’Algérie. Nouveau bain de sang, plus de cent morts (bilan officiel.)
09 juillet 1961 à midi , du chat à grailler. Personne n’a bouffé.
11 juillet 1961 , cinq fusiliers de l’air tués à BLIDA (rumeur ETR805).
Nuit du 11 au 12 juillet 1961 : trois biffins tués à EL AFFROUN , village voisin (rumeur ETR805).
12 juillet 1961, 9H , près de la ferme Cleyne., deux pieds-noirs tués. Ils ont sauté sur un obus de105 piégé. Quel boucan !
Nuit du 13 au 14 juillet 1961, entre 20H.30 et minuit , nous entendons de nombreux tirs, très nourris, venant de chez Féréol.

14 JUILLET 1961

L’escorte qui vient nous rechercher à 6H. du matin, à la ferme Cleyne. est en retard. Durant la nuit, l’A.L.N. a abattu des poteaux téléphoniques.
Pour l’anecdote, j’ajoute que, tard dans la nuit, pendant ma faction je me suis assoupi. Ce sont les copains de l’escorte, qui nous ont réveillés. Personne n’en a rêvé. Je l’ai échappé belle, c’était OUED-SMAR ou TINFOUCHI en cas de dénonciation.
Dans cette ferme, nous n’étions que trois appelés. Lorsque l’un des trois était de faction pendant deux heures sur le toit, les deux autres dormaient si la situation le permettait.
A MOUZAÏA , nous crevions de faim, souvent vidés à cause des courantes. Mais les missions très rapprochées ne pouvaient attendre, puisqu’il n’y avait pas assez de soldats. A MOUZAÏA , il n’y avait pas de planqués.
Nuit du 17 juillet 1961, vers 22H . Harcèlement de la ferme Cleyne. L’A.L.N. procédait ainsi afin de démoraliser les bidasses . C’était leur forme de guerre psychologique. Je n’avais pas besoin de ça. Comme tout appelé, j’attendais la quille. L’armée, rien à cirer.
Nuit du 20 juillet 1961, 23H . Vive fusillade et tirs de mortiers dans les djebels proches de MOUZAÏA .

QUARTIER LIBRE

30 juillet 1961 , avec deux copains, j’attends vainement le train pour BLIDA . Il a sauté sur un 105 piégé. C’était l’un de nos rares quartiers libres. Nous ne nous laissons pas abattre et prenons un vieux car tout rafistolé. Les gens nous étaient visiblement hostiles. Trois pauvres gus en uniforme, sans armes, pas rassurés. Soulagement à l’arrivée à BLIDA où on s’est perdu dans le dédale des ruelles. Nous avons failli nous faire tuer à coups de pierres. Au départ, des gosses en guenilles nous demandent de l’argent .Ils nous insultent, nous balancent divers objets ramassés par terre, des adultes s’en mêlent. Les pierres pleuvent de plus en plus drues et de plus en plus grosses. Nous avons réussi à ne pas nous laisser enfermer. Nous devons notre salut à une fuite vitesse grand V. Nous sommes arrivés devant des chevaux de frise qui servaient de protection à une imposante bâtisse en dur. C’était la « Patte de Chat » , un bordel très connu des soldats à BLIDA . En nous faisant rentrer, la mère maquerelle nous a sauvé la vie.

MOIS D’AOUT SANGLANT

Nuit du 01 août 1961 , entre 22H et 23H . Ca rafale aux MAT49 et au F.M., secteurs Cleyne. et Féréol.
03 août 1961, à MOUZAÏA , un engin explosif est lancé sur le toit de la maison d’un commerçant musulman.
05 août 1961 , base consignée. Le général félon GARDY émet à l’aide d’un émetteur clandestin un message pro-O.A.S.
Nuit du 08 août 1961 , entre 20H30 et 2OH45 , ça rafale secteur de la base. Fait assez rare, ça accroche à la MAT49, au F.M., aux flingues , à la 12,7, aux mortiers et à la grenade dans les gorges de la CHIFFA . Bilan inconnu.
NUIT du 10 août 1961 : notre section de protection (S.P.) rafale deux A.L.N. à la MAT49 et à la 12,7. La biffe du 404 R.A.A. fait également le coup de feu. Les deux hommes réussissent à se camoufler dans MOUZAÏA .
NUIT du 14 août 1961 , la S.P. tire sur quatre A.L.N. à MOUZAÏA . Ils s’échappent en ripostant.
15 août 1961 , ça rafale toute la matinée dans le secteur proche de la base.
Nuit du 15 août 1961 , 22H15 , ça rafale à la MAT49 près de la base.
19 août 1961 , trois incendies dus au napalm font rage toute la journée. Accrochages dans le djebel MOUZAÏA jusqu’au soir. Douze A.L.N. auraient été tués.
Nuit du 22 août 1961 , l ’A.L.N. coupe des pylônes près de chez Féréol. et scie deux cent orangers. Je suis de garde cette nuit-là, à la ferme. Cette crapule n’aime pas ses « indigènes » , ni les gus qui le protègent, chaque nuit. Nous profitons de son absence pour donner des conserves à ces pauvres gens. Pas d’hommes valides. Il n’y a que des femmes et des enfants et un ou deux vieux. Ces familles logent dans un gourbi au centre de la ferme. Nous ne sommes pas mieux lotis, nous dormons dans une étable dont la porte obsolète et détériorée fermait avec un fil de fer accroché à un clou. Féréol n’avait que faire de la peau des gus qui défendaient la sienne. Nous ne sommes pas dupes : les hommes sont avec l’A.L.N. La lutte du peuple algérien est justifiée. Seule la quille nous intéresse.
Pendant les quelques mois que l’ai passé à MOUZAÏA , pas de perte déplorée parmi nous : C’est l’essentiel.
Pendant cette nuit du 22 août 1961 , jusque tard dans la nuit, les femmes et les enfants ont chanté à tue-tête. Ils couvraient ainsi les bruits des scies qui coupaient les pylônes. L’escorte est arrivée en retard. Les sorties nocturnes de véhicules étaient rares : elles étaient réservées aux cas d’extrême nécessité car l’insécurité régnait. Quand il le fallait, le médecin était escorté.
25 août 1961 , Nord-Est d’OUED-EL-ALLEUG , deux A.L.N. gravement blessés par l’armée en cours d’opération.
27 août 1961, 7H45 , à MOUZAÏA , explosion d’un obus piégé. J’étais dans un mirador sur la base. Quel vacarme !
28 août 1961, 19H30 , l’A.L.N. rafale avec des armes automatiques un véhicule militaire à 4 km au Sud Ouest d’ OUED-EL-ALLEUG (bilan inconnu).
Prés d’ EL AFFROUN , des pylônes haute tension sont coupés sur les lignes BLIDA-MARENGO et BOUFARIK-AFFREVILLE .
Nuit du 01 septembre 1961 . Vive fusillade près de la ferme Cleyne.

LES CONQUERANTS

06 septembre 1961 , dans l’après-midi, un commando A.L.N. fort d’environ une douzaine d’hommes a tué par égorgement deux fermiers européens, blessé leur fils âgé d’une quinzaine d’années. Celui-ci a réussi à contacter la base par téléphone. La S.P. est sortie aussitôt tuant trois A.L.N., dont deux blessés achevés sur place par des soldats.
Lorsque le Half-Track est revenu, un cadavre juché sur la mitrailleuse 12,7, les ovations des pieds-noirs dans la rue principale l’ont accueilli.
A l’arrivée au camp, des gendarmes en treillis de combat impeccables, n’ayant visiblement jamais servi, se sont comportés comme des conquérants, en ouvrant l’arrière du véhicule. Ils gueulaient après les bidasses qui ne sautaient pas assez vite de l’engin, deux cadavres à leurs pieds.
Je revois encore ces sauvages, ces va-t-en-guerre attraper les victimes par les cheveux, les jeter à terre, les traîner sur le sol comme des sacs de pommes de terre.
L’un des gendarmes a eu un recul. Sa gloriole avait disparue. Il venait de mettre la main dans la bouillie : la cervelle de l’Algérien qu’il voulait traîner à terre.
En effet, l’un des malheureux avait la boîte crânienne éclatée par les balles des pistolets-mitrailleurs MAT49.
Les trois corps étaient recroquevillés, raidis par la mort : l’un d’eux avait les cheveux dressés sur la tête, la mort jusque dans les cheveux ! Les mouches virevoltaient autour d’eux. Ils furent exposés à la vue de tous dans une petite baraque, appelée « l’abattoir » par les anciens.
La vision de l’un d’eux m’a particulièrement choquée. Je le revois encore. Un beau brun à la moustache finement taillée sur un beau visage. Ses yeux étaient grands ouverts, il semblait sourire. Ses bras étaient criblés d’impacts de balles.
Trois jeunes gens de petite taille, 17 ou 18 ans environ, notre âge.
J’étais révolté, impuissant. Comment des garçons de même âge, certains appelés du contingent, ont-ils pu agir avec une telle sauvagerie ? Achever des blessés ! L’un d’eux n’était que légèrement blessé de quelques balles à un bras ! Honte à ces assassins !
Cette vision d’horreur hante encore parfois mes nuits. Des cauchemars d’une acuité accrue, chaque année, à l’approche du mois de septembre.
Cette journée du 06 septembre s’est achevée par le bruit de l’explosion d’une grenade défensive (DEF) au bain maure et par l’annonce de l’arrestation de se pt personnes, appartenant sans doute au commando A.L.N., par la biffe, probablement le 404 R.A.A.

LA RAFLE

07 septembre 1961 , quatre vingt musulmans (?)sont raflés dans la population « mâle » , comme disent nos chefs. Ils sont emmenés de force à la baraque où, pour l’exemple, ils sont contraints de passer lentement devant les cadavres exposés des trois Algériens, abattus par des hommes de la S.P. Parmi ces Algériens, quatorze personnes environ dont de jeunes garçons de 13 ou 14 ans n’ont pas de pièce d’identité. Ils ont été arrêtés à la sauvette.
Le lendemain, nous avons su que le groupe des 14 avait été passé à tabac et à la gégène. Adultes et enfants torturés à mort. (?)
Jusque tard dans la nuit, nous avons entendu des cris inaudibles. Comme des cochons que l’on égorge. C’était insoutenable. Nous n’avons pas vu, mais nous avons compris que les enfants arrêtés étaient torturés.
Après quelques jours d’exposition en plein été, les trois cadavres auraient été jetés à la benne à ordures pour être ensuite jetés à la décharge publique. Selon les anciens du camp, cette pratique était courante à MOUZAÏAVILLE.
Toujours le 07 septembre 1961 , dans le djebel MOUZAÏA , gros incendie dû au napalm . Au début de la nuit, vingt-six volontaires du peloton, de jeunes recrues inexpérimentées, de la classe 61/2 sont envoyés boucler et fouiller le secteur. Deux grenades défensives sont récupérées.
12 septembre 1961, 22H . Alors que nous étions en patrouille, dans MOUZAÏA , explosion due à un plasticage O.A.S. Trois Algériens sont grièvement blessés. L’un d’eux agonise, la poitrine transpercée par un morceau de planche ressortant dans le dos. Lors de l’explosion, par effet de souffle, j’ai reçu un choc à la tête : sans doute une pierre ou autre objet.
L’arcade sourcilière saignait abondamment. J’ai tourné de l’œil. Après toutes ces années, je me demande encore si je le dois à la vision du pauvre homme agonisant ou au coup reçu. J’ai atterri à l’infirmerie où on m’a recousu avant de me renvoyer dans ma piaule. J’ignore ce que sont devenus les trois blessés algériens.

REBELLIONS

Après le putsch d’avril 1961, les soldats passés libérables ( à trois mois de la quille) refusaient systématiquement d’aller au crapahut . Les bleus les suppléaient.
J’avais rencontré deux autres appelés communistes avec qui j’écrivais des petits papillons « Paix en Algérie » que l’on placardait et distribuait sur les lits, dans les fillods , en se planquant. Nous suivions les consignes du P.C.F : militer au sein de son unité afin d’aider à la prise de conscience des appelés, peu politisés.
Les papillons étaient rédigés en scripte. Pour éviter d’être pris, on se cachait derrière les moustiquaires des fillods sous les vasistas, à l’heure de la distribution du courrier par le vaguemestre pendant midi. Il faisait une chaleur torride sous la tôle. Le vaguemestre pouvait nous appeler pour une lettre. Une ou deux fois, mon voisin de piaule, qui se doutait que j’étais dans le coup, m’a ramené du courrier. Ne voulant pas lui faire courir de risques, nous avons décidé d’espacer nos rendez-vous. Tout se passait bien. Nous nous sommes donc enhardis à rédiger de petits tracts de trois ou quatre lignes appelant notamment à « lutter contre la guerre imbécile et sans issue menée par DE GAULLE en Algérie » . On signait : « des appelés communistes » .
Quand aux gradés, ces brèles devaient se douter que j’étais dans le coup, mais « pas vu, pas pris » . Par conséquent, l’armée ne savait plus où me mettre. Les gradés m’ont viré du peloton, pourtant obligatoire, à MOUZAÏA . Bien que reçu au stage de standardiste, j’ai très vite compris que je n’aurais pas d’affectation dans cette spécialité. Un gradé m’a annoncé que j’étais « reclassé sans spécialité » . Reclassé « bon à rien » : les risques encourus étaient accrus. Or, le danger était permanent à MOUZAÏAVILLE .
L’ampleur des protestations en métropole et la paix qui se profilait à l’horizon imposait à l’armée la discrétion dans sa répression contre les soldats rebelles : l’armée préférait éviter d’ébruiter ce que subissaient certains bidasses .
L’armée m’a donc spécialement choyé, en m’isolant pour mieux assouvir sa répression feutrée. Tout au long de mon service militaire, j’ai vécu sous la menace d’un retour à OUED-SMAR . Vivre constamment dans la crainte d’un mauvais coup d’un gradé est terriblement stressant.
Avoir fait ses classes à OUED-SMAR imposait le respect aux autres appelés : la seule évocation de ce nom était redoutée de tous. Mais c’était une tare aux yeux de nombreux gradés. Certains « rampants » étaient des crevures. Ils n’avaient rien de commun avec les pilotes qui étaient souvent très sympathiques. N’ayant plus de stage à suivre, plus de peloton à faire, j’étais à la disposition des chefs. Diverses missions occupaient l’essentiel de mes journées : crapahut à volonté. J’ai craint pour ma vie.
Les tracts pendant midi, le crapahut toute la journée : cela a duré jusqu’au jour où j’ai reçu l’ordre de faire mon paquetage. J’avais été dénoncé. Embarquement immédiat en train, puis en avion, sous escorte : comme si je pouvais m’échapper de l’avion ! Ce n’est qu’à l’atterrissage que l’on m’a dit que j’arrivais à TELERGMA , dans le CONSTANTINOIS . J’étais très anxieux.
Cette région d’ ALGERIE avait mauvaise réputation, en raison de l’insécurité engendrée par l’activité d’une A.L.N. très combattive.
C’est donc à la mi-septembre 1961 que je suis muté dans le CONSTANTINOIS . J’ai correspondu avec un copain resté à MOUZAÏAVILLE . Nous avions prévu un système « anti-mire » . On écrivait au crayon mine et on collait l’enveloppe à la « seccotine » pour voir si on était censurés. J’ai reçu certains courriers, notamment une lettre de mon oncle Hilaire, le cheminot. Elle est passée. C’était aussitôt après le putsch d’avril 1961. Il relatait les luttes des ouvriers en France pour faire barrage aux factieux. Il a enchaîné par de violentes critiques contre la guerre et contre l’armée.
Je n’ai pas été inquiété par ce courrier antimilitariste qui est passé malgré une sévère censure.

MOUZAÏAVILLE
L’AFFRONT


Au réfectoire, j’ai vu un chef de chantier pied-noir traiter plus bas que terre des algériens qui travaillaient à la construction d’un mur. « Sale melon », «sale raton», « sale bougnoule » …, le refrain habituel, auquel je n’ai jamais pu m’accoutumer. Le pied-noir aboyait.
Mon sang n’a fait qu’un tour. Discrètement, j’ai dit à l’oreille de celui qui semblait le plus âgé :
« Qu’attendez-vous pour le descendre » ?
Une journée ou deux après, pas de chef de chantier. Le vieil homme, qui m’a reconnu m’a dit à l’oreille que le F.L.N. l’avait tué. J’étais sidéré. La mort de la brute qui n’en était pas moins un être humain me réjouissait. C’était pendant l’été 1961. J’aimerais tant revoir cet algérien ou l’un des témoins de cette scène au réfectoire.


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Xuan
   Posté le 11-05-2012 à 23:59:53   

mondialisation .ca publie :

Ce que fut la colonisation: Les jours de mai funeste de l'Algérie


par Chems Eddine Chitour



Mondialisation.ca, Le 11 mai 2012





«On a tué, massacré, violé, pillé tout à l'aise dans un pays sans défense, l'histoire de cette frénésie de meurtres et de rapines ne sera jamais connue, les Européens ayant trop de motifs pour faire le silence (...). Rien n'est plus contraire aux intérêts français que cette politique de barbarie.» Jean Jaurès citant Clémenceau (Chambre des députés, 27 mars 1908)

Dans cette deuxième partie de notre récit sur ce que fut la colonisation, nous allons revenir rapidement sur la situation qui prévalait à la veille de l'invasion coloniale. Après la chute de Grenade en 1492, les puissances ibériques (Espagne et Portugal), se renforcent économiquement et militairement. Les Espagnols s'emparent de plusieurs ports du littoral algérien et obligent les villes de Ténès, Mostaganem et Cherchell de payer tribut, Alger livra l'île qui contrôlait sont port. Alger ou El-Djazaïr était un petit port peuplé d'environ 20.000 habitants, sa population s'est accrue fortement avec l'arrivée des Juifs et des Maures expulsés d'Andalousie après la chute de Grenade. Après avoir achevé la Reconquista en 1492 avec la chute du dernier bastion en possession musulmane: l'Émirat de Grenade, le cardinal Ximenès, inquisiteur de la Cour d'Espagne porte la Croisade au coeur des petits États barbaresques. Les Espagnols annexent plusieurs villes côtières: Mers El Kébir en 1505, Oran en 1509 et Bougie (Béjaïa) en 1510.

S'il est vrai que l'Algérie a été occupée sous la période ottomane, il faut cependant rendre justice à Khier Eddine Barberousse qui a sauvé l'Algérie d'une christianisation forcée comme ce fut le cas des Incas et des Aztèques. Pizzaro a fait ses premières armes sur les côtes algériennes.. De plus, Khier Eddine fut le premier à délimiter les frontières de l'Algérie actuelle, notamment à l'est la province de Tabarka payait tribut et faisait allégeance à la Régence d'Alger qui eut souvent à rentrer en guerre avec la Régence de Tunis. Et on apprend que cette dernière a pendant plus d'un siècle «envoyé l'huile à la Mosquée d'Alger afin que la lumière ne s'éteigne jamais» .

A l'ouest, Khier Eddine suivit la division romaine entre la Maurétanie césarienne et la Maurétanie tingitane par le fleuve Moulaya «Flumen Malva Dirimit Maurétanias duas» , le fleuve Moulaya divise les deux Maurétanies. Il a fallu attendre le traité de Lalla Maghnia en 1845, pour que la France rectifie la frontière au profit du royaume du Maroc, le prix de la félonie étant de déclarer la guerre à l'Emir Abdelkader. Khayr ad-Din repousse les attaques espagnoles sur les différentes villes. C'est l'acte de naissance de la Régence d'Alger. La ville d'Alger devient un grand port de guerre qui gagne au fil des expéditions étrangères la réputation de «bien gardée» (en arabe). La domination de la mer lui permet de repousser plusieurs attaques provenant d'un certain nombre de pays européens, à commencer par celle menée par Charles Quint en octobre 1541.

Par ailleurs, l'Algérie imposait aux différentes flottes pénétrant en mer Méditerranée un impôt, avec protection contre toutes attaques de pirates ou de pays tiers.
La liste des pays ayant souscrit à cet impôt: Royaume-Uni: 267.500 francs, France: 200.000 francs, États-Unis: 125 000 dollars par mois.

En 1536, l'amiral français Bertrand d'Ornesan unit ses douze galères françaises à une petite flotte ottomane appartenant à Barberousse à Alger, faite d'une galère ottomane et de 6 galiotes, et attaque l'île d'Ibiza, dans les Baléares. Après le siège de Nice, François Ier propose aux Ottomans de passer l'hiver à Toulon. La cathédrale de Toulon servit aussi de mosquée. Bien plus tard, le 18 octobre 1681, le Dey d'Alger déclare officiellement la guerre à Louis XIV.
En 1682-1683, l'amiral français Abraham Duquesne commande par deux fois le bombardement d'Alger, et força le Dey à restituer tous les esclaves chrétiens. La paix fit ensuite conclue avec le Royaume de Louis XIV. Elle devait durer plus d'un siècle.

Suite à l'indépendance des États-Unis en 1776 que la Régence d’Alger fut la première à reconnaître – Condelezza Rice secrétaire d’Etat des Etats-Unis à remis, il y a quelques années à notre ambassadeur aux Etats-Unis, une copie de la lettre de reconnaissance des Etats-Unis par la Régence d’Alger- , le Sénat américain décide de proposer un «traité de paix et d'amitié avec les États de Barbarie» dont un avenant sera paraphé le 5 septembre 1795 à Alger puis de nouveau le 3 janvier 1797. Un traité similaire sera signé avec le Bey de Tunis. Le traité est ratifié et paru dans le Philadelphia Gazette le 17 juin 1797. L'article 11 de ce traité indique que: «Considérant que le gouvernement des États-Unis n'est en aucun sens fondé sur la religion chrétienne, qu'il n'a aucun caractère hostile aux lois, à la religion ou à la tranquillité des musulmans et que lesdits États-Unis n'ont jamais participé à aucune guerre ni à aucun acte d'hostilité contre quelque nation mahométane que ce soit, les contractants déclarent qu'aucun prétexte relevant d'opinions religieuses ne devra jamais causer une rupture de l'harmonie régnant entre les deux nations» . Il a été rédigé par John Barlows, consul général des États-Unis à Alger.

Cependant, La Régence fut constamment attaquée, notamment après le congrès de Vienne, où l'Europe se mit d'accord pour réduire la Régence, l'expédition américaine de 1815 et celle que conduisent les Marines britannique et hollandaise sur Alger en août 1816, ces dernières subirent de grandes pertes et sont empêchées d'accoster sur Alger.
L'Affaire de l'éventail entre le pacha turc Hussein Dey et le consul français Pierre Deval, le 30 avril 1827, est le casus belli de la guerre déclarée par le Royaume de France à la Régence d'Alger, qui déclenche le blocus maritime d'Alger par la marine royale française.

En 1827, donc, le Dey n'était pas encore remboursé du million qu'il avait prêté à la France, sans intérêts, trente et un ans auparavant! Bien plus, du fait des dettes de Bacri, le Dey risquait fort de ne jamais toucher un sou. Ainsi, sous couleur de satisfaire ses réclamations, on avait «rendu légale sa spoliation» . Le Dey d'Alger était ainsi «magnifiquement» récompensé de l'ardeur qu'il avait mise à faciliter le ravitaillement de la France affamée par l'Angleterre. (1)

L’invasion : La fin d’un monde

Le 14 juin 1830, le général de Bourmont débarqua sur le sol algérien à Sidi Fredj. L'armée coloniale livra les 19 et 24 juin les deux batailles de Staoueli. L'état-major français bénéficie d'un plan de débarquement, Reconnaissance des forts et batteries d'Alger, dressé par l'espion Boutin envoyé par Napoléon en 1808. Après des combats difficiles, le Dey n'eut plus qu'à faire sauter le fort l'Empereur à l'explosif. Dans l'acte de reddition signé par de Bourmont il est dit que l’armée ne s’ingérera pas dans les choses de la religion et sauvegardera les lois et coutumes des vaincus.

Pourtant, le 7 juillet, ordre est donné d'évacuer la Casbah. Ce sera la première violation du Traité de capitulation conclu deux jours auparavant seulement. La pièce d'artillerie - Baba Merzoug pour les Algériens - la «Consulaire» pour les envahisseurs, est expédiée à Brest le 27 juillet 1833. C'est ce canon qu'une association souhaite récupérer sous l'indifférence apparente des autorités.

La conquête jamais achevée sera âpre, rude et violente, longue de plus d'un siècle, au cours duquel émergeront le Bon, la Brute et le Truand: des généraux partisans de l'ethnocide des théoriciens de la colonisation, défenseurs de l'expropriation des indigènes, et des missionnaires qui n'avaient de cesse de faire retrouver à l'Algérien son substrat originel chrétien après avoir enlevé la gangue musulmane. Car le cardinal Lavigerie recommandait de christianiser les Algériens ou de les refouler loin dans le désert...

Au nom de la France, et au nom de la religion, imaginons une armée qui s'installe par le droit du plus fort, qui tue, viole, pille, ruine de paisibles citoyens pour la rapine mais aussi, et rapidement pour installer des colons qui avaient tous, à des degrés divers, une vie ratée derrière eux.
Ces colons par la force des Bugeaud, et autres sinistres Rovigo, devinrent des maîtres, les agioteurs se mirent de la partie et on détruisit à qui mieux mieux un Alger qui a mis des siècles à sédimenter pour mettre à sa place la civilisation.
Des cimetières furent profanés, notamment ceux des Deys et les os furent éparpillés sans respect pour les morts, nous dit l'archiviste Albert Devoulx.
Nous allons dans ce qui suit, citer quelques sinistres personnages dont les noms continuent encore - nostalgie oblige -à être ânonnés par des Algériens
Deux mois après l'invasion et au mépris des promesses de De Bourmont, le général Clauzel, qui symbolisera pour les Algériens la spoliation légale et la malhonnêteté, violera l'engagement. Il inaugure la politique de privation et de confiscation des biens habous qui permettront à de nombreux officiers de s'emparer de terres algériennes.
C'est le début de la colonie de peuplement.
Les bourreaux sans honneur qui ont martyrisé les Algériens Bugeaud, Clauzel, Rovigo, Saint Arnaud…
Des stocks d'or et de bijoux constituant le trésor de La Casbah furent pillés par des intendants généraux sans être inquiétés malgré la dénonciation d'officiers français comme Berthezene: «On est venu que pour piller les fortunes publiques et particulières, on m'a proposé de faire ou de laisser faire, de laisser voler les habitants parce que c'est autant d'argent importé en France; enfin, d'obliger les habitants à déserter le pays pour s'approprier leurs maisons et leurs biens.» L'imagination déchaînée et bestiale des premières décennies de la conquête sera «très riche» .
On payera des spahis à 10 francs la paire d'oreilles d'un indigène, preuve qu'ils avaient bien combattu. «Un plein baril d'oreilles récoltées paire à paire, sur des prisonniers, amis ou ennemis» a été rapporté d'une expédition dans le Sud par le général Yusuf.

Les enfumades et massacres des mois de mai 1845 et 1945



Enfumades de 1845 : découverte des ossements d’algériens asphyxiés par le colonel français Pélissier
Source : http://www.jijel-echo.com/Enfumades-des-grottes-de-la-Dahra.html


A partir de 1832, une nouvelle ère de la colonisation commence. C'est la guerre d'extermination par enfumades et emmurements, l'épopée des razzias par la destruction de l'économie vitale, la punition collective et la torture systématique.
En avril 1832, la tribu des Ouffia, près d'El Harrach, fut massacrée jusqu'à son extermination. Le butin de cette démonstration de la cruauté coloniale que le Duc de Rovigo a laissé commettre, fut vendu au marché de Bab Azzoun où l'on voyait «des bracelets encore attachés au poignet coupé et des boucles d'oreilles sanglantes» , comme en témoigne Hamdane Khodja.
La guerre de Bugeaud –Le sobriquet « bouchou » terrorisa des générations d’enfants - fut une guerre d'épouvante, c'est le premier usage, connu, de la guerre non conventionnelle pratiqué par une armée régulière sur le territoire algérien.
« Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac aux Sbéhas! Enfumez-les à outrance comme des renards.» s’exclame Bugeau.
Justement, le 11 juin 1844, Canrobert évoque ce fait d’armes, auquel il a personnellement participé, un an auparavant. «J'étais avec mon bataillon dans une colonne commandée par Cavaignac. Les Sbéahs venaient d'assassiner des colons et des caïds nommés par les Français; nous allions les châtier. Dans la falaise est une excavation profonde formant grotte. Les Arabes y sont, et, cachés derrière les rochers de l'entrée, [...] À ce moment, comme nous nous sommes fort rapprochés, nous commençons à parlementer. On promet la vie sauve aux Arabes s'ils sortent. (..) On pétarda l'entrée de la grotte et on y accumula des fagots, des broussailles. Le soir, le feu fut allumé. Le lendemain, quelques Sbéahs se présentaient à l'entrée de la grotte demandant l'aman à nos postes avancés. Leurs compagnons, les femmes et les enfants étaient morts. Telle fut la première affaire des grottes".

En 1845, un siècle avant les massacres du 8 mai 1945 et son lot de plusieurs milliers de victimes, le général Cavaignac avait inauguré l'ancêtre de la «chambre à gaz» que le colonel Pellisier utilisera pour mater l'insurrection des Ouled Riah dans le Dahra.
Ainsi, les villageois de cette bourgade s'étaient réfugiés dans des grottes des montagnes avoisinantes pour échapper à la furie des soldats. Ils furent enfumés par «des fagots de broussailles» placés à l'entrée-sortie des grottes. Le soir, le feu fut allumé. Le lendemain, au moins 500 victimes furent dénombrées. Les insurgés avaient pourtant «offert de se rendre et de payer rançon contre la vie sauve» , ce que le colonel refusa.
Un soldat écrit: «Les grottes sont immenses; on a compté 760 cadavres; une soixantaine d'individus seulement sont sortis, aux trois quarts morts; quarante n'ont pu survivre; dix sont à l'ambulance, dangereusement malades; les dix derniers, qui peuvent se traîner encore, ont été mis en liberté pour retourner dans leurs tribus; ils n'ont plus qu'à pleurer sur des ruines.»

Après ce massacre, Pélissier fait mine de consciences inquiètes: «La peau d'un seul de mes tambours avait plus de prix que la vie de tous ces misérables.»

Saint-Arnaud fera mieux que Cavaignac et Pélissier.
Le 8 août 1845, il découvre 500 Algériens qui s'abritent dans une grotte entre Ténès et Mostaganem (Aïn-Meran). Ils refusent de se rendre. Saint-Arnaud dont Victor Hugo a dit qu'il avait les états de service d'un chacal, ordonne à ses soldats de les emmurer vivants. «Je fais boucher hermétiquement toutes les issues et je fais un vaste cimetière. La terre couvrira à jamais les cadavres de ces fanatiques. Personne n'est descendu dans les cavernes. Personne que moi ne sait qu'il y a dessous 500 brigands qui n'égorgeront plus les Français.»

La politique de terre brûlée devait amener une vingtaine d'années plus tard les famines qui ont vu la mort de centaines de milliers d'Algériens, au point qu'il a fallu 50 ans pour que la population algérienne retrouve le chiffre de 3 millions d'habitants qu'elle avait en 1830.

Bien plus tard les crimes de masse de mai 1945 sont une autre tâche sur la conscience de la France: comme exemple de violence absurde, certains militaires, juchés sur des toits de wagons de chemin de fer, arrosaient à la 12.7 tous ceux qui passaient à leur portée.
Ce furent d'ailleurs parfois des troupes coloniales africaines qu'on utilisa pour accomplir la sinistre besogne.

Il n'y a jamais eu aucun acte de repentance pour les massacres perpétrés le 8 mai 1945 non seulement à Sétif mais aussi à Guelma et à Kherrata... Le général Duval le «boucher du Constantinois": «Je vous ai donné la paix pour 10 ans, si la France ne fait rien, tout recommencera en pire et probablement de façon irrémédiable.»

En définitive, après l'invasion, l'armée n'a pas tenu parole, le peuple fut humilié, déstructuré, dépossédé de sa terre (60% des bonnes terres étaient détenues par 10.000 colons qui est un apartheid avant celui des colons de l'Afrique du Sud.
De plus, l'administration coloniale mit la main sur les fondations pieuses (Habous) qui entretenaient les mosquées et les zaouïas, ce qui tarit du même coup la source de financement de l'enseignement qui, pour Venture de Paradis, était développé dans l'Alger d'avant la conquête.
Au total, en 1863, sur les 173 mosquées d'Alger, il restait à peine une douzaine, toutes les autres furent démolies ou aliénées, certaines furent converties en écuries... Ces quelques phrases, extraites du rapport parlementaire de la commission dirigée par Alexis de Tocqueville en 1847, témoignent de la violence du choc civilisationnel: «Autour de nous, les lumières de la connaissance se sont éteintes... C'est dire que nous avons rendu ce peuple beaucoup plus misérable et beaucoup plus barbare qu'avant de nous connaître.» Voilà un échantillon de l'oeuvre positive de la France.


Professeur Chems Eddine Chitour
Ecole Polytechnique Alger enp-edu.dz

1. G. Esquier: La prise d'Alger 1830. Paris & Alger, E. Champion & l'Afrique latine, 1923

Chems Eddine Chitour est un collaborateur régulier de Mondialisation.ca. Articles de Chems Eddine Chitour publiés par Mondialisation.ca
Xuan
   Posté le 16-07-2012 à 14:05:15   

A l'occasion du 50e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie :
La Marseillaise des requins de Gaston Couté
gorki
   Posté le 17-07-2012 à 09:45:21   

Juste je ne pouvais pas laisser passer cet article sans réagir, ou par une simple citation sans aucune forme de rigueur intellectuel il est fait passé Friedrich Engels pour un fervent partisan de la colonisation de l’Algérie : ci-dessous deux extraits d’un long article que Friedrich Engels a consacré à la colonisation de l'Algérie par la France, article paru et le 17 septembre 1857 dans le New American Cyclopedia.

« Depuis la première occupation de l’Algérie par les français et jusqu’à présent, ce pays malheureux a été l’arène d’incessantes effusions de sang, de rapines et de violences. Chaque ville, grande et petite, a été conquise successivement, au prix d’immenses sacrifices. Les tribus Arabes et Kabyles qui apprécient l’indépendance par-dessus tout et pour qui la haine de la domination étrangère est un principe plus chère que la vie elle-même ont été écrasées par de terribles razzias au cours desquelles leurs habitations et leurs biens ont été brûlés et démolis, les récoltes détruites sur pieds et le malheureux survivants massacrés ou livrés à toutes les horreurs de la débauche et de la brutalité. Les français persistaient à employer ces méthodes de guerres barbares au mépris de normes de l’humanité de la civilisation et de la chrétienté. A titre de justification, on alléguait que les Kabyles sont féroces et enclins au meurtre, qu’ils torturent leurs prisonnier et qu’a l’égard des sauvages l’indulgence et une erreur … les Bulletins et les journaux français abondent en affirmations concernant la paix et la prospérité de L’Algérie. Ce n’est, cependant, qu’un tribut à la vanité nationale »… etc.

Maintenant il ne faut jamais perdre de vue que Marx et Engels observant le mouvement de l’histoire résonnaient en matérialiste Ainsi dans une lettre a Friedrich Engels Marx écrivait… a propos de l’inde et de sa colonisation par l’Angleterre :

« Nous ne pouvons nier, que la société bourgeoise a vu, pour la seconde fois son XVIe siècle ; mais nous espérons que ce nouveau XVIe sonnera l’enterrement de cette société tout comme l’autre avait sonné sa naissance. La véritable mission de la société bourgeoise, c’est de créer le marché mondial, du moins dans ses grandes lignes, ainsi qu’une production conditionnée par le marché mondiale. * Comme le monde est rond cette mission semble achevée depuis la colonisation de la Californie et de l’Australie et de l’ouverture du Japon et de la chine. Pour nous la question difficile est celle –ci : sur le continent la révolution est imminente et prendra tout de suite un caractère socialiste ; mais ne sera-t-elle forcément étouffée par ce petit coin, puisque, sur un terrain beaucoup plus grand, le mouvement de la société bourgeoise est encore ascensionnel ?...

Ceci dit au passage, ce propos parmi tant d’autre damne le pion de ceux qui prétendent Marx Engels ne pas avoir intellectuellement anticipés les dimensions économiques politiques impérialistes de la société bourgeoise moderne

Marx à Friedrich Engels le 14 janvier 1858

* Souligné par moi Gorki
Xuan
   Posté le 21-11-2012 à 11:55:58   

Une belle chanson composée par Farid Ali pendant la guerre de libération «ayemma a3zizen ouretsrou» et sous titrée.
Xuan
   Posté le 08-05-2013 à 15:30:25   

Sur le blog de J. Toutaux :

8 MAI 1945 EN ALGERIE : REPRESSION SANGLANTE PAR L'ARMEE COLONIALE FRANCAISE A SETIF, GUELMA ET KHERRATA


Les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata sont des répressions sanglantes d'émeutes nationalistes qui sont survenues en mai 1945 dans le département de Constantine, en Algérie française.
Les répressions sanglantes des massacres de Sétif, Guelma et Kherrata,débutent le 8 mai 1945.

Pour fêter la fin des hostilités de la Seconde Guerre mondiale et la victoire des Alliés sur les forces de l'Axe, un défilé fut organisé. Les partis nationalistes algériens, profitant de l'audience particulière donnée à cette journée, décident par des manifestations dans un premier temps pacifiques de rappeler leurs revendications patriotiques. Mais à Sétif un policier tire sur un jeune scout musulman tenant un drapeau de l'Algérie et le tue, ce qui déclenche une émeute meurtrière des manifestants, avant que l'armée n'intervienne.

Il y aura parmi les Européens plus d'une centaine de morts et autant de blessés. Le nombre des victimes autochtones, difficile à établir, est encore sujet à débat aujourd'hui .

Les autorités françaises de l'époque fixèrent le nombre de tués à 1 165. Un rapport des services secrets américains à Alger en 1945 notait 17 000 morts et 20 000 blessés. Le gouvernement algérien avance le nombre de 45 000 morts. Suivant les historiens, le nombre varie de 8 000 (Charles-Robert Ageron, Charles-André Julien) à 15 000 victimes. Pour Antoine Benmebarek, l'administrateur chargé de la région de Sétif lors du massacre, il s'élèverait à 2 500 morts.

À Sétif, la manifestation séparée des manifestations officielles, est autorisée à condition qu'elle n'ait pas un caractère politique : aucune bannière ou autre symbole revendicatif, aucun drapeau autre que celui de la France ne pouvait être déployé. Les slogans anti français ne doivaient pas être scandés. Aucune arme, ni bâtons, ni couteaux ne sont admis.

Cette manifestation commence à envahir les rues dès 8 heures, estimée à plus de 10 000 personnes, chantant l’hymne nationaliste Min Djibalina (De nos montagnes), défile avec des drapeaux des pays alliés vainqueurs et des pancartes « Libérez Messali », « Nous voulons être vos égaux » ou « À bas le colonialisme ». Mais vers 8 h 45 surgissent des pancartes « Vive l'Algérie libre et indépendante » avec en tête de la manifestation Aïssa Cheraga, chef d'une patrouille de scouts musulmans, arbore le drapeau algérien.

Tout dérape alors, devant le café de France, avenue Georges Clemenceau, le commissaire Olivieri tente de s’emparer du drapeau, mais il est jeté à terre. Selon un témoignage, des européens en marge de la manifestation assistant à la scène se précipitent dans la foule. Les porteurs de banderoles et du drapeau refusent de céder aux injonctions des policiers. C'est alors que des tirs sont échangés entre policiers et manifestants. Dans la foulée un jeune homme de 26 ans, Bouzid Saâl, s'empare du drapeau algérien mais il est abattu par un policier s'en suivent immédiatement, des tirs provenant de policiers provoquant la panique générale . Les manifestants en colère s'en prennent aux Français, au cri de "n'katlou ennessara"(Nous tons les français), et font en quelques heures 28 morts chez les européens, dont le maire qui a cherché à s'interposer, et 48 blessés. Il y aurait de 20 à 40 morts chez les indigènes, et de 40 à 80 blessés

Le mouvement s'étend très rapidement, d'abord dans la région montagneuse de petite Kabylie, dans les petits villages entre Bougie et Djidjelli où des fermes européennes isolées et des maisons forestières sont attaquées et leurs occupants assassinés.et, le soir même à Guelma, une manifestation s'ébranle. Le sous-préfet Achiary, un ancien résistant, fait tirer sur les manifestants. On relèvera un mort et six blessés parmi les manifestants, 5 blessés dans le service d'ordre. Le cortège se disperse. Le sous-préfet dispose de trois compagnies de tirailleurs en formation, tous musulmans. Il consigne la troupe et fait mettre les armes sous clés. Un bataillon d'infanterie de Sidi-Bel-Abbès, convoyé par des avions prêtés par les américains, arrive le 9 dans la journée pour évacuer des petits villages d'« européens » qui sont encerclés par les émeutiers.

La répression prend fin officiellement le 22 mai. L’armée organise des cérémonies de soumission où tous les hommes doivent se prosterner devant le drapeau français et répéter en chœur : « Nous sommes des chiens et Ferhat Abbas est un chien ».

Des officiers exigent la soumission publique des derniers insurgés sur la plage des Falaises, non loin de Kherrata. Certains, après ces cérémonies, sont embarqués et assassinés. Pendant de longs mois, les Algériens musulmans qui, dans les campagnes, se déplaçaient le long des routes continuèrent à fuir pour se mettre à l'abri, au bruit de chaque voiture.

Dans son témoignage l'historien algérien Boucif Mekhaled, raconte : À Kef-El-Boumba, j’ai vu des Français faire descendre d’un camion cinq personnes les mains ligotées, les mettre sur la route, les arroser d’essence avant de les brûler vivants.


http://www.facebook.com/zahiabenabid

PLusieurs articles suivent : lien
marquetalia
   Posté le 10-08-2014 à 00:19:25   

http://www.socialgerie.net/spip.php?page=forum&id_article=1427
marquetalia
   Posté le 07-09-2014 à 18:21:03   

http://etudescoloniales.canalblog.com/archives/2006/05/10/2311101.html
Xuan
   Posté le 08-05-2015 à 23:07:27   

Sur le site de Drapeau Rouge :

8 mai 1945 : victoire contre le nazisme et massacre du peuple algérien


Le 8 mai 1945, le général Keitel signait la reddition totale et sans condition de l'Allemagne nazie.

Le jour même, le matin du 8 mai à Sétif, alors que l'Algérie était encore une colonie française, des Algériens se rassemblaient autour de la mosquée, des gens affluaient de toute part. Ceux des douars se rassemblaient à l'entrée de la ville. La manifestation prévue était pacifique. Sept à huit mille Algériens défilaient, précédés par les scouts de la ville, drapeau algérien en tête et banderoles déployées avec les inscriptions : « Pour la libération des peuples» ; « Vive l'Algérie libre et indépendante ». Malgré l'interdiction de banderoles politiques, le cortège se mit en route. Le sous-préfet donna l'ordre d'enlever les banderoles. La police se mit à tirer, pendant que des européens voulaient empêcher le défilé. Des coups de feu sont échangés. La juste colère des algériens éclate, la gendarmerie intervient. A onze heures, le calme est revenu. La nouvelle du massacre se répand.

A Guelma, peu d'Algériens assistent aux cérémonies officielles. Une manifestation est organisée avec des pancartes : « Vive la démocratie », « A bas l'impérialisme », «Vive l'Algérie indépendante». La police tire sur la foule et disperse les manifestants. Le 9 mai, Guelma est assiégée par des groupes armés des douars voisins venus venger leurs morts. D'autres défilés ont lieu à Batna, Biskra, Khenchela, Blida, Bel-Abbès, Saïda où la mairie fut incendiée. A Bône et à Djidjelli, des milliers de manifestants se joignirent aux manifestations officielles de la victoire contre le nazisme et sortirent leurs banderoles. A Alger, les fidèles ne se joignirent pas à la manifestation officielle de la Grande Mosquée.

En 1830, le débarquement des militaires français ouvrait la voie à la colonisation de l'Algérie qui commença dès 1836 dans la plaine de la Mitidja jusqu'en 1847, malgré la résistance héroïque d'Abd-el-Kader. Les colons rachetaient à vil prix les terres ou confisquaient celles des domaines des propriétaires fonciers algériens et turcs. Ils établirent ainsi d'immenses propriétés foncières. En 1844, Bugeaud organise l'administration. Dès 1848, l'Algérie est divisée en 3 départements. En 1870, le décret Crémieux accorde la citoyenneté française aux 32 000 juifs d'Algérie, puis en 1889 à tous les enfants d'origine européennes nés en Algérie, pour renforcer la colonisation. Les Algériens musulmans, eux, sont régis par le code de l'indigénat (1881) et sont considérés comme des sujets et non des citoyens. Le pouvoir économique est représenté par l'assemblée des délégations financières des colons, des non-colons et des indigènes musulmans qui n'ont que 21 représentants sur 69 membres.

En Algérie, la colonisation a été une colonisation de peuplement. Les Algériens ont été spoliés, exploités par les colons, étaient considérés comme des citoyens de seconde zone, et massacrés alors qu'ils avaient participé à la première guerre mondiale. Les algériens ont remplacé en métropole le million de morts de la guerre dans les usines, sur les chantiers pour relever l'économie française. La révolution d'Octobre a affirmé le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et a accordé un soutien au mouvement de libération naissant qui a commencé à revendiquer l'égalité pour les musulmans en Algérie. Le refus de l’État français et des colons d'accéder à ces revendications légitimes a renforcé le sentiment national algérien. Durant la seconde guerre mondiale, les Algériens musulmans ont contribué à la libération de la France. Aussi était-il d'autant plus légitime de faire valoir leur droit à disposer d'eux-mêmes, leur droit à l'indépendance.

Les fusillades et massacres du 8 mai 1945 étaient la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. La lutte pour l'indépendance nationale avait dès lors franchi une étape supérieure. L'agitation se développa dans les campagnes. Les événements de Sétif et de Guelma furent considérés comme le signal de la guerre de libération nationale, les attaques contre des bâtiments officiels se sont multipliées.

La répression coloniale se déchaîna : à Sétif, à Guelma, la police, la gendarmerie, tirèrent sur la foule. Des européens organisèrent des milices et entreprirent la « chasse à l'arabe ». A Guelma le sous-préfet créa une milice approuvée par les présidents des Anciens Combattants, de la «France combattante et du secrétaire de l'Union locale des Syndicats».

L'armée organisa la « guerre » contre les mechtas qui subirent de jour et de nuit des attaques sanglantes. C'était une nouvelle guerre coloniale que la France et son armée engageait contre le peuple algérien ; la marine et l'aviation furent autorisées à mitrailler les douars par le gouvernement provisoire de la France.

Non seulement massacrés par l'armée française et les civils européens, le peuple algérien, ses masses populaires et son avant-garde nationale, furent condamnés politiquement par les partis de gauche représentés dans le gouvernement provisoire et qui se réclamaient de la résistance contre l'occupant nazi et le gouvernement de Pétain. Pour les socialistes on « avait sali la grande heure de la victoire des démocraties ». Le Parti Communiste dénonça dans l'Humanité la collusion des « pseudo-nationalistes et des éléments hitlériens connus » et « Il faut tout de suite châtier impitoyablement et rapidement les organisateurs de la révolte et les hommes de main qui ont dirigés l'émeute » et encore « Ceux qui réclament l'indépendance de l'Algérie sont des agents conscients ou inconscients d'un autre impérialisme. Nous ne voulons pas changer notre cheval borgne pour un aveugle. » Certes il y eut par la suite condamnation des excès de la répression, la réclamation d'une « justice et rien que la justice », puis plus tard celle de l'amnistie. Mais la condamnation politique restait.

La terreur contre le peuple algérien permit au colonialisme de se maintenir jusqu'en 1962. Mais la volonté de se libérer n'était pas morte et après neuf années de préparation, la lutte de libération nationale allait reprendre en novembre 1954 et aboutir 8 ans plus tard à l'indépendance du peuple algérien.

Il y eu près de 50 000 algériens massacrés, exécutions massives de populations, d'otages, de suspects sans jugement, la torture fut pratiquée à grande échelle et le viol fut utilisé comme arme de guerre. Les exactions de l'Etat français en Algérie constituent un « crime contre l'humanité ».

Aujourd'hui, à Béziers notamment, Robert Ménard, maire affilié au Front National, s'attaque à la mémoire de la lutte de libération nationale menée par le peuple algérien. Il a osé débaptiser la « rue du 19 mars 1962 » (date des accords d'Evian traduits par un cessez-le-feu immédiat) pour la renommer au nom de Hélie Denoix de Saint-Marc, résistant et partisan de « l'Algérie française » ayant participé au putsch des généraux.

Face aux nostalgiques de « l'Algérie française », nous réaffirmons le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et notre combat contre l'impérialisme !

Nous soutenons également la lutte qui s'organise pour que l'Etat français reconnaisse officiellement le « crime contre l'humanité » qu'il a commis en Algérie et pour qu'une stèle en mémoire aux victimes algérienne soit érigée à Paris.

Hommage aux martyrs de la lutte de libération nationale algérienne !
Pour le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes !
A bas l'impérialisme !
Prolétaires et peuples opprimés de tous les pays, unissons-nous !
marquetalia
   Posté le 09-05-2015 à 13:15:16   

le PCOF se joint à la revendication pour la reconnaissance des massacres coloniaux de Sétif et Guelma http://www.pcof.net/actualites.php?id=444
marquetalia
   Posté le 09-05-2015 à 13:25:37   

Xuan a écrit :

Ce n’est pas le but.

Evidemment la Turquie a commis un génocide en déportant et en massacrant de façon systématique le peuple arménien, en particulier à la faveur de la première guerre mondiale, d’une manière qui a inspiré le génocide des Juifs par les nazis.
D’ailleurs la complicité du pouvoir allemand dans le génocide des arméniens ne fait pas de doute non plus.

Or la Turquie a fait remarquer à Sarkozy que la France avait commis un génocide en Algérie et que le propre père de Sarkozy, légionnaire en Algérie, pouvait le lui confirmer.
En ce qui concerne le génocide en Algérie, j’ai repris sans le modifier le titre de cet article. Mais il n’est pas démontré qu’il s’agisse réellement en Algérie d’un génocide et non de massacres.
Le fait est que la notion de génocide est très souvent galvaudée afin de justifier une action en justice. Comme la CPI est dirigée par les pays impérialistes, l’accusation de génocide sert de prétexte pour mettre certains pays au banc des accusés.
Qu’ils se prennent en retour l’accusation de génocide leur va bien parce que les pays impérialistes occidentaux ont commis des massacres innombrables et qu’ils continuent.

D'autre part, il est évident que Sarkozy se contrefout des arméniens. Par contre cette opération lui rapporte des voix et retarde un peu l’entrée de la Turquie en Europe. A mon avis c’est le but visé parce que la Turquie est historiquement liée à l’Allemagne et que ça constituerait un bloc important un peu lourd à avaler.


donc,il y a toujours des rivalités en Europe entre les impérialismes francais et allemand;mais je vois mal l Allemagne soutenir une entrée de la Turquie dans l U.E,vu les tensions outre-rhin entre Allemands de souche et la deuxième génération de Turcs;Berlin n a t il pas livré des armes au PKK pour lutter contre Daech,soutenu de facto par Ankara en Syrie et de jure en Libye contre les troupes de Haftar-appuyé par le Caire-?
marquetalia
   Posté le 09-05-2015 à 13:28:54   

concernant les massacres de Sétif et Guelma,l inauguration d une plaque à Paris en leur hommage permettrait peut etre de marchander avec Alger le survol de son territoire par l aviation francaise pour intervenir en Libye Occidentale,controlée par les djihadistes-et où se cache Mokhtar Belmokhtar,le dirigeant de Al-Mourabitoune.