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Xuan
Il est question de Clamadieu pour GDF...
décidément le monde est bien petit !
https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-economie/20091105.RUE3360/rhodia-accuse-de-trucages-le-gendarme-boursier-deboute.html?fbclid=IwAR2oGZ1KXP7C7xN2HGgJtawpv1ZfnW1Yl2SC-rFPdEzCfcJvhwXY7xZMDpo....
Cet individu est passé entre les gouttes du scandale Rhône Poulenc, resté président du groupe Rhodia puis Solvay. Le fond de l'affaire était initialement l'utilisation de l'argent public dans les entreprises "nationalisées par la gauche" pour gober un maximum de sociétés. Suite à la catastrophe de Bhopal en Inde, le coût de la sécurité dans la chimie a fait fuir les capitalistes et Rhône Poulenc a cherché à habiller la mariée pour refourguer cette branche par tous les moyens, comme le raconte Daniel Lebard. Pour redresser Rhodia, c'est Clamadieu ( conseiller industriel sous Martine Aubry ) qui a pressé le citron des salariés et mis en route les plans de restructuration. La liquidation du textile synthétique des années 80 à 2000, puis les restructurations en 2009/2010, ou celle de la chimie fine en 2007 (par exemple l'usine de Roussillon après la délocalisation du paracétamol en Chine). Et j'en passe.
pzorba75
La CGT Energie oublie de rappeler que c'est sous le gouvernement socialo-communiste de Lionel Jospin, entre 1997 et 2002, que les décisions de privatisations de France Télécom et d'EDF-GDF ont été prises pour se conformer aux objectifs européistes de la libre concurrence.

Qui sème le vent récolte la tempête.

Clin d'oeil aux éoliennes qui vont fournir l'électricité dans nos foyers sans pollution, à vérifier.
Xuan
A propos de la vague de froid au Texas



Etats-Unis
Les factures astronomiques d'électricité au Texas après la vague de froid
Source: Associated Press

Une autre manifestation de la «libéralisation» (voir privatisation) de l'énergie est vécue par les habitants du Texas, car après plusieurs jours de coupures d'électricité et d'eau au milieu d'un froid extrême, ils sont confrontés à une augmentation astronomique du coût de l'électricité.

À un moment où au moins 30000 ménages sont toujours sans électricité, alors que les équipes n'ont pas encore réparé toutes les lignes électriques qui se sont effondrées à cause de la neige et du mauvais temps, les Texans reçoivent des factures d'électricité pouvant atteindre 16000 dollars !!!

Le Texas est le seul État dont le réseau de distribution d'énergie est complètement « libéré», c'est-à-dire privatisé. De nombreux ménages ont des contrats dont le prix mensuel varie en fonction de la demande qui a considérablement augmenté avec la vague de froid.
La situation est telle que même le maire de Houston , la quatrième plus grande ville de l'État, s'est empressé d'intervenir pour adoucir les réactions. "Ces factures, ces coûts prohibitifs, doivent être payés par l'État du Texas et non par des consommateurs individuels qui ne sont pas responsables de cette catastrophe ", a déclaré Sylvester Turner à NBC.

"Tout ce qui s'est passé cette semaine était prévisible et aurait pu être évité" , a-t- il déclaré, ajoutant qu'il était clair depuis longtemps que le réseau électrique indépendant du Texas était vulnérable aux conditions météorologiques extrêmes.
De manière caractéristique, le gouvernement fédéral se précipite pour assurer la rentabilité des fournisseurs d'énergie privés, alors que Joe Biden a signé une nouvelle déclaration d'urgence pour le Texas, libérant des fonds qui peuvent être utilisés pour subventionner les comptes des ménages affectés.
Pendant ce temps, les autorités fédérales et locales du Texas ont appelé à une enquête sur la crise énergétique.
Mis à part le problème de l'électricité, les habitants de nombreuses villes du Texas se sont retrouvés sans eau potable dimanche.
(Avec des informations de: ΑΠΕ-ΜΠΕ, AFP)

En France la CGT Energie mène la bataille contre les projets de privatisation Hercule (côté Elec) et Clamadieu (côté gaz) et pour la nationalisation de tout le secteur de l’Energie

Hausse des prix, casse du secteur, précarisation : à qui la faute ?
« Une baisse drastique des effectifs a eu lieu lors de ces 10 dernières années pour effectivement mettre à mal notre mission de services publics et [la desserte] partout dans tous les foyers français l’électricité et le gaz » , nous apprend la vidéo (postée en commentaire ).
De même, « Nous avons assisté aux pillages de nos entreprises. […] L’argent est détourné et pillé par les actionnaires privés [au lieu de servir à l’entretien du réseau, de la sécurité, dans la prévention, des investissements]. » « A titre d’exemple, lors des 10 dernières années, c’est 66 milliards d’euros qui ont été volés des caisses d’EDF et d’Engie au profit des actionnaires privés. Ces sommes là [auraient dû servir] à l’entretien du réseau, à la sécurité, dans les embauches, dans la formation des agents » , relève également la CGT Energie de Paris.
Xuan
Un article du Diplo assez documenté :

Bruxelles et Paris à la manœuvre
Qui veut la mort d’EDF ?

Plus que jamais, la menace du dérèglement climatique commande d’investir dans l’efficacité énergétique et le renouvelable. Mais, à Paris et à Bruxelles, la priorité reste de démanteler le service public. Dernier avatar d’une obstination à favoriser artificiellement les prestataires privés dans la fourniture d’électricité, le projet Hercule cristallise les inquiétudes.

par Anne Debrégeas & David Garcia février 2021 https://www.monde-diplomatique.fr/2021/02/DEBREGEAS/62795

Le gouvernement envisage-t-il de « couper Électricité de France [EDF] en trois, c’est-à-dire de le démanteler » ? Interpellé sur le projet Hercule par Mme Valérie Rabault, présidente du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, le 15 décembre dernier, le premier ministre Jean Castex tente de rassurer : « Nous n’avons (…) nullement l’intention de démanteler EDF, qui restera un grand groupe public. » Ces propos rappellent ceux prononcés dans le même hémicycle par le ministre de l’économie Nicolas Sarkozy, le 6 avril 2004 : « Depuis 2000, le marché de l’énergie est ouvert à la concurrence à hauteur de 30 % parce que le gouvernement de Lionel Jospin, soutenu à l’époque par le Parti communiste, avec des ministres communistes, a transposé en février 2000 la directive européenne libéralisant le marché de l’énergie… Je redis qu’EDF et GDF [Gaz de France] ne seront pas privatisés (1). » Élu président de la République en 2007, il privatisa GDF.[/#]

À ce jour, l’État détient encore 84 % du capital de l’établissement public transformé en société anonyme en 2004 et introduit en Bourse l’année suivante. Mais pour combien de temps ? Depuis le printemps 2019, le gouvernement français et la Commission européenne négocient en toute opacité la réorganisation du deuxième producteur mondial d’électricité. En mai dernier, alors que le président Emmanuel Macron venait d’évoquer devant les caméras le retour des « jours heureux », en référence au programme du Conseil national de la Résistance, ses représentants négociaient à Bruxelles le torpillage d’une des conquêtes de la Libération, soixante-quinze ans après la nationalisation de l’électricité et du gaz.

Le projet Hercule poursuit l’objectif fixé par une directive européenne de 1996 : imposer l’émergence d’acteurs privés en rognant la position dominante d’EDF, tout en demandant à l’État d’assumer les incertitudes et les risques liés à la filière nucléaire. Le projet devait être présenté à l’Assemblée nationale l’été dernier, puis en ce début d’année, mais il se heurte à la mobilisation du personnel d’EDF, qui multiplie les grèves, et à celle de l’opposition parlementaire, qui en appelle à l’opinion.

Malgré les dénégations du président-directeur général d’EDF, M. Jean-Bernard Lévy, le démantèlement du service public de l’électricité semble acté entre Paris et Bruxelles, en contrepartie d’une modification de la régulation des prix d’achat du nucléaire (lire « Une régulation au bénéfice du privé »).
Plusieurs documents ont fuité. Hercule refonderait le groupe en trois entités : un pôle chargé de la production nucléaire et thermique, EDF Bleu, auquel serait rattaché le Réseau de transport d’électricité (RTE) ; un deuxième, EDF Azur, gérant les concessions hydroélectriques ; et le troisième, EDF Vert, regroupant les autres activités. On retrouverait dans ce dernier pôle la production éolienne et solaire, la commercialisation, les activités internationales hors nucléaire, les services et Enedis, qui exploite des réseaux de distribution. Le capital d’EDF Bleu et d’EDF Azur deviendrait public à 100 %, mais celui d’EDF Vert serait introduit en Bourse. Un tiers, pour commencer, comme pour celui de GDF en son temps… qui avait ensuite été livré majoritairement au privé.

Démarchage commercial abusif
L’avenir des concessions hydroélectriques reste incertain et semble faire l’objet d’âpres négociations entre la France et l’Union européenne. Une structure publique telle qu’Azur, évoquée dans le projet actuel, pourrait éviter leur mise en concurrence à l’expiration des concessions. La perspective d’une cession au privé de l’exploitation de ces ouvrages stratégiques, dont la sûreté est cruciale, suscite depuis des années une très forte opposition syndicale et politique, à gauche comme à droite (2).

Cette privatisation déguisée est projetée sans tirer le bilan de l’ouverture à la concurrence pour la fourniture d’électricité aux entreprises, en 1999, puis aux particuliers, en 2007 (3). La baisse des prix promise dans les deux cas n’a pas eu lieu. Bien au contraire : les tarifs ont augmenté de 60 % entre 2006 et 2020 pour les particuliers, quand l’inflation restait inférieure à 20 % durant la même période (4). Selon la Commission européenne, cela serait dû à une concurrence… insuffisante. « Dans certains États membres, le processus de libéralisation a été mis en œuvre de façon imparfaite, en raison du maintien de la prééminence des opérateurs historiques sur les marchés amont (production et vente en gros) et/ou les marchés aval (fourniture, notamment du fait du maintien de tarifs réglementés de vente) » , affirme la direction de la communication de la Commission dans une réponse écrite à nos questions.

Une partie de l’augmentation des factures peut être attribuée aux investissements dans le renforcement du réseau, dans la prolongation des centrales nucléaires et dans les énergies renouvelables. Mais elle découle également du mode de formation des prix sur le marché de l’énergie, largement déterminé par les prix des matières fossiles, gaz et charbon, qui ne sont pas « représentatifs de la réalité des approvisionnements du système électrique français, avec une forte volatilité et des perspectives tendanciellement à la hausse » , reconnaît la Commission de régulation de l’énergie (5). Président de cette autorité administrative pourtant très libérale, M. Jean-François Carenco l’admet : « La concurrence par les prix reste marginale sur le marché de l’électricité. Elle ne sert pas à faire baisser les tarifs (6). »


Pour sa part, l’association Consommation, logement, cadre de vie (CLCV) ne juge « pas viable » la déréglementation du secteur de l’électricité en France, tout en précisant ne pas être hostile aux privatisations. « La production nucléaire est exercée en monopole public, ce qui semble consensuel, écrit-elle dans un courrier adressé à la commissaire européenne à l’énergie, Mme Kadri Simson, le 19 octobre 2020. Le réseau étant aussi un monopole naturel, cela signifie que (…) les opérateurs alternatifs ne sauraient être concurrentiels ni sur le réseau ni sur la production, mais sur la partie commercialisation, qui représente une petite part du prix complet. »

Président de l’Association française indépendante de l’électricité et du gaz (Afieg), un groupe de pression qui représente les grandes sociétés privées du secteur, comme Total Direct Énergie, Gazprom ou Endesa, M. Marc Boudier considère au contraire que, « si le transport et la distribution de l’électricité sont par nature monopolistiques à l’échelon local ou national, cela ne justifie pas le maintien d’un monopole public sur l’ensemble de l’activité » . En France, Enedis exerce un monopole sur 95 % du territoire national. Ailleurs, par exemple en Allemagne, une kyrielle d’opérateurs gèrent la distribution à l’échelle du pays, mais jamais en concurrence sur un territoire donné.

On parle de « monopole naturel » lorsque les coûts fixes qu’engendre la production d’un bien sont très importants et que les coûts moyens baissent fortement avec l’augmentation de la production, ce qui rend plus compétitive une seule entreprise. Le préambule de la Constitution française prévoit que, en pareille situation, ce type d’entreprise doit devenir la propriété de la collectivité ; mais il a été souvent contourné. Les coûts du réseau électrique comme de la production nucléaire et renouvelable se composent en grande partie d’investissements lourds, amortissables sur plusieurs décennies, indépendants de la quantité d’énergie produite et transportée. Construire davantage de moyens de production ou de lignes que nécessaire pour pouvoir les mettre en concurrence aboutirait à un gâchis économique, doublé d’une absurdité écologique. « L’histoire a montré que les fournisseurs alternatifs n’ont quasiment développé aucune capacité de production d’énergie, conventionnelle ou innovante, et qu’ils ne comptent nullement le faire » , fait valoir M. François Carlier, délégué général de la CLCV.

Devant l’impossibilité de l’introduire dans les réseaux et dans la production, les partisans de la concurrence se sont rabattus sur la commercialisation, qui représente aujourd’hui à peine 4 % du coût total du système électrique (7). La « fourniture » consiste essentiellement à prospecter de nouveaux clients, élaborer des offres complexes et variées, en faire la promotion. Aujourd’hui, près d’une cinquantaine d’électriciens étrangers, pétroliers, gaziers, jeunes pousses, enseignes de la grande distribution disputent à EDF son ancien monopole. Résultat : l’entreprise publique perd plus de cent mille clients par mois (8). En deux ans, le français Total Direct Énergie et l’italien ENI ont vu leur nombre de clients en électricité grimper respectivement de 51 % et 156 % (9)…

Le consommateur peut-il en attendre un gain quelconque ? Certainement pas une baisse des prix, puisque la commercialisation engendre des surcoûts, répercutés sur la facture : nouvelles équipes commerciales pour chaque fournisseur, courtiers, gestionnaires des bourses d’électricité ; duplication des systèmes d’information, des fonctions support (ingénierie et administration) ; publicité, démarchage ; multiplication des interfaces entre acteurs, contractualisation des échanges ; risques juridiques, etc. Interrogée sur la manière dont la concurrence pourrait réduire les coûts, la Commission européenne nous répond : « Pas de commentaire sur vos questions spécifiques. »

N’ayant prise ni sur l’essentiel des coûts ni sur la qualité de l’électricité délivrée, les fournisseurs peinent à se démarquer. Leurs offres sont de fait « très similaires et sans innovation » , souligne la CLCV, qui décèle même un « lien de cause à effet (…) avec le recours massif aux pratiques trompeuses et agressives » . Le nombre de litiges mettant en cause un démarchage commercial abusif bat des records : près de deux mille en 2019, en hausse de 65 % en trois ans, selon le médiateur national de l’énergie, M. Olivier Challan Belval, qui instruit les plaintes. « Certains démarcheurs se font passer pour des agents Enedis [groupe EDF], d’autres prétextent venir contrôler la facture d’énergie ou profitent de la fragilité de personnes âgées » , détaille-t-il. Il préconise l’interdiction du démarchage commercial ou, à défaut, son encadrement strict. Il dénonce également la tendance des fournisseurs à résilier les contrats à la moindre difficulté de paiement, faisant s’envoler le nombre de coupures. Près de 672 400 interventions pour impayés ont été effectuées en 2019, soit 100 000 de plus que l’année précédente.

Menace sur les tarifs réglementés
Au début de la déréglementation, les fournisseurs devaient s’approvisionner sur un marché de gros aux prix très volatils. Ils se trouvaient face à un opérateur historique produisant une électricité à coût bas et stable, proposant aux consommateurs des tarifs réglementés de vente (TRV) encadrés par l’État et généralement avantageux. Difficile, pour les acteurs privés, de se faire une place. La Commission européenne a choisi de les aider en réclamant la fin des TRV, dans une décision rendue le 12 juin 2012 : « Les concurrents d’EDF seraient ainsi en mesure de faire des offres à des prix comparables à ceux que peut proposer EDF, ce qui devrait permettre une concurrence effective. » Les fournisseurs obtenaient ainsi la suppression des TRV pour les moyennes et grandes entreprises à la fin 2015, et pour les plus petites en 2019. L’Union des industries utilisatrices d’énergie (Uniden) avait pourtant plaidé auprès de la Commission européenne pour leur maintien : « Le fonctionnement imparfait du marché rend nécessaires les tarifs réglementés (…). La structure des tarifs répond à celle des coûts réels par catégorie de clients. (…) Les consommateurs valoriseraient également la stabilité et la visibilité du prix qu’ils paient pour leur approvisionnement en électricité (10). »

Pour les particuliers, une modification du mode de calcul des TRV, sous la pression des fournisseurs alternatifs, les vide de leur substance (11). Construits à l’origine pour refléter les coûts du système électrique français, ces tarifs doivent désormais exprimer le coût d’approvisionnement moyen d’un fournisseur alternatif. Les TRV sont ainsi devenus dépendants du cours mondial du charbon et du gaz, incontrôlable par la puissance publique. D’après la Commission de régulation de l’énergie, il s’agit d’assigner aux tarifs un objectif de « contestabilité », défini comme la « faculté pour un opérateur concurrent d’EDF présent ou entrant sur le marché de la fourniture d’électricité de proposer, sur ce marché, des offres à prix égaux ou inférieurs aux tarifs réglementés » (12). Ces tarifs deviennent, par construction, plus élevés que les offres des fournisseurs. L’Autorité de la concurrence s’était pourtant opposée à ce mode de calcul, jugé « défavorable pour vingt-huit millions de clients aux tarifs réglementés » . Dans un avis uniquement consultatif et sans suite, elle s’étonne : « L’application de cette méthode traduirait un changement de nature des TRV de l’électricité en France, qui consisterait à les transformer en un “prix plafond” du marché de détail, c’est-à-dire un prix représentatif des coûts des fournisseurs les moins efficaces (13). »

Les fournisseurs alternatifs et leurs promoteurs ont alors beau jeu de mettre en avant une étude récente de l’Observatoire mondial des marchés de l’énergie. Celle-ci souligne qu’un changement de fournisseur d’électricité générerait une économie modique de 44 euros par an en moyenne pour un particulier, soit 5 % de la facture (14)… C’est le résultat direct de l’augmentation des TRV pour satisfaire les opérateurs privés ! À première vue, le baromètre 2020 du médiateur de l’énergie semble accréditer une adhésion majoritaire au principe de la mise en concurrence des énergéticiens : 73 % des personnes interrogées estiment que l’ouverture du marché est « une bonne chose (15) » . Toutefois, seulement 14 % des sondés estiment que le processus de privatisation a entraîné une amélioration du service, et 31 % une baisse des tarifs.

« Le prix n’est pas le seul facteur pris en compte par le client, attaché à une qualité de service globale » , assure M. Boudier. Les clients industriels manifestent, eux, un enthousiasme mesuré à l’heure du bilan. Pour M. Nicolas de Warren, président de l’Uniden, « l’ouverture à la concurrence a généré un fort développement de comportements et de phénomènes économiques et financiers “court-termistes”. Ceux-ci vont à l’encontre de la stabilité et de la visibilité indispensables aux producteurs ou aux consommateurs industriels, compte tenu de la lourdeur et de la longueur de leurs cycles d’investissement » .

Stabilité et niveau des prix sont des facteurs essentiels, mis en avant par les industriels comme par les particuliers. Bien que fortement dégradés, les tarifs réglementés à destination des particuliers représentent encore une valeur refuge pour 70 % de clients. Surveillés par l’État, ils protègent partiellement de la volatilité des prix de marché. Leur disparition abandonnerait les clients dans le maquis des offres opaques et du démarchage. Elle entérinerait la fin de l’égalité de traitement entre usagers.

Autre risque du démantèlement : la stabilité du système électrique. Le gestionnaire de réseau doit garantir à chaque instant l’équilibre parfait entre consommation et production, sous peine de coupures, voire de panne générale (comme la succession de coupures durant trente-huit jours en tout en 2000 et 2001 en Californie, une conséquence de la libéralisation du secteur). Pratiquement sans possibilité de stocker l’électricité et soumis à de nombreux aléas, en particulier météorologiques, l’exercice est très complexe. La multiplication des acteurs — producteurs et fournisseurs — qui doivent se coordonner au travers du marché n’induit pas seulement de nouveaux surcoûts : elle fragilise aussi l’équilibre de l’exploitation du parc de production. Dans un rapport de novembre 2019 (16), l’association européenne des gestionnaires de réseaux (Entso-e) pointe clairement la responsabilité du marché dans l’augmentation des instabilités, qui ont déjà conduit à deux épisodes de coupures en janvier et septembre 2019 en France.

Les élus locaux s’inquiètent également des effets d’une privatisation d’EDF sur la péréquation tarifaire. Aujourd’hui filiale à 100 % d’EDF, le très rentable réseau de distribution Enedis assure une desserte de tout le territoire au même prix. Demain, l’ex-ERDF ferait partie d’EDF Vert, promis à une entrée en Bourse. Des actionnaires privés accepteront-ils d’investir à perte dans les zones rurales, moins rentables que les grandes agglomérations ? Sans se prononcer sur Hercule, le directeur général de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), M. Pascal Sokoloff, émet un jugement mitigé sur le processus. « Dans les années qui ont précédé la création d’ERDF, en 2008, EDF avait diminué sensiblement ses investissements de maintien du réseau. Avec pour conséquences une augmentation du nombre de coupures d’électricité, doublée d’une aggravation de la fracture territoriale » , rappelle-t-il.

Avec le projet Hercule, la création d’une branche d’EDF destinée à être privatisée s’inscrit dans le désengagement de l’État vis-à-vis du solaire et de l’éolien, qui demanderaient pourtant des investissements publics importants. D’autant que la collectivité subventionne ces productions à travers des tarifs d’achat garantis : les investisseurs, privés pour l’essentiel, construisent des centrales en échange d’une rémunération garantie sur la durée de vie estimée des installations. Ce mécanisme de délégation de service public s’apparente au modèle des autoroutes. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, les rémunérations exigées par les investisseurs privés font grimper la facture. Car les investissements étant de très long terme, les coûts de financement représentent un paramètre essentiel. À ce jeu, les structures publiques en situation de monopole bénéficieraient pourtant de conditions imbattables, comme le rapportent les experts François Dauphin et Basile Bouquet à propos de la construction de la centrale nucléaire britannique de Hinkley Point : « Dans une étude de 2017, la Cour des comptes anglaise a estimé le coût complet à (…) 100 euros par mégawattheure pour une rémunération de 9 % (taux minimum pour une entreprise introduite en Bourse) (…) et à seulement 30 euros par mégawattheure en cas de retour attendu de 2 % (le taux où l’État français pourrait emprunter actuellement sur les marchés pour un investissement à cinquante ans) (17). »

Bientôt un référendum ?
Confrontée à l’urgence climatique, la France devra réduire drastiquement sa consommation énergétique et renoncer à terme aux énergies fossiles, en leur substituant une électricité d’origine renouvelable. Parallèlement, le parc nucléaire est appelé à diminuer, voire à disparaître. Le système électrique va donc connaître dans les prochaines décennies une transformation profonde, impliquant des investissements massifs. Dans ce contexte, la priorité accordée à l’initiative privée freine la transition énergétique. « L’Union européenne dispose d’atouts scientifiques et industriels, mais ses politiques publiques ont privilégié le démembrement de ses groupes pour renforcer la concurrence et ouvrir ses marchés, au détriment d’un objectif de leadership technologique » , observe l’Institut français des relations internationales (IFRI) (18).

Le monopole public français, qui avait permis de construire en quelques décennies un réseau et un parc de production capables d’amener l’électricité dans chaque foyer, a été progressivement affaibli par vingt ans de dérégulation. « Dans l’état actuel des choses, et pour la première fois de notre histoire, nous ne sommes pas en mesure d’être pionniers dans ces domaines, ni même de développer nos métiers historiques comme le nucléaire, l’hydraulique ou les réseaux » , résumait EDF dans sa communication interne au moment des grèves de décembre dernier (19).

« L’avenir du système électrique, et donc d’EDF, c’est tout d’abord le retour à un cadre économique guidé par la gestion des biens communs » , appuient en écho les confédérations syndicales représentatives dans l’énergie, dans un courrier du 7 janvier demandant à M. Macron de renoncer à son projet de réorganisation du groupe public. Elles ajoutent : « L’avenir d’EDF, c’est aussi d’investir massivement dans la prochaine décennie pour garantir la sécurité d’approvisionnement électrique du pays. »

Avec une mobilisation syndicale forte et unitaire, l’opposition à Hercule peut-elle faire reculer le gouvernement ? Le 15 décembre, le groupe socialiste à l’Assemblée nationale annonçait le dépôt d’une proposition de référendum d’initiative partagée (RIP) sur le sujet. Celle-ci devrait être soutenue par l’ensemble de la gauche parlementaire et par une partie de la droite. Contre la privatisation d’Aéroports de Paris, un même front uni avait mobilisé plus d’un million de pétitionnaires, en dépit de nombreux obstacles pratiques. Même inférieure aux 4,7 millions de signatures nécessaires juridiquement pour imposer un référendum, cette mobilisation a pesé sur la décision de M. Macron de suspendre son projet, devenu intenable dans le contexte de la pandémie de Covid-19 et d’un sévère recul du trafic aérien.

Dans le cadre du « grand débat national » faisant suite au mouvement des « gilets jaunes », le président de la République s’était engagé à abaisser à un million de signatures le seuil pouvant déclencher un RIP. Cette promesse de réforme institutionnelle ne s’est pas concrétisée, mais elle pourrait être rappelée dans le contexte d’un référendum sur le projet Hercule. Et permettre d’imposer un débat sur le rôle d’un véritable service public de l’énergie face à l’urgence climatique.

Anne Debrégeas & David Garcia

Respectivement ingénieure-chercheuse à Électricité de France (EDF), porte-parole de la fédération Sud-Énergie, et journaliste.

(1) « Quand Sarkozy promettait de ne pas privatiser GDF », L’Obs, Paris, 3 octobre 2006.

(2) Lire David Garcia, « Les barrages hydroélectriques dans le viseur de Bruxelles », Le Monde diplomatique, juin 2019.

(3) Cf. « Hercule, un pas de plus dans l’impasse des marchés de l’électricité » (PDF), Sud-Énergie, décembre 2020.

(4) « Les dépenses des Français en électricité depuis 1960 », Insee Première, n° 1746, Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), Paris, avril 2019 ; « Prix de l’électricité en France et dans l’Union européenne en 2019 » (PDF), Datalab, Commissariat général au développement durable, Paris, juin 2020.

(5) Consultation publique sur la nouvelle régulation économique du nucléaire existant, ministère de la transition écologique, Paris, 2020.

(6) Nabil Wakim, « “Il y a désormais trop d’acteurs sur le marché de l’électricité” en France », Le Monde, 26 octobre 2018.

(7) « Cadrage de l’évaluation économique des scénarios de long terme », document interne du groupe de travail « Coûts » de RTE, février 2020.

(8) Guillaume Guichard, « EDF perd plus de 100 000 clients par mois », Le Figaro, Paris, 23 novembre 2020.

(9) « Le fonctionnement des marchés de détail français de l’électricité et du gaz naturel. Rapport 2018-2019 », Commission de régulation de l’énergie, Paris, 23 novembre 2020.

(10) Cité dans « Décision de la Commission du 12 juin 2012 concernant l’aide d’État SA.21918 (C 7/07) (ex NN 17/07) mise à exécution par la France — Tarifs réglementés de l’électricité en France » (PDF), Commission européenne, 12 juin 2012.

(11) Lire Aurélien Bernier, « Électricité, le prix de la concurrence », Le Monde diplomatique, mai 2019.

(12) « Délibération no 2019-139 portant proposition des tarifs réglementés de vente d’électricité », Commission de régulation de l’énergie, Paris, 25 juin 2019.

(13) « Avis 19-A-07 du 25 mars 2019 relatif à la fixation des tarifs réglementés de vente d’électricité », Autorité de la concurrence, Paris, 25 mars 2019.

(14) « L’Observatoire mondial des marchés de l’énergie 2020 », Capgemini, novembre 2020.

(15) Enquête réalisée du 2 au 16 septembre 2020 auprès d’un échantillon représentatif de 1 998 foyers français interrogés par voie électronique.

(16) « Report on deterministic frequency deviations » (PDF), Entsoe, 4 novembre 2019.

(17) Basile Bouquet et François Dauphin, « Nucléaire et libéralisation : une équation insoluble ? », Les Échos, Paris, 24 juillet 2019.

(18) Marc-Antoine Eyl-Mazzega et Carole Mathieu, « La dimension stratégique de la transition énergétique », Études de l’IFRI, Paris, avril 2019.

(19) « Neuf questions sur le projet Hercule » (PDF), communiqué interne, EDF, Paris, décembre 2020.
 
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