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Xuan
QUI EST RISHI SUNAK ? Le nouveau premier ministre anglais ?

28 OCTOBRE 2022

Le grand quotidien argentin Pagina/12 nous livre ici le portrait du nouveau premier ministre, ce n’est sans doute pas un hasard si celui-ci est une synthèse entre madame Thatcher et les relations neo-colonialistes entre l’empire britannique, la royauté et la caste des Maradjhah. Face à l’UE, la Grande Bretagne a choisi la vassalisation de son “empire” aux USA, le personnel politique est celui du rêve du XIXe siècle mis au service d’une nouvelle guerre impérialiste, et directement aux manettes des milliardaires hors sol face à une population qui partout crève littéralement des “solutions” de cette caste mais qui n’a pas de dirigeants ni de syndicats, ni de parti à la hauteur de son mécontentement, des idéologues de “la démocratie”, des “progressistes” sociétaux qui n’offrent aucune alternative à ce pouvoir caricatural. (note et traduction de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Par Marcelo Justo – Página/12, Argentine

Il a une fortune de 770 millions de dollars et une carrière politique foudroyante


Le nouveau Premier ministre est plus riche que le roi Charles III et la reine consort Camilla: il a été le premier politicien à figurer sur la liste des plus riches du Royaume-Uni du Sunday Times. Avec sa femme, l’héritière milliardaire Akshata Murty, il a une fortune estimée à environ 770 millions de dollars, soit le double de celle du roi et de Camilla.

Sunak a fait fortune en travaillant dans le monde de la finance, avec la banque d’investissement Goldman Sachs et le fonds spéculatif TCI et Theleme Partners. Sa femme, créatrice de mode, est la fille du milliardaire indien N.R. Narayana Murthy, fondateur de la multinationale informatique Infoys. Les 0,93% qu’elle a de l’entreprise font d’elle l’une des femmes les plus riches du Royaume-Uni.

Sunak est arrivé au Parlement lors des élections générales de 2015 et a voté pour le Brexit un an plus tard. Avec Theresa May comme Premier ministre, il a fait ses premiers pas au gouvernement. Le grand saut a été avec Boris Johnson qu’il avait soutenu lorsqu’en 2019, le Parti conservateur a élu le remplaçant de May. Johnson l’a nommé ministre du Trésor et, à la veille de la pandémie, ministre des Finances en février 2020.

À ce poste, il a surpris car malgré sa réputation d’orthodoxie fiscale thatchérienne, il n’a pas hésité à lancer un fort programme de soutien aux entreprises et aux ménages qui le rendait très populaire à l’époque. En mars, il a présenté un budget qui contenait une autre mesure peu orthodoxe : augmenter l’impôt sur les sociétés qui facturaient plus de 250 000 livres de 19 à 25%.

Les choses se sont compliquées quelques semaines plus tard car les révélations journalistiques sur la femme de Sunak ont montré qu’il avait profité d’une règle obscure qui favorise les millionnaires, les « non dom », pour ne pas payer onze millions de livres d’impôts. Avec la carrière de son mari sur la corniche, Murty a fait marche arrière et a annoncé qu’elle abandonnait son statut de « non-dom ».

Sunak n’a pas non plus échappé au scandale Partygate. La police a découvert qu’il avait participé à l’une des plus d’une centaine de fêtes au 10 Downing Street en période de confinement. Pour le fait, il a payé une amende qui, il faut le supposer, ne l’a pas altéré ni lui ni son compte bancaire: cinquante livres.

Selon ses détracteurs, qui pullulent dans l’aile pro-Boris du parti, Sunak était le Brutus qui a planté le poignard dans le dos du Premier ministre avec sa démission au milieu de nouveaux scandales de corruption. Lors de l’élection pour le remplacer, cette stigmatisation n’a pas pu être éliminée. Elle a propulsé Liz Truss dans le vote qui a été fait parmi les députés conservateurs, mais elle s’est estompée grâce à l’appartenance au Parti conservateur profond, celui des zones rurales qui rêvent encore d’un retour aux jours de gloire de l’empire par la main d’un messie, la Margaret Thatcher des années 80 ou le Boris Johnson du Brexit.

La carrière de Sunak semble s’estomper avec cette défaite, mais il commence à refaire surface avec le désastre causé par Truss lorsqu’il présente son budget le 23 septembre. Dans la campagne, Sunak avait averti que la politique économique promue par Truss était un « conte de fées »: après les énormes dépenses fiscales dues à la pandémie, une réduction d’impôt pour les plus riches et les entreprises de milliards de livres ne pouvait pas être promue.

Truss a gagné la bataille électorale interne, mais pas la guerre. Le 6 septembre, elle est élue à la tête du Parti conservateur. Environ 45 jours plus tard, elle a présenté sa démission. Sunak a remporté sa deuxième bataille pour la couronne conservatrice, mais n’a guère triomphé dans la guerre. Il hérite d’un parti fragmenté, d’une économie brisée, d’une dette de cent pour cent du PIB et d’une population fatiguée de douze ans d’austérité conservatrice, juste la formule qu’il a laissé entendre qu’il appliquerait lorsqu’il a déclaré au siège du parti après l’annonce de son couronnement que des « décisions très difficiles » sont à venir.

Sa fortune est un autre talon d’Achille au milieu de la crise et de l’ajustement prévisible qu’il favorisera dans son gouvernement. Sunak possède des propriétés dans différentes parties du monde d’une valeur supérieure à 15 millions de livres. Le Premier ministre dépense plus de quatorze mille livres par an pour maintenir la température de l’eau de l’une de ses piscines: six fois plus que ce que la famille moyenne paie pour le gaz et l’électricité. Pourra-t-il exiger que la société se serre la ceinture alors que personne ne l’a choisi et que ses poches débordent d’or ?

……………………

Annexe:

Dix détails sur la vie et la carrière de Rishi Sunak, le « chevalier Jedi » devenu Premier ministre britannique

Le successeur de Liz Truss est un fan de cinéma Star Wars, fan de Southampton et accro à Coca-Cola. Sunak deviendra le premier chef de gouvernement à être membre d’une minorité ethnique, non blanc et le premier hindou. Ses parents sont venus au Royaume-Uni d’Afrique de l’Est et tous deux sont d’origine indienne. Sunak est né à Southampton en 1980, où son père était médecin généraliste et sa mère dirigeait une pharmacie.

https://www.publico.es/internacional/diez-detalles-vida-y-carrera-rishi-sunak-caballero-jedi-llegado-primer-ministro-britanico.html#analytics-seccion:listadoPrécédentXi Jinping et la microphysique du pouvoir chinois
Xuan
Les conservateurs peinent à gouverner

L’été indien du mécontentement britannique


Boycott des factures d’énergie, grève des dockers, des postiers, dans les usines et les chemins de fer : au Royaume-Uni, l’« été du mécontentement » se prolonge cet automne, alors que le pays s’enfonce dans la crise économique et politique. En fonctions depuis le 6 septembre, la première ministre Elizabeth Truss n’aura tenu que quarante-quatre jours avant d’annoncer sa démission…

par Marc Lenormand

Le Monde diplomatique
https://www.monde-diplomatique.fr/2022/11/LENORMAND/65271

Le Royaume-Uni est traversé, depuis l’été, par une vague de grèves inédite. Les salariés revendiquent surtout des augmentations alors que l’inflation a atteint 10,1 % en juillet, et encore en septembre, un niveau inégalé depuis 1982. Dans les docks de Felixstowe et de Liverpool, les chemins de fer, la poste, les transports publics des grandes villes et l’industrie manufacturière en particulier, les syndicats ont consulté leurs adhérents et obtenu de très fortes majorités en faveur de la cessation du travail. Si des concessions ont parfois été obtenues rapidement, y compris par la simple menace de l’action dans le secteur manufacturier, les grèves ont duré dans les transports publics et plus encore dans les docks et les chemins de fer. Après plusieurs décennies d’atonie, ce retour de la conflictualité sociale met aussi fin à une séquence marquée par la primauté d’enjeux dits « constitutionnels » qui avait assuré la domination du Parti conservateur. Mais il ne s’accompagne pas, loin de là, d’un resserrement des liens entre le Parti travailliste (Labour) et les syndicats. La presse britannique a vite évoqué un « été du mécontentement », en référence à l’« hiver du mécontentement » de 1978-1979, lorsque plusieurs grèves avaient battu en brèche la politique d’austérité du gouvernement travailliste de James Callaghan.

Pourtant, les mobilisations de l’été 2022 rappellent bien davantage l’« été glorieux » de 1972 (1) : l’opposition au plafonnement des augmentations salariales par le gouvernement conservateur d’Edward Heath avait impliqué les secteurs des mines, des chemins de fer et des docks, jusqu’au bâtiment en passant par l’industrie manufacturière. L’économie britannique connaissait cependant, depuis les années 1960, les prémices d’une désindustrialisation qui allait s’étendre sous l’effet des crises monétaires et des récessions. La conflictualité chute dans le secteur privé à partir du milieu des années 1970. L’« hiver du mécontentement » constitue une sorte de passage de témoin, lorsque aux grèves des ouvriers de Ford et des routiers succède celle des agents des services publics. Les conservateurs au pouvoir de 1979 à 1997 laminent les bastions historiques : les syndicats combatifs des mines et de l’imprimerie sont neutralisés à l’issue de durs conflits au milieu des années 1980 ; les entreprises de l’énergie et des communications sont privatisées dans la seconde moitié de la décennie. Les collectivités locales, l’éducation et la santé en viennent à constituer le centre de gravité de la conflictualité sociale.

La récente vague de grèves apparaît d’autant plus remarquable que la législation antisyndicale — mise en place sous Margaret Thatcher et M. John Major, maintenue par les travaillistes puis encore renforcée par les conservateurs à partir de 2010 — contrarie le recours à l’action : elle exclut le blocage des lieux de travail, les grèves de solidarité ou les revendications de portée générale (comme la défense des acquis en matière de retraite). Y contrevenir expose les salariés à des licenciements et les syndicats à des poursuites. Ni droit individuel ni même pratique collective régulée, la cessation de l’activité devient une action qu’il incombe aux organisations de travailleurs d’organiser et d’encadrer. S’imposent notamment la consultation des adhérents, le vote de plus de la moitié des inscrits, l’obtention de 50 % des voix en faveur de la cessation du travail. Depuis le printemps, une participation massive et des majorités écrasantes ont assuré, sinon les victoires des grèves, du moins leur inscription dans la durée. Ce cadre institutionnel cantonne toutefois l’action aux secteurs où les organisations syndicales sont suffisamment implantées pour chercher à engager un rapport de forces. Le taux de syndicalisation de la population active britannique, qui s’élevait à 23,1 % en 2021, masque une différence majeure : si un peu plus de la moitié des travailleurs des services publics sont syndiqués, moins de 13 % de ceux du privé le sont (2). L’évolution des salaires dépend donc de la mobilisation des rares bastions syndicaux du secteur privé, dans les transports, les docks, l’industrie manufacturière et la poste.

À cet égard, M. Mick Lynch, secrétaire général de la National Union of Rail, Maritime and Transport Workers (RMT), le principal syndicat des cheminots, ne paraît pas infondé à soutenir qu’il lutte pour la classe ouvrière britannique tout entière. En annonçant son retour (« The working class is back »), il convoque un imaginaire susceptible de rallier des catégories populaires britanniques brutalisées par une décennie d’austérité (à laquelle une étude récente attribue 330 000 morts) (3). Mais il s’agit aussi de tenter de mettre un terme au reflux syndical entamé dans les années 1980 et à l’éviction de la question sociale du débat public. La dernière vague de contestation remonte aux années de marasme économique, à la suite de la crise financière de 2007-2008 (4). Sous le gouvernement travailliste finissant de M. Gordon Brown, en 2008, des grèves pour les salaires dans le secteur public et d’autres, sauvages, dans les raffineries contre l’externalisation et la concurrence d’entreprises continentales employant des travailleurs détachés incitent déjà les médias conservateurs à évoquer un « été du mécontentement ». De l’automne 2010 au printemps 2012, les politiques d’austérité du gouvernement de coalition dominé par les conservateurs occasionnent des grèves et des manifestations massivement suivies dans les services publics ou encore des mobilisations étudiantes contre la hausse des frais d’inscription.

Enjeux identitaires
L’épuisement de ces contestations, symbolisé par l’évacuation du principal campement d’Occupy London en février 2012, coïncide avec le surgissement de la question nationale en Écosse. Après que le Parti national écossais (SNP), principale formation indépendantiste, a obtenu la majorité absolue en mai 2011 au Parlement d’Édimbourg, le premier ministre écossais Alex Salmond affirme disposer d’un mandat populaire. En octobre 2012, son gouvernement et celui du Royaume-Uni s’accordent sur l’organisation d’un référendum sur l’indépendance d’ici à la fin de l’année 2014. Peu de temps après, en janvier 2013, M. David Cameron promet la tenue d’un référendum sur le maintien ou non du Royaume-Uni dans l’Union européenne en cas de victoire conservatrice aux élections prévues en 2015. S’ouvre ainsi une longue séquence « constitutionnelle » : d’une part, l’irruption de la question écossaise et des ressorts nationalistes de l’opposition à l’Union polarise le débat autour d’enjeux identitaires et divise la gauche britannique ainsi que le mouvement syndical ; d’autre part, ces divisions se combinent au reflux de la conflictualité sociale après 2012 — l’année 2015 voit le plus faible nombre jamais enregistré de journées de grèves — pour laisser le champ libre à des reformulations nationalistes de la question sociale auxquelles se rallient une partie des classes populaires.

Le SNP s’est positionné à gauche depuis les années 1980 et sert donc de réceptacle à la déception à l’égard des travaillistes : lors des élections au Parlement écossais de 2011, il progresse fortement dans les quartiers populaires de Glasgow et d’Édimbourg. Ce vote ne signifie pas nécessairement un soutien à la cause indépendantiste, de même que le vote travailliste ne révèle pas forcément une opposition à l’indépendance : la question nationale n’est alors ni le seul ni même le premier déterminant du vote. Le référendum du 18 septembre 2014, marqué par un taux de participation très fort à 84,6 % et un vote indépendantiste élevé à 44,7 %, reflète en revanche une nouvelle polarisation du champ politique écossais autour de la question nationale, dont les scrutins qui se sont tenus depuis ont confirmé l’ancrage. Le référendum de 2016 sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne produit lui aussi une nouvelle polarisation, structurante au moins jusqu’au début de l’année 2020, entre partisans du Brexit et opposants. La question met par ailleurs en difficulté un Parti travailliste rallié depuis les années 1980 à une communauté économique perçue comme protectrice face à la déferlante thatchérienne, mais dont l’aile gauche demeure rétive au libéralisme européen. À la gauche du mouvement syndical, la RMT soutient la Trade Unionist and Socialist Coalition (TUSC) favorable à la sortie de l’Union, après avoir lancé l’alliance No2EU - Yes to Democracy (« Non à l’Union européenne, oui à la démocratie » avec des organisations comme le Parti communiste pour porter une critique de gauche aux élections européennes en 2009 (5).

Même si des débats demeurent autour des conséquences du retrait de l’Union et si un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Écosse pourrait se tenir dès 2023, cette séquence institutionnelle a été refermée par l’élection de décembre 2019, transformée en nouveau référendum sur le Brexit par M. Boris Johnson. Les conservateurs se sont alors rêvés en nouveau « parti du peuple » (« People’s Party »), promettant de remédier au déclassement du nord de l’Angleterre. Puis la crise sanitaire a imposé d’autres questions, sur l’état du service public de santé ou les défaillances du marché. C’est surtout la remontée progressive de la conflictualité sociale dès l’hiver 2021-2022 qui a achevé la transition vers une nouvelle séquence.

Elle intervient toutefois dans un contexte de désalignement entre mouvement syndical et Labour. Depuis sa création en 1900 comme prolongement parlementaire du mouvement ouvrier, le Parti travailliste occupe un espace central au sein de la gauche, renforcé par les rapports organisationnels et financiers très forts entretenus avec les principaux syndicats. Cette relation a été marquée par des tensions croissantes lorsque les gouvernements travaillistes ont déçu les attentes syndicales et par des réconciliations lorsque le parti, de retour dans l’opposition, a renoué avec des organisations qui cherchaient quant à elles un débouché politique pour leurs revendications. Elles ont ainsi mis leurs ressources financières et organisationnelles au service du Labour lors des élections de 2015, 2017 et 2019. M. Jeremy Corbyn, qui a fait l’objet d’attaques virulentes jusqu’au sein de son propre mouvement dès avant son élection comme dirigeant en 2015, a même bénéficié du soutien public et indéfectible de M. Leonard McCluskey, secrétaire général de Unite, le principal syndicat dans le secteur privé.

Boycott des factures d’énergie
Ce lien de proximité s’est distendu fortement depuis l’élection de M. Keir Starmer comme dirigeant et la rupture opérée avec les années Corbyn. Autant les responsables syndicaux avaient accepté leur propre mise à distance et le tournant néolibéral du parti dans les années 1980 et 1990 conduit par MM. Neil Kinnock, John Smith et Anthony Blair, autant le recentrage opéré par M. Starmer percute la logique de nouveaux dirigeants syndicaux marqués à gauche et déterminés à affirmer l’autonomie à l’égard du parti. C’est le cas de la RMT, exclue du Labour en 2004 après que certaines de ses sections ont décidé de soutenir des partis politiques de gauche radicale. Mais c’est aussi celui d’organisations toujours affiliées au parti : en 2015, M. Dave Ward a été élu secrétaire général de la Communication Workers Union (CWU, syndicat des postiers), sur une promesse d’émancipation ; à Unite, Mme Sharon Graham a succédé en 2021 à M. McCluskey sur une ligne de réorientation des ressources vers l’action sur les lieux de travail. L’attitude de la direction travailliste a renforcé cette dynamique. Alors qu’il est même allé dans un premier temps jusqu’à interdire aux membres de son cabinet fantôme de se rendre sur les piquets de grève des cheminots, M. Starmer s’emploie surtout à présenter le Labour comme le meilleur allié des directions d’entreprise.

Les sondages lui laissent espérer les voix d’un électorat modéré. Le naufrage des conservateurs conforte cette stratégie opportuniste. Les attaques contre la livre et la dette britannique ont poussé Mme Elizabeth Truss à annoncer sa démission le 20 octobre. Si le programme de la première ministre de « réductions d’impôts non financées en faveur des plus les riches a été la goutte d’eau de trop pour les marchés financiers, c’est le plafonnement des prix de l’énergie qui avait rempli le vase à ras bord », explique le chercheur Keir Milburn. Or, ajoute-t-il, cette mesure d’un montant de 150 milliards de livres (172 milliards d’euros) aurait notamment été annoncée dès l’installation du gouvernement Truss pour désamorcer un vaste boycott des factures d’énergies (6). Lancée en juin, la campagne « Don’t Pay » a en effet permis la mobilisation de centaines de milliers de foyers alors que la coalition « Enough is Enough » rassemble, elle, syndicats, associations et députés de la gauche travailliste autour d’une plate-forme de revendications contre la hausse du coût de la vie. Conscients de leurs propres faiblesses, ainsi que des limites imposées par le cadre institutionnel, les syndicats nouent de nouvelles alliances pour poursuivre leurs combats.

Marc Lenormand

Maître de conférences en études anglophones et en civilisation britannique à l’université Paul-Valéry de Montpellier.
(1) Ralph Darlington et Dave Lyddon, Glorious Summer : Class Struggle in Britain 1972, Bookmarks, Londres, 2001.

(2) Department for Business, Energy & Industrial Strategy, « Trade union membership, UK 1995-2021 : Statistical bulletin » (PDF), 22 mai 2022.

(3) David Walsh, Ruth Dundas, Gerry McCartney, Marcia Gibson et Rosie Seaman, « Bearing the burden of austerity : How do changing mortality rates in the UK compare between men and women ? », Journal of Epidemiology and Community Health, Londres, octobre 2022. Lire également Sanjay Basu et David Stuckler, « Quand l’austérité tue », Le Monde diplomatique, octobre 2014.

(4) Lire Tony Wood, « Le mouvement social britannique sort de sa léthargie », Le Monde diplomatique, juin 2011.

(5) Lire Owen Jones, « Colère sociale, vote à droite », Le Monde diplomatique, octobre 2014.

(6) Keir Milburn, « Don’t pay took down Kwasi Kwarteng », Novara Media, 18 octobre 2022.

Écouter cet art
Xuan
L'enterrement d'EII était aussi celui du Commonwealth
Et c'est aussi un enterrement piloté par les USA.
Quant à la GB son unité est aussi en question.
pzorba75
Les analystes soulignent la réaction des "marchés financiers" à la politique de Liz Truss, curieusement aucun mot sur la politique étrangère et l'engagement du Royaume Uni en Ukraine pouvant mener à la guerre générale, pour le compte des américains et contre le bloc eurasiatique Russie - Chine.
Le nouveau roi Charles III n'a pas hérité d'un pays au faîte de sa puissance, il rassure pour assurer la démocratie "aristocratique" et la domination des capitalistes.
Xuan
Le Brexit n'a pas résolu les problèmes de la GB au contraire elle s'est jetée dans les bras des USA e sa situation n'a fait qu'empirer

Truss "la plus courte" démission après l'échec d'un plan de réduction d'impôts, montre que l'ancienne démocratie occidentale "ne peut pas résoudre de nouveaux problèmes"



ParChen Qingqinget Xu Yelu
Publié: 20 octobre 2022 23:41


La Première ministre britannique Liz Truss a démissionné jeudi après seulement 45 jours de mandat à la suite de l'échec de son plan de réduction des impôts, devenant ainsi la première ministre la plus courte de l'histoire britannique, ont rapporté les médias. Ce revirement dramatique dans sa vie politique pourrait également être considéré comme un microcosme de la politique occidentale défaillante, lorsque le modèle anglo-saxon ne peut pas diriger le monde car la pratique à long terme de la démocratie occidentale ne peut pas résoudre les nouveaux problèmes émergents, ont déclaré des experts chinois.

Truss a déclaré jeudi dans un bref discours à l'extérieur de Downing Street qu'elle ne pouvait pas accomplir le mandat pour lequel elle avait été élue par le Parti conservateur. "J'ai donc parlé à Sa Majesté le Roi pour lui annoncer que je démissionne en tant que chef du Parti conservateur" , a-t-elle déclaré.

Truss a également déclaré qu'elle resterait à son poste jusqu'à ce qu'un successeur prenne officiellement la tête du parti et soit nommé Premier ministre par le roi Charles III, a rapporté la BBC.

Bloomberg a déclaré que Truss avait quitté son poste de Premier ministre britannique après "un mandat bref et chaotique" avec un ensemble massif de réductions d'impôts avant d'en dénouer la majeure partie face à une déroute du marché. Son départ laisse le Parti conservateur au pouvoir gravement endommagé, et sa perte est finalement due à un manque d'instinct politique et de conscience de la réalité économique, selon les médias.

Un nombre croissant de législateurs avaient appelé Truss à démissionner après des semaines de troubles provoqués par son plan économique. Lorsqu'il a été dévoilé par le gouvernement en septembre, le plan a déclenché des turbulences financières et une crise politique qui a vu le remplacement du chef du Trésor de Truss, de multiples revirements politiques et une rupture de la discipline au sein du parti conservateur au pouvoir.

« La démission de Truss montre d'abord que les problèmes institutionnels de la Grande-Bretagne sont sérieux » , a déclaré jeudi au Global Times Cui Hongjian, directeur du Département d'études européennes à l'Institut chinois des études internationales. L'ensemble original de solutions politiques du pays et ses institutions sont incapables de soutenir les problèmes pratiques auxquels le pays est confronté ou de résoudre les divisions au sein du parti, a déclaré Cui.

De plus, Truss elle-même et le parti conservateur, en tant que parti traditionnel de centre-droit, ont été sévèrement influencés par le populisme. Ils voulaient délibérément réduire la distance entre les soi-disant élites politiques et les gens ordinaires, mais ne trouvent pas de solution professionnelle à ce processus, a-t-il déclaré.

La chute de Truss a commencé lorsque son ancien chancelier Kwasi Kwarteng a annoncé son mini-budget il y a un mois, ce qui a provoqué des semaines de turbulences économiques et a finalement conduit à son limogeage le 14 octobre, a déclaré Sky News.

La dirigeante britannique assiégée s'est ensuite excusée d'avoir menacé la stabilité économique du Royaume-Uni et a déclaré qu'elle était désolée d'être "allée trop loin et trop vite" alors que les marchés chutaient et que les investisseurs se débarrassaient de la livre sterling et des obligations d'État.

"Cela montre également que le modèle anglo-saxon ne peut pas diriger le monde, car ces anciennes mesures telles que les réductions d'impôts ne peuvent pas résoudre de nouveaux problèmes" , a déclaré Wang Yiwei, directeur de l'Institut des affaires internationales de l'Université Renmin de Chine. le Global Times jeudi.

Le Royaume-Uni est désormais confronté à de multiples crises, notamment le conflit ukrainien, les pénuries d'énergie, l'inflation et la dépréciation de la livre, dont certaines sont directement liées au découplage mené par les États-Unis avec la Chine, en plus de la montée du protectionnisme, a déclaré M. Wang. "Le gouvernement britannique n'a pas trouvé de nouvelle dynamique de croissance et ces difficultés économiques ont finalement déclenché une crise politique plus importante."

Certains médias ont rapporté que sa démission faisait suite à une journée de chaos, la ministre de l'Intérieur Suella Braverman ayant également démissionné mercredi en raison d'une faille de sécurité impliquant un document gouvernemental. Truss est également apparue lors d'une session orageuse de questions au Premier ministre au Parlement où elle a répété ses excuses pour son programme budgétaire désastreux.

Alors qu'une élection à la direction aura lieu la semaine prochaine pour trouver le remplaçant de Truss, les principaux candidats incluent des personnalités clés de son cabinet, a déclaré le New York Times, et certains analystes ont même émis l'hypothèse que Boris Johnson, qui a démissionné de son poste de Premier ministre dans le été, pourrait faire un retour.

La Grande-Bretagne est connue comme le fondateur de la démocratie occidentale, et alors qu'elle aurait dû avoir une riche expérience dans sa pratique, il semble qu'elle soit impuissante face à de nouveaux problèmes et à un environnement complexe.

Pour le gouvernement britannique maintenant, la seule solution possible à ces problèmes est de remplacer constamment les "premiers ministres" , et la démission de Truss pourrait devenir un outil avec lequel les factions internes du parti conservateur se combattent, a noté Cui.

"Il est difficile pour tout nouveau dirigeant de résoudre les problèmes à court terme, et celui qui succède à Truss peut rencontrer toutes sortes de problèmes, et il peut aussi faire des erreurs. Ces prétendues erreurs politiques pourraient alors devenir de la chair à canon pour leurs adversaires politiques au sein du parti, ce qui, plutôt que de combler le fossé au sein du parti, pourrait intensifier les conflits politiques » , a-t-il déclaré.

Aux yeux de certains experts chinois, la démission dramatique de Truss pourrait également être considérée comme un microcosme du déclin de la politique occidentale, car remplacer seulement des dirigeants sans changer d'état d'esprit ne résoudra aucun problème.
 
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