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Xuan
Histoire et société

J’accuse: il ne peut pas y avoir de hasard dans ce qui se passe au PCF…


DANIELLE BLEITRACH 23 SEPTEMBRE 2020


A propos d’Assange et de la plupart des questions internationales, je voudrais que chacun mesure bien le frein à l’action et la confusion systématique semée à l’intérieur du PCF par une partie de la direction depuis le 38e congrès. J’ai quitté le pCF le 22 avril quand La célébration de la naissance de Lénine a été censurée… Pour pouvoir dire dans ce blog ce que je vois et je comprends de ce qui se passe.

J’accuse donc une fraction du parti unissant les “refondateurs” et l’ex-direction de s’opposer à l’action courageuse, portant ses fruits, de ceux qui avec Fabien Roussel sont en train de reprendre pied dans le monde du travail, dans les couches populaires et retrouver une part de l’estime au niveau international que le PCF avait perdu. Si j’étais restée à leurs côtés je ne pourrais pas écrire ce que j’écris ici parce qu’ils privilégient avec esprit de responsabilité l’unité du parti, la compréhension de l’ensemble des militants. Mais dans ce blog, nous sommes désormais libres de dire ce qui nous semble juste sans impliquer personne dans nos déclaration.

J’accuse donc ceux qui n’ont cessé de détruire le PCF, de l’effacer de la mémoire des Français, de le mettre à la remorque d’une social démocratie de plus en plus déconsidérée de poursuivre dans cette ligne et de le faire dans un esprit de revanche. Je les accuse d’oeuvrer consciemment ou inconsciemment en faveur de l’impérialisme et contre tous ceux qui cherchent à s’en libérer.

Avant ce congrès, c’était pire encore et ce depuis plus de 20 ans. A partir de Robert Hue, je défie quiconque de trouver dans la politique menée par la direction du PCF et le secteur international, relayée par la presse communiste, l’humanité en particulier, autre chose qu’un soutien de fait aux positions de l’OTAN et de la CIA.

Ceux qui ont été capable de cautionner l’invasion de la Yougoslavie, de promouvoir une liste “bouge l’Europe” qui s’engouffrait sans état d’âme dans cette invasion qui violait tout le droit international ont continué à promouvoir au nom d’une présupposée dénonciation des “dictateurs” toutes les invasions, qu’il s’agisse de la Libye, de la Syrie. Ils ont accompagné de leur hypocrite choeur “démocratique” toutes les atteintes et les pillages contre les peuples, ont cautionné de fait l’expédition du Mali, et fermé les yeux sur la francafrique, fait la fine bouche devant le Venezuela, ils ont fidèlement suivi la social démocratie dans ses errances y compris en Ukraine. Et pour cela ils ont dû inventer l’histoire du communisme, de notre propre parti pour de fait nous faire admettre la monstrueuse équivalence entre Communisme et fascisme à travers Staline égal Hitler, ce qui n’avait jamais été imaginé même quand nous avons condamné le stalinisme de 1956 à 1980. Et ils s’apprêtent à poursuivre cette entreprise immonde pour le centenaire du Parti.

La critique de ce qu’on a désigné sous le nom de Stalinisme est nécessaire, comprendre les raisons de la chute de l’URSS, indispensable mais cela doit être fait à partir de nos propres exigences et pas en suivant toutes les propagandes anti-communistes. Ceux qui affirment cette évidence sont taxés de “stalinisme” ce qui du point de vue bigot et diabolisant qui est le leur donne tous les droits sans avoir à s’expliquer. Cela va avec la destruction de toute formation des militants, un marxisme qui doit se limiter à la doxa trotskiste, une pratique politique qui se détourne de l’action et fait des organismes du parti les lieux d’un bavardage vain.

J’accuse et j’affirme que l’interdiction et la censure, la diffamation dont j’ai été la victime tout ce temps là avec d’autres, n’était pas simple mesquinerie lâcheté contre un individu mais bien un choix politique. Ceux qui comme l’actuelle direction de l’humanité ou Marie Gerorges Buffet ont été capable de soutenir la campagne d’u Robert Ménard contre Cuba sont capables de tout et ne changeront jamais. Il y a une logique dans le soutien à une liquidation du parti derrière Melenchon ou autre, son effacement et leurs choix internationaux. La même logique que l’on retrouve chez celle qui voient dans les blondes créatures défilant sous les drapeaux des collaborateurs nazis en Bielorussie une victoire du féminisme …

Paradoxalement, renforcer le parti communiste, lui redonner toute sa place est le contraire de la manière dont on canalise la colère des militants contre de potentiels alliés. Personnellement j’ai toujours été contre que nous nous effacions derrière Melenchon, qui n’a jamais fait mystère de là où il venait, du lambertisme et du mitterrandisme, l’anticommunisme de fait. Sa conception du mouvement dirigé d’une manière occulte par un petit groupe est le contraire d’un parti communiste. Ce n’est pas lui le fautif mais ceux qui nous ont forcé à l’adouber comme porte parole du parti. Aujourd’hui, il ne s’agit pas de renforcer les attitudes haineuses des militants contre Mélenchon ou d’autres, au contraire, il s’agit de mesurer qu’il y a des alliances électorales, des gestions locales qui réclament l’entente, mais que la conduite d’un parti communiste, ses luttes, son programme, sa finalité doit exister d’une manière autonome et ne pas s’effacer derrière ces alliances électorales. Oui il nous faut des élus, mais des élus communistes sans un parti communiste sont soumis aux mêmes pressions, aux mêmes abandons.

Le secteur international témoigne de cette subordination totale à la social démocratie alors même que celle-ci est de plus en plus intégrée à l’hégémonie nord-américaine, à son bellicisme néo-colonial et à son refus du multilatéralisme. Nous célébrons aujourd’hui les 75 ans de l’ONU dans un contexte où les Etats-Unis se dirigent de plus en plus vers la guerre, le refus des organismes internationaux et une pression dictatoriale exercée contre les peuples qui résistent. Tout cela parce qu’un autre monde est en train de surgir et que la Chine qui s’affirme socialiste sous la direction d’un parti communiste est en train d’impulser une autre direction. les militants communistes ne doivent selon le secteur international du PCF, la presse communiste, la formation, ne rien connaitre de cet enjeu… Pourquoi?

A partir du 38 e Congrès les choses évoluent à peine en ce qui concerne le secteur international relayée par une commission féminine qui fait à peu près n’importe quoi, et s’excite sur tout sauf les problèmes concrets des femmes des couches populaires, et des travailleuses en particulier dans le service public. Ainsi dans le cas Assange, il a fallu la bataille déterminée de notre camarade Fabienne Lefebvre pour que le PCF soit invité à dénoncer ce qui se passe avec Assange. La commission féminine n’a cesse de monter au créneau pour empêcher que l’on soutienne Assange en reprenant les accusation contre ce dernier accusé d’avoir fait l’amour sans protection, une opération venue de Suède et qui est apparue comme une manipulation indigne. Il faudrait tout reprendre le refus de soutenir le Venezuela, le choix d’appuyer le maidan et quasiment toutes les interventions y compris à travers un bruyant soutien au Kurdes dans une coalition criminelle contre la Syrie… Que l’on éprouve tout à coup de la sympathie pour ce malheureux peuple qui n’a cessé d’être victime de la Turquie et d’autres puissances peut être compris mais que ce soit au moment où on leur fait jouer le rôle de supplétif derrière les USA dit ce qui est défendu.

Ce positionnement obstiné toujours en faveur des bonnes oeuvres de la CIA et de l’OTAN sous couvert de “démocratie” peut-il être le fruit du hasard sur une vingtaine d’années?

Pourquoi y compris les campagnes en faveur de la paix, et de Cuba ne sont -elles jamais organisées. Les déclarations du secrétaire du PCF restent-elles lettre morte?

Pourquoi s’acharnent-ils à c que ne soient jamais posées des questions comme la sortie de l’UE et de l’OTAN? Y a-t-il des subsides de ce côté là ? Pourquoi interdisent-ils que soit posée la question du socialisme? Pourquoi interdisent-ils de répondre aux campagnes contre la Chine ? Pourquoi les avancées indéniables dans les discours de Fabien Roussel sont-elles ainsi contraintes à un commun dénominateur “progressiste” sans intervention réelle, de peur d’une scission dont ils menacent de plus en plus ouvertement?

Pourquoi les militants communistes ne sont-ils jamais informés et les laisse-t-on simplement s’imbiber de la propagande anticommuniste sur un en jeu aussi fondamental que la réalité du socialisme chinois ? Pourquoi peuvent-ils imposer une telle ligne, le feront-ils au Congrès?

Pourquoi cette censure totale sur tous ceux qui comme moi interrogent la stratégie, l’histoire et l’avenir ? Ils s’appuient il est vrai sur les divisions, les concurrences, les haines imbéciles qu’engendrent les contrerévolutions et la faiblesse des organisations révolutionnaires, s’unifier, ouvrir le dialogue a été le premier pas du manifeste, il faut poursuivre et le faire derrière Fabien Roussel, le secrétaire du PCF qui par sa pratique, ses choix fait la preuve que nous sommes en train de sortir de la liquidation. Il faut amplifier cette volonté d’unité des communistes parce que l’abstention des couches populaires, la politique de plus en plus offensives contre celles-ci, contre les travailleurs, la jeunesse , prouve qu’il faut l’unité par pour les places mais pour imposer une autre orientation à notre pays. Il n’y a pas d’issue dans des stratégie de division, groupusculaires, il faut reconquérir ce parti communiste dont nous avons tous besoin et pour cela “que les bouches s’ouvrent pas de mannequin dans le Parti!” que chacun reprenne sa place et tire dans le même sens.

Et pour cela ne serait-il pas temps que les militants mesurent le travail de sape interne tel qu’il est réellement mené et s’y opposent. Pourquoi les pratiques ouvertement fractionnelles et liquidatrices dans le Val de Marne et les Bouches du Rhône ne sont-elles jamais sanctionnées, comment se fait-il qu’ils soient encore en état de diriger la presse communiste ce qu’elle peut écrire et ce qu’elle doit taire?

Agir ainsi depuis plus de vingt ans et d’une manière qui constamment va dans le sens de ce que recherchent les USA, l’UE, l’OTAN peut-il être le simple fuit du hasard, d’une méconnaissance des questions internationales et des enjeux ? Cela défie tous les calculs des probabilité… il y a des individus dont la conscience est telle qu’ils bravent la mort, la fin dans un cachot comme Assange, Manning, ils peuvent finir dans un stade comme Jara ou dans une chambre d’hôtel comme Vjtchek hier, il est des peuples indomptables comme Cuba, mais il est des gens que l’on convainc de trahir plus aisément et qui rejoignent facilement le chœur de pseudo démocrates et vrais impérialistes… mais l’histoire ne les acquittera pas.

Ici dans ce blog, nous posons les questions à notre manière, directe, sans avoir à ménager rien, ni personne… mais nous savons que de partout monte la prise de conscience et que ceux qui voudront maintenir la chape de l’ignorance sur ceux que la colère soulève ne peuvent le faire que par des leurres, des dévoiements qu’il faudra bien dénoncer.

Danielle Bleitrach


Edité le 23-09-2020 à 13:22:00 par Xuan


Xuan
Un remarquable article de Jean Claude Delaunay sur le "communisme déjà là" et la censure du socialisme.

Je conseille de lire le tableau (en bleu, non reproductible ici, à lire sur le site de Danielle Bleitrach https://histoireetsociete.com/2020/08/27/le-grand-silence-du-socialisme-par-j-cl-delaunay/


_________________________



Le grand silence du socialisme par j.Cl Delaunay


https://histoireetsociete.com/2020/08/27/le-grand-silence-du-socialisme-par-j-cl-delaunay/
DANIELLE AOÛT 2020


On aura perçu ce que ce site essaye d’avancer: le capitalisme en tant que mode de production a fait son temps, son dernier avatar le néo-libéralisme porté par la puissance militaire et financière des USA et de ses alliés occidentaux n’a plus les moyens de son hégémonie. Sa crise a été aggravée par l’épidémie et il ne trouve plus qu’à reproduire les recettes de la fin de l’URSS, des révolutions de couleur, des déstabilisations de toutes sortes. Survivre au sein de ce maelström implique d’innover, de rechercher la paix, les coopérations, chaque nation, chaque formation sociale ayant ses propres ressources . Nous sommes que nous le voulions ou non entrés dans la transition “des socialismes”., c’est-à-dire le gigantesque combat pour faire lâcher prise à la domination politique du capital. Jean Claude Delaunay à partir de l’expérience chinoise nous invite à une réflexion incontournable. (note de danielle Bleitrach)

(Première partie)

La question soulevée dans ce texte est la suivante : Est-ce que les idées relatives au communisme influencent celles que l’on peut avoir sur le socialisme? Existe-t-il une relation descendante entre conception ou idéologie du communisme et conception du socialisme? Pour tenter de répondre à cette question, j’ai examiné les deux points suivants :

Un essai de description rapide des principales conceptions du communisme existant aujourd’hui en France (première partie);
Les conclusions qui en découlent pour les partisans du socialisme (deuxième partie).
Les principales conceptions du communisme et de son approche en France

Le communisme est aujourd’hui, en 2020, une représentation de l’avenir des sociétés développées, faisant suite au jaillissement productif qui s’est produit dans une partie de l’hémisphère Nord au 18ème siècle. Ce n’est plus une utopie mais la possible réalisation, compte-tenu des progrès techniques et scientifiques déjà atteints et de ceux que l’on peut anticiper, d’un mode de production et de consommation nouveau. Aujourd’hui la révolution des forces productives s’exprime principalement dans la révolution de moyens de production intellectuels et elle est incorporée dans des êtres vivants. La matérialité du 19ème siècle n’a pas disparu mais elle évolue. Une révolution du calcul numérique est en train de prendre forme. Elle correspond à une révolution scientifique annonciatrice du communisme.

Cela dit, le communisme ne prendra place humaines que sur la base de rapports sociaux appropriées et d’un niveau de développement technique et mental permettant leur fonctionnement. Le bon vieux marxisme est encore là pour nous le rappeler. Il faudra, ne serait-ce que pour se rapprocher du communisme, livrer un gigantesque combat au terme duquel les classes dominantes actuelles dans le pays et dans le monde devront céder la place, perdant ainsi leur pouvoir et leur raison d’être. C’est pourquoi elles refusent absolument d’envisager que les sociétés humaines puissent devenir communistes, et elles affirment que le communisme est une utopie dangereuse.

Telle est, me semble-t-il, la première et sans doute la plus importante des conceptions que l’on puisse repérer relativement au communisme dans un pays capitaliste développé. Dans la suite de ce texte je désignerai cette conception par le terme de “Conception négative”, ou CN.

Une société communiste est, théoriquement, une société d’abondance, d’où la rareté des biens et des services, et par conséquent le marché, mais aussi la forme marchandise des biens et services ainsi que de la force de travail, auront disparu. Pour se défendre du communisme au plan idéologique, les classes capitalistes dirigeantes énoncent que les besoins étant infinis, il ne sera jamais possible de les satisfaire tous. Les sociétés seront donc éternellement marchandes et capitalistes

Comme l’écrivaient Marx et Engels dans l’Idéologie allemande (1846), «à toute époque, les idées de la classe dominante sont les idées dominantes» . Cela se vérifie, hier comme aujourd’hui. Il s’en suit que la très grande majorité de la population, notamment en France, a une représentation péjorative du communisme. Cette représentation est ignorante, floue, narquoise et de toute façon négative. “Le communisme, c’est tout ce qui est à toi est à moi”. Telle est la définition imbécile du communisme qui, je le crains, prévaut dans les esprits. Elle est digne de Tony Blair et de sa sotte arrogance mais ne ne va pas au delà.

Seule la partie très minoritaire de la population qui se range rationnellement sous la bannière du Communisme et qui agit à l’intérieur de Partis communistes ou d’organisations similaires, pense l’avenir de la société à l’aide d’une conception positive et théorisée du communisme et de son approche.

La France est dans ce cas. Elle offre cependant la particularité d’abriter deux conceptions positives radicalement différentes de l’approche du Communisme. Les éléments importants à noter concernant leur rapport au socialisme, sont les suivants.

Selon la première de ces conceptions positives (que je désignerai par la suite comme Conception Positive 1, ou CP1), le communisme serait potentiellement présent au sein même de la société capitaliste. Certes, il ne le serait qu’en pointillé, mais il le serait quand même. Pour révolutionner la société capitaliste, il serait donc inutile et peut-être même politiquement coûteux d’en faire la révolution. Il suffirait d’en conduire l’évolution. Là encore, Marx et Engels (L’idéologie allemande) sont sollicités. «Le communisme n’est pas un état des choses qui doit être créé, ni un idéal sur lequel la réalité devra se régler. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l’état de choses actuel» .

Passer par une étape socialiste, intermédiaire entre le capitalisme et le communisme, deviendrait superflu puisque le communisme serait «déjà là» , bien que n’étant «pas tout à fait là» . La branche opéraïste du marxisme, sous la plume de Toni Négri, a développé des positions qui convergent avec celles de Lucien Sève, notamment dans Good Bye Mr. Socialism[1]. Négri ne prend pas appui sur l’Idéologie allemande. Son inspiration théorique est plutôt cette partie des Gründrisse que l’on appelle «Le Fragment des Machines» . Mais le résultat est le même. Bernard Friot, de son côté, a découvert que les cotisations sociales avaient fait entrer la France dans un époque nouvelle, très proche du communisme. Comme l’indique cette brève énumération, les théories du «communisme déjà là» sont variées et sans doute plus nombreuses que celle engendrée par Lucien Sève.

Selon la deuxième de ces conceptions positives (ou Conception Positive 2, ou CP2), le socialisme serait, au contraire, une étape toujours indispensable sur le chemin du Communisme. Cette conception fait figure de «parent pauvre» dans la réunion de la famille. Ce serait le groupe de celles et de ceux qui rabâchent Lénine, ah! quelle horreur! quelle tristesse!

Ces conceptions positives sont en effet des conceptions ennemies. Pour la Conception positive 1, la marche vers le Communisme ne supposerait pas du tout que la rupture complète avec le capitalisme fut le premier acte révolutionnaire devant être accompli. Le communisme serait le prolongement direct de l’évolution des forces productives engendrées par le capitalisme développé lui-même.

D’une part, ce développement bouleverserait les catégories antérieures. La classe ouvrière, pffffuit! L’impérialisme, pffuit! La théorie de la valeur des marchandises élaborée par Marx, pfffuit! Pour poursuivre l’oeuvre de Marx, bref pour être un marxiste moderne, il faudrait REFONDER le marxisme. Le vieux marxisme ne serait plus désormais qu’un «sabre de bois» . Aux chiottes, le vieux marxisme!

D’autre part, lorsque l’on aurait bien compris tous ces changements, et que, en tant que marxiste moderne, on prendrait directement appui sur ces manifestations du «communisme déjà là» pour lutter contre le capitalisme, les capitalistes seraient plus que gênés aux entournures pour s’opposer à vous, pour vous empêcher de déstabiliser.

En effet, vous prendriez alors appui sur une tendance qui serait immédiatement favorable à vos ambitions révolutionnaires mais dont ils seraient, simultanément, les propres générateurs, et dont ils ne sauraient donc se passer sans mettre en cause leur activité.

C’est pourquoi cette marche vers le Communisme pourrait être effectuée au sein même de la société capitaliste, dans le cadre de ses règles de fonctionnement, celles en particulier de la démocratie bourgeoise, et avec le consentement républicain de la classe capitaliste s’inclinant devant le suffrage universel. Point besoin de socialisme.

Conformément à la CP1, les combats politiques pour la construction définitive du Communisme seraient conduits en termes de majorités arithmétiques puisque la configuration sociale et institutionnelle de la société en voie de transformation serait conservée, au moins pendant un certain temps. Ce qui aiderait à construire ces majorités arithmétiques seraient, par exemple, les valeurs de gauche, opposées aux valeurs de droite. Je rappelle ici que Lucien Sève, récemment disparu, a apporté sa compétence philosophique pour l’élaboration de la CP1. Cela dit, comme je l’ai déjà mentionné, ce n’est pas le seul auteur à avoir conclus comme il l’a fait. Il paraît clair que la faillite du socialisme de type soviétique (années 1990) a fortement stimulé l’éclosion et la mise en forme de ce genre de conception.

Pour la Conception positive 2, au contraire, l’élaboration de tout projet visant à révolutionner la société capitaliste suppose l’élimination immédiate de la classe capitaliste, a fortiori de son noyau dirigeant, la grande bourgeoisie. Le socialisme serait, pour cette conception, la phase transitoire au cours de laquelle les capitalistes, en tant que classe sociale, seraient immédiatement chassés du pouvoir et de l’économie pour que le prolétariat et le peuple puissent construire le socialisme. Cet aspect des choses est de nature politique, et d’autres traits fondamentaux, de nature économique, caractériseraient cette phase.

Quoiqu’il en soit, conformément à CP2, les mêmes combats politiques seraient conduits en termes de classes et donc au nom des classes majoritaires révolutionnaires contre les classes minoritaires vivant de l’exploitation du travail. La théorisation de la CP2 remonte aux débuts du Capitalisme monopoliste et de l’Impérialisme. Elle fut inaugurée par Lénine et par les bolchevicks au cours des années 1915-1920. Par contraste, les théorisations relevant de la CP1 ont mûri pendant la deuxième moitié du 20ème siècle.

Voici un tableau visant à résumer, tout en les comparant, les trois conceptions du communisme que je viens d’évoquer et que l’on trouve aujourd’hui, en France.

Tableau comparatif des 3 conceptions du Comunisme en France et de leur incidence sur l’idée du socialisme
Points de différenciation Conception Négative (communisme=utopie= pas de socialisme) Conception Positive 1 (communisme déjà visible=pas de socialisme) Conception Positive 2 (communisme à construire= socialisme)
Faut-il un Parti communiste pour aller au communisme? Le communisme étant une utopie, l’existence d’un parti communiste est une aberration. Un parti communiste n’est pas nécessaire. Les mouvements sociaux suffisent. Un parti communiste est indispensable
Le marxisme est-il un guide pour la réflexion et l’action? Le marxisme est une théorie comme une autre et c’est sans doute la pire Le marxisme est une théorie faillible qui doit être REFONDEE La classe ouvrière tend à disparaître. Elle est gagnée par des idées fascisantes Le marxisme est pour l’instant indépassable. Il faut le diffuser et le DEVELOPPER.
La classe ouvrière joue-t-elle un rôle oarticulier? Non. Elle ne joue pas de rôle particulier. Elle ne comprend pas les changements en cours Oui, elle continue de jouer un rôle révolutinnaire de premier plan. Mais elle est aujourd’hui sur la défensive
Quelles sont les forces sociales majeures du changement social ou de la révolution? L’entreprise capitaliste L’entreprise capitaliste Le peuple la multitude. Ces notions sont Surdéterminées par des valeurs La force révolutionnaire est le peuple de gauche La classe ouvrière demeure le moteur de toute révolution. Mais il faut lui redonner confiance et force
Sur quoi reposent ces conceptions? Sur l’ignorance, sur l’idéologie capitaliste Sur une certaine interpré- tation de la faillite du socialis -me de type soviétique, de l’échec du Programme Commun surl’idée de l’individualisation Irrépressible des sociétés modernes, sur le niveau supposé des forces productives Sur l’idée que l’interprétation CP1 de l’échec de l’URSS est erronée, que la lutte en France et en Europe a été dévoyée et conduite dans l’impasse de l’UE que rien ne changera sans une réorientation politique du PCF, nationale et de classes, que les rapports sociaux sont fonda mentaux.
Critiques des partisans de ces conceptions sur le socialisme Le socialisme est le gouverne ment des fainéants. Le socialisme risque d’être une bureaucratie inefficace et politiquement dangereuse En niant le socialisme, les luttes sont condamnées à sont impuissantes.


Telles sont, me semble-t-il, les contenus principaux des trois conceptions que l’on peut observer en France relativement au Communisme ainsi que leurs positions respectives sur le socialisme. Mais quelle peut être l’influence globale de cette configuration à propos du socialisme ?

Je n’ai pas d’informations particulières sur le partage de la population adulte française relativement au Communisme et au socialisme. Il ressort néanmoins du tableau ci-dessus que la conception négative et la conception positive 1, qui sont toutes deux hostiles au socialisme, ont des zones de recouvrement et conjuguent certainement leurs effets.

Quelles sont les proportions? Les chiffres qui suivent sont une façon de parler et non de véritables quantités. Selon moi, «les indifférents-hostiles» au Communisme forment la très grande majorité de la population, disons 95%. Je tends à croire que les 5% restants sont des cadres politiques «de gauche» ou des militants communistes et communisants de petites formations diverses. Ils se partageraient entre partisans de la conception positive 1, qui seraient majoritaires dans ce sous-groupe, soit 3%, et partisans de la conception positive 2, qui seraient minoritaires, soit 2%.

Si les ordres de grandeur retenus sont corrects, on peut expliquer que la mention du socialisme soit totalement absente du discours politique contestataire français actuel.

Elle le serait en raison de la faiblesse numérique de son soutien de base, faiblesse quasiment inévitable dans une société dominée par le Capital financier.

Elle le serait ensuite en raison de la division existant au sein des partisans du Communisme. La division est toujours préjudiciable à la force d’une idée politique, quelle qu’elle soit.

Mais elle le serait enfin en raison du silence de certaines directions (je pense notamment à celle du PCF) devant les difficultés rencontrées pour souligner publiquement, ouvertement, la nécessité du socialisme pour faire avancer les luttes sociales.

Tout se passe comme si ces dirigeants restaient sans voix. Tout se passe comme si les partisans du socialisme avaient honte de leurs convictions et ne savaient quoi faire pour l’exprimer. Mais en sont-ils encore les partisans? Quelles difficultés rencontrent-ils?

Malgré l’évidence criante de la nécessité d’une réponse de type léniniste à la crise économique, politique, sanitaire, morale, que traverse la France, la conviction socialiste est, dans ce pays, si faible, si atténuée, si éloignée des esprits, que quasiment personne ne s’y réfère. Les pays socialistes eux-mêmes, la Chine en premier lieu, malgré la profondeur et la qualité visibles de leur engagement socialiste dans la lutte contre la récente pandémie, sont l’objet d’attaques aussi grossières et violentes qu’injustifées. Or ces attaques demeurent, pour l’instant, quasiment sans riposte.

Seul, un très petit nombre de personnes, de militants, d’ouvriers, de syndicalistes, d’intellectuels, d’animateurs de sites web, osent protester contre elles.

Mais pour ce qui concerne le socialisme, c’est le grand silence blanc qui l’emporte. La majorité des dirigeants français actuels de la lutte révolutionnaire ne s’affirmeraient-ils socialistes, au sens léniniste du terme, qu’en chuchotant ce mot maudit, à la nuit tombée et par temps d’épais brouillard?

Si l’on est partisan du socialisme, que faut-il faire devant cette hostilité au socialisme qui est, en même temps qu’un assourdissant silence à son égard, un assourdissant silence favorable à la grande bourgeoisie, un assourdissant silence dans la capacité des luttes socio-économiques, pourtant nombreuses, à déboucher sur le changement auquel elles aspirent? Faut-il continuer à se taire en baissant la tête ou faut-il au contraire la relever et combattre, même en tant qu’individu ou membre d’un petit groupe?

Macte animo generose puer, sic itur ad astra. *

Jean-Claude Delaunay

[1]Toni Négri, 2008, Good Bye Mr. Socialism, Editions du Seuil, Paris. Toni Négri prend appui sur le texte des Gründrisse selon lequel, à un moment donné, lorsque le développement des forces productives a dépassé un certain niveau, les formes marchandes perdent leur signification. Il estime que ce niveau particulier a été atteint dans les sociétés développées de type occidental.

*[ "Courage enfant de noble race, c'est ainsi que l'on atteint le ciel" ]
 
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