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![]() Un Journaliste Français arrêté dans le Donbass par des troupes pro-Ukrainiennes 22 août Iouri Iourtchenko, journaliste et citoyen français, a été arrêté le 19 août par des forces paramilitaires pro-ukrainiennes dans le Donbass, à proximité de la localité d’Ilovajsk. Comme son nom le laisse supposer, Iouri Iourtchenko, âgé de 59 ans, n’est pas français d’origine : né à Odessa (un port au sud de l’Ukraine), il vit à Paris depuis 1992, a la nationalité française, est écrivain, poète et journaliste indépendant. Il était dans la zone des combats depuis le 14 juin. Il a été arrêté par une formation paramilitaire pro-Kiev, le bataillon Donbass. Le français a été arrêté avec sept autres personnes alors que le petit groupe se rendait dans Ilovajsk, où les forces ukrainiennes avaient réussi à prendre position. Selon les insurgés, elles en ont été repoussées ce 21 août et la localité leur appartient de nouveau en entier. Très disputée ces derniers jours, la prise de cette petite ville située à 20 km au sud-est de Donetsk, la capitale des insurgés, aurait permis aux forces ukrainiennes de prendre appui sur un axe stratégique vital pour l’approvisionnement militaire et civil de cette grande ville, capitale de l’insurrection qui appelle Novorussie l’union des deux républiques populaires insurgées de Lugansk (LNR) et de Donetsk (DNR). L’arrestation du français a été confirmée par Anton Geraschchenko, un conseiller du ministre de l’Intérieur ukrainien, sur sa page Facebook, et reprise par la presse ukrainienne. Selon le conseiller, Iouri Iourtchenko qu’il a qualifié d’ une âme perdue, une espèce de barde ou de poète du terrorisme du Donbass » sera traduit en justice pour avoir participé à l’insurrection dans le Donbass, lorsque Ilovaisk sera repris entièrement par l’armée ukrainienne, ce qui n’est pas encore le cas. Engagé par la plume auprès des insurgés de Novorussie Iouri Iourtchenko avait en effet, selon les informations que nous avons pu recueillir, un positionnement ambigu. Parti dans le Donbass pour « crever le blocus médiatique autour de la lutte de la Novorussie » , il s’était effectivement engagé auprès des insurgés. Avec ses armes de prédilection : la plume et la voix. Il était apparu sur plusieurs médias proches des insurgés et des chaînes de télévision locale pour prêcher la bonne parole de l’insurrection. Il se rendait souvent sur les lieux où se déroulaient combats et bombardements. Nous avons pu joindre Gueorgui Morozov, adjoint du responsable du bureau des affaires étrangères au sein de la direction de l’Information rattachée au ministère de la Défense de la République populaire de Donetsk (DNR) : « Iouri Iourtchenko était accrédité comme journaliste auprès de la DNR ; par ailleurs il était aussi correspondant de guerre auprès du ministère de la Défense de la DNR » . A sa connaissance, il n’y a pas eu d’autre français enlevé récemment ou arrêté par les forces ukrainiennes ; en revanche celles-ci ont arrêté récemment un citoyen serbe et un citoye n slovaque. Il est sûr que ceux qui l’ont arrêté savaient ce qu’ils faisaient : « il est localement assez connu, ils ne pouvaient pas ne pas savoir qui il est » . Les responsables de Novorussie mobilisés pour obtenir sa libération Il nous a déclaré que « nous sommes sûrs que nous obtiendrons sa libération ; nous essayons d’organiser son échange contre des prisonniers de guerre ukrainiens » . Les insurgés ont une commission spéciale qui s’occupe de l’échange des prisonniers de guerre ; selon des sources proches de l’insurrection, ils détiendraient près de 1000 soldats ukrainiens. Georgui Morozov a refusé de confirmer cette information, mais précise que « nous avons des gradés, notamment des officiers supérieurs, ainsi que des aviateurs ukrainiens. Il y a aussi des prisonniers issus de formations paramilitaires comme le Donbass » . Pour l’heure, le Quai d’Orsay n’est pas en mesure de confirmer officiellement l’arrestation de Iouri Iourtchenko ; l’ambassade ukrainienne fait des vérifications auprès des autorités ukrainiennes. Pour Georgui Gerasimov, « les français doivent être au courant. Lorsque les ukrainiens arrêtent un citoyen étranger, ils préviennent son ambassade » . En revanche pour l’instant aucun responsable français n’a cherché à joindre les responsables de la DNR à ce sujet. Un risque « important » qu’il soit soumis à de mauvais traitements Selon Gueorgui Morozov, il y a un risque « important » que Iouri Iourtchenko soit soumis à de mauvais traitements, voire à la torture. « Il a été arrêté par une formation composée d’ex-taulards – le gouvernement ukrainien a amnistié tous ceux qui sont allés prendre les armes au Donbass – d’Ukrainiens engagés volontaires et, selon nos informations, de mercenaires, notamment polonais. L’insurrection de Novorussie a infligé d’importantes pertes à cette formation, qui a été complétée plusieurs fois à l’arrière. En plus ils viennent de se faire jeter d’Ilovaisk avec pertes et fracas ; d’autres formations ukrainiennes qui étaient là ont aussi eu des pertes importantes » , explique Georgui Morozov. Il continue son raisonnement : « ils sont fatigués, très énervés, et en plus ils ont faim ; de gros problèmes d’équipement et d’approvisionnement les touchent, comme le reste de l’armée ukrainienne d’ailleurs. Ces gens-là sont capables de tout » . Il y a deux semaines, les insurgés ont organisé un échange de prisonniers (morts et vifs) dans le secteur de Torez, au sud du territoire tenu par l’insurrection. Georgui Morozov se souvient : « nous, on leur a donné des prisonniers vivants et des corps de leurs soldats que nous avions recueilli ; eux n’ont donné que des corps, et ça se voyait que nos hommes étaient morts après avoir été faits prisonniers. Ils avaient été torturés et c’était horrible à voir . » Cependant, même si Iouri Iourtchenko échappe à la torture et soit placé dans une prison ukrainienne, les conditions ne sont guère meilleures. Le pays souffre de graves pénuries, les conditions de détention sont très éloignées des standards européens et la justice d’un pays en guerre – même si officiellement il ne s’agit que de réduire des « terroristes » ne s’embarrasse pas des principes communément admis en Europe – respect du contradictoire et caractère équitable du procès. Le précédent Graham Phillips Par le passé, les forces ukrainiennes ont déjà arrêté des journalistes européens. Le 22 juillet 2014, le journaliste britannique Graham William Phillips, collaborateur de la chaîne de télévision russe Russia Today, a été arrêté par les services secrets ukrainiens (SBU) dans le secteur de l’aéroport de Donetsk. Trois jours plus tard, il a été expulsé hors du pays vers la Pologne et interdit pendant trois ans d’entrer en Ukraine, « pour des raisons de sécurité de l’Etat, de défense de la souveraineté et de l’intégrité territoriale » avait expliqué alors la SBU. Le 26 juillet, il avait déclaré sur son compte Twitter que pendant qu’il était détenu, ses comptes sur les réseaux sociaux avaient été forcés par la SBU, et qu’à cette occasion, son compte Facebook et plus de 2000 vidéos qu’il avait réalisé sur place effacées. Peu après, il est revenu, cette fois en tant que journaliste indépendant, dans la zone contrôlée par l’insurrection et se trouve actuellement à Lugansk. Edité le 25-08-2014 à 17:55:35 par Xuan |