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Xuan
Epilogue...


Xuan
Que devient Le Paon ?

Tandis que Martinez passe l'éponge le 14 avril et que l'Huma s'empresse d'absoudre sans se poser la moindre question, on peut se demander où va atterrir Le Paon.
Reclassement au Conseil Economique et Social Ecologique (CESE) ou à l'Agence Française de lutte contre l'illettrisme ?
Et pour Lafont l'ancien Trésorier Administrateur, un poste de Conseiller Social dans une Ambassade ?
Il serait intéressant d'en savoir davantage, histoire de comparer avec une pratique déjà bien rodée à la CFDT et des revenus proches du double, ancienneté oblige..


Edité le 13-05-2015 à 23:14:53 par Xuan


Xuan
Le site du PRCF met en ligne l'article de Stéphane Sirot :


Lendemains de crise : la CGT à la croisée des chemins – Stéphane SIROT …


Depuis le mois d’octobre c’est une crise ouverte qui agite la CGT avec l’affaire Lepaon. http://www.initiative-communiste.fr/ a très régulièrement ouvert ses colonnes pour relayer les prises de positions des syndicalistes de combat ; le secteur luttes du PRCF a également très régulièrement pris la parole sur le sujet. Mais cette affaire n’est que le symptôme visible d’une crise plus large, et de la mutation d’une CGT dont la tête désormais intégrée à la CES a rompu avec les fondamentaux du syndicalisme de classe et de masse. Notre ami Stéphane Sirot, fin spécialiste de l’histoire de de la CGT dans la tribune suivante revient sur ce que révèle cette crise. Il y développe les perspectives qui s’ouvrent pour une possible relance d’un syndicalisme de combat permettant de remettre les travailleurs du pays à l’offensive.

Par Stéphane SIROT, historien français, spécialiste de l’histoire et de la sociologie des grèves, du syndicalisme et des relations sociales. Il est professeur d’Histoire à l’Université de Cergy Pontoise et auprès de l’IEP Paris (Sciences Po) ainsi que l’IAE de Nantes





Des révélations du Canard enchaîné, le 29 octobre 2014, sur la coûteuse rénovation du logement de fonction loué à Vincennes pour le désormais ex-secrétaire général de la CGT, jusqu’à la validation par son Comité confédéral national (CCN) d’un nouveau bureau confédéral (BC) et d’un nouveau secrétaire général le 3 février 2015, la centrale de Montreuil a traversé une tempête d’une ampleur sans précédent. La série à rebondissements des révélations sur les privilèges accordés à Thierry Lepaon a jeté une lumière crue sur des mauvaises pratiques en voie d’institutionnalisation et fait remonter à la surface des évolutions qui, depuis un quart de siècle, marquent une nette mutation de la CGT par rapport à ses valeurs et à ses engagements historiques. L’année des 120 ans de la plus vieille confédération née en 1895 pourrait être celle de son renouveau ou, à défaut, de son lent déclin vers un syndicalisme résiduel.

La CGT au miroir de sa crise

cgt_1936_conges_payesAu-delà du naufrage d’une équipe dirigeante et des turpitudes individuelles d’un homme qui s’est retrouvé par défaut à la tête de l’une des deux grandes confédérations françaises où il n’a jamais réussi à s’imposer, la crise de la CGT a eu un effet loupe.

D’abord, sur le fonctionnement de la confédération et l’état de la démocratie syndicale en son sein. Durant leurs mandats, pour mieux asseoir un pouvoir voulu autant que possible sans discussions de fond et sans partage, Louis Viannet et, surtout, Bernard Thibault, ont volontairement affaibli le rôle du BC, au profit d’une instance plus pléthorique, la Commission exécutive confédérale (CEC), elle-même progressivement attachée à s’imposer face au CCN, pourtant la seule instance représentant l’ensemble des structures territoriales et professionnelles du syndicat[1].



Ce processus a contribué à enfanter des pratiques de direction sans dialogue, sans orchestration des débats et, au bout du compte, sans ligne clairement assumée, alors même qu’étaient opérés des choix remaniant grandement les options séculaires de la CGT. Ses secrétaires généraux se sont ainsi érigés en incarnations vaguement autoritaires d’une équipe dirigeante de plus en plus déconnectée de ses organisations et de ses militants de base. Un tel système a favorisé la constitution d’une oligarchie de fait, fonctionnant en vase clos, éloignée des réalités du terrain, accaparée par ses fonctions de représentation institutionnelles et secouée par de récurrentes manœuvres de pouvoir autour de batailles d’écuries convoitant pour leur poulain le poste suprême.

Face à une direction confédérale peu soucieuse d’ouvrir des discussions, d’imprimer une orientation issue des remontées du mouvement social et volontiers enferrée dans des stratégies d’autoreproduction, les fédérations, à commencer par les plus puissantes d’entre elles, ont vécu de plus en plus isolément leur vie, se constituant parfois en baronnies largement détachées des enjeux confédéraux. Une CGT composée de micro-pouvoirs lui conférant un visage sans cesse plus fragmenté s’est au final dessinée durant ce dernier quart de siècle.

D’ailleurs, les critiques sur l’absence d’impulsion collective, de ligne confédérale franche, limpide et assumée, mais aussi sur les aléas de la mise en oeuvre des décisions du 50e congrès confédéral réuni à Toulouse en mars 2013, transpirent des multiples prises de position des instances territoriales et fédérales votées à l’occasion de la « crise Lepaon ». Ainsi le 9 décembre 2014 l’Union générale des fédérations de fonctionnaires (UGFF) demande-t-elle « un point d’étape sur la mise en œuvre des orientations issues du 50e congrès confédéral de notre CGT », appuyée le 13 janvier 2015 dans sa démarche par la Fédération des finances.

S’agissant du fonctionnement des instances dirigeantes, le « relevé de décisions sur la situation de la CGT » rédigé le 11 décembre 2014 par la Fédération des services publics réclame « les dispositions nécessaires à la réorganisation du travail de la direction et de la maison confédérales, sous le contrôle de la CEC et du CCN ». Dans le même ordre d’idées, six jours plus tard, la Fédération des ports et docks veut « redimensionner la Maison confédérale tournée vers ses organisations, avoir des instances (BC, CEC, CCN) qui travaillent et creusent au fond les questions d’ordre politique, social et économique qui mettent les organisations de la CGT en mouvement… ». Plus abruptement, la contestataire UL des syndicats CGT de Seclin et environs (Nord) demande d’« en finir avec la lutte des places » qui, selon elle et d’autres, tend à accaparer les dirigeants confédéraux.

Il serait possible de poursuivre la litanie des citations montrant à quel point, aux yeux d’un grand nombre de ses propres structures, la confédération apparaît alors comme un bateau ivre sans gouvernail. Ces organisations, orphelines d’une stratégie ouvertement définie et souvent sévères à l’égard des orientations développées sous les mandats de Bernard Thibault, exigent des mises au point et l’ouverture de francs échanges sur des enjeux majeurs. L’appel à l’« organisation d’un débat » est une expression d’ailleurs récurrente des textes produits pendant la « crise Lepaon ». Ledit débat, tel qu’il est en général requis, touche à l’ensemble des activités et des dimensions de la vie militante et de l’organisation qui la coordonne. Les propositions de l’UGFF du 9 décembre 2014 en font la synthèse : « Projet syndical, unité et stratégie des luttes dans le champ syndical et au-delà, outil syndical, rôle et place des syndiqués, démocratie ». Derrière une telle affirmation se dessinent, en creux, les interrogations, voire les préventions sur le « syndicalisme rassemblé », les pratiques de lutte, les places respectives du rapport de forces et de la négociation collective à froid, donc le degré d’engagement de la CGT dans les processus de « démocratie sociale » institutionnalisée. Autrement dit, l’ensemble des mutations entreprises par la direction de la CGT depuis la seconde moitié des années 1990 se trouve convoqué.

Un peu comme un repas de famille qui tourne mal fait ressurgir les ressentiments enfouis de longue date, la crise de la CGT a soulevé le couvercle d’une marmite qui, manifestement, bouillonnait sous une chape de plomb désormais fissurée. C’est d’ailleurs l’un des enseignements remarquables de ces derniers mois : la poussée de la base s’est révélée telle que, cette fois, les manœuvres d’appareil tentées par quelques dirigeants – ou anciens dirigeants sans mandat – soucieux de préserver leur pré carré s’en sont trouvées enrayées. Si cet élan ne retombe pas, l’occasion d’une relance est offerte à une CGT désormais à la croisée des chemins.

Après les tempêtes : vers une thérapie salutaire ou vers une longue agonie ?


Il n’y aura pas de congrès confédéral extraordinaire, contrairement au voeu de militants et d’organisations aux condamnations anciennes et connues face aux évolutions de la CGT. Pour autant, la préparation du 51e congrès prévu pour se tenir au printemps 2016 donne l’occasion à la confédération de procéder enfin à une forme d’inventaire du dernier quart de siècle.

A cet effet, quelques thèmes majeurs peuvent être dégagés. A commencer par celui de la démocratie syndicale. Une réappropriation des valeurs fondamentales du fédéralisme, cette marque de fabrique historique de la CGT, mérite d’être considérée. Les syndiqués qui seront peut-être appelés à y réfléchir pourraient partir de ces considérations produites par Emile Pouget lorsqu’il présentait en 1908 l’organisation dont il était alors l’un des principaux leaders : « … la Confédération n’est pas un organisme de direction, mais bien de coordination et d’amplification de l’action révolutionnaire (…). Ici, il y a cohésion et non centralisation, impulsion et non direction (…). C’est là ce qui fait la puissance rayonnante de la Confédération : l’impulsion ne vient pas d’en haut, elle part d’un point quelconque et ses vibrations se transmettent, en s’amplifiant, à la masse confédérale[2] ». Une direction confédérale capable, en somme, d’être un chef d’orchestre susceptible de mettre en musique une partition sans fausses notes, de porter une ligne édifiée par d’incessants allers-retours entre la base et le sommet. En adaptant ces principes au temps présent, n’y a-t-il pas ainsi matière à couper court à la perpétuation de directions hors-sol incapables de tenir le rôle à la fois de coordonnatrices et de porte-voix du contre-pouvoir dont elles ont la responsabilité ?

Le rapport au politique est par ailleurs une thématique de fond déterminante. Cette question est devenue sulfureuse à Montreuil depuis Louis Viannet et, a fortiori, Bernard Thibault, tant elle plaçait ces dirigeants face à leurs options mutantes non pleinement assumées. Pour ne pas la soulever, elle a sciemment été réduite à la relation syndicat/parti, si sensible à la CGT, compte tenu d’un passé composé d’une relation parfois incestueuse avec le PCF. Du coup, l’essentiel de la question politique, c’est-à-dire le rapport au projet de société et à l’utopie, la relation aux institutions, aux pouvoirs, s’en est trouvée mise sous l’éteignoir. Le pragmatisme sans perspective ni contenu a ainsi pu momentanément triompher aux étages dirigeants de l’immeuble de la porte de Montreuil. Une CGT repensée ne peut s’exonérer de remettre sur le métier des questions stratégiques en lien avec la question politique. La CGT doit-elle s’assumer en syndicat réformiste ou, au contraire, revenir aux fondamentaux de ce que les syndicalistes d’action directe et leurs héritiers appelaient la « double besogne », c’est-à-dire sa dimension de défense des revendications quotidiennes mais également de changement social, de rupture avec le capitalisme ? Or, au tournant des XXe-XXIe siècles, la dynamique centrale dans laquelle s’inscrivent, à des degrés divers, l’ensemble des organisations de défense du salariat, est celle d’un syndicalisme de cogestion qui, en termes d’analyses et de pratiques, est principalement soucieux d’une prise de participation, parallèlement aux structures de pouvoir, à l’administration et à l’aménagement du monde tel qu’il est, sans perspective de transformation d’ampleur. Cette orientation n’a pas produit d’effets fructueux pour le monde du travail qui, depuis plus de trois décennies, voit ses droits et ses protections se diluer au fil de négociations « donnant-donnant » déséquilibrées. De surcroît, cette démarche cogestionnaire a produit un mouvement syndical en général, et une CGT en particulier, en situation d’affiliation au champ institutionnel, donc de moins en moins en capacité de contredire ses choix et n’ayant même plus forcément la détermination de s’y essayer. C’est la raison pour laquelle une réflexion autour des thématiques institutionnalisation/désinstitutionnalisation, affiliation/désaffiliation, obéissance/désobéissance paraît d’une absolue nécessité. Bref, quel syndicalisme veut la CGT ? Souhaite-t-elle creuser une démarche de négociations sans rapport de forces déterminé, d’accompagnement des décisions prises par l’ordre dominant ou, au contraire, veut-elle « refonder son analyse et son action, à partir de la nature de classe des rapports sociaux », comme l’y invitait le 22 décembre dernier, dans une adresse au BC et à la CEC, le Bureau régional de l’Union régionale d’Ile-de-France ?

Un tel questionnement conduit inévitablement à reposer la problématique du rapport de la CGT aux processus de « dialogue social ». Depuis les années 1980, une dynamique politique transpartisane s’est enclenchée, depuis les lois Auroux de 1982 jusqu’à la présidence Hollande, en passant par la loi Larcher du 31 janvier 2007, visant à orienter le syndicalisme vers la négociation collective centrée sur l’entreprise et à en faire un co-législateur, par des interactions d’une ampleur inédite entre le contrat et la loi. De ces mécanismes destinés à contourner la régulation conflictuelle des rapports sociaux résulte une double institutionnalisation du syndicalisme : par le haut, les directions confédérales semblant peu à peu davantage fréquenter les ors de la République que les assemblées générales de grève ; par le bas, via les instances de représentation du personnel, de plus en plus occupées à négocier des accords d’entreprise ou à accompagner des plans sociaux, sur fond de réunions au nombre démultiplié et de cumul des mandats, notamment encouragé par la loi de 2008 sur la représentativité et par une désyndicalisation réduisant comme peau de chagrin le vivier du renouvellement.

En somme, depuis trois décennies, la fonction d’« agence sociale » du syndicalisme, soit sa participation à des fonctions économiques ou sociales de l’Etat et plus récemment aux enjeux gestionnaires de l’entreprise, s’est renforcée de manière assez radicale, au détriment de sa fonction de « mouvement social », celle de la fabrique de la contestation[3]. Cela ne va pas sans poser problème, en particulier à un type de syndicalisme, tel celui de la CGT, qui s’est édifié et consolidé à partir de pratiques qui lui permettaient, à l’instar de la grève, de prendre racine de manière sans cesse renouvelée dans les profondeurs de l’univers salarial. Une entreprise de déconstruction des dynamiques politiques et des évolutions du syndicalisme ayant conduit à cette situation est un point de départ pour une réflexion fructueuse sur les modalités, l’ampleur et les limites de la participation des représentants de la CGT à cette dimension institutionnelle de son activité.

Plus largement, la CGT gagnerait à engager un bilan de l’ensemble de ses pratiques. Ainsi de son rapport à la grève, par rapport à laquelle une prise de distance s’est dessinée à mesure que grossissaient les tendances à l’institutionnalisation[4], tandis que des modes de mobilisation traditionnels telle la journée d’action démontrent depuis vingt ans leur épuisement. Ou encore sa relation aux autres syndicats, donc sa manière de concevoir l’unité qui, au cours du dernier quart de siècle, est volontiers devenue une finalité sans contenu – sous le vocable passablement creux de « syndicalisme rassemblé » – plutôt qu’un éventuel outil en vue du triomphe d’objectifs et de revendications fermement définis.

Enfin, la question de l’intégration de la CGT au syndicalisme européen ressort comme un sujet transversal. D’une manière ou d’une autre, cette dimension suinte de la quasi-totalité des thématiques qui viennent d’être évoquées, tant l’inclusion, voire la dilution du syndicalisme traditionnellement défendu par la confédération de Montreuil dans le syndicalisme bruxellois à dominante social-démocrate a accompagné et parfois accéléré les métamorphoses de la CGT.

On l’aura compris, la tâche est rude et ample. C’est pourtant l’unique manière pour la CGT de retrouver un cap, de se renouveler et d’espérer repartir sur des bases saines et clarifiées. Si les forces internes déterminées à contourner ces débats pour que rien ne change l’emportent au cours des douze prochains mois, le risque est grand de voir la CGT emprunter le chemin d’un syndicalisme résiduel. Car la situation est critique. Elle recule quasiment partout aux élections professionnelles, y compris dans ses bastions historiques, et elle perd des adhérents, une tendance que les affaires Lepaon ont d’ailleurs ponctuellement nourrie (des syndicalistes parlant à cet égard, en privé, de « démissions Lepaon »). De surcroît, les partenaires les plus naturels de la CGT sont en échec : la FSU vient de subir une mémorable défaite aux élections professionnelles dans les fonctions publiques ; SUD ne décolle quasiment nulle part voire régresse quelquefois. A l’inverse, le syndicalisme réformiste assumé (CFDT, CFTC, CFE-CGC, UNSA) se porte dans l’ensemble assez bien en termes électoraux. Et dans les cas où la CFDT stagne ou recule, c’est d’ordinaire l’UNSA ou la CFE-CGC qui raflent la mise. Entre ce champ syndical réformiste d’un côté et l’effritement des syndicats les plus contestataires de l’autre, FO (et/ou parfois des syndicats conservateurs comme le SNALC dans l’Education nationale) regagne du terrain perdu au cours des dernières années et pourrait en fin de compte se replacer au centre du jeu social, d’autant plus si la CGT et les organisations traditionnellement situées dans son sillage ne tirent pas les leçons de leur situation respective. A cet égard, il appartient à l’aînée d’entre elles de montrer l’exemple.

[1] Voir à ce sujet l’intéressant entretien donné par René Mouriaux au Journal du dimanche le 30 janvier 2015.

[2] L’opuscule d’Emile Pouget sera réédité dans le courant de l’année 2015 par les éditions de l’Arbre bleu, avec une préface critique de Stéphane Sirot.

[3] Pour reprendre les notions forgées par Pierre Rosanvallon dans La question syndicale, Paris, Hachette, 1998 (1988).

[4] A l’instar des syndicalismes du monde occidental, comme le montre Jean-Christian Vinel (dir.), La grève en exil ? Syndicalisme et démocratie aux Etats-Unis et en Europe de l’Ouest (XIXe-XXIe siècles), Nancy, éditions Arbre bleu, 2014.


A lire de Stéphane Sirot :

> 1884. Des syndicats pour la République, Lormont, Le Bord de l’eau, coll. « 3e culture », 2014, 114 p., ISBN 9782356873040
> Le syndicalisme, la politique et la grève. France et Europe : XIXe-XXIe siècles, Nancy, Arbre bleu éditions, coll. « Le corps social », 2011, 360 p., ISBN 979-10-90129-00-9
> Les syndicats sont-ils conservateurs ?, Paris, Éditions Larousse, coll. « À dire vrai », 2008, 126 p., ISBN 978-2035839718
> La grève en France. Une histoire sociale, XIXe-XXe siècle, Paris, Éditions Odile Jacob, coll. « Histoire », 2002, 306 p., ISBN 978-2738111722
> Maurice Thorez, Paris, Presses de Sciences Po, coll. « Facettes », 2000, 301 p., ISBN 978-2724607963
> Histoire sociale de l’Europe : industrialisation et société en Europe occidentale, 1880-1970 (codirection avec François Guedj), Paris, Éditions Seli Arslan, coll. « Histoire, cultures et sociétés », 1998, 411 p., ISBN 978-2842760144
Xuan
Un article paru sur le site "communistes" :

04 février 2015

La CGT : Quelles orientations


Le Comité Confédéral National de la CGT a élu le bureau confédéral de 10 personnes à 88,8% et Philippe Martinez secrétaire confédéral à 93,4 %. Plusieurs responsables de fédérations et d’UD n’ont pas respecté les mandats pour lesquels ils étaient missionnés comme par exemple la fédération de la santé ou l’UD du Nord.

L’affaire Lepaon n’a été que le déclencheur d’une crise profonde au sein de la CGT et il est primordial qu’une réorientation de la ligne confédérale sur une pratique de lutte de classe et de masse soit la base des prochains débats dans l’organisation.

Cheminots, salariés de l’énergie, enseignants, personnels de santé et les innombrables luttes dans le privé pour une augmentation du pouvoir d’achat ou contre les licenciements prouvent que le potentiel d’action existe et qu’il est indispensable de le développer.

Le changement d’équipe à la tête de la CGT ne remettra le syndicat sur les rails de la lutte de classe. Il ne tournera le dos ni au « syndicalisme rassemblé ni au dialogue social »

La fin de non-recevoir pour l’organisation d’un congrès extraordinaire courant 1er semestre 2015 ne laisse présager rien de bon. Seule la pression des structures de bases pourra faire avancer la nécessité de l’action, pour organiser une coordination des luttes qui seule arrêtera le MEDEF et nos gouvernants sociaux-démocrates qui mettent en place la loi scélérate du ministre Macron et le retour en arrière de 70 ans qui en découlera.
Xuan
Fin de récré à la direction de la CGT


Depuis la CE de début janvier (voir ICI), de l’eau a coulé sous les ponts, en particulier avec le CCN du 13 et les soubresauts qui ont suivi. Les tueries de Charlie Hebdo et de l’épicerie cacher ont un peu étouffé les scandales, et au final, il n’est pas si mal de laisser le temps au temps et de ne pas toujours réagir à chaud. Pour comprendre, c’est bien d’avoir un peu de recul !

Le CCN du 13 janvier

Le CCN a donc balayé les prétentions de Thierry Lepaon à continuer de manipuler en arrière-plan, et a retoqué sa proposition de future direction (voir un article des Echos, ici, pour le détail).

Non sans quelques moments « démocratiques » qui révèlent la nature véritable de ce qu’est la direction centrale de la CGT, pour l’essentiel : un rassemblement de barons bureaucrates, attachés à la défense collective et individuelle de leurs privilèges, dans le cadre d’une conception d'un syndicalisme de réforme du capitalisme et de cogestion via l’ensemble du système paritaire.

On a ainsi vu la secrétaire de la fédération de la Santé voter POUR le projet Lepaon, alors qu’elle était formellement mandatée pour voter CONTRE, et on découvre au passage qu’elle est la compagne de Martinez, futur secrétaire « pressenti », comme le dit la langue de bois.

On découvre ensuite, grâce aux camarades de la Métallurgie que le secrétaire de l’UD du Nord, qui a également voté POUR le projet Lepaon, était lui aussi mandaté pour s’y opposer (voir ci-contre).

Nous invitons vraiment les camarades à consulter les votes des structures, dans le fichier compilé ci-contre à gauche (merci à Cyril Lazaro !).

D’ailleurs cela permet de mesurer la prétendue opposition de l’Agro qui a voté POUR le projet Lepaon au nom de la lutte contre le réformisme (authentique !), une fédération prétendument hyper-radicale, qui adhère à la FSM et tout et tout… Donc camarades, allez vérifier, et demandez des comptes, comme le font les camarades de la Santé (leur congrès en mars va être tendu…) ou ceux de l'USTM du Nord.

Martinez prépare la fin de la récré

Le projet Lepaon a été adopté par seulement 57% des voix dans ces conditions truquées, il a donc été rejeté, puisqu’il n’atteint pas le seuil statutaire des 2/3. Malgré tous les efforts de l’ancien trésorier, magouilleur devant l’éternel, le fameux Donneddu qui a par exemple tenté de faire croire que la majorité simple suffisait. Mais la courte majorité obtenue grâce aux votes truqués a permis malgré tout à Martinez de prendre la main pour se placer, et être validé pour construire la future direction confédérale. Et déjà, c’est lui qui a représenté la CGT aux vœux de Hollande…

Il fallait vite donner les apparences du retour à la normale ! De débat de fond, point ! Un congrès extraordinaire ? Pas question, c’est le congrès ordinaire qui aura lieu en mars 2016.

Habile le Martinez. La commission qu’il s’adjoint est élargie, avec la présence de trois camarades réputés critiques, à des degrés divers, dont Gisèle Vidalet (on trouvera sa déclaration du 19 décembre ICI sur la compilation d’un précédent article). Et il surfe habilement sur le ras le bol qui s’étend dans toute la CGT autour du bazar au sommet.
La critique sur le fond est rare, on en reste en gros au « rejet des positions réformistes qui nous mènent dans une impasse » pour reprendre des formulations lues ici ou là. Mais quelles sont ces positions réformistes, au-delà de se coucher devant Hollande ?
Dans un précédent article (« CGT : crise d’orientation derrière la crise de direction ») nous disions qu’il n’y avait pas grand-chose à attendre du CCN et de l’ensemble des directions de la CGT, et nous relevions l’ensemble des débats qu’il faut avoir.
Aujourd’hui, on n’a pas abordé le début d’une virgule de ces problèmes de fond de l’orientation de la CGT, même pas l’attitude à l’égard du gouvernement Hollande…

D’où la lassitude des militants face à ce qui apparaît comme des magouilles au sommet, le réflexe « légitimiste » qui pousse à tout oublier et à retourner dans les manifs comme cette semaine sur la loi Macron, ou les manifestations de l’Energie et des Cheminots de jeudi.

Martinez est habile, il va proposer une nouvelle direction plus ou moins équilibrée, représentative des divers courants, et en gros, la CE comme le CCN vont la valider à quelques exceptions près. Et on va fermer le ban, passer à autre chose, en essayant d’oublier au plus vite l’épisode Lepaon…

Le Congrès extraordinaire

Nous l’avons dit, l’hypothèse d’un congrès extraordinaire a été rejetée, alors qu’elle était très populaire dans notre syndicat, pour mettre les choses à plat, pour clarifier (voir ci-contre à gauche une deuxième compilation de déclarations de syndicats depuis début janvier). Le congrès aura lieu en mars 2016, comme prévu.

Il ne s’agit pas d’une question de date, mais d’ordre du jour : un congrès extraordinaire traite d’une question extraordinaire, et pas de l’ordinaire du syndicat. Refuser cette hypothèse comme l’a fait la CE et le CCN, c’est étouffer le débat de fond, la critique, et rien d’étonnant au sommet de la CGT où, comme nous l’avons déjà dit, ils se tiennent tous par la barbichette. On notera la constance de certains, comme l’UD des Bouches du Rhône, qui refusent de s’aligner et persistent à en revendiquer la tenue (voir ci-contre à droite).

Pourtant, le 51ème congrès de 2016 va être rock’roll, parce que l’affaire Lepaon va être là, et bien là. Alors, à tous les syndicalistes de classe de le transformer en tribune de dénonciation de l’orientation réformiste qui domine à la tête de notre confédération. A nous de dénoncer, les illusions de réforme du capitalisme, du nationalisme économique, la soumission à l’acceptation de la précarité, de la pénibilité pour ne négocier que la couleur de nos chaînes. A nous de contester le système paritaire qui n’est que la cogestion des affaires du capital avec le MEDEF, même si cette cogestion est conflictuelle. A nous de remettre sur la table la lutte contre la précarité et la sous-traitance, le combat contre la pénibilité et la souffrance au travail, l’internationalisme contre la mondialisation capitaliste et contre le nationalisme, des orientations qui attaquent au cœur du capitalisme et de l’exploitation.

A nous d’accumuler les débats de fond et les forces pour faire de ce 51ème congrès, si nous le voulons, si nous le pouvons aussi (là, ce n’est pas gagné, il faut l’admettre…) un véritable congrès extraordinaire !


Edité le 28-01-2015 à 09:40:12 par Xuan


Xuan
Lepaon a remis son mandat suivant le conseil de Louis Viannet.

Les dernières "justifications" de cet individu se sont avérées des mensonges puisqu'il touchait lors de sa « situation de précarité » des revenus complémentaires comme membre pendant trois ans du Conseil économique, social et environnemental - ce dont il n'a pas parlé - et touché 5.200 € net pendant plusieurs mois jusqu'au mois de décembre.

La médiation de Viannet visait également à éviter d'élargir la cible à d'autres bonzes de la direction, on peut le lire en filigrane ici :

"Toutes les pistes permettant d'éviter ou de limiter déchirements, divisions, affrontements, dans les débats qu'il va falloir conduire dans la commission exécutive, le comité confédéral national [CCN], et à tous les niveaux de l'organisation, doivent être explorées. Cela suppose une volonté commune d'avancer vers une situation apaisée."

Le texte entier de l'interview de Viannet dans le Monde du 6 janvier :
.



Louis Viannet : Thierry Lepaon doit « remettre son mandat »


Comment analysez-vous la crise qui traverse aujourd'hui la CGT?


Par sa durée, par les principes et les valeurs qu'elle malmène, la crise qui secoue actuellement la CGT dans ses profondeurs est sans précédent. Les traces qu'elle va laisser peuvent générer des situations difficilement maîtrisables, des meurtrissures durables, mettant à mal les difficiles progrès réalisés dans le « vivre-ensemble » et rendant difficiles les rapports entre les militants, entre différentes organisations ou structures de la CGT, affaiblissant ainsi ses capacités d'actions. Toutes les pistes permettant d'éviter ou de limiter déchirements, divisions, affrontements, dans les débats qu'il va falloir conduire dans la commission exécutive, le comité confédéral national [CCN], et à tous les niveaux de l'organisation, doivent être explorées. Cela suppose une volonté commune d'avancer vers une situation apaisée.

A la base, il y a beaucoup de colère qui s'exprime. Une sortie par le haut est-elle encore possible ?

Certains tentent de s'abriter derrière « les fuites » et l'importante campagne médiatique pour justifier leur recherche du maintien du statu quo, faisant fi des nombreuses réactions négatives connues en regard d'une telle perspective. D'autres considèrent que les conciliabules de sommet entre ceux et celles qui savent, peuvent suppléer au nécessaire débat démocratique qu'il va d'ailleurs falloir concevoir le plus large possible, si l'on veut rassembler toutes les forces vives de la CGT autour des décisions du CCN. Dans leur énorme majorité, les militants tiennent la lorgnette par le bon côté et veulent, avant tout, sauvegarder le potentiel de mobilisation et de rassemblement de leur CGT. C'est pourquoi mieux vaut regarder la réalité en face, aussi dure soit-elle.

Certains, à la direction de la CGT, évoquent un complot...

Certes les fuites ont bel et bien existé, la pression médiatique également. Mais, si aucune faute n'avait été commise, il n'y aurait aujourd'hui ni fuite ni campagne des médias. Qui plus est, ces fautes impliquent le secrétaire général, dès lors les problèmes prennent une autre dimension.
Car c'est ainsi. On peut le regretter, on peut souhaiter que les choses soient différentes demain mais, pour le moment, le secrétaire général n'est pas seulement le porte-parole de l'organisation, il est d'abord son porte-drapeau. On le regarde, on l'écoute, on le juge et tout ce qui porte atteinte à son image, tout ce qui affaiblit son crédit, entame l'image et le crédit de l'organisation.
Il ne faut donc pas s'étonner si la grande partie des militants, des syndiqués, a ressenti un choc à l'annonce des affaires, appartement, bureau, puis prime de départ, niveau du salaire... Autant de pratiques pas vraiment habituelles dans la vie de l'organisation. Elles ont été ressenties comme tellement contraires à l'idée généralement admise du secrétaire général de la CGT que seul un démenti aurait pu rassurer ; tandis que toute tentative de justification ne pouvait qu'accentuer la méfiance.

Au-delà n'est-ce pas la CGT et même le syndicalisme qui sont atteints par cette crise ?

C'est plus que l'image qui est ternie. Cela sème le doute sur la sincérité avec laquelle la CGT défend bec et ongles ses valeurs fondamentales. C'est l'amalgame, le « tous les mêmes » qui vient humilier ceux et celles qui, chaque jour avec dévouement et abnégation, aident les salariés à résister.
C'est d'autant plus dommageable que cela s'inscrit dans un climat de défiance générale et grandissante vis-à-vis des institutions à laquelle n'échappe pas le syndicalisme.
Il va donc falloir innover, intensifier les améliorations dans la vie et le fonctionnement démocratiques de toutes les structures de la CGT si l'on veut retrouver rayonnement et confiance et surtout donner un nouvel élan à la culture du débat pour permettre à tous et à chacun la possibilité d'exprimer et défendre ses idées et de les soumettre à la discussion collective. Le désaccord doit être intégré comme un élément du débat et non de division.

Le malaise que vous évoquez n'est-il pas antérieur à l'élection de Thierry Lepaon ?

Loin de moi l'idée de penser que les problèmes sont arrivés avec Thierry Lepaon. A plusieurs reprises, et récemment lors du départ de Bernard Thibault, il est bien apparu des signes qu'un mal-être était déjà présent, dû sans doute au retard pris dans l'évolution de la CGT. C'est donc aux dirigeants d'aujourd'hui qu'incombe la responsabilité d'impulser un véritable aggiornamento de la CGT, à partir de l'inventaire des dysfonctionnements - qui reste à faire. Les travailleurs ont besoin d'une confédération en pleine possession de ses moyens.
Le contexte actuel n'est, hélas, pas le meilleur souhaitable. La crédibilité perdue du secrétaire général à l'intérieur comme à l'extérieur est, en soi, un lourd handicap de départ.

Dans ce contexte, que doit faire Thierry Lepaon ?

C'est au CCN d'assumer ses responsabilités et de prendre les décisions qu'il considère les meilleures ou les moins mauvaises quant au devenir de la CGT en ayant en permanence en ligne de mire l'unité de l'organisation, le rassemblement de toutes ses forces et la mobilisation de l'ensemble des valeurs qui nous rassemblent.
En clamant sa volonté de rester coûte que coûte dans sa responsabilité, Thierry Lepaon tend à confondre détermination et entêtement. Ce faisant, il rajoute encore de la tension dans le débat qui en a déjà suffisamment, alors que sa fonction lui commande le contraire.
Un tel climat, une telle tension peuvent, à tout moment, donner lieu à des affrontements, à des déchirures, lourdes de conséquences pour la CGT, à un affaiblissement dangereux au moment même où la mission historique qui est la sienne, nécessite renforcement, dynamisme, confiance et unité.

Tout doit donc être tenté pour garder une CGT unie et des rapports humains pacifiés. Pour sa part, et dans le cadre des efforts communs, le secrétaire général se grandirait, en cette année de 120e anniversaire de la création de la CGT, en annonçant publiquement, et avant même la réunion du comité confédéral national, sa décision de remettre son mandat à la disposition du CCN. C'est, pour lui, la seule façon de participer positivement à l'écriture des pages à venir de l'histoire de la CGT.

propos recueillis par Michel Noblecourt


Edité le 06-01-2015 à 20:03:54 par Xuan


Xuan
Les Echos signalent la déclaration de Louis Viannet au Monde :

"Le secrétaire général se grandirait, en cette année de 120e anniversaire de la création de la CGT, en annonçant publiquement, et avant même la réunion du comité confédéral national, sa décision de remettre son mandat à la disposition du CCN. C’est, pour lui, la seule façon de participer positivement à l’écriture des pages à venir de l’histoire de la CGT."

"Certes les fuites ont bel et bien existé, la pression médiatique également. Mais, si aucune faute n’avait été commise, il n’y aurait aujourd’hui ni fuite ni campagne des médias. Qui plus est, ces fautes impliquent le secrétaire général, dès lors les problèmes prennent une autre dimension [...] Seul un démenti aurait pu rassurer ; tandis que toute tentative de justification ne pouvait qu’accentuer la méfiance"

Viannet ajoute que toutes les affaires impliquant Thierry Lepaon ont produit un "doute sur la sincérité avec laquelle la CGT défend bec et ongles ses valeurs fondamentales. C’est l’amalgame, le « tous les mêmes » qui vient humilier ceux et celles qui, chaque jour avec dévouement et abnégation, aident les salariés à résister"
Il critique ceux qui "considèrent que les conciliabules de sommet entre ceux et celles qui savent, peuvent suppléer au nécessaire débat démocratique qu’il va d’ailleurs falloir concevoir le plus large possible, si l’on veut rassembler toutes les forces vives de la CGT autour des décisions du CCN" .


Edité le 05-01-2015 à 13:19:11 par Xuan


Xuan
Concernant l'appel "pour défendre la CGT", je ne l'avais volontairement pas mis en ligne, ses initiateurs rappelant notamment que :

Ce texte n’est pas une pétition mais bien une contribution au débat mise à disposition des syndiqué-e-s et de leurs organisations. Nous n’avons pas mis le texte sur Internet ni permis qu’il soit signé en ligne sur un site de pétitions. Nous avons juste créé une adresse électronique (le temps donc uniquement de cette bataille) afin de regrouper les signatures nationalement. Et il n’aura échappé à aucun des signataires que nous demandons l’ouverture d’une tribune de discussion comme la CGT a su le faire par le passé. Cela s’impose d’autant plus que l’utilisation des médias publics et de ceux de la CGT semblent réservés à certains…ce qui ne contribue pas au débat, loin s’en faut

> [...]

> [...]

> Concernant la médiatisation (que nous n’avons pas voulue) nous nous en tenons à ce que nous avons dit précédemment : nous faisons de ce texte et des débats qu’il provoque une affaire interne afin que les syndiqués ne soient pas dessaisis de leur CGT et qu’au contraire ils se la réapproprient.

> Enfin même si nous prenons acte des marques de soutien reçues de la part d’autres organisations nous ne prenons en compte que les signatures émanant d’adhérents ou d’organisations de la CGT. De même nous ne mentionnons pas, dans le cas où elles sont signalées par les signataires, les appartenances à des organisations autres que la CGT.
Xuan
Charles Hoareau et les camarades syndicalistes à l'origine de la liste citée par oùvalacgt ont fait connaître aux syndicalistes CGT signataires :

" La tribune de Jean Louis MOYNOT paru dans Le Monde et qui montre bien le projet que certains ont en tête pour la CGT (et comment les médias leur ouvrent volontiers leurs pages)
La réponse de Jean Pierre PAGE à cette même tribune, réponse qu’évidemment Le Monde, bien que premier destinataire n’a pas publiée…"


Ces deux tribunes qui illustrent bien les débats en cours ci-dessous :

CGT : pourquoi Thierry Le Paon doit démissionner

LE MONDE | 18.12.2014 à 14h24

La crise profonde que traverse la CGT a un caractère historique pour deux raisons. La première est qu’elle est sans précédent. La seconde raison, beaucoup plus fondamentale, est que, derrière la « guerre des chefs » et les fautes graves commises par l’actuel secrétaire général, il y a une accumulation historique de questions stratégiques non résolues parce qu’elles n’ont pas été débattues au grand jour.
Le résultat de cette carence de démocratie est que la CGT reste enfermée sur elle-même, dans des structures et des idées qui datent de périodes révolues, qu’elle se fractionne de manière presque illisible, qu’elle ne parvient pas à produire une analyse des principaux traits du capitalisme contemporain et qu’elle a été incapable jusqu’à présent d’élaborer une stratégie syndicale unique, cohérente, efficace et susceptible de converger avec les efforts du syndicalisme européen et mondial dans le même sens.
Il faut bien sûr faire la part de la crise que provoquent la mondialisation sous domination des multinationales, la financiarisation du capital, la spéculation et le pouvoir des banques, l’incapacité des Etats et des instances internationales à répondre aux enjeux écologiques et à parer aux dangers qu’ils comportent. La complexité de cette transformation du capitalisme et des sociétés humaines n’est que faiblement comprise et intégrée, et cela entraîne un mouvement général de déclin du syndicalisme mondial.
On doit malheureusement reconnaître que la CGT est dans le peloton de tête des syndicats en déclin, en tout cas en Europe. Elle perd à nouveau de l’influence et des adhérents, parce que ses mots d’ordre ne répondent pas assez à la structure actuelle du salariat, non plus qu’aux problèmes et aux attentes des salariés. Je ne cherche nullement à alourdir les difficultés de la CGT. J’ai décidé de me syndiquer à la CGT au tout début de mes études.
J’ai fait mes armes syndicales à l’UNEF, et politiques contre la guerre d’Algérie. Le sens principal de ma vie est mon engagement syndical à la CGT, qui s’est notamment concrétisé par quinze ans à la direction de la confédération. J’ai pris ma première carte le 1er mai 1962 au Syndicat des métaux de La Ciotat, et les suivantes au SNCIM (Syndicat national des cadres et ingénieurs de la métallurgie). Cela fait cinquante-deux ans que je suis adhérent et militant de la CGT. C’est à ce monde que j’appartiens.
Démocratie de masse
Ce qui m’importe est que la CGT ouvre ses portes et ses fenêtres pour engager tous les débats nécessaires. Tout cela (et bien d’autres sujets d’importance majeure) s’est inscrit dans un mouvement qui, de 1968 à 1978, avec des avancées, des blocages et quelques hésitations, est allé dans le sens du développement d’une démocratie de masse concernant à la fois les organisations confédérées, la représentation syndicale dans les entreprises (conquise en 1968), les syndiqués, les salariés, les institutions où siègent les syndicats et la représentativité nationale.
Cela a été le grand combat de Georges Séguy, à partir du rétablissement de la CGT dans ses droits en mai 1968, combat dont l’apogée a été le 40e congrès (Grenoble 1978) et auquel j’ai pleinement adhéré. Mais l’orientation du congrès, résolument démocratique et unitaire, a été rapidement stoppée et refoulée.
L’important est de savoir que la CGT a connu de ce fait une période de plus de dix ans d’isolement, d’affaiblissement, de perte sévère d’effectifs et de stagnation de son influence. Inversement, la période suivante a été marquée par l’ouverture de débats, voulus par Louis Viannet, qui ont conduit à l’entrée de la CGT dans la Confédération européenne des syndicats où elle tient une place et joue un rôle très importants. Cette période a aussi été celle d’une remontée de l’influence et d’une amélioration de l’image de la CGT, ainsi que des syndicats en général. Nouvelles preuves que l’ouverture des grands débats produit des évolutions effectives du mouvement syndical, qui vont à la rencontre des préoccupations des salariés.
Les choses sont devenues plus compliquées par la suite. Le débat sur le projet de traité constitutionnel s’est déroulé plutôt dans le pays (les entreprises, les familles et amis) qu’au sein de la CGT. Le climat au cours du Comité confédéral national appelé à se prononcer a été bien trop tendu au regard d’un enjeu limité (donner une consigne de vote). Comme s’il y avait là un règlement de comptes ! Preuve, sans doute, que nous n’avions pas assez largement travaillé le sujet, mais sans doute aussi qu’il y avait des sujets de débats « cadavérisés » accumulés dans les placards.
C’est, sans doute, à travers les fâcheux épisodes vécus depuis plus de deux ans, ce qui a fait ressortir des questions propres à la CGT elle-même. Nous ferions bien d’en débattre, en particulier de la démocratie, car nous en avons peut-être beaucoup parlé, mais nous n’avons guère avancé dans la pratique. Le monde change de plus en plus rapidement et violemment. Toute période d’attente dans notre tentative de comprendre ce changement nous éloigne de la réalité qui devient pour nous fuyante.
Lorsque j’ai quitté la direction confédérale, je crois avoir dit ce qu’il fallait pour laisser une trace publique et positive dans l’histoire de la CGT. Puis je me suis réjoui, des années plus tard, des avancées indéniables qui se sont produites dans l’esprit de cet article. Mais, aujourd’hui, je me reproche d’avoir été trop optimiste.
Les avancées en question sont parties du sommet de l’organisation, et la plus grande partie des structures de la CGT n’a pas bougé dans sa culture, dans ses idées et ses pratiques. Pour en donner un exemple, en 2008-2009, la « commission ad hoc » sur les structures de la CGT a fait un excellent travail. Mais personne n’en a parlé au 49e congrès qui a suivi, et rien n’a changé depuis dans les structures de la CGT. Il est grand temps de réagir. Car la CGT va continuer à s’éloigner de ce qui est sa base par vocation. Pensons par exemple à la question du nucléaire chez les jeunes. Si la CGT décrochait de sa base, la fin de son histoire pointerait à l’horizon.
Thierry Lepaon doit démissionner. L’élu du 50e congrès de la CGT a perdu sa légitimité pour rester à la tête de celle-ci. Les fautes qu’il a commises, graves et contraires à l’éthique du mouvement syndical et ouvrier, lui rendent impossible de conduire l’évolution culturelle de la CGT.
Jean-Louis Moynot (Ancien secrétaire confédéral et membre de la Commission exécutive confédérale de la CGT (de juin 1967 à juin 1982))

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Thierry Lepaon, la CGT et un article de
Jean-Louis Moynot.



J’ai lu avec intérêt la tribune de Jean-Louis Moynot dans le Monde du 19 décembre 2014. Il dresse un constat sévère de l'état de la CGT, et conclut par le nécessaire départ de Thierry Lepaon. Comme Jean-Louis Moynot je suis arrivé à la même conclusion mais pour d'autres raisons. En fait pour des raisons opposées aux siennes.

Jean Louis Moynot a été un dirigeant de la CGT, il a défendu ses idées il n'a pas été suivi et en a tiré les conséquences. Ce n'était certainement pas une décision facile à prendre d’autant que son attachement à la CGT ne s’était jamais démenti. Mais courageusement il l'a prise. C'était un débat de fond qui touchait à la stratégie et aux orientations de la CGT.

Cela n'avait rien à voir avec des pratiques contraires à ce que sont les valeurs de la CGT, ce qui est l'éthique et l'histoire du mouvement ouvrier de notre pays. A l’inverse Thierry Lepaon lui, fait un choix contraire à celui de Jean Louis Moynot. Il s'accroche à son poste au risque de diviser durablement la CGT !

Déjà celle ci doit faire face à une perte de crédibilité pourtant acquise par plus d’un siècle de dévouement, d’abnégation et de sacrifices de générations de militants. On ne peut par conséquent que se poser des questions sur les raisons qui inspirent cet aveuglement de Thierry Lepaon. Comportement totalement irrationnel ou autre chose?

Contrairement à Jean-Louis Moynot je ne fais pas le même bilan sur les causes de la crise que traverse la CGT, crise qu’on ne saurait dissocier de celle du syndicalisme en France, en Europe et dans le monde.

Pour ma part je pense que ces 20 dernières années ont été caractérisées par un étouffement du libre débat sur ce que doit être notre vision du syndicalisme du 21 ème siècle face à une crise systémique du capitalisme, un aiguisement des luttes de classes et des tensions internationales sur de nombreux sujets.

Plutôt que d’élever le niveau de sa riposte la direction de la CGT à préféré faire le choix d’un volontarisme totalement coupé des réalités. La priorité est ainsi devenue la mise en œuvre d'une orientation qui doit tout à l'accompagnement des politiques sociales libérales en France et en Europe, un refus d'organiser les convergences des luttes, une vision du syndicalisme rassemblé à sens unique qui s'est faite à son détriment et donc du rapport des forces, un abandon de notre action en faveur du renouveau du syndicalisme européen et international comme l’avait pourtant décidé le 45ème congrès!

Le syndicalisme dont la CGT se prévaut donne ainsi l’impression d’être dans une impasse, incapable d’anticiper, et de se faire entendre de la masse des travailleurs. Elle s’est même progressivement coupée de ceux, en particulier les chômeurs et les précaires qui sont devenus les laissés pour compte ! Ne sommes nous pas passés d’un “monde de pauvres sans travail à un monde de pauvres avec un travail”? Que faisons nous ?

Ainsi malgré la prise de pouvoir “des usurpateurs” comme Susan George nomme les multinationales malgré l’Europe vassale qui a élevé l’Euro au rang de nouvelle religion et malgré des institutions syndicales qui ne sont que des rouages de l’UE la CGT a persévéré dans une voie sans issue! Ce n’est pas la CES/CSI ou la CFDT qui ont changé mais bien la CGT.

C’est sur ce fond de scène que depuis des années le refus d’entendre et de débattre est devenu dans la CGT une seconde nature, le culte du dialogue social avec le patronat et les gouvernements de droite comme de "gauche" est devenu un passage obligé! Tout cela a été aggravé par la lutte des places, celle des clans et des courtisans. Cela a conduit à un recul sans précèdent de la démocratie interne.

Comme Jean-Louis Moynot j’ai connu une époque ou les débats internes étaient fermes et d’un contenu élevé, aujourd’hui on se complait dans des discussions d’édredons, tout en veillant à en exclure ceux qui ne partagent pas la vision des dirigeants et qui osent le dire.

L’institutionnalisation, la bureaucratisation et même la corruption ont conduit notre syndicat à prendre de plus en plus des distances avec les lieux de travail, les militants d’entreprises, les luttes et les solidarités pour lesquels nous sommes censés exister.

Quel serait l’intérêt d’une CGT ne vivant que pour elle-même ?

Il faudrait peut être qu’un jour la direction de la CGT se demande pourquoi l’abime s’est creusé à ce point entre son sommet et sa base. En fait nous assistons à une cacophonie ou l’on ne comprend qu’une chose la CGT n’est plus la même. On a même fait écrire sur le sujet un livre par une journaliste des Echos, livre qui par ailleurs fourmille d’idées reçues et d’inexactitudes.

Dorénavant la référence est devenue pour les dirigeants confédéraux le modèle du syndicalisme européen version CES. Louis Viannet m’a dit une fois “nous ne resterons pas le dernier carré”. Où en sommes-nous aujourd’hui?

A cause de ce conformisme ou plutôt de cette mise en conformité la CGT a été conduite à remettre en cause son identité, son indépendance et ce qui faisait sa singularité dans le syndicalisme en France, en Europe, dans le monde. Aujourd’hui elle cherche à se situer en démontrant qu’elle a changé, qu’au fond elle est une organisation comme les autres dans le monde bien policé du syndicalisme d’accompagnement. Pour le prouver, elle pratique depuis plusieurs années une forme de contrition d’autant plus surprenante qu’on ne le lui a pas demandé.

Nul ne saurait nier que le syndicalisme doit changer, bouger et tenir compte du monde dans lequel nous vivons! Mais dans le cas de la CGT cela ne s’est pas fait avec continuité dans le respect de ce qu’elle est (ou était), mais au prix d’une rupture avec ce qui était sa vision, ses principes, son identité.

En fait la CGT a un problème existentiel, elle ne sait plus dans quel camp elle est. Pourtant comme le disait Elsa Triolet “les barricades n’ont que deux cotés”. Il lui faut donc choisir!

Ce choix est devenu un enjeu pas seulement syndical mais aussi politique. Chacun mesurant ce a quoi conduit un changement de et dans la CGT.

Jean Louis Moynot qui n’a pas fait preuve d’indifférence à ces bouleversements auxquels nous assistons nous propose de persévérer dans cette voie! Or où en sommes nous?

Soyons pour une fois lucide: le syndicalisme européen est une faillite. Il est paralysé, en panne d’idées, artificiel, inexistant et comme KO debout. Ce syndicalisme de l’échec c’est ce que nous connaissons en France mais aussi, en Espagne, en Grande Bretagne et en Allemagne ou même le système de “cogestion” a été abandonné alors qu’il n’était rien d’autre qu’une version de l’association capital/travail! Dans tous ces pays comme dans le reste de l’UE non seulement aucun résultat n’a été obtenu ces dernières 25 années mais en plus le chômage et la pauvreté ont explosé, toutes les garanties sociales sont remises en cause, le service public est liquidé, le syndicalisme s’est partout affaibli en influence comme en force organisée.

En Grèce la politique de l’UE a précipité des centaines de milliers de personnes dans l’incapacité de recourir aux soins, les retraites ont été considérablement diminuées, la pauvreté revêt désormais un caractère de masse. La Grèce est-elle le laboratoire expérimental imposé demain à l’ensemble des populations des pays de l’Union européenne et notamment la France ? Déjà dans sa directive Marchés publics, l’UE a introduit la possibilité d’une mise en concurrence des régimes obligatoires de protection sociale…

C’est là le seul bilan du dialogue social européen a l’égard duquel la CES procède par incantations dans l’espoir vain de voir changer les choses! Elle demeure ce qu’elle est au fond un rouage des institutions européennes!

Cela pourrait d’ailleurs s’appliquer également à la CSI dont Jean Louis Moynot a été un des avocats auprès de la direction de la CGT.

Jean-Louis Moynot parle de “transformation du capitalisme” ! Mais de quelle transformation s’agit il? Le MEDEF comme le patronat européen ne donnent ils pas à eux seuls l’image de ce que peut être la rapacité du capital, son caractère foncièrement réactionnaire, totalement dépassée par les exigences de développement sociale et culturel de notre temps. Le capitalisme n’est il pas partout dans le monde synonyme de régression et de guerres, n’est il pas devenu un système anachronique. Au fond “la transformation du capitalisme” c’est avant tout et plus que jamais toujours du capitalisme! Pourquoi dire et faire comme si cela n’était pas le cas?

La question se pose donc en ces termes: somme nous oui ou non pour un aménagement du système en quelque sorte un capitalisme à visage humain ou pour reconnaitre la contradiction fondamentale de l’opposition capita/travail et donc lutter pour une rupture et un autre choix de société!

A cette question légitime nous préférons jusqu’à présent ne pas répondre et entretenir une ambiguïté.

Par conséquent il ne faut pas chercher bien loin les raisons de cet immobilisme du syndicalisme et de la CGT qui provoque son déclin comme force sociale, et l’affadissement de son projet d’émancipation humaine.

Voila pourquoi la CGT est confrontée non pas à des problèmes de dysfonctionnements mais bien à la place qui doit être la sienne et donc à la stratégie qu’elle se doit de suivre.

Malgré ces évidences Thierry Lepaon et son équipe dont l’échec est patent nous parlent de changer mais dans une sorte de continuité, en quelque sorte comme le disait Lampédusa “ il faut que tout change pour que tout reste identique”. Quant à Jean-Louis Moynot il nous propose de nous recentrer sur le modèle syndical européen comme la CES qui s’était indignée du vote massif des travailleurs français en faveur d’un rejet du projet de constitution européenne.

Pour ma part je pense que nous devons faire le choix de principes, ceux du syndicalisme de classe, indépendant et démocratique. Ce ne sont pas des formules de rhétorique voila pourquoi il faut leur donner du sens dans ce qui est notre pratique syndicale quotidienne et à tous les niveaux sans en exclure aucun ! L’unité et la cohésion de la CGT s’en trouveraient renforcées d’autant que s’il est une chose qui ne saurait se négocier ce sont bien les principes!

Ces principes ont toujours donné lieu dans la CGT, le Mouvement syndical français et international à des débats allant parfois jusqu’à la division et la scission. Ils furent depuis la naissance de la CGT animés d’une part par les tenants d’une vision réformiste et de collaboration de classe avec la bourgeoisie et d’autre part par les partisans d’une conception de luttes des classes et de rupture avec le capitalisme! Pour autant ce sont, ses débats, ses victoires et ses défaites qui ont forgé la CGT tout au long de son histoire, une histoire fondée sur les valeurs inséparables qui sont celles du Mouvement ouvrier français et international. Pendant près d’un siècle, elles ont valu un grand prestige international à la CGT !


Au fond cette crise de la CGT peut contribuer à clarifier bien des choses. Si elle lui fait courir des risques évidents elle lui offre également l’opportunité de se dépasser en prenant les décisions qui s’imposent et que réclament un grand nombre de ses adhérents afin d’en sortir par le haut. C’est ce que propose l’appel “Défendons la CGT » d’ores et déjà soutenu par près de 700 militants et militantes et des dizaines d’organisations, nombre qui ne cesse de progresser. C’est la raison pour laquelle je le soutiens!

IL faut des actes forts, inciter partout à la libre parole, se réapproprier la CGT et décider par nous mêmes comme avec les travailleurs de quelle CGT nous avons besoin!

C’est pourquoi Thierry Lepaon doit démissionner, il est devenu un obstacle à l’unité et la cohésion de la CGT mais c’est également le cas du bureau confédéral, et de la commission exécutive confédérale. Ils ont perdu toute légitimité. Enfin il faut que le CCN comme il en a le pouvoir décide d’un Congres extraordinaire dans les meilleurs délais ! Le CCN doit mettre en place un collectif transitoire jusqu’au Congrès avant la fin de 2015 afin d’animer le travail confédéral et impulser la bataille revendicative, les luttes et la préparation du 51ème Congrès de la CGT.

Jean-Pierre Page
Ancien membre de
la Commission exécutive confédérale de la CGT



Edité le 03-01-2015 à 18:35:39 par Xuan


Xuan
Le site oùvalacgt publie :

Samedi 3 janvier 2015

CGT : crise d'orientation derrière la crise de direction !



La CEC a donc pris une double décision : faire sauter le fusible Lafont qui a démissionné de son poste de trésorier, et convoquer un CCN officiel pour le 13 janvier… mais sans ordre du jour bien défini ! Toutes les manœuvres sont donc encore possibles et on n’est pas à l’abri de nouvelles surprises d’ici là (l'ordre du jour proposé le 16 décembre, limité à l'évolution des responsabilités et à la définition de règles financières montrent bien la contre-offensive en cours).

Pour rappeler les faits et les manœuvres d’appareil, nous mettons ci-contre un article des Echos de Leila de Comarmond (du 8 décembre) et un article du blog du Monde de Michel Noblecourt (du 9 décembre) deux journalistes qui ont manifestement leurs sources au sein même de la direction de la CGT – ce qui prouve que tout le monde n’a pas le cul propre… (nous en profitons pour rappeler que le blog « Où va la CGT ? » n’a, lui, pas de source au sein des principaux responsables de notre syndicat, d’où des lacunes et autres approximations constatées ici ou là). Mais ces articles journalistiques sans grand intérêt pour ce qui est de l’analyse de ce qui se passe dans la CGT, rappellent malgré tout les principaux événements de ces derniers jours.


Nous diffusons également l’intervention détaillée de A. Alphon-Layre résumant les divers volets de l’affaire, vu du côté de la direction confédérale).



L’échéance repoussée à la mi-janvier, on a donc eu un peu de temps pour faire le point sur la manière dont l’affaire est traitée en interne.
Dans les syndicats, c’est l’incompréhension et le désarroi, le sentiment d’une trahison grave pour ce qui semblait être le dernier instrument de protection. Malgré la méfiance et les pratiques de collaboration rejetées par une partie des syndiqués (et anciens syndiqués !), la CGT restait perçue comme un instrument indispensable pour résister aux offensives du capital. Et voilà que l’on étale les turpitudes du secrétaire général sur la place publique, comme pour les politiciens de l’UMP ou du PS, comme les patrons, leurs revenus et parachutes dorés… Bien sûr, les montants ne sont pas du même niveau, mais le plus grave, c’est que c’est la même logique de « profiter », de l’enrichissement personnel. Le sentiment que non, à la CGT, on ne « doit » pas faire cela.

Double réaction donc : défendre le syndicat (car bien entendu cette attaque est intéressée, comme chaque fois), et se débarrasser au plus vite d’un dirigeant qui salit la CGT. Mais pas plus d’interrogations sur pourquoi on en est arrivé là, d’où vient le ver qui est dans le fruit, et comment y remédier. C’est sur cette vague que surfent les plus modérés des critiques comme JP Mercier de Lutte Ouvrière qui en reste à « il vaudrait mieux pour tout le monde qu’il s’en aille » (voir la vidéo ICI sur le site de la CGT PSA Aulnay).

Dans toute la CGT, c’est un cataclysme à caractère historique. Nous mettons en ligne ci-dessus un copieux document qui compile l’ensemble des déclarations (originales) que nous avons trouvées, soit reçues directement sur le blog, soit rassemblées ici ou là. 83 déclarations, 150 pages, c’est plus qu’instructif et tout à fait inédit à la CGT (attention, 12Mo, c’est un peu long à télécharger). On en trouvera d’autres sur le site des libertaires dans la CGT, la compilation complète reste à faire !

On lira donc avec intérêt les réactions outrées des syndicats, des UL, UD et FD qui appellent à la démission et à un congrès extraordinaire, les fayots (comme les CR Aquitaine et Bretagne, ou l’UD 33) qui soutiennent carrément le secrétaire, les déclarations embarrassées de ceux qui le soutiennent sans oser l’assumer ouvertement (Energie, métallurgie…), les prises de position ambiguës des structures confrontées à des problèmes similaires (Commerce, Ports et Docks) etc.
Par ailleurs, nouveau fait tout aussi historique, la Confédération a été contrainte à réagir, à mettre en ligne tout un dossier, que nous avons sauvegardé ICI.

Nous ne reviendrons pas ici sur les soutiens plus ou moins francs du secrétaire général, dont on se demande comment on a pu arriver à le désigner à ce poste…
Parmi les critiques et exigences, on peut les distinguer de deux ordres.

Celles qui en appellent à la démission globale du Bureau Confédéral, et qui appellent le CCN à reprendre la main sur les affaires de la CGT . Il y a là un malentendu intéressé : en appeler au CCN, c’est imaginer qu’il peut mettre en œuvre une rectification, c’est défendre le CCN. Ce n’est pas notre cas ; nous voulons juste rappeler vite fait ici une petite liste des casseroles qui trainent dans la CGT, pour les organisations du CCN : le Commerce et ses turpitudes, les Ports et Docks et les pratiques mafieuses dans le nettoyage, la FERC et les embrouilles dans l’enseignement privé, la Santé avec les manœuvres de Prigent, l’Energie avec le CCAS EdF, les Cheminots avec les CER SNCF, les Territoriaux avec le CG59 et autres, l’intégration des militants CFDT aux Banques et Assurances, les embrouilles à la CGT Pôle Emploi (organismes sociaux) après la fusion ANPE ASSEDIC, la Construction avec les affaires Dalkia, Forclum, Cegelec il y a quelques années, les contradictions dans la Métallurgie (Nord Pas de Calais), la tentative de suppression de la CGT Chômeurs, les conflits à la NVO et au siège de Montreuil, etc. la liste est loin d’être close. Pour les départements, on les voit s’aligner sans sourciller sur les fédérations au moindre conflit, voir le Nord à propos du CG59, le Gard (avec ses propres histoires), le Bas Rhin avec le Commerce, les contradictions dans le 94 et ainsi de suite.
Imaginer donc que le CCN va pouvoir faire le ménage et la grande lessive est un doux rêve, et comme nous avons eu l’occasion de l’écrire, « ils se tiennent tous par la barbichette ». Ce qui explique d’ailleurs que Thierry Lepaon soit toujours là…
Par ailleurs, l’appel à la démission de la totalité du Bureau Confédéral apparaît comme radical, mais c’est un moyen d’escamoter le problème Lepaon d’une part, ainsi que l’appel à un congrès extraordinaire d’autre part : c’est ramener l’affaire à un « dysfonctionnement » collectif, c’est d’abord un contre-feu pour éviter que la contestation ne se répande, et qui en plus limite la discussion au sommet. Il est plus que probable que cette proposition vienne en soutien indirect à Thierry Lepaon, en le dédouanant de toute faute personnelle…

Ceux qui appellent à la démission immédiate de Thierry Lepaon et à convoquer un Congrès confédéral extraordinaire. C’est la position la plus correcte et nous l’appuyons. Non pas que nous ayons quelques illusions sur une supposée démocratie retrouvée dans la CGT et sur les résultats d’un tel congrès extraordinaire, mais c’est la position qui met les pieds dans le plat sans botter en touche et sans diluer les responsabilités (Lepaon démission, tout de suite !) et qui ouvre une nouvelle phase de débat général dans l’organisation sur la base de la catastrophe actuelle. C’est la position la plus favorable au débat de fond dans la CGT.
Nous invitons tous les syndicats et structures de base (les UL en particulier) à s’emparer du débat, à prendre position, à transmettre leur avis. Certains l’ont déjà fait (voir la compilation), mais il faut généraliser la protestation, et ne pas se contenter de la laisser entre les mains des responsables fédéraux ou départementaux. On notera avec intérêt que certaines de ces structures (comme l’UD 31) poussent dans le même sens.

Car ce qui se passe dans la confédération n’est pas d’abord une affaire de démocratie , comme le mettent en avant bon nombre de critiques, comme s’il suffisait de changer quelques responsables, quelques règles de fonctionnement, comme si l’orientation était bonne, mais pervertie par quelques éléments dévoyés… On voit poindre ici ou là quelques critiques, en particulier sur les positions récentes de la Confédération (dont les dernières prises de position sur la représentation du personnel – voir la déclaration du secrétaire de l’UD du Cher, ICI), mais cela reste conjoncturel et marginal.

Nous le répétons, et nous constatons que nous sommes bien seuls à oser aborder frontalement la question : il y a des centaines de Thierry Lepaon à débarquer à la CGT (voir l'article de ce blog ICI), et plus largement, c’est tout le système de cogestion du capitalisme qui est en cause . Gestion de la Sécu, des Mutuelles et Complémentaires santé, de l’UNEDIC, de la Formation Professionnelle, participation aux Conseils Economiques et Sociaux à tous les niveaux (national, régional…), aux multiples agences paritaires, gestion des Comités d’Entreprises (CCAS EdF, CER SNCF, Eurodisney ou partout ailleurs), on ne compte plus les responsables CGT investis, au sens propre, dans des structures de gestion, à gérer des dizaines de milliers, des centaines de milliers, des millions d’euros.
Que croyez-vous qu’il se passe ? Quand on a abandonné, depuis belle lurette, une perspective anti-capitaliste (rappelons-nous la CGT en mai 1968…), et bien l’habit fait le moine. C’est le même phénomène chez les hommes politiques, pareil : ils en croquent. Pas tous bien sûr, mais beaucoup, surtout quand on est investis dans ces structures.

« Rendre la CGT à ses syndicats » ?, bien sûr, mais sur quelle orientation ? Faut-il rappeler comment les positions réformistes se sont répandues à tous les niveaux depuis bien longtemps, sur tous les sujets, la défense du nucléaire et la méfiance envers l’écologie, la défense de l’emploi industriel capitaliste (voir encore le colloque organisé récemment par la CGT dans le Nord sur le sujet), du paritarisme, la régularisation des sans-papiers au cas par cas et le refus de défendre la régularisation sans condition, l'abandon dans les faits du combat contre la pénibilité et la sous-traitance à quelques rares secteurs prêts, la défense d’un service public hors de tout contenu de classe etc. etc. ce sont tous les articles de ce blog qu’il faudrait ici citer…

Derrière la crise de direction pointée un peu partout se cache une crise d’orientation, dont la première manifestation – limitée – est l’attitude à avoir relativement au gouvernement Hollande/Macron/Valls. La question est donc bien celle d’une orientation syndicale de classe, et de la rupture nécessaire pour y parvenir. Et ça ne va pas se faire dans la soie, et on voit bien tous celles et ceux qui vont s’accrocher, becs et ongles à leurs fauteuils… Imaginer le changement de la CGT par en haut est un rêve sans issue, dont font régulièrement les frais des générations de militants combatifs, purement et simplement éliminés parce que devenus gênants. Les derniers en date, les camarades du Conseil Général du Nord, débarqués à la veille des élections, provoquant la perte de 5 sièges sur 9 pour la CGT au CG…
La rupture, le retour au syndicalisme de classe passent par le débat, la bataille politique, l’affrontement sur l’orientation fondamentale, sur la séparation nette des intérêts des travailleurs et des intérêts du capital, sur la délimitation des camps, de qui sont nos amis et qui sont nos ennemis, et de ce que nous ne voulons plus dans cette société barbare… C’est à partir de là qu’on va pouvoir définir ce que nous voulons, et comment y arriver.
Et parmi les choses que nous ne voulons plus, c’est la collaboration de classe avec nos exploiteurs , c’est en finir avec une cogestion qui brouille les cartes et entretient la confusion…

L’appel « Pour défendre la CGT »
Nous avons reçu (au moins six exemplaires d’origines différentes !) un appel lancé début décembre à l’initiative de Charles Hoareau (Bouches du Rhône), des responsables régionaux et départementaux du Cher et du Centre, et de JP Page, ex responsable international de la CGT et proche du PRCF.
Projet d’appel qui aurait dû rester interne (?) pour certains, mais il est en fait largement public (voir ICI).
Ce texte appelle au départ immédiat des responsables indignes, a pour objectif de s’adresser au CCN à qui on doit « redonner tout le pouvoir », relève dans la CGT des dérives depuis « presque vingt ans » à partir des notions du « syndicalisme rassemblé », en appelle à un congrès extraordinaire qui donne la parole aux syndiqués, et à la résistance face aux politiques anti-sociales.
Seule initiative d’opposition large connue, elle a des aspects positifs (l’appel à la démission de Lepaon, à un congrès extraordinaire, la résistance face aux politiques antisociales du gouvernement) mais aussi des limites (l’appel au CCN, dater les dérives de la CGT d’il y a seulement vingt ans (la CGT en 68… ???), mettre en avant la démocratie pour résoudre la crise actuelle…).
Le débat a lieu très largement en ce moment dans la CGT, sur tous les sujets et tous les thèmes, avec ou sans cet appel. Alors, à chacun(e) de juger de l’intérêt de le signer selon les contextes,..

L’affrontement au gouvernement Hollande/Valls/Macron
Une chose est sûre. Une des démarcations au sein de la CGT porte sur l’attitude à adopter face au gouvernement. Un secteur important dans les syndicats (et pas d’abord dans les structures qui n’en sont que le reflet déformé ) n’en peut plus du rouleau compresseur des attaques, les unes derrière les autres, sur tous les terrains, et appelle à une réaction claire et nette, organisée et centrale, à un plan offensif et ambitieux contre le gouvernement. Cela réunit les syndicats combatifs, tous les opposants, l’appel « Défendre la CGT » et bien d’autres, y compris parmi les responsables des structures, comme on a pu voir lors des manifestations du Front de Gauche, les 12 avril et 15 novembre.
C’est un premier pas positif, nous l’avons déjà dit, et s’il en sort quelque chose il faudra s’y associer. Mais cela ne fait pas une démarcation de classe, il y a bien des manières de s’opposer à Hollande, y compris dans des visions différentes de la gestion de la paix sociale…
L’heure est donc à la critique sur le fond de la direction et de l’orientation de la Confédération, en lien avec la crise du capital et des tentatives désespérées de le réformer, sous une forme brutale à la sauce MEDEF/Macron, ou sous une forme nuancée mais illusoire de capitalisme à visage humain…

> Lepaon démission, tout de suite !

> Il faut convoquer un congrès extraordinaire de la CGT !

> Que tous les militants, syndicats et UL s’emparent du débat, que cent fleurs s’épanouissent, que le débat se généralise partout sur les orientations confédérales !

> Non à la collaboration de classe dans la cogestion du capitalisme, vive le syndicalisme de classe !



Edité le 03-01-2015 à 18:37:26 par Xuan


 
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