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Centrafrique : la 50ème opération de brigandage contre les peuples africains

Avec l’opération « Sangaris » en Centrafrique, la France mène actuellement en Afrique sa 50 ème intervention depuis les « indépendances » octroyées dans les années 1960. Le jeudi 5 décembre 2013, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté la résolution 2172, rédigée intégralement par la France, pour une nouvelle intervention dans la République Centrafricaine (RCA). Officiellement, la France appuie ponctuellement les forces de la MISCA, 6000 hommes de l’Union Africaine (en fait uniquement des soldats des semis-colonies françaises : Tchad, Gabon, Congo-Brazzaville, Cameroun). Officiellement encore, l’opération a lieu pour empêcher préventivement un « génocide ». La situation actuelle est bien issue d’un conflit politique qui tourne au massacre inter-religieux. Mais pourquoi les autorités françaises impliquées dès le début de la tragédie dégoulinent-elles maintenant de tant d’humanisme ?

En fait, après avoir abandonné à son sort l’ex-président Bozizé, putchiste soutenu jusqu’alors mais coupable d’avoir signé des accords économiques avec la Chine, la France va tenter de réorganiser sa semi-colonie, rétablir un semblant d’ordre pour laisser ses affairistes agir et renforcer ses bases militaires permanentes. Cette semaine le président centrafricain, Michel Djotodia, mis au pouvoir par la coalition Séléka, a été démissionné par son mentor, le Tchadien, Idriss Déby, qui a soutenu militairement la France au Mali et qui conforte ainsi son ascendant dans la région. Tout cela, avant que ne soit installé un nouveau président fantoche. La France impérialiste se trouve à l’origine du drame humain épouvantable que vivent les Centrafricains (elle a organisé les accords entre la Séléka et le clan Bozizé suite à une première guerre civile) mais dans le chaos ambiant elle peut encore se présenter comme un recours. Comme tous les pompiers pyromanes, la France impérialiste fait partie du problème et prétend néanmoins être la solution.

Sangaris suit la logique des 49 précédentes opérations militaires. Malgré son prétexte humanitaire, cette intervention dans une des semi-colonies les plus liées à la France constitue une opération de brigandage international sous mandat onusien. Loin de la protection de populations martyrisées par les milices Séléka et anti-balaka (anti-machettes), l’enjeu central est le pillage des ressources à l’heure où le concurrent chinois inquiète les impérialismes français et yankee. Sur la scène « intérieure », Il est remarquable que les principales forces politiques du régime capitaliste en France, du Parti de Gauche de JL Mélenchon au Front national de Marine Le Pen, soutiennent unanimement une intervention impérialiste qui doit à leurs yeux servir les « intérêts nationaux ».

Une semi-colonie sous tutelle

Historiquement, la Centrafrique, ex-colonie d’Oubangui-Chari, est connue en France à travers deux faits qui résument assez bien les relations de domination coloniale ou néo-coloniale. La Centrafrique représente d’abord cette nuit coloniale, du travail forcé et de la schlague. En 1927, dans son célèbre livre Voyage au Congo André Gide a fait connaître les horreurs de la colonisation en évoquant justement les grandes forêts de l’actuelle RCA (République Centrafricaine). Son livre pourtant très modéré fait scandale à une époque où l’on chantait partout les louanges de la « mission civilisatrice » menée par la France depuis le partage de l’Afrique entre puissances européennes en 1885 à la Conférence Berlin. A l’approche de Bangui, en remontant le fleuve Congo jusqu’au la Tchad, Gide remarque l’effroyable exploitation d’une population démunie livrée aux compagnies concessionnaires forestières qui la brutalise sans vergogne avec l’aval et souvent l’implication directe de l’administration française. Le second fait connu en France concerne à la fin des années 1970 le règne du sergent Bokassa qui s’est alors intronisé empereur. Bokassa est à l’origine un soldat de l’armée coloniale française engagé en Indochine et en Algérie. On sait que ce pantin mégalomane est à l’origine de l’affaire dite des « diamants de Bokassa », un scandale qui empoisonna la fin du mandat du président V. Giscard d’Estaing. Mais en septembre 1979, le servile Bokassa est tout de même renversé par « l’opération Barracuda » organisée par la France qui lui reproche son rapprochement avec Kadhafi. Dans ce pays la France fait la pluie et le beau temps en RCA en destituant successivement les présidents-laquais qu’elle a mis en place. La mise sous tutelle quasi complète de ce pays a abouti à la situation actuelle. Elle a permis la constitution de grandes fortunes comme celle de la famille de Bernard Henry-Lévy ou celle des Giscard d’Estaing. Elle a aussi abouti à faire de ce pays riche en ressources minières un des 5 plus pauvres de la planète. Odile Tobner écrivait le 6 décembre 2013 à ce propos sur le site de l’association Survie : « Avec moins de cinq millions d’habitants la Centrafrique est aujourd’hui un pays sans routes, sans hôpitaux, sans écoles, sans eau potable, sans électricité. Soixante-dix pour cent de la population, abandonnée à elle-même, se trouve au-dessous du seuil de pauvreté et souffre de malnutrition ; le taux de mortalité à l’âge de cinq ans est de 220 pour mille et l’espérance de vie est de 44 ans. La moitié des habitants sont analphabètes. Tel est le triste bilan des régimes qui se sont succédé, tous sous une étroite dépendance de Paris. L’État-fantôme ne contrôle pas l’exploitation des ressources, bois, diamant, dont une grande partie fuit en contrebande vers les pays voisins. »

Les enjeux d’une nouvelle ruée sur l’Afrique F.Hollande a affirmé que l’intervention en Centrafrique était purement humanitaire : « les Français doivent être fiers d’intervenir quelque part sans intérêts ». Il suffit de lire le site officiel du ministère des affaires étrangères pour réfuter ce gros bobard. Ce ministère ne cache pas sa brutale avidité : « En dépit de l’instabilité politique et des risques sécuritaires, Air France, Bolloré (logistique et transport fluvial), Castel (boissons et sucre), Total (stockage et distribution des produits pétroliers), CFAO (distribution automobile) ont maintenu leurs implantations en RCA. L’arrivée en 2007 de France Télécom dans la téléphonie mobile marque un certain intérêt des investisseurs français. Les pillages consécutifs à la prise de Bangui par les rebelles le 24 mars ont fortement perturbé l’activité des entreprises françaises ».
La Centrafrique n’est pas un pays qui produit énormément de richesses à part les diamants et l’or mais son sous-sol est riche en beauxite et en uranium. On a trouvé récemment au nord des gisements de pétrole. L’ex-président Bozizé a commis un crime de lèse majesté en signant des accords de prospection pétrolière avec le géant chinois CNPC et en négociant la filière diamantaire avec l’Afrique du sud. Il a donc été lâché par son mentor français. Il faut inscrire cette prédation des ressources dans un cadre plus large et plus stratégique qui ne s’embarrasse pas de propos « humanitaires ». Face à la montée de l’impérialisme chinois et de ce que l’on nomme les « puissances émergentes », les stratèges impérialistes français prévoient qu’une nouvelle ruée sur l’Afrique est désormais nécessaire. Le document du ministère français de la Défense, Horizons stratégiques, affirme que dans les années qui viennent l’armée française devra faire face au radicalisme religieux et au tribalisme mais aussi que « les sentiments nationalistes et/ou panafricains pourraient se développer, parfois au détriment des intérêts occidentaux ». Le danger vient d’une baisse d’influence française : « L’amoindrissement de la part relative de l’Europe en tant que principal fournisseur d’aide publique au développement est susceptible d’affecter le tropisme européen des pays d’Afrique subsaharienne au profit des puissances émergentes majeures. » Dans le même document on prévoit le type de guerres à venir : « La rupture du tabou de l’intangibilité des frontières pourrait avoir des effets en cascade sur l’ensemble du continent, voire au-delà. » De nouvelles interventions auront lieu « résultant de l’incapacité des États à contrôler leur territoire, la multiplication des “zones grises”, concentrant groupes criminels et groupes rebelles, pourrait nécessiter des interventions occidentales (…) L’Afrique restera une zone de convoitises et de confrontations potentielles et une zone stratégique prioritaire pour la France » Début décembre à Paris se sont tenu coup sur coup un grand forum France-Afrique (qui a réuni mercredi 4 décembre près de 600 patrons à Bercy au Ministère de l’économie) et un sommet politique France-Afrique à l’Elysée axé sur la « paix et la sécurité » (dans lequel Hollande a annoncé la formation de 20000 soldats africains par la France). Hubert Védrine, ancien ministre de Mitterand et éminence grise de l’impérialisme français a remis un rapport dans le quel il affirme que « L’Afrique peut devenir le nouvel ’Eldorado’ de la France ». Il déclare : « J’ai accepté cette mission parce que l’idée était originale : se concentrer exclusivement sur la dimension économique de cette relation si passionnelle entre la France et l’Afrique. Autrement dit, l’originalité du groupe de travail, que Pierre Moscovici a eu le mérite de constituer, réside justement dans les sujets qu’il n’aborde pas, le passé, le néocolonialisme... Les Africains étaient très demandeurs, eux qui nous reprochent souvent de nous perdre dans des débats sans fin sur la Françafrique, alors que tout cela est derrière nous. Savez-vous que, depuis plus dix dans, la croissance économique du continent se situe juste derrière celle de l’Asie ? Elle a été en moyenne de 5% par an et devrait atteindre 6,4% l’an prochain ! Même si elle ne représente encore que 2% du commerce mondial, l’Afrique a connu la plus forte croissancedans les échanges internationaux entre 2000 et 2011. C’est le continent qui épargne le plus après l’Asie : les réserves de change y sont estimées à 500 milliards de dollars » Le message du rapport Védrine est clair. Il reprend l’essentiel du document du ministère de la Défense Horizons stratégiques mais traduit dans un langage économique. Face à la « fin de l’hégémonie occidentale » l’impérialisme français se doit réagir pour contrer une tendance qui lui est défavorable. Dans son interview H.Védrine ajoute : « Entre 2000 et 2011, la part de marché des entreprises au Sud du Sahara a baissé de 10% à moins de 5%, même si en valeur les exportations françaises ont doublé. C’est qu’entre-temps la Chine s’est activée. Sa part de marché sur le continent est passée de moins de 2% en 1990 à plus de 16% en 2011, tandis que nombreux autres pays, comme l’Inde, les Etats-Unis ou le Brésil, ont intensifié leurs liens avec l’Afrique. » Ces chiffres alarment les stratèges de l’impérialisme français même si les investissements directs sont toujours à l’avantage de la France. Fin 2011, la valeur cumulée des investissements en Afrique s’échelonnait ainsi : la France possède 58 milliards de dollars, les États-Unis 57, la Grande-Bretagne 48, la Malaisie 19, l’Afrique du Sud 18, puis viennent seulement la Chine avec 16 milliards et l’Inde avec 14 milliards. La traduction du regain d’intérêt de la France pour l’Afrique s’écrit en lettres de sang sur le dos des peuples dominés. Chaque guerre récente comme celle de la Côte d’Ivoire en 2010, de la Libye en 2012, du Mali en 2013 renforce une dépendance humiliante et affaiblissent les peuples et Etats africains. Les pays « sauvés » s’enfoncent inexorablement. Après avoir laissé agir et avoir soutenu la coalition Séléka pour le renversement de Bozizé, la France impérialiste change de camp. Les apprentis sorciers participent en premier chef au chaos. La France impérialiste n’est pas l’avenir de l’Afrique.

Troupes françaises hors d’Afrique !

A bas l’impérialisme français !

Comité Anti-Impérialiste, le 11 janvier 2013 http://anti-imperialiste.over-blog.org/
 
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