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Finimore
Léonid Pliouchtch est mort jeudi 4 juin 2015 près de Paris.

Voici plusieurs articles concernant Léonid Pliouchtch (ou Léonide Plioutch).
1- L’ex-dissident Léonid Pliouchtch est décédé en France (La Croix)
2- Léonide Pliouchtch, mathématicien et ex-dissident soviétique, est mort (Libération)
3- Un grand homme vient de nous quitter (La règle du jeu) –BHL-

Ces 3 articles sont intéressants et leur publication dans des journaux d’origine chrétienne, ex-gauchiste et néo-conservateur est assez révélateur. Ils donnent des infos sur les positions et motivations politiques de celui qui fut médiatisé en 75 notamment par les trotskistes lambertistes au sein du « Comité des mathématiciens » Laurent Schwartz, Michel Broué (historien de l’OCI puis du PCI dont il sera exclu en mai 1989) ou Jean-Jacques Marie (historien trotskiste-lambertiste) y jouant un rôle déterminant. C’est ce qu’avait montré Christophe Bourseiller dans son livre « Cet étrange Monsieur Blondel : enquête sur le syndicat Force ouvrière » -Bartillat 1997- pages 166 à 169.
Benjamin Stora (spécialiste de Messali Hadj) fut cadre politique de l’OCI-AJS et PCI qu’il quitte en 1985, donne des infos dans son autobiographie : « La dernière génération d’Octobre » -stock 2003- pages 144 à 148 (une chronologie détaillée de 1968 à 1986 est également présente dans son livre).
En 1977, L’étincelle (hebdo de l’OCT) n°6 –jeudi 20 janvier 1977- écrit dans un article : « URSS : Sur la défense des prisonniers politiques des pays de l’Est : Brisons le mur de notre silence » que « Face à Soljénitsyne, n’oublions pas que nombre « d’opposants » développent une critique de gauche fondée sur la démocratie prolétarienne et le pouvoir des conseils ouvriers (Pliouchtch). » (…) « attention trotskysme ? Hésiterons-nous maintenant à nous engager dans ce combat parce que les trotskystes en ont le monopole ?
L’AJS est une secte dont nous savons que l’esprit « démocratique » s’arrête aux portes de ses propres meetings. Néanmoins, force nous est de reconnaître que cette secte a joué un rôle non négligeable dans les défaites récentes des maîtres du Kremlin (la libération de Pliouchtch par exemple).
» –page 20-
(OCI –Organisation Communiste Internationaliste-, AJS –Alliance des Jeunes pour le Socialisme-, PCI –Parti Communiste Internationaliste-, OCT –Organisation Communiste des Travailleurs-)


1- L’ex-dissident Léonid Pliouchtch est décédé en France (La Croix)

L’ex-dissident et mathématicien soviétique Léonid Pliouchtch est mort jeudi 4 juin à 77 ans, près de Paris. Il vivait en France depuis son départ de l’URSS en 1976, à l’issue d’une grande campagne internationale pour exiger sa libération.

Militant des droits de l’homme, cet Ukrainien avait fait partie des scientifiques soviétiques ayant protesté contre l’intervention en Tchécoslovaquie en 1968. Il avait appartenu au premier groupe organisé de la dissidence, le « Groupe d’Initiative pour la défense des droits de l’Homme en URSS ». Il avait également œuvré à la diffusion de littérature interdite sous forme de « samizdat ».
Il avait été arrêté en 1972 à Kiev, en Ukraine, et aussitôt accusé d’« activités antisoviétiques ». Interné en hôpital psychiatrique à Dniepropetrovsk, il avait été traité à haute dose par des médicaments neuroleptiques, malgré le fait qu’il était sain d’esprit. (...)
Grâce à une campagne internationale conduite par Amnesty International, et à laquelle s’était associé le prix Nobel de la paix Andreï Sakharov, il avait finalement pu être libéré en 1975. Son nom était alors devenu mondialement connu. Puis il avait réussi à partir en France avec sa famille l’année suivante. Il avait choisi d’y rester, même après l’effondrement du régime soviétique et l’indépendance de l’Ukraine en 1991.
Galia Ackerman, éditrice et traductrice qui a bien connu Léonid Pliouchtch à ce moment-là, se souvient d’un homme « posé, ayant gardé sa bienveillance et son honnêteté intellectuelle, incapable de trahir ses principes, toujours le cœur ouvert et très dévoué à l’Ukraine ».
Vivant en région parisienne dans les années 1980, Léonid Pliouchtch s’était notamment engagé en faveur de l’aide aux boat-poeple vietnamiens fuyant le régime communiste. Il avait aussi écrit, sous le titre « A nous l’Europe », un plaidoyer en faveur de l’intégration européenne de l’Ukraine aux accents prémonitoires, puisqu’il annonçait le mouvement proeuropéen qui est devenu majoritaire aujourd’hui dans ce pays.

Alain Guillemoles

http://www.la-croix.com/Actualite/Monde/L-ex-dissident-Leonid-Pliouchtch-est-decede-en-France-2015-06-05-1320153


2- Léonide Pliouchtch, mathématicien et ex-dissident soviétique, est mort

(Libération : Hélène DESPIC-POPOVIC 4 juin 2015)

DISPARITION Interné en 1972 en asile psychiatrique pour «menées antisoviétiques», il est mort jeudi à Paris. Léonide Pliouchtch vivait en France depuis 1976.

Peu de gens se souviennent encore des ex-dissidents soviétiques et pourtant ils ont marqué leur temps. Léonide Pliouchtch, qui s’est éteint aujourd’hui à Paris à l’âge de 76 ans, est l’un de ceux-là. Ce mathématicien, né dans une famille ukrainienne exilée au Kirghizistan en 1939, devint le symbole de la répression de l’Union soviétique finissante de Léonide Brejnev. Arrêté en 1972, il fut condamné un an plus tard en son absence et sans avocat à être interné en… asile psychiatrique. L’homme était accusé de «menées antisoviétiques» et diffusion de «textes dactylographiés».
«La peur de devenir fou m'envahissait»

Rarement une affaire avait suscité un tel mouvement d’opinion. Dans le pays, sa cause fut défendue par le physicien nucléaire russe Andreï Sakharov, fait Prix Nobel de la Paix en 1975, et à l’étranger par les ONG des droits de l’homme comme Amnesty International, les associations de mathématiciens et les intellectuels engagés de divers pays, dont ceux de France. Ses conditions de vie dans l’hôpital psychiatrique Serbsky de Moscou qui le déclara psychotique et celui de Dniepropetrovsk en Ukraine, où il fut interné pendant trois ans, ont ému l’opinion. Il reçut de fortes doses de médicament au point d’être affecté de terribles douleurs. «Sous l’effet des neuroleptiques, je ne tardais pas à sombrer dans un état de surdité émotive et morale, je perdais la mémoire, balbutiais des propos incohérents. Je ne tenais qu’à grand renfort d’incantations: ne rien oublier de tout cela, ne pas capituler. La peur de devenir vraiment fou m’envahissait», écrit Pliouchtch quelques années plus tard dans ses mémoires publiées en français sous le titre Dans le carnaval de l’Histoire.

«Il vit au milieu d’aliénés violents, soumis à des doses massives de médicaments qui le menacent de mort à tout instant : c’est là une des formes les plus pernicieuses de répression dans le monde moderne, qui conduit des médecins à modifier, par des médicaments, peut-être pour toute sa vie, la personnalité d’un détenu», dénonce à l’époque dans Le Nouvel Observateur le mathématicien français de gauche Laurent Schwartz. Les défenseurs de Pliouchtch finissent par avoir gain de cause. L’intellectuel ukrainien est libéré et expulsé en 1976 vers la France, où il resta jusqu’à sa mort.

«Le désir aigu du droit à la vérité»

Il s’engagea alors dans la défense des persécutés. En 1977, il est nommé président pour l’étranger du groupe ukrainien Helsinki de Défense des droits de l’Homme et collabore à la rédaction ukrainienne de Radio Liberty.

Dans une interview à la russologue Hélène Blanc, accordée en 2010, il devait ainsi raconter son cheminement vers la dissidence :

«Ce qui a déclenché ma dissidence ?

Une lente libéralisation de la conscience face à la magie ou à l’hypnose du dressage total que subissait tout être humain. Bien que d’origine sociale modeste, ayant constaté la non-conformité du quotidien avec la propagande, j’acceptais docilement les explications fournies à l’école (menaces impérialistes, Juifs et autres ennemis de l’intérieur). La première brèche dans cette chape de plomb d’ignorance, fut le rapport Khrouchtchev dénonçant les crimes de Staline. En même temps que l’image de ce «dieu», s’effondra aussi celle du Parti. Dès lors, je n’ai eu que mépris à son égard.

En revanche, j’ai ressenti le désir aigu du droit à la vérité. La brutale répression de la Révolution hongroise m’a fait douter des informations de la presse écrite. Impossible de concilier la logique des sciences mathématiques et l’absurdité d’une société bâtie sur le mensonge et la corruption généralisés. Telle est d’ailleurs l’explication du nombre élevé de mathématiciens, de physiciens et de champions d’échecs devenus dissidents.

L’antisémitisme de l’État et du Parti m’ont fait réfléchir à l’idée nationale. Au début, j’ai été révolté par la déportation massive de certains peuples (Tchétchènes, Tatars de Crimée, etc.) Plus tard, cela m’a ouvert les yeux sur le nationalisme ukrainien. J’ai mis des années à l’assimiler car il était moins évident que le problème tchétchène ou tatar.

Ne voyant aucun moyen de lutter, je me suis replié sur ma vie professionnelle. J’ai compris alors qu’à l’époque il était impossible de ne pas mentir, impossible de travailler honnêtement dans ce pays. À l’Institut de Cybernétique, j’ai pris conscience que l’économie étatique courait à la catastrophe. En pratique, la vie dans les usines et les kolkhozes (exploitations agricoles collectives, NDA), le démontrait en permanence.

Voilà ce qui motiva ma protestation sociale: la situation des travailleurs et le krach économique. Car la raison première, ancrée au fond de moi, était mon refus éthique de l’esclavage. Désormais, je veux jouir du droit d’être une personne à part entière, d’user du droit à la libre pensée, à la libre parole, à un travail sensé. C’est fini, je refuse de mentir. Cette motivation «d’être une personne» a fédéré toutes les autres.

Cette prise de conscience du facteur humain a entraîné celle du facteur national. Mon Ukraine natale n’était qu’une colonie. L’Empire soviétique était l’ennemi de la liberté, de l’humanité, de toutes les nations, peuple russe y compris. Le samizdat domina peu à peu toutes les sphères de la vie et de la pensée. En m’y insinuant, je devins non seulement un lecteur de littérature interdite, mais aussi un diffuseur et un auteur. En tant que marxiste, j’ai tenté de résoudre les contradictions entre théorie et pratique en analysant, dans mes articles, la théorie marxiste, l’éthique, le problème nationaliste. Mes débats avec les proches du samizdat, qu’ils soient marxistes ou anti-marxistes, m’ont mené à la conclusion que nous vivions un capitalisme féodal employant des esclaves d’État…»

Hélène Despic-Popovic

http://www.liberation.fr/monde/2015/06/04/leonide-pliouchtch-mathematicien-et-ex-dissident-sovietique-est-mort_1323075


3- Un grand homme vient de nous quitter

(La Règle du Jeu -12 juin 2015) revue crée par Bernard Henri Lévy

"L'ukrainien Léonid Pliouchtch incarnait pour beaucoup d’entre nous en diaspora cette lueur qui a brisé le mur qui existait entre l’Ukraine et nous, à l’Ouest".
Je suis encore sous le coup de l’émotion et de la peine. Ce jeudi 4 juin, nous avons tous appris le décès de Léonid Pliouchtch. À la nouvelle de la mort de ce célèbre dissident ukrainien, j’ai vu défiler mentalement les images du meeting pour sa libération à Paris, d’abord à l’Ecole Nationale Supérieure de la rue d’Ulm, puis dans la salle de la Mutualité, à l’initiative du « Comité des Mathématiciens » présidé par Henri Cartan, Laurent Schwartz et Michel Broué. J’étais adolescent alors, et cela m’a marqué. A l’époque, deux associations ukrainiennes avaient pris contact avec ce comité, créé suite au poignant témoignage de Tania Jitnikova, l’épouse de Léonid Pliouchtch, qui dénonçait l’arbitraire dont son mari était victime : le « Cercle d’Etudes Franco-Ukrainien » et « Les Jeunes Amis de l’Ukraine ». Grâce à une intense campagne, Léonid Pliouchtch a finalement été libéré. Le moment de sa libération et son arrivée à Vienne en 1976 – le visage encore boursouflé par tous les « calmants » que les médecins criminels lui avaient injecté durant ses quatre ans de détention à l’institut Serbsky à Moscou puis à l’asile psychiatrique de Dniepropetrovsk – ont été des événements considérables. Le livre L’Affaire Pliouchtch, de Tania Mathon et Jean-Jacques Marie, paru aux éditions du Seuil, permet de bien comprendre le contexte dans lequel sa libération a été rendue possible.

Une autre image me revient à l’esprit : celle des réunions, en sa présence cette fois, à Paris, rue de la Glacière dans le treizième arrondissement, chez un ami ukrainien, de ceux qui se battaient alors pour la libération des détenus politiques en URSS et dans les pays du « bloc socialiste », mobilisation qui a mené ensuite à la création du Comité d’Appui aux Luttes des Peuples de l’Est et de l’URSS (CALPEU), regroupant diverses associations qui représentaient ces peuples.

En tant que membre de la diaspora ukrainienne, Léonid Pliouchtch incarnait pour moi la voix de l’Ukraine actuelle, avec toutes ses contradictions et ses complexités. Beaucoup, parmi cette diaspora, ont été surpris lorsque, au moment de sa libération, il a proclamé qu’il était marxiste et communiste, tout en affirmant aussi qu’il faisait partie d’un peuple qui aspirait à l’indépendance. C’est ce qui explique qu’à Paris, les associations et les partis français engagés dans la bataille pour sa libération se réclamaient dans leur grande majorité de la gauche et de l’extrême-gauche.

Deux de ses livres sont parus en français : Dans le Carnaval de l’Histoire, récit autobiographique publié aux éditions du Seuil, et Ukraine : À nous l’Europe !, aux éditions du Rocher, qui véhicule sa vision de l’Ukraine.

Mais qui était vraiment Léonid Pliouchtch ?

Il voit le jour en 1938 dans une famille d’ouvriers ukrainiens installée en Kirghizie et qui retourne en Ukraine après la guerre. Le jeune Léonid fait ses études de Mathématiques à l’Université de Kiev, où il obtient son diplôme en 1962. En 1968, il prend ses distances avec le régime soviétique en prenant fait et cause pour deux dissidents, Guinzbourg et Galanskov, dans une lettre à la Komsomolskaia Pravda. Avec seize autres dissidents, il signe ensuite une déclaration dénonçant l’invasion soviétique de la Tchécoslovaquie. Peu à peu, il entre en contact à Kiev avec des personnalités de la dissidence ukrainienne telles qu’Ivan Svylytchnyj, Ivan Dziouba, Evhen Sverstiuk. Ses prises de position et ses fréquentations attirent l’attention et provoquent la colère du régime soviétique, d’où son arrestation en 1972 et son internement à l’Institut Serbsky à Moscou, puis à l’asile psychiatrique de Dnipropetrovsk.

Une fois libéré, il élit résidence en France avec sa famille. Après avoir d’abord habité Nanterre, très affecté par le suicide de son fils ainé Dmytro, il se fixe, avec sa femme et son autre fils Alexandre, dans une petite ville du Sud-Ouest où il vivra jusqu’à la fin de ses jours.

Il s’engage dans divers comités et associations de droits de l’homme comme Amnesty International. Il fait partie de la rédaction de la revue ukrainienne Sutchasnist et devient également le représentant du groupe ukrainien pour l’application des Accords d’Helsinki dans la diaspora, avec deux autres dissidents : Petro Hryhorenko et Nadia Svytlytchna. Le Groupe Helsinki a été créé en 1976 en Ukraine sous la houlette de célèbres dissidents ukrainiens tels que Mykola Rudenko, Levko Loukianenko et Viatcheslav Tchornovyl qui, hélas, ont tous été arrêtés et condamnés par le pouvoir soviétique. La représentation du Groupe Helsinki a œuvré sans relâche jusqu’à l’écroulement de l’empire soviétique.

La dernière fois que j’ai vu Léonid Pliouchtch, c’était en 2008 à Kiev, à l’Université Mohyla, lors de la présentation de son livre Le Carnaval de l’Histoire, publié en ukrainien. Deux autres livres de lui ont paru en Ukraine aux éditions Krytyka : l’un sur Taras Chevtchenko et l’autre sur Mykola Khylovyj, deux grands écrivains ukrainiens – preuve, s’il en fallait, que Léonid Pliouchtch, pourtant issu d’une famille russophone (puisqu’il partage sa trajectoire avec celle de nombreux Ukrainiens qui ont été « russifiés »), était profondément attaché à la culture ukrainienne. Léonid Pliouchtch est devenu un fervent partisan de l’orientation de l’Ukraine vers l’Europe, comme le fut en son temps l’écrivain communiste ukrainien Mykola Khylovyj (qui se suicida en 1933 pour protester contre l’oppression stalinienne en Ukraine). C’est, a-t-il dit, en lisant le livre d’Ivan Dziouba Internationalisme ou russification qu’il a compris l’enjeu du problème ukrainien.

Cet homme, pour beaucoup d’entre nous en diaspora, fut cette lueur qui a brisé le mur qui existait entre l’Ukraine et nous à l’Ouest. Car il faut le reconnaître : une grande partie de la diaspora était tristement victime du manque d’information et de la désinformation, dus notamment au « rideau de fer ». A l’heure où l’Ukraine traverse des moments cruciaux pour son existence, souhaitons que la vie et l’œuvre de Léonid Pliouchtch soient pour nous tous un exemple aujourd’hui et dans l’avenir.

La rédaction

http://laregledujeu.org/2015/06/12/22423/un-grand-homme-vient-de-nous-quitter/


Edité le 11-08-2015 à 08:36:11 par Finimore


 
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