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Xuan
Ci-dessous un article signé Lordon dans le Monde Diplo de mars 2014, et qu'on peut retrouver en édition intégrale sur le blog du diplo. On peut y lire : "le parti socialiste c'est la droite ! La Droite Complexée" :


LES IRRESPONSABLES DU PACTE DE RESPONSABILITE
Les entreprises ne créent pas l’emploi


mercredi 26 février 2014, par Frédéric Lordon


Il faut avoir sérieusement forcé sur les boissons fermentées, et se trouver victime de leur propension à faire paraître toutes les routes sinueuses, pour voir, comme s’y emploie le commentariat quasi-unanime, untournant néolibéral dans les annonces récentes de François Hollande [1]. Sans porter trop hauts les standards de la sobriété, la vérité appelle plutôt une de ces formulations dont Jean-Pierre Raffarin nous avait enchantés en son temps : la route est droite et la pente est forte — mais très descendante (et les freins viennent de lâcher).

Entreprise, mon amour ?


En effet, droit, c’est droit ! Et depuis l’origine. Evidemment, pour s’en apercevoir, il aurait fallu prêter un peu plus attention aux six premiers mois de la présidence Hollande, où tout a été posé pour cinq ans, et les actes et la logique des actes.
Ce texte est la version longue de l’article paru dansLe Monde diplomatique de mars 2014. Les actes d’abord, en une séquence impressionnante de cohérence : ambassade du premier ministre à l’université du MEDEF, reculade devant les « pigeons », rapport Gallois, consécration législative de l’ANI (Accord National Interprofessionnel) — et tout le reste à l’avenant : Jérôme Cahuzac qui n’a « jamais cru à la lutte des classes » [2], heureusement remplacé par Bernard Cazeneuve qui voit, lui, distinctement que « les entreprises ne sont pas des lieux d’exploitation ou d’accumulation de profit » [3], l’un puis l’autre sous la tutelle éclairée de Pierre Moscovici qui pense que « pour lutter contre l’exil fiscal, il faut avant tout valoriser le site France qui doit être accueillant pour les entreprises, les talents » [4], qu’il ne doit pas y avoir de loi sur les rémunérations patronales, matière en laquelle il faut préférer « agir dans le dialogue (...) et miser sur une autorégulation exigeante » [5], qui pense tellement de choses d’ailleurs... Essentiellement résumable à une : « les entreprises sont au cœur de notre politique économique » [6].

Et voilà énoncée la logique des actes. Pauvre logique qui transpire les stratégies du désespoir et de la renonciation. Car les tendances longues de la trahison idéologique se mêlent ici aux calculs égarés de la panique quand, ayant abandonné toute idée de réorienter les désastreuses politiques européennes, ayant même fait le choix de les durcir un peu plus avec le TSCG, et par conséquent privé de toute possibilité de relance, il ne reste plus pour se sauver du naufrage complet que le radeau de la Méduse : « l’entreprise » comme ultime providence, c’est-à-dire... le MEDEF comme planche de salut. Formidable effort de la vie sauve et géniale trouvaille au bord de l’engloutissement : « La seule chose qu’on n’a pas essayé, c’est de faire confiance aux entreprises » [7]. Ah ! la riche idée : faire confiance aux entreprises... Faire confiance au preneur d’otages en se jetant dans ses bras, persuadé sans doute que l’amour appelle invinciblement l’amour — et désarme les demandes de rançon.

La prise d’otages du capital


Contrairement à ce qu’exclamerait dans un unisson d’horloges synchronisées la cohorte éditorialiste, scandalisée qu’on puisse parler de « prise d’otages », il n’y a pas une once d’outrance dans le mot, dont il faut même soutenir qu’il est analytiquement dosé au plus juste. Il est vrai que l’altération perceptive qui fait voir les droites sous l’espèce de la courbure est en accord avec cette autre distorsion qui conduit à voir des « prises d’otages » partout — chez les cheminots, les postiers, les éboueurs, et plus généralement tous ceux qui se défendent comme ils peuvent des agressions répétées dont ils sont l’objet —, sauf où il y en a vraiment. Il est vrai également que le capital a pour lui tous les privilèges de la lettre volée d’Edgar Poe [8], et que sa prise d’otages, évidente, énorme, est devenue invisible à force d’évidence et d’énormité. Mais par un effet de cécité qui en dit long sur le pouvoir des idées dominantes, pouvoir de faire voir le monde à leur manière, en imposant leur forme au réel, et en rendant invisible tout ce qui pourrait les contredire, par cet effet de cécité, donc, la plus massive des prises d’otages est devenue la moins remarquée, la plus entrée dans les mœurs.

Or, comme Marx l’avait remarqué, le capitalisme, c’est-à-dire le salariat, est une prise d’otage de la vie même ! Dans une économie monétaire à travail divisé, nulle autre possibilité de reproduire la vie matérielle que d’en passer par l’argent du salaire... c’est-à-dire l’obéissance à l’employeur. Et s’il n’y avait eu la conquête de haute lutte des institutions de la protection sociale, on ne voit pas bien ce qui séparerait la logique profonde de la mise au travail capitaliste d’un pur et simple « marche ou crève ».

Le capital ne prend pas en otage que la vie des individus séparément, mais également — en fait d’un seul et même tenant — leur vie collective, celle-là même dont la politique est l’expression, et qui donne normalement à la politique son objet. Mais voilà, l’objet de la politique est dans les pattes d’un autre : le capital. Cette captation a pour principe majeur que toute la reproduction matérielle, individuelle et collective, est désormais entrée sous la logique de l’accumulation du capital : la production des biens et des services qui reproduisent la vie matérielle n’est plus effectuée que par des entités économiques déclarées capitalistes et bien décidées à n’opérer que sous la logique de la marchandisation profitable. Et pour principe mineur la capacité d’initiative dont jouit le capital : le capital financier a l’initiative des avances monétaires qui financent les initiatives de dépenses du capital industriel — dépenses d’investissement ou dépenses de recrutement. Aussi les décisions globales du capital déterminent-elles le niveau général de la conjoncture, c’est-à-dire les conditions dans lesquelles les individus trouvent les moyens — salariaux — de leur reproduction. C’est ce pouvoir de l’initiative, pouvoir d’impulsion du cycle de la production, qui confère au capital une place stratégique dans la structure sociale d’ensemble — la place du preneur d’otages, puisque tout le reste de la société n’en finit pas d’être suspendu aux décrets du capital et à son bon vouloir.

Sous la menace de la grève de l’investissement


Sans doute l’intensité de la prise d’otages se trouve-t-elle modulée par la configuration historique concrète du capitalisme au moment considéré. Le rapport de force entre le capital et le travail, on pourrait même dire entre le capital et tout le reste de la société, n’est pas le même lorsque le commerce international, les investissements directs et les mouvements de capitaux sont très régulés, et lorsqu’ils ne le sont pas. C’est d’ailleurs le propre du néolibéralisme que d’avoir accru quasiment sans limite les possibilités stratégiques du capital, en abattant systématiquement les barrières qui jusqu’ici retenaient ses calculs.

Il fallait donc avoir l’humanisme chrétien, ou la bêtise crasse, chevillée au corps pour s’imaginer que le capital pourrait, comme toute puissance en marche, ne pas pousser son avantage jusqu’à sa dernière extrémité , et pour croire qu’il trouverait de lui-même les voies de la décence ou de l’autorégulation. Or cette « dernière extrémité », très exactement appuyée à la capacité d’initiative qu’on vient de décrire, consiste en ce que le capital est en mesure d’exiger de la société qu’il soit fait droit à toutes ses demandes pour que l’initiative soit effectivement lancée. Faute de quoi il pratiquera la grève de l’investissement — « grève », n’est-ce pas là le mot qui, dans la boîte à deux neurones de l’éditorialiste quelconque, déclenche habituellement l’association avec « prise d’otages » ?

Bien sûr pour qu’il y ait arc électrique dans cette boîte-là, il faudrait que cette grève, d’un genre spécial, se donne à voir sous des formes plus standard. Or ni piquet, ni banderole, ni brasero dans les grèves du capital, mais plutôt une retenue silencieuse — de l’investissement —, accompagnée d’un lamento bruyant, lamento de la création empêchée, à base d’énergies qui voudraient tant être libérées (et qui sont tant bridées), d’étouffement règlementaire et de strangulations fiscales, ou plus subtilement d’attractivité du territoire (médiocre) et par conséquent de fuite des talents, bref le discours du positif contrarié — pour ainsi dire le discours des forces de la vie, que seule une perversité mortifère peut avoir l’idée de retenir.

Evidemment le discours du positif a le gros bâton du négatif sous la main. Car si la société n’exécute pas les quatre volontés du capital, le capital a les moyens de le faire sentir à la société — et ceci du fait même qu’il a capté la maîtrise entière de sa reproduction matérielle. Il faut alors prendre un peu de recul pour mieux mesurer l’ampleur de la prise d’otages, et l’efficacité du rançonnement, depuis la suppression de l’autorisation administrative de licenciement au milieu des années 80 jusqu’aux dispositions scélérates de l’ANI, en passant par la baisse de l’impôt sur les sociétés, la défiscalisation des stock-options, les atteintes multiples au CDI, le travail du dimanche, etc., liste interminable de butins de guerre, dont il faut comprendre qu’elle est vouée à s’allonger indéfiniment tant qu’il ne se trouvera pas en face de la puissance du capital une puissance de même échelle mais de sens opposé pour le ramener autoritairement à la modération, car, la liste précédente l’atteste suffisamment, le capital n’a aucun sens de l’abus .

Le capital-enfant


Intensifiée comme jamais par la configuration institutionnelle du néolibéralisme, la capture — la prise d’otages — constitutionnelle au capitalisme a porté le rançonnement de la société entière à des degrés inouïs, mesurables par l’impudence déboutonnée de ses ultimatums. Le capital ne négocie plus avec la société : il extorque. Pourquoi se gênerait-il ? Sous le nom de « mondialisation », la situation structurelle a été aménagée pour maximiser son pouvoir matériel et symbolique, et il est dans la (tauto)logique des choses qu’une puissance à laquelle a été ôtée toute limite ne connaisse plus de limite. C’est pourquoi le capital désormais dicte ses demandes — on prétend que le pacte de responsabilité a été livré à Hollande clé en mains par Gattaz qui s’en défend à peine —, à défaut de quoi, il bloquera tout.

La compréhension de ce blocage demande alors de sortir de l’abstraction macroscopique du « capital » pour se transporter dans les psychés patronales ordinaires, et y observer in situ moins le cynisme ouvert de l’institution MEDEF que le sentiment du « bon droit » des patrons individuels, sentiment d’une évidente légitimité, ou bien celui d’une véritable offense au moindre refus, et la réaction totalement infantile du « si c’est comme ça... » qui s’en suit invariablement — « si c’est comme ça, je m’en vais », « si c’est comme ça la France n’aura plus mon talent », « si c’est comme ça, je paye mes impôts ailleurs », « si c’est comme ça, mon énergie n’est plus du tout libérée », « si c’est comme ça, je ne peux pas innover », « si c’est comme ça, je n’embaucherai pas » .

L’hypothèse infantile est décidément la bonne puisque la perte des limites fait invariablement remonter la part de l’enfant-tyran. A l’image de la psychologisation générale de la société, une des tendances les plus profondes du néolibéralisme, le débat politique se trouve donc entraîné dans une effarante régression où ne comptent plus que les conditions du confort psychique de l’enfant-patron. Pierre Gattaz réclame qu’on lui évite toute disposition « stressante » . Mais c’est sans doute Fleur Pellerin qui va le plus loin dans la grammaire du dorlotement en reconnaissant bien volontiers que « le milieu entrepreneurial a encore besoin de preuves d’amour » [9]. Voilà donc où nous en sommes : pour obtenir des patrons qu’ils daignent faire leur travail, la société doit leur témoigner de « l’amour », et surtout veiller à leur éviter toute contrariété. Stade ultime de la prise d’otages, où le preneur d’otages, en plus de la rançon, réclame d’être aimé, l’extorsion matérielle cherchant à se prolonger sous une forme délirante en extorsion affective.

Et c’est avec ce genre de complexion que la Droite Complexée du président Hollande imagine passer un pacte de responsabilité ! idée folle conduisant inévitablement à se demander lequel des deux « contractants » est le plus irresponsable, le capital-enfant qui ne connaît plus aucun frein et violentera jusqu’au bout la société otage, ou le gouvernement qui persiste, contre toute évidence, à en faire un partenaire « responsable ». Il faut en tout cas avoir au choix la franche bêtise ou, plus probablement, le cynisme retourneur de veste de M. Montebourg pour oser dire que le pacte consiste en « une réconciliation de la nation autour de l’entreprise » , en contrepartie de laquelle il est attendu que « l’entreprise secoure la nation » [10].

La curieuse science expérimentale
des baisses de cotisations


Supposé qu’il passe parfois dans quelque esprit gouvernemental l’ombre d’un doute, le capital, lui, ne se pose pas ce genre de question. Tout à sa poursuite des coudées larges et de la suppression fiscale, il demande, menace... et obtient. Bref il commande. De toutes ses revendications, la plus constamment réaffirmée a pour objet les cotisations sociales — les « charges » — et le voilà de nouveau satisfait. Mais d’une satisfaction qui va s’usant — avec la force de l’habitude — et réclame sans cesse des montants plus importants pour se soutenir. C’est pourquoi — assez d’être timoré ! — Pierre Gattaz se propose toutes les audaces de l’arrondi supérieur : 100 milliards de réduc’, c’est beau, c’est net, pas compliqué à retenir, maintenant, donc, il nous faut 100 milliards. Double effet caractéristique de l’addiction et de l’accoutumance, le capital déclare qu’il ne peut plus vivre, et donc qu’on ne pourra pas compter sur lui, s’il n’a pas sa dose. Le fait est que depuis presque trois décennies de pratique intensive des baisses de cotisations sociales, sans compter les aides variées à l’emploi et les allègements de toutes sortes — Gérard Filoche en estime le total à 65 milliards d’euros [11], soit 3 bons points de PIB tout de même —, le capital n’a même plus à chercher la seringue : il a le cathéter branché à demeure.

Mais le vrai mystère dans toute cette affaire réside bien dans le fait même de politiques entretenues depuis si longtemps alors que leur inefficacité est si continûment avérée — elle, pour des raisons qui n’ont rien de mystérieux : parce que le coût salarial complet n’est qu’une fraction relativement modeste du coût total (25 %) [12] et que même les 100 milliards de Gattaz n’aboutiraient qu’à une baisse du coût de production de 3,5 % [13], une misère à la merci du moindre renchérissement de matière première, pour ne rien dire d’un mouvement de change d’un compétiteur extra-européen. A ce propos, et dans le registre du passeur de plats, signalons le commentaire tout de bienveillance de Daniel Cohen pour qui il ne faut voir dans le pacte de responsabilité « aucune conversion idéologique » [14] mais une simple « option pratique » , le pacte consistant, « privé de l’arme monétaire, (...) à gagner en compétitivité (...) par une dévaluation fiscale » . Ceci, d’ailleurs, avant de suggérer « d’indexer [les prestations] des systèmes sociaux sur la croissance » , soit la proposition même du MEDEF, et cette remarquable convergence du patronat, de la Droite Complexée et de ses économistes de service ne peut en effet être mise au compte d’aucune « conversion idéologique » — à l’évidence, l’unanimité spontanée des raisonnables.

Mais que dire également de l’imitation de tous les pays européens dans la course à la baisse du coût du travail, sinon qu’elle n’a pas d’autre effet que l’attrition générale des standards sociaux sans le moindre gain de compétitivité puisque celle-ci n’est jamais qu’un avantage différentiel ,comme tel annulé par son adoption généralisée. Ou encore de la théorie dite du wage-gap , soutenant que le chômage est un effet de déséquilibre de l’offre et de la demande sur le marché du travail dû à un excès du prix du travail, sinon qu’elle est fausse et archi-fausse [15].

Mais aucune de ces évidences n’a la moindre prise, ni sur le patronat évidemment — il ne faut pas trop demander —, ni sur le commentariat qui jacasse la baisse des charges à l’unisson du MEDEF, ni surtout sur le gouvernement socialiste à qui pourtant ces conneries coûtent les yeux de la tête ! Le voilà alors le vrai pouvoir des idées dominantes : le pouvoir de se maintenir envers et contre tout , contre toutes les objections de l’analyse et contre toutes les infirmations du réel — et il n’en a pas manqué depuis plus de vingt ans de baisses continues de tout et de stagnation prolongée dans le chômage de masse. Le pouvoir des idées dominantes, c’est ce privilège des épistémologies asymétriques, c’est-à-dire d’un rapport totalement distordu à l’expérience : on poursuivra pendant des décennies, et jusqu’au bout, la mise en œuvre du faux que l’on continuera, contre toute évidence, de déclarer le vrai, là où on ne laisserait pas six mois à une tentative authentiquement alternative.

Car il faut s’efforcer d’imaginer un programme de rupture avec le néolibéralisme et surtout se figurer ce que serait la réaction du commentariat aux turbulences qui suivraient nécessairement d’une refonte de l’ordre institutionnel du capitalisme (encore ne parle-t-on même pas ici de sortie du capitalisme ...) : glapissements et hauts cris, rappels à l’ordre de la « raison économique », avertissements que ça ne marche pas et que ça ne marchera jamais, injonction à faire une démonstration immédiate d’efficacité, quand le néolibéralisme ne cesse, lui, de nous appeler à la sagesse du long terme (où « s’obtiennent vraiment ses effets »), et de nous renvoyer à la patience, patience des efforts de compétitivité qui « finiront par payer », patience de l’Europe qui sera bientôt sociale, enfin plus tard... — il faudra, donc, se souvenir de cette asymétrie des exigences temporelles, qui somme les uns au court terme et accorde aux autres le long, le très long terme, pour ne pas oublier, si jamais vient un jour le moment de la transformation sociale, de préciser que nous demanderons nous aussi vingt ans et pas une journée de moins.

Les entreprises ne créent pas l’emploi


Mais le pire dans toute cette affaire c’est peut-être l’irrémédiable inanité de la stratégie Hollande et de ses conseillers, esprits entièrement colonisés par la vue MEDEF du monde et qui n’ont d’autre point de départ de toutes leurs réflexions que la prémisse, l’énoncé princeps du néolibéralisme, il est vrai répété partout, entré dans toutes les têtes sur le mode de l’évidence au-delà de toute question : « ce sont les entreprises qui créent l’emploi » . Cet énoncé, le point névralgique du néolibéralisme, c’est la chose dont la destruction nous fait faire un premier pas vers la sortie de la prise d’otages du capital.

En tout cas, derrière « les entreprises ne créent pas d’emploi » il ne faut certainement pas voir un énoncé à caractère empirique — que les vingt dernières années confirmeraient pourtant haut la main en tant que tel... Il s’agit d’un énoncé conceptuel dont la lecture correcte n’est d’ailleurs pas « les entreprises ne créent pas d’emploi » mais « les entreprises ne créent pas l’emploi » . Les entreprises n’ont aucun moyen de créer par elles-mêmes les emplois qu’elles offrent : ces emplois ne résultent que de l’observation du mouvement de leurs commandes dont, évidemment, elles ne sauraient décider elles-mêmes, puisqu’elles leur viennent du dehors — du dehors, c’est-à-dire du bon-vouloir dépensier de leurs clients, ménages ou autres entreprises.

Dans un éclair de vérité fulgurant autant qu’inintentionnel, c’est Jean-François Roubaud, président de la CGPME et Saint Jean Bouche d’or, qui a vendu la mèche, à un moment, il est vrai, voué à être puissamment révélateur : le moment de la discussion des « contreparties ». Comme on sait à l’instant T moins epsilon qui précède la conclusion du « pacte », le patronat jure sur la tête du marché qu’il s’en suivra des créations d’emplois par centaines de mille et, comme de juste, à l’instant T plus epsilon on n’est tout d’un coup plus sûr de rien, il faudra voir de près, ne nous emballons pas, en tout cas il faut nous faire confiance.

Et voilà ce gros nigaud de Roubaud qui déballe tout sans malice ni crier gare : « encore faut-il que les carnets de commandes se remplissent... » [16] répond-il en toute candeur à la question de savoir si « les entreprises sont prêtes à embaucher en échange » [17]. C’est pas faux Roubaud ! Or si les entreprises « produisaient » elles-mêmes leurs propres carnets de commandes, la chose se saurait depuis un moment et le jeu du capitalisme serait d’une déconcertante simplicité. Mais non : les entreprises enregistrent des flux de commandes sur lesquels elles n’ont que des possibilités d’induction marginale (et à l’échelle agrégée de la macroéconomie aucune possibilité du tout [18]) puisque ces commandes ne dépendent que de la capacité de dépense de leurs clients, laquelle capacité ne dépend elle-même que de leurs carnets de commande à eux [19], et ainsi de suite jusqu’à se perdre dans la grande interdépendance qui fait le charme du circuit économique.

A quelques variations près, réglées par la concurrence inter-firmes, la formation des carnets de commandes, dont Roubaud nous rappelle — pertinemment — qu’elle décide de tout, ne dépend donc pas des entreprises individuellement, mais du processus macroéconomique général . En situation de passivité face à cette formation de commandes, qu’elles ne font qu’ enregistrer , les entreprises ne créent donc aucun emploi, mais ne font que convertir en emplois les demandes de biens et services qui leurs sont adressées. Là où l’idéologie patronale nous invite à voir un acte démiurgique devant tout à la puissance souveraine (et bénéfique) de l’entrepreneur, il y a donc lieu de voir, à moins grand spectacle, la mécanique totalement hétéronome de l’offre répondant simplement à la demande externe.

On dira cependant que les entreprises se différencient, que certaines réduisent mieux leurs prix que d’autres, innovent plus que d’autres, etc. Ce qui est vrai. Mais n’a in fine d’effet que sur la répartition entre elles toutes de la demande globale... laquelle demeure irrémédiablement bornée par le revenu disponible macroéconomique. Ne peut-on pas aller chercher au dehors un surplus de demande au-delà de la limite du revenu interne ? Oui, on le peut. Mais le cœur de l’argument n’en est pas altéré pour autant : les entreprises enregistrent, à l’export comme à domicile, des demandes que, par construction, elles ne peuvent pas, individuellement, contribuer à former, et elles se borneront (éventuellement) à convertir ces commandes en emplois. En d’autres termes, les emplois ne sont que le reflet de demandes passivement perçues. Aucun geste « créateur » du type de celui que revendique l’idéologie patronale là-dedans. Les entrepreneurs et les entreprises ne créent rien (en tout cas en matière d’emploi) — ce qui ne veut pas dire qu’elles ne font rien : elles se font concurrence pour capter comme elles peuvent des flux de revenu-demande, et font leur boulot avec ça.

Non pas les entreprises : la conjoncture


Tout ceci signifie alors que nous n’avons pas à déférer à toutes leurs extravagantes demandes au motif qu’elles détiendraient le secret de la « création des emplois ». Elles ne détiennent rien du tout. Mais si l’emploi n’est pas créé par les entreprises, par qui l’est-il donc, et à qui devraient aller nos soins ? La réponse est que le « sujet » de la création des emplois n’est pas à chercher parmi les hommes, en vérité le « sujet » est un non-sujet, ou pour mieux dire la création des emplois est l’effet d’un processus sans sujet , un processus dont le nom le mieux connu est la conjoncture économique — terrible déception de ceux qui attendaient l’entrée en scène d’un héros... La conjoncture économique est en effet ce mécanisme social d’ensemble par quoi se forment simultanément revenus, dépenses globales et production. Elle est un effet de composition, la synthèse inintentionnelle et inassignable des myriades de décisions individuelles, celles des ménages qui vont consommer plutôt qu’épargner, celles des entreprises qui lanceront ou non des investissements — et, drame pour la pensée libérale-héroïsante, il faut avoir la sagesse intellectuelle de s’intéresser à un processus impersonnel .

Mais s’y intéresser, on le peut, et très concrètement même ! Car la conjoncture est un processus qui, dans une certaine mesure se laisse piloter. C’est précisément l’objet de cette action qu’on appelle la politique macroéconomique. Mais, de cela, le gouvernement « socialiste » a manifestement abdiqué toute velléité : ligoté par les contraintes européennes qui ont si bien neutralisé toute possibilité de politique économique active, et ayant renoncé par avance à tout effort de retrouver quelque marge de manœuvre en cette matière, il ne lui est plus resté qu’à dévaler avec tout le monde la pente de l’idéologie libérale-entrepreneuriale pour former le puissant raisonnement que « si ce sont les entreprises qui créent les emplois, alors il faut être très gentil avec les entreprises » .

Cependant, n’y a-t-il pas une contradiction à dire que le capital a toute initiative et qu’il prend — activement — la société en otage, quand, par ailleurs, on soutient que les entreprises sont réduites à enregistrer — passivement — des demandes qu’elles n’ont aucun pouvoir de former, et qu’elles n’ont dès lors nulle capacité de « créer l’emploi ». Il n’y a là en fait rien de contradictoire mais l’effet d’une asymétrie d’échelle, et une discontinuité classique quand on passe du microéconomique au macroéconomique. Les entreprises séparément n’ont aucune prise sur rien. C’est la composition de toutes leurs décisions qui fait tout. Mais cette composition est la plupart du temps inintentionnelle et sans cohérence spéciale — on en constate juste le résultat —, puisque c’est précisément le propre d’une économie de marché, c’est-à-dire d’une économie décentralisée que les agents y prennent leurs décisions par devers eux et sans coordination avec les autres. Aussi chacun d’eux est-il renvoyé à son isolement et à sa condition passive.

La situation change lorsque se présente un coordinateur. Le « capital » prend peut-être son sens le plus haut lorsqu’il apparaît ainsi sous l’espèce de la collectivité coordonnée des détenteurs de moyens de production. Certes le capital existe hors de cet état coordonné, et l’on peut bien maintenir qu’il est souverain — et preneur d’otages. Mais c’est un souverain désarticulé — un pur effet de composition acéphale. Et il n’est qu’un preneur d’otages de fait. Disons plus précisément : la société se retrouve otage du processus impersonnel en quoi consiste la synthèse des décisions des propriétaires individuels. Le souverain preneur d’otages ne prend alors vraiment sa forme consistante qu’au moment où le capital accède au stade du pour-soi en se posant, sous l’égide d’un coordinateur explicite (typiquement le MEDEF), comme une unité d’action consciente. C’est par passage du microéconomique au macroéconomique, c’est-à-dire de l’entreprise au capital , qu’apparaît véritablement la lutte de classes à l’échelle de la société entière, soit : un groupe constitué et unifié contre le reste.

On dira que ce capital coordonné se tire une balle dans le pied lorsqu’il s’engage dans son chantage caractéristique de la grève de l’investissement puisque, à gémir que rien n’est possible, il conduit en effet tous ses membres à gémir de concert, et de concert aussi à retenir leurs avances (leurs projets)... c’est-à-dire in fine à torpiller pour de bon la conjoncture dont pourtant ils vivent tous. Se seraient-ils coordonnés sur la position inverse qu’ils ne se seraient pas moins donné raison, mais cette fois en soutenant une conjoncture brillante... telle qu’ils auraient tous contribué à la former. Mais d’une part, le capital, dont Marx rappelait qu’il est incapable de dépasser « ses intérêts grossiers et malpropres » , est le plus souvent hors d’état d’accéder à ce degré de rationalité. Et d’autre part, c’est l’horizon même de ces intérêts grossiers et malpropres qui lui désigne les bénéfices immédiats du chantage à l’investissement, contre lequel il espère bien ramasser autant d’avantages en nature (exonérations de toutes sortes, réglementaires et fiscales) que possible — et c’est une rationalité qui en vaut une autre : non pas la rationalité de l’entrepreneur mais celle de l’extorsion. Et si, par une asymétrie caractéristique, le capital refuse, au nom d’un argument idéologique, la coordination positive de l’investissement (« que le libre marché fasse son œuvre ! »), il est en revanche très capable de la coordination négative du chantage et de l’ultimatum.

On peut donc soutenir sans la moindre contradiction et la thèse de la prise d’otages (globale, celle du capital) et celle de la vaine prétention des entreprises à « créer l’emploi ». Les entreprises, séparément, ne créent rien. Mais il est vrai que, liguées en capital coordonné, elles décident de tout. Reconnaissons qu’à la profondeur où l’ânerie des « entrepreneurs qui créent l’emploi » est désormais enkystée, mesurable à la vitesse-éclair à laquelle elle vient à la bouche de l’éditorialiste quelconque, le travail d’éradication va demander du temps. Raison de plus pour l’entamer tout de suite. La politique se portera mieux, c’est-à-dire un peu plus rationnellement, quand ses discours commenceront d’être à peu près purgés de toutes les contrevérités manifestes, et manifestement attachées à un point de vue très particulier sur l’économie, et quand les schèmes de pensée automatique que ces contrevérités commandent auront été désactivés. Les entreprises ne créent pas l’emploi : elles « opèrent » l’emploi déterminé par la conjoncture. Si l’on veut de l’emploi, c’est à la conjoncture qu’il faut s’intéresser, pas aux entreprises.
Mais faire entrer ça dans une tête « socialiste »... Il est vrai que parmi le programme chargé des conversions symboliques à opérer, il y a à défaire l’habitude irréfléchie qui consiste à donner le parti socialiste pour la gauche, et à donner (très inconsidérément) de la gauche au parti socialiste. Alors que, rappelons-le, et il met d’ailleurs assez d’effort comme ça pour qu’on n’en doute plus et qu’on puisse l’en « créditer », le parti socialiste : c’est la droite ! La Droite Complexée. A propos de laquelle, du train où vont les choses, il va bientôt falloir se demander ce qu’il lui reste exactement de complexes.

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Notes

[1] Proposé en janvier par M. Hollande, le « pacte de responsabilité » offre aux entreprises un allégement de cotisations sociales de 30 milliards d’euros... dans l’espoir que celles-ci voudront bien, en contrepartie, créer des emplois...
[2] France 2, 7 janvier 2013.
[3] BFM-RMC, 6 janvier 2014.
[4] Les Echos, 4-5 mai 2013.
[5] Les Echos, 23 mai 2013.
[6] Les Echos, 23 mai 2013.
[7] Matthias Fekl, député proche de Pierre Moscovici, cité in Lénaïg Bredoux et Stéphane Alliès, « L’accord sur l’emploi fracture la gauche », Mediapart, 28 avril 2013.
[8] Dans la nouvelle d’Edgar Allan Poe La Lettre volée (1844), tous les protagonistes recherchent fébrilement un billet d’une importance décisive qu’ils supposent caché, mais qui est en fait posé en évidence sur un bureau.
[9] Cité in Julien Ponthus, « Hollande, VRP de la “start-up République” à San Francisco », Reuters, 12 février 2014.
[10] Arnaud Montebourg, « La Matinale », France Inter, 18 février 2014.
[11] « Le président de la CNAF dément la Présidence de la République », blog de Gérard Filoche, 27 janvier 2014.
[12] Christian Chavagneux, « Pourquoi le pacte de responsabilité n’améliorera pas les marges des entreprises et ne créera pas d’emplois », blog Alternatives Economiques, 6 janvier 2014.
[13] Id.
[14] Daniel Cohen, « La baisse des charges est davantage une option pratique qu’une conversion idéologique », entretien avec Franck Dedieu, L’Expansion,18 février 2014.
[15] Pour un démontage en règle de cette thèse, voir le petit livre de Laurent Cordonnier, Pas de pitié pour les gueux , éditions Raisons d’agir, 2000.
[16] Les Echos , 3 janvier 2014.
[17] Id., la question lui est posée par Derek Perrotte.
[18] En tout cas hors de toute coordination.
[19] Commande de travail pour les ménages-salariés, commande de biens et services pour les entreprises-clientes.


Edité le 12-03-2014 à 22:53:38 par Xuan


Xuan
Le Front Syndical de classe réagit à la déculottade de Le Paon :

Au lendemain de la réunion du Comité confédéral national (CCN, parlement de la CGT) les agences de presse annoncent :


« On va entamer une série de discussion à la fin de cette semaine, ou en début de semaine prochaine, avec FO, la FSU, Solidaires et la CFDT si elle le souhaite, pour définir le contenu de cette journée [le 18 mars] », a affirmé M. Lepaon à l'issue de la réunion du Comité confédéral national (CCN, parlement de la CGT) mardi et mercredi.

« Ce ne sera pas une journée contre le pacte de responsabilité, mais sur les salaires, l'emploi et le financement de la protection sociale » , a-t-il dit. Selon lui, « même FO reconnaît que le pacte est désormais dans le paysage » .


M. Lepaon a précisé que la CGT « se rendra à la réunion du 28 février » avec le patronat pour discuter des contreparties aux aides accordées aux entreprises dans le cadre du pacte. « On va y aller sur la plateforme commune que nous avons négociée avec la CFDT, l'Unsa et la FSU » , qui réclame la conditionnalité des aides.


Si ces informations étaient confirmées, ce serait la preuve une fois de plus de l'abandon de revendications essentielles des travailleurs de la part de la direction confédérale de la CGT car, le pacte dit de responsabilité annoncé par F. Hollande le 14 janvier 2014 c'est :

=>un royal cadeau au MEDEF (plus de 30 milliards d'euros d'exonération).

=>l'annonce de coupes sombres considérables dans les budgets publics (50 milliards d'ici 2017) et donc l'affaiblissement et la régression des services publics.



La Sécu en danger



Comme plusieurs organisations de la CGT l'ont déjà signalé, le déport vers la fiscalité du financement de la branche familiale de la sécurité sociale constitue une attaque sans précédent du modèle mis en place à Libération.

Ainsi, l'Union Départementale du 92 souligne que cette mesure aura pour conséquences :

=>le vol de 36 milliards sur les salaires

=>la diminution des prestations famille.

=>une hausse des impôts.

=>des Économies brutales sur la branche maladie (déremboursements de médicaments, non prise en charge à 100% de soins coûteux etc.) pour compenser partiellement la perte.



Car en effet, cette exonération équivaut à une attaque frontale contre le salaire socialisé et contre la protection sociale.


Accepter cette mesure c'est par conséquent entériner aussi tout le discours sur le coût du travail seriné à longueur d'antenne pour rendre en définitive les salariés responsables des difficultés économiques et de la crise!


Inscrire son action dans la négociation de contreparties c'est de fait accepter le gros des mesures prévues par le pacte en essayant à la marge d'en corriger certains effets et c'est donc acquiescer à cette attaque majeure contre les droits conquis par les travailleurs.


Reconnaître que le pacte est désormais dans le paysage c'est adopter une politique de soumission aux objectifs de régression sociale poursuivis de manière ininterrompue par la droite et par l'actuel pouvoir.


Les soi-disant contreparties constituent un leurre pour faire avaliser les contre-réformes.
Et ce n'est pas une entreprise nouvelle :


Souvenons-nous, déjà sous Sarkozy la direction de la CGT s'était placée en situation d'acceptation de la réforme des retraites de 2010 pour en négocier certains aspects, avec les résultats que l'on sait!

C'est pourquoi nous faisons notre la plateforme de l'UD CGT du 92 qui exige :

=>Le maintien des cotisations patronales d’Allocations familiales.

=>L’annulation immédiate du projet gouvernemental de transfert des 36 milliards de cotisations familiales vers l’impôt.

=>L’abandon du pacte de responsabilité des entreprises voulu par le MEDEF et le gouvernement.


C'est pourquoi nous reprenons et appelons à reprendre l'appel de l'Union locale de l'UL CGT de Chalon sur Saône qui proclame :

Ce pacte de responsabilité n'est ni négociable, ni amendable!

C'est pourquoi nous proclamons avec le Syndicat CGT du Conseil général des Ardennes:

Fiscaliser, c’est saper les fondements de la Sécu !
Xuan
Sapin - Soral même combat


Dans une interview publiée dimanche dans Le Parisien/Aujourd'hui en France, Michel Sapin se défend d’avoir passé « un pacte avec le diable » avec son pacte de responsabilité :
" Ce n'est pas aux patrons que l'on fait un cadeau mais aux entreprises à qui l'on donne les moyens de créer des emplois".
"ce n'est pas un pacte avec le diable". "L'entreprise est une communauté humaine dans laquelle il y a, avant toute chose, des travailleurs et des salariés".
"Il y a dans l'entreprise des intérêts différents qui, à un moment donné, peuvent converger dans un compromis gagnant-gagnant : c'est cela le dialogue social. Ça n'efface pas le conflit, ça permet de le dépasser. Et c'est de cela que nous avons besoin aujourd'hui".
"le président de la République a dit que ce pacte devait être établi le plus rapidement possible". "L'horizon, c'est celui du printemps, entre mars et juin"
.

On rappellera juste que le pacte en question consiste à piquer 30 milliards sur le salaire total, ce qui revient pour un net de 1000 €, à près de 100 € du salaire total.
Egalement Gattaz nous a bien expliqué que ce vol n’a aucune contrepartie et qu’il comptait bien en gratter davantage sur les salaires, jusqu’à concurrence de 100 milliards pour commencer.

Reconnaissons qu’il s’agit quand même d’un « compromis gagnant-gagnant » puisque le Medef gagne à la fois sur les salaires et sur l’obligation d’embaucher.
C’est aussi un dialogue social entre Gattaz et Sapin dont les intérêts convergent comme on le voit.

Concernant le pacte avec le diable , et l’Union Sacrée dont nous célèbrerons le centenaire le 4 août, l’expression est bien désuète puisque les socialos ont eu tout le loisir d’épouser, d’assimiler et de mettre en pratique les conceptions du patronat, de sorte qu’on croirait entendre ici le sermon d’un DRH.

Mais cent ans après c’est la même recette.
C’est la classe ouvrière et le peuple qui doivent renoncer à leurs intérêts propres pour défendre ceux des capitalistes français contre leurs concurrents étrangers.
Dépasser la lutte de classe, « c'est de cela que nous avons besoin aujourd'hui » dit Sapin.

Par la même occasion on constate que les objectifs des socialistes et ceux défendus pas Soral ou Le Pen ne diffèrent fondamentalement que sur la question de l’Europe et des alliances internationales mais qu’ils sont identiques sur l’Union Sacrée.
On entend Soral dans cemeeting : « Le pouvoir a peur d’une chose c’est de l’union sacrée des authentiques patriotes et des authentiques démocrates » … « je rappelle que je préside une association qui s’appelle E&R qui prône la réconciliation nationale…nous avons une élite oligarchique totalement traitre au peuple e à la nation française et sur le plan économique et sur le plan géopolitique » [11’à 16’]
Soral affiche évidemment son soutient au FN en disant un peu plus tôt : « tout ceci se paiera aux élections » [11’08]

Plus récemment Bruno Gollnish enfonce le clou le 6 février sur son blog, sous le titre Versaillais et communards rassemblés : l’Union Sacrée qui effraie la secte.
Il conclut « comme le note Marine Le Pen, versaillais et communards rassemblés, «Unis les Français sont invincibles!». »


Il est essentiel de connaître la nature exacte des relations entre le PS et le FN.
Ce qui les oppose n’échappe à personne, mais pour ce qui concerne la contradiction fondamentale de notre société, leur objectif commun est l’alliance du Travail et du Capital pour défendre ce dernier contre l’ennemi de l’étranger .
Xuan
Sur l'Expansion :

Le Medef revendique la paternité du pacte de responsabilité de François Hollande

L'Expansion.com avec AFP - publié le 17/01/2014 à 16:39


La patron des patrons, Pierre Gattaz, estime "avoir apporté sur un plateau" le pacte de responsabilité présenté mardi par le président François Hollande.
AFP/ERIC PIERMONT

Le patron du Medef, Pierre Gattaz, a assuré vendredi qu'il avait apporté le pacte de responsabilité "sur un plateau" au président François Hollande, qui s'est inspiré, selon lui, du pacte de confiance qu'il lui avait présenté en novembre.


"Nous avons salué le pacte de responsabilité que nous a servi le président de la République le 31 décembre et qui était inspiré, je ne le dis pas trop fort, du pacte de confiance que nous lui avons apporté sur un plateau" , a affirmé Pierre Gattaz à l'occasion des voeux de l'Alliance des minerais, minéraux et métaux (A3M).

Le patron du Medef a par ailleurs refusé de s'engager sur la création d'un million d'emplois en cinq dans le cadre de ce même pacte de responsabilité. "Je ne signerai jamais que nos entreprises vont créer un million d'emplois. Ce serait suicidaire" , a assuré Pierre Gattaz, qui a également souligné qu'il ne signerait pas non plus, en tant que chef d'entreprise, "l'embauche de 100 personnes demain matin" .

Interrogé par l'AFP après son discours, Pierre Gattaz a ajouté que la création d'emplois ne s'obtenait pas "en appuyant sur un bouton" , tout en renvoyant la balle dans le camp du gouvernement . "Nous avons un objectif intermédiaire à cinq ans qui est de créer un million d'emplois, à la condition que nombre de chantiers s'ouvrent et à la condition que le terreau de France s'améliore et que les dépenses publiques baissent. C'est fondamental" , a-t-il expliqué.

"Attention au plouf"

Dans son discours, M. Gattaz a dit avoir accueilli le pacte de Hollande avec un "ouf" de soulagement. Mais il a prévenu: "Attention au plouf!" . Selon lui, le gouvernement n'a pas encore bougé. "Il faut que les mesures commencent. Il n'y a pas un embryon de l'allègement par rapport à ces 100 milliards" , a-t-il affirmé à l'AFP, insistant sur le fait que la création d'emplois dépendait des mesures demandées par le Medef.

Pierre Gattaz demande régulièrement un allègement de 50 milliards d'euros des cotisations sociales des entreprises, associé à une baisse de même ampleur de leurs impôts. En réponse au ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, qui avait mis la veille la barre plus haut en exigeant la création de 2 millions d'emplois pour atteindre un taux de chômage de 7% "comme en Allemagne ou aux Etats-Unis" , M. Gattaz a renvoyé le gouvernement "à ses responsabilités" .

François Hollande a présenté mardi son pacte de responsabilité comme étant le "plus grand compromis social depuis des décennies" . Il s'est aussi prononcé pour une politique économique de "l'offre" afin de retrouver la croissance et de créer des emplois et pour "la poursuite de l'allègement du coût du travail" .

Le président a annoncé que cette baisse passerait par la suppression des cotisations familiales versées par les employeurs d'ici 2017, soit environ 30 milliards d'euros, une somme qui englobe les 20 milliards déjà pris en charge par le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Cette suppression de cotisations doit se faire sans "transfert de charges des entreprises vers les ménages" , et par le biais de réductions dans la dépense publique.

Lire également sur le même site :
Pacte de responsabilité: ce qu'en pense vraiment le Medef de Pierre Gattaz
Par Sebastien Pommier - publié le 15/01/2014 à 17:04
"Le pacte présenté par François Hollande devant la presse n'est pas "un cadeau aux patrons" a affirmé ce mercredi Pierre Gattaz. En matière de baisse du coût du travail, le président du Medef en veut plus"...
Xuan
Près de 100 € volés sur un salaire de misère


Je poursuis sur la baisse des salaires, avec le vol des cotisations pour les allocations familiales, annoncé hier par Hollande.

Soit un salaire net de 1000 €, le salaire total (c'est-à-dire avec l'ensemble des prélèvements sociaux) vaut presque le double.
Le calcul qu'on peut trouver sur Internet donne 1,82 x salaire net, ici 1820 €.

Sur ce salaire total le prélèvement pour les allocations familiales représente 5,25 %, soit 1820 x 0,0525 = 95,55 €, près de 10 % du net !

On comprend la joie de Gattaz qui a salué le discours de Hollande :

"Une mesure demandée par le patronat qui représente un allègement du coût du travail d'un montant total de 30 milliards d'euros. A cela s'ajoutent 20 milliards d'euros de baisse du coût du travail permise par le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) sur la période 2013-2015. Soit un total de 50 milliards d'euros d'allègements du coût du travail sur l'ensemble du quinquennat." [Le Parisien]

Ces 30 milliards volés aux salariés devront être pris quelque part et payés d'une façon ou d'une autre par les masses.
Xuan
Le blocage du SMIC « préserve le pouvoir d'achat et l'emploi des moins qualifiés (...),
alors que s'amorce l'inversion de la courbe du chômage »
prétend Sapin.



Ce laquais du patronat ment comme un arracheur de dent.
Le cynisme des socialos ne connaît pas de bornes, à l'évidence ils souhaitent aligner à terme le SMIC sur son équivalent allemand qui démarrera à 8,5 €, afin de résoudre les problèmes de concurrence des exportateurs français.
Or, tandis que la situation des PME et TPE continue de se dégrader, ce sont précisément les plus grosses entreprises qui font toujours de juteux bénéfices, en particulier le CAC 40 qui a versé 60 % des profits aux actionnaires.
Le Parti Socialiste est bien le pantin du capital monopoliste.

Voir Pas de coup de pouce pour le smic, qui augmentera de 1,1 % - Le Monde
L'action de classe pour les salaires s'impose, salut aux grévistes de Total !
Xuan
La valse des étiquettes se poursuit en 2014. ON se damande où ils vont cher cher leur "déflation" et leur hausse des prix à quatre nèfles %.
La TVA passe à 10 %
Le gaz va de nouveau augmenter ;
... " les ménages abonnés au gaz seront soumis à partir de l'an prochain à la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN), dont ils étaient jusqu'ici exemptés, dans le cadre de la mise en place de la contribution climat énergie ou taxe carbone."

Encore une fois la propreté écologique sert de prétexte pour écraser les bas revenus.
Eric
Finimore a écrit :

[citation=Eric]Le p"c"o f , qui fait aussi partie du Front de gauche , n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon.


Finimore a écrit :

As-tu des infos à ce sujet "le PCOF...(...) n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon."


Eric a écrit :

La Forge n'est plus un journal marxiste-léniniste depuis longtemps .
Mais je sais qu'il existe encore des éléments sains dans ce parti.
Je salue au passage le camarade des éditions Kobawa pour son travail ;
il fait un boulot titanesque en rééditant les écrits et œuvres de Staline , dont certains n'ont jamais été édités en français , y compris du temps ou le p "c " f était encore communiste .


La question était précise et tu me réponds en partie à côté et avec des généralités.

-Tu dis "La Forge n'est plus un journal marxiste-léniniste depuis longtemps." depuis longtemps ? et tu disais dans ton message précèdent que le PCOF " n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon." Alors c'est depuis le ralliement à Mélenchon où depuis longtemps ? (le PCOF à été fondé en 1979), le ralliement progressif au Front de Gauche (soutiens aux listes "gauche de la gauche" date de la fin des années 2000 (après 2007...). Pour moi le PCOF a glissé dans l'opportunisme depuis 1993, ce qui ne l'empêche pas, et là tu as raison d'avoir en son sein des communistes sincèrement marxistes-léninistes.

Dans une lettre à un camarade datant de février 1997, j'indiquait au sujet du PCOF, ceci :
" PCOF et opportunisme

L'Opportunisme vis a vis du PCF transpire dans certaines occasions:
-Dans un édito de La Forge n° 305 reprit en tract à propos de la position pour les législatives de 93.
Le PCOF donne ses consignes " il faut sanctionner la social-démocratie tout en signifiant notre rejet de la droite et notre détermination à combattre sa politique au service du capital (...) le choix concret dépend des conditions politiques dans chaque circonscription et des listes en présence (...)
si plusieurs listes se présentent aujourd'hui comme des alternatives au PS et à la droite, aucune ne peut représenter à elle seule l'alternative populaire ".
Affirmer que le P"C"F ou les Ecolos représentent une partie de l'alternative populaire, c'est se moquer du monde ! La FORGE est bien silencieuse sur ses forces réformistes. Pas un mot de critique ou même d'appréciation sur ces forces à propos des élections ou plus généralement.
Avec une telle position "sanctionner le PS, sans soutenir la droite", le PCOF ne risque pas d'être a contre-courant, tellement c'est l'évidence parmi les travailleurs...Et ça évite de se mouiller.
-Le PCOF parle de "vote anticapitaliste" pour le 1er tour des présidentielles, il faut se souvenir du vrai visage du P"C"F quand il tabassait les révolutionnaires à la portes des usines. Là aussi le PCOF fait complètement l'impasse sur l'analyse des courants pour lequel il veut faire voter. D'autant plus que le PCOF lui-même en 1986 avait été isolé, gazé et tabassé en queue de cortège dans la manif syndicale (CGT) le 1er mai par des gros bras du... P'C'F.


Oui, la publication par Kobawa des écrits et œuvres de Staline est titanesque, tu fais bien de le rappeler mais cela ne répond pas à ma question.[/citation]

Je vois que tu réponds brillamment à ma place .
Je partage tout ce que tu écrits .
Finimore
Eric a écrit :

Le p"c"o f , qui fait aussi partie du Front de gauche , n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon.


Finimore a écrit :

As-tu des infos à ce sujet "le PCOF...(...) n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon."


Eric a écrit :

La Forge n'est plus un journal marxiste-léniniste depuis longtemps .
Mais je sais qu'il existe encore des éléments sains dans ce parti.
Je salue au passage le camarade des éditions Kobawa pour son travail ;
il fait un boulot titanesque en rééditant les écrits et œuvres de Staline , dont certains n'ont jamais été édités en français , y compris du temps ou le p "c " f était encore communiste .


La question était précise et tu me réponds en partie à côté et avec des généralités.

-Tu dis "La Forge n'est plus un journal marxiste-léniniste depuis longtemps." depuis longtemps ? et tu disais dans ton message précèdent que le PCOF " n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon." Alors c'est depuis le ralliement à Mélenchon où depuis longtemps ? (le PCOF à été fondé en 1979), le ralliement progressif au Front de Gauche (soutiens aux listes "gauche de la gauche" date de la fin des années 2000 (après 2007...). Pour moi le PCOF a glissé dans l'opportunisme depuis 1993, ce qui ne l'empêche pas, et là tu as raison d'avoir en son sein des communistes sincèrement marxistes-léninistes.

Dans une lettre à un camarade datant de février 1997, j'indiquait au sujet du PCOF, ceci :
" PCOF et opportunisme

L'Opportunisme vis a vis du PCF transpire dans certaines occasions:
-Dans un édito de La Forge n° 305 reprit en tract à propos de la position pour les législatives de 93.
Le PCOF donne ses consignes " il faut sanctionner la social-démocratie tout en signifiant notre rejet de la droite et notre détermination à combattre sa politique au service du capital (...) le choix concret dépend des conditions politiques dans chaque circonscription et des listes en présence (...)
si plusieurs listes se présentent aujourd'hui comme des alternatives au PS et à la droite, aucune ne peut représenter à elle seule l'alternative populaire ".
Affirmer que le P"C"F ou les Ecolos représentent une partie de l'alternative populaire, c'est se moquer du monde ! La FORGE est bien silencieuse sur ses forces réformistes. Pas un mot de critique ou même d'appréciation sur ces forces à propos des élections ou plus généralement.
Avec une telle position "sanctionner le PS, sans soutenir la droite", le PCOF ne risque pas d'être a contre-courant, tellement c'est l'évidence parmi les travailleurs...Et ça évite de se mouiller.
-Le PCOF parle de "vote anticapitaliste" pour le 1er tour des présidentielles, il faut se souvenir du vrai visage du P"C"F quand il tabassait les révolutionnaires à la portes des usines. Là aussi le PCOF fait complètement l'impasse sur l'analyse des courants pour lequel il veut faire voter. D'autant plus que le PCOF lui-même en 1986 avait été isolé, gazé et tabassé en queue de cortège dans la manif syndicale (CGT) le 1er mai par des gros bras du... P'C'F.


Oui, la publication par Kobawa des écrits et œuvres de Staline est titanesque, tu fais bien de le rappeler mais cela ne répond pas à ma question.
Eric
Finimore a écrit :

[citation=Eric]Le p"c"o f , qui fait aussi partie du Front de gauche , n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon .


As-tu des infos à ce sujet "le PCOF...(...) n'a plus rien de marxiste-léniniste depuis qu'il a abandonné la défense de Staline et qu'il s'est rallié à Mélenchon."[/citation]


La Forge n'est plus un journal marxiste-léniniste depuis longtemps .
Mais je sais qu'il existe encore des éléments sains dans ce parti .
Je salue au passage le camarade des éditions Kobawa pour son travail ;
il fait un boulot titanesque en rééditant les écrits et œuvres de Staline , dont certains n'ont jamais été édités en français , y compris du temps ou le p "c " f était encore communiste .
 
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