Forum Marxiste-Léniniste
Forum Marxiste-Léniniste
 
Retour au forum
 

Ajouter une réponse

Pseudo :    S'inscrire ?
Mot de passe :    Mot de passe perdu ?
Icône :
                                
                                
Message :
 
 
 
Smilies personnalisés
 
Options :
Notification par email en cas de réponse
Désactiver les smilies
Activer votre signature
 
 
Dernières réponses
Finimore
Concernant Michel Clouscard, voici ce qu'en écrit François Bégaudeau dans son livre : Notre joie (fayard-pauvert 2021).

Si c’est profond, je creuse. En creusant, ma main rencontre un attelage verbal à succès. Libéral-libertaire est cet attelage. Le marxiste Clouscard l’a formé dans les années 1970. Puis des gens pas très marxistes en ont fait leur totem négatif. Pour Clouscard puis Soral puis forcément M, l’engeance libérale-libertaire est la source de tous nos malheurs.

Une convergence lexicale ne vaut pas convergence. Qu’il nous arrive, à Raphaël Enthoven et à moi, de dire courgette ne scelle pas entre nous un compagnonnage politique, grand bien lui fasse. Mais dans le système Clouscard comme dans le système Soral, libéral-libertaire n’est pas courgette. C’est par la centralité de libéral-libertaire que le second a pu se dire le continuateur du premier.

Au rappel que Clouscard s’est démarqué sèchement de cette embarrassante descendance, je pourrais rétorquer qu’on a les admirateurs qu’on mérite, mais alors il me faudrait admettre que je mérite M. M qui m’a dès la première pinte demandé mon avis sur Clouscard, comme me l’ont demandé nombre de jeunes droitiers depuis un an. Tout cela est bien confus. Qui mésentend qui ? Qui embrouille qui ?

Pour une part, Clouscard s’embrouille tout seul. Sa confusion tient, comme chez ses obscurs disciples, à la morphologie en deuxième main de sa thèse. Car Clouscard ne critique pas les libertaires en soi mais en tant qu’amis de ses ennemis. Les libertaires seraient les complices objectifs de l’hégémonie libérale ; les idiots utiles du libéralisme ; les couillons de l’histoire, dirait aussi ce natif du Tarn. Leur célébration du désir servirait les intérêts du capitalisme de la séduction advenu après-guerre.

L’attelage verbal est donc un montage théorique. L’extrapolation d’une contiguïté en collusion. En tout cas une construction idéelle qui, soumise aux faits, s’effondre.

Dans les faits, les forces libertaires et les forces libérales se sont en tout temps affrontées. Et pour cause : les mouvements proclamés libertaires se proclament antilibéraux, et le libéralisme est constitutivement autoritaire. Les libertaires songent à des peines substitutives à la prison, les libéraux à en construire de nouvelles pour accueillir les perdants indociles de leur compétition. Les libertaires militent pour l’insubordination de l’école aux exigences de la production au nom desquelles les libéraux la soutiennent et la financent. Les libertaires visent la réduction du temps de travail que les libéraux œuvrent à augmenter.

Dans le concret de la séquence 68 qui selon Clouscard noue l’alliance entre les deux branches, les libertaires travaillent à étendre la grève, les libéraux réclament sa fin. Des libertaires pousseront jusqu’à la sécession communautaire leur refus d’un modèle de croissance que les libéraux décrètent sans alternative.

Hélas, Clouscard n’est pas si factuel. Pour être marxiste il n’en est pas moins philosophe. À sa pensée globale importe l’idée libertaire et non son incarnation. Les consciences individuelles sont dérisoires au regard de sa conscience philosophante occupée à ficeler son grand récit. Depuis ce promontoire lui apparaît négligeable que les libertaires se soient vécus comme antilibéraux. Ils ne savent pas ce qu’ils font, ils ne connaissent pas leur rôle historique, leur place dialectique. Ils s’abusent parce qu’ils sont abusés : le développement de l’esprit libertaire est une ruse de la raison libérale. Et l’individu est au cœur de la stratégie : le capital, ayant intérêt à émietter en individus les groupes formés pour le combattre, encourage le libertaire à réclamer des droits pour l’individu. Aussi bien, occupé à multiplier les désirs du consommateur, le capitalisme de la séduction se félicite de la sacralisation du désir par l’hédonisme libertaire.

Cela s’entend. Cela se conçoit. C’est une conception. Toutes les conceptions sont possibles. Mais les faits eux ne volent pas dans le possible, ils sont avérés ou non. Dans les faits, le désir d’achat ne participe en rien du désir valorisé par les anarcho-désirants . Stimulé par des techniques de manipulation inférées d’expériences de rats en cage, la pulsion de consommer enclot le consommateur dans le circuit marchand. La pulsion de consommer est le contraire de l’expression d’une singularité, valeur cardinale des libertaires. Elle uniformise chacun et ne singularise personne. Elle fond l’individu dans la masse.

Le marketing ne cible pas des individus mais des groupes ethniques ou sociaux ou sexuels ou culturels qu’il convertit en niches. Si par exception il affine ses messages pour toucher une individualité, c’est dans le but de désindividuer son désir en sorte que, par un jeu mimétique et donc dépersonnalisant, l’individu désire ce que désirent les autres. Le besoin client , qui porte déjà mal son nom – ai-je besoin d’un mixeur à boisson ? –, n’est pas le désir client. Et Clouscard est le premier à constater-déplorer que la consommation lisse les goûts, les pratiques, les attitudes, les vêtements, cependant que Lasch, son cousin américain, observe que les Narcisse accouchés par le capitalisme contemporain sont expropriés de leur subjectivité. La consommation produit des Narcisse qui s’adorent ressemblant à des millions d’autres Narcisse ressemblant à des millions d’autres.

La prétendue complicité objective entre libéraux et libertaires repose donc sur une sous-estimation du désir, dommageablement apparenté à la démangeaison maladive qui jette le petit cadre brimé sur le Smartphone Motorola 128 Go Noir.

À la spéculation historique de Clouscard je peux opposer une contre-spéculation. Je peux d’un coup de clavier inverser les rôles des agents historiques. Écrire que c’est le libéralisme qui est une ruse de la raison libertaire. Décider que la consommation est une ruse de l’émancipation. Que le cool est une marchandise mais que ses effets excèdent les profits que les marchands en retirent. Qu’il y a un supplément, une conséquente fortuite, un bénéfice émancipateur collatéral. Déraidi par le chewing-gum, fluidifié par le scooter, déployé par la voiture, le corps occidental d’après-guerre en vient à trouver insupportable la verticalité imposée par le curé, l’instituteur, le père, le mari, la patronne, et parfois prolonge cette intolérance en insurrection. Je peux en douze touches tenir que les années 1960 contestataires ce fut ça. Ce fut Marx finissant le travail d’Elvis Presley – pour paraphraser l’ami Negri.

Elvis Presley est une marque de savon, vendue avec des techniques de vendeur de savon. Oui les marchands ont arrosé la planète de rock’n’roll, globalisant les goûts et les danses, formatant les postures, introduisant dans tous les foyers du matériel d’amplification et de diffusion du son. Et le rock en se diffusant diffuse une onde qui en chaque corps produit une vibration qui devient une démangeaison qui devient une addiction. Le corps en redemande, et c’est le but : qu’il redemande du savon, qu’il redemande du rock. Mais la vibration rock s’excède en d’autres désirs que l’hypermarché ne peut satisfaire. Le fournisseur ne peut plus fournir. Le corps électrifié par le rock se survolte en subversion politique contre le capital dont la camelote a allumé la mèche. À ce moment, qui est l’idiot de l’autre ?

Si en juin 1968 l’ouvrière de Wonder ne veut plus rentrer dans cette taule , c’est que l’électricité ambiante, produite par frottement des corps dans les concerts et les manifs, allume en elle une énergie qui déborde le cadre du travail d’usine. Ça fuit de partout. Le capital doit stopper l’hémorragie. Si personne ne se remet au boulot, qui produira ses richesses ? Les propriétaires envoient leurs intellectuels organiques tancer les libéraux-libertaires. Les libéraux-autoritaires réclament qu’on sépare le bon grain capitaliste de l’ivraie du désir. Et de cette histoire-là racontée par moi c’est Clouscard qui est le couillon.

On rate le fait libéral en ratant sa contradiction interne : ses bulldozers défoncent des vies mais aussi des murs. La gauche antilibérale rate l’essentiel si elle rate cette inédite conjonction de coercition et de laisser-faire.

Clouscard rétorquerait que cette ambivalence n’est pas une contradiction mortelle du capitalisme mais la condition de sa survie. En nous jetant des miettes de plaisir, il se rend vivable et nous endort. La consommation achète ma docilité. Quand j’achète, c’est moi qu’on achète.

Cela s’entend aussi.

Tout s’entend.

Vu du haut, les deux analyses dialectiques sont défendables à l’infini – misère de la philosophie. Redescendons au ras des pâquerettes. Revenons au blue-jean , puisque Clouscard a fait une fixette sur ce vêtement emblématique. Laissons l’emblème, voyons l’usage. Dans le périmètre individuel, que se passe-t-il avec le jean au début de son règne ? Il se passe bien sûr que c’est un désir archi-impersonnel – tout sauf un désir donc – qui me pousse à en acquérir un. Il se passe que c’est, avec le téléphone portable, le vecteur d’uniformisation le plus performant de l’histoire du commerce mondialisé – dans tous les films, qu’ils soient iraniens, argentins, algériens : des jeans et des Smartphones. Mais il se passe aussi que cette uniformisation estompe l’appartenance de classe ; que dans certaines situations (pas toutes), porter le même pantalon que le dominant atténue le complexe d’infériorité sociale. Il se passe surtout que le caractère unisexe du vêtement est un passe-droit pour les femmes. Il se passe concrètement qu’à moi femme de 1972 le jean autorise des positions et des mouvements que la jupe patriarcale m’interdisait. Moulée dans un jean je peux me balader sans craindre un coup de vent, je peux plier et déplier mes jambes sans ouvrir un angle idéal sur ma culotte, je peux ne pas porter de culotte, je peux poser mes fesses partout, je peux me poser là, je peux me salir, je peux me tacher sans avoir à me changer, je peux danser sans craindre de filer un collant, je ne suis tenue ni aux collants ni aux bas, je ne suis pas tenue de m’épiler les jambes, je peux sauter je peux courir je peux grimper à un arbre, je peux porter des tennis qui multiplient les terrains praticables par moi. Ainsi j’ai grignoté du terrain dans cette chasse gardée des hommes qu’est l’espace public. Le jean m’offre des bouts de cité. Il m’octroie, dans ce sens physique, concret, au ras des pratiques, des bouts de citoyenneté.

Est-ce que ces détails intéressent Clouscard ? J’en doute. Je flaire que sa critique du blue-jean n’est pas amendable parce qu’elle est affective. Je flaire que le jean le rebute en soi, et non pour sa fonction historique. Que la coolitude que le jean signale et permet lui déplaît en soi, et non pas seulement comme anesthésiant politique. Les hippies, Michel les trouve idiots avant qu’idiots utiles. Leurs codes par définition grégaires lui semblent puérils. Ces originaux se soumettent à une norme de l’anticonformisme – mutins de Panurge ? Les libertaires c’est le folklore de la rébellion sans la rébellion. Avec eux tout est permis mais rien n’est possible.

Je flaire chez Clouscard une dilection pour la tradition – celle-là même que M flaire positivement, ici tout le monde flaire tout le monde, nous nous reniflons. Je flaire que le provincial Clouscard refuse le rock en tant que marqueur d’une avant-garde citadine qui le rebute. Quand il vocifère contre le jean ce n’est pas le marxo-hégélien qui parle, mais l’amateur du rugby de village. Je le flaire chez lui parce que j’ai l’odeur sur moi. J’ai aimé ce rugby via mes parents d’ascendance rurale. J’en regrette la disparition. J’ai mes nostalgies aussi, multipliées avec l’âge ; j’évite juste de les politiser.

Je flaire en outre que Clouscard, qui a si bien parlé de l’amour courtois, déteste surtout du jean le caractère unisexe. J’en viens à sentir, dans son analyse du remplacement d’un capitalisme par un autre, une préférence pour le capitalisme patriarcal d’avant-guerre. Je ne vais plus tarder à penser qu’elle s’inscrit dans une nostalgie du patriarcat.

Ou bien c’est simplement l’échelle individuelle qui est déconsidérée. La femme en jean est une quintessence d’individu. La femme, en tant qu’elle échappe toujours, est la synecdoque de l’individu en tant qu’il échappe toujours. Échappe à quoi ? Échappe au théoricien, peut-être amer de certains échecs amoureux, mais échappe d’abord à la théorie. L’individu c’est le particulier, la théorie c’est le général. La diatribe millénaire des théoriciens contre l’individualisme est induite par la théorie elle-même, dont les grosses mailles peinent à attraper l’individu. L’anti-individualisme du philosophe est une autre de ses déformations professionnelles.

Mais la déconsidération est plus violente. Plus viscérale, plus intime. La vie individuelle n’est pas seulement quantité négligeable dans la comptabilité théorique, elle est méprisable.

Pourquoi M rechigne-t-il à parler de lui ? En première approche, j’ai cru qu’il évacuait l’aspect social de sa vie, jugé trop prosaïque. En deuxième approche, j’ai conjecturé que M ne déteste ni les juifs ni les femmes ni les Anglais ni les transgenres, mais lui-même. Et plus précisément Mehdi en lui – comme son acolyte anti-PMA déteste l’homosexuel en lui. Puisque M ne s’aime pas différent, il se voudrait autre ; pour être autre, il fond sa différence dans la fiction du même. Ça se défend ; ça se comprend. Mais c’est insuffisant. Alors que la soirée commence à se finir, les mots par lesquels il décline mon ultime exhortation à parler de lui suggèrent une troisième approche. Les petites affaires individuelles ça n’a aucun intérêt, dit-il. Ça ne mérite pas qu’on en parle, ajoute-t-il, et sa bouche, articulant cela, se tord de mépris. Ce n’est pas une image, c’est un fait physionomique : il grimace. De mépris, et un peu aussi de dégoût. Comme qui trouverait un rat dans une suite nuptiale. Non, pas un rat : une crotte de rat.

L’individu une crotte de rat.

L’individu en soi, l’individu livré à lui-même est indigne d’intérêt, est indigne. Il n’acquiert dignité qu’à se fondre dans une entité plus vaste et plus estimable, plus estimable parce que plus vaste. La nation. La société. Le peuple. Un corps d’armée. Le corps enseignant.

La mauvaise disposition de Clouscard vis-à-vis de l’individu en tant qu’individu est peut-être le noyau affectif de son communisme. Entre autres mobiles qui la légitiment définitivement, la défense du commun serait sous-tendue par un vieux et profond rejet de l’individu. Le commun ne réglerait pas un compte à la propriété privée mais à l’individu, qui n’est tel qu’à s’excepter en partie de la chose commune.

Pourquoi les spectateurs militants grimacent-ils devant le personnage de mon docu Autonomes qui a poussé l’autonomie jusqu’à une solitude farouche ? Pourquoi tant de réserves sur cet homme des bois qui n’emmerde personne, ne demande rien à personne, ne profite de personne à quelques poules volées près ? Pourquoi tiennent-ils tant à spécifier que l’autonome n’est pas celui qui s’isole dans son coin ? Qu’est-ce qu’il y a de si répréhensible dans le fait de s’isoler dans son coin ? Quelle vieille méfiance contre l’individu s’exprime là ? Quelle proximité entre le commun et le communautaire ? Par extrapolation, j’en viens à voir dans la volonté de reconnecter l’individu (à la terre, au vivant, etc.) une volonté de le recadrer. Dans la volonté de le relier une volonté de le lier. Ainsi tous ces mouvements émancipateurs ne consisteraient qu’à arracher l’individu à une mauvaise tutelle pour le confier à une bonne tutelle (la nature, la communauté, l’espace citoyen).

La politique-institution qui défend l’existant est policière ; mais la politique-émancipation n’est-elle pas aussi un rappel à l’ordre ?

Par une de ces coïncidences qui sont le sel de la vie, j’achève la première mouture de ce livre pile au moment où une historienne marxiste et libertaire a tweeté une alerte contre une blague de moi qu’elle juge sexiste. Alerte relayée par un tombereau de témoignages courageusement anonymes sur mon comportement mufle avec l’autre sexe. Il apparaît au grand jour que mon féminisme revendiqué est une diversion de prédateur. C’est donc au titre de la grande marche vers l’égalité femme-homme que le NPA annule une rencontre publique avec moi, que le site anarchiste Lundi Matin annule la publication d’un entretien avec moi, que le journal du Parti de gauche annule la publication d’un article sur les séries, écrit à sa demande et bénévolement. Entre autres punitions et boycotts.

Par une coïncidence non moins salée, j’achève dix mois plus tard la dernière mouture de ce livre pile au moment où une figure de la gauche radicale agonit mon attitude d’après la conférence lyonnaise où il était présent, me jugeant irresponsable et gogol d’avoir fait table commune avec des fafs . Ça me donne l’idée d’un livre.

Je reviendrai une autre fois sur les boycotts du printemps 2020, dont certains durent. Il y a beaucoup à en tirer. Beaucoup de savoir, beaucoup de gaieté. Pour l’heure et pour ici je me contente d’inscrire cet élégant lynchage dans la longue histoire de mes rapports tendus avec la militance.

Force est de constater que nous ne m’aimons pas beaucoup.

Il y a comme un malaise de nous à moi.

Pour des raisons de fond ? C’est ce que les militants, piètres psychologues, se figurent. Dénués d’odorat, ils posent un diagnostic théorique. Comme M, ils croient à la guerre des idées . Par exemple en 1993 le SCALP me reproche des propos de radio sur les limites de l’antifascisme. Par exemple en 1996 les austères anarcho-punks trouvent les Zabriskie à la fois trop désinvoltes et trop staliniens . Par exemple dans une librairie alternative une militante PC tance ma sympathie pour les décroissants. Par exemple les spectateurs décroissants d’Autonomes trouvent que le film ridiculise leur cause. Par exemple ce message hier d’un militant LO pour me rééduquer sur la question européenne. Par exemple la liste est longue. Et inutile.

Ça ne se passe par sur ce plan.

Au plan des individus et des viscères, là où Clouscard n’aime pas les fringues des hippies, là où S remâche sa rupture amoureuse, là où M désespère de sa mère arabe ou gauloise ou whatever, il n’y a pas désaccord entre la militance et moi mais incompatibilité d’humeur. Je l’avais dit à une journaliste de gauche qui justifiait un article négatif sur En Guerre par le mépris de classe qui selon elle en transpirait : la prochaine fois écris directement que tu n’aimes pas ma gueule.
Xuan
Ce qu'a pu dire le PC soviétique au PCF à cette époque relève aussi de la ligne révisionniste, qui était commune aux deux PC.

C'est sur cette ligne révisionniste que je veux attirer l'attention.
Evidemment Clousclard qui l'a défendue n'en dit pas un mot et reste focalisé sur le libéralisme libertaire et le "gauchisme".

Le Parti Communiste Chinois s'était opposé très tôt à la ligne de Khrouchtchev, notamment dans la "lettre en 25 points". Ces 25 points s'appuyaient sur "les deux Conférences de Moscou de 1957 et de 1960" et trois d'entre eux concernaient la ligne générale des partis communistes dans les métropoles impérialistes.

Le point 10).
Dans les pays impérialistes et capitalistes, il est nécessaire de faire triompher la révolution prolétarienne et d'établir la dictature du prolétariat pour résoudre à fond les contradictions de la société capitaliste...L'avant-garde du prolétariat ne deviendra invincible en toutes circonstances que si elle maîtrise tous les modes de combat, pacifique et armé, ouvert et clandestin, légal et illégal, la lutte parlementaire et la lutte de masse, etc. Il est faux de refuser d'utiliser la lutte parlementaire et d'autres formes légales de combat lorsqu'elles doivent et peuvent l'être. Mais quand le parti tombe dans le crétinisme parlementaire ou le légalisme, qu'il circonscrit la lutte dans les limites autorisées par la bourgeoisie, l'aboutissement en sera inévitablement l'abandon de la révolution prolétarienne et de la dictature du prolétariat.

le point 11).
En traitant la question du passage du capitalisme au socialisme, le parti prolétarien doit partir du point de vue de la lutte de classe et de la révolution, et il doit se baser sur la théorie marxiste-léniniste de la révolution prolétarienne et de la dictature du prolétariat...

Le point 12).
Les révolutions sociales sont historiquement inévitables aux différentes étapes de l'histoire de l'humanité et se produisent en fonction de lois objectives indépendantes de la volonté de l'homme....

Les marxistes-léninistes ont critiqué cette ligne dès le début des années 60, cf le site des éditions prolétariennes.
La route a été sinueuse mais peu à peu les critiques finissent par émerger quand la dérive du PCF devient évidente et que ses effectifs fondent comme un glaçon au soleil.
L'élection de Hollande a été un point de non-retour. Dernier candidat du PS à avoir bénéficié d'un soutien dans le PCF et la CGT, sa politique anti-sociale a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.
Contrairement à la clique révisionniste qui s'accroche à la direction du PCF et notamment à la ligne éditoriale de l'Humanité, la base du PCF et de la CGT ne veut plus entendre parler de la social-démocratie, dont nombre d'individus sont venus renforcer les rangs de LREM.
Il faut en comprendre les causes.
Principalement c'est la thèse du passage pacifique au socialisme, inséparable de l'électoralisme, qui sont à l'origine de la dégringolade du PCF.

Pour soutenir un candidat "commun" et faire bonne figure dans le cirque électoral, la ligne révisionniste a délesté le PCF de toute référence aux principes communistes.
Et ceci jusqu'à l'objectif de la société socialiste. Au lendemain même du dernier congrès la faucille et le marteau, symboles de l'unité de la classe ouvrière et de la paysannerie, ont été remplacés par une étoile et une petite flamme dépourvues de toute signification de classe ou même politique, tout juste bonnes à orner un sapin de Noël.


____________________


J'ai déjà mis en ligne plusieurs articles de Danielle Bleitrach, qui était dirigeante aux côtés de Georges Marchais. Peu à peu et bien qu'elle n'ait jamais remis en cause ce dirigeant mais plutôt son entourage, elle est revenue sur la dérive révisionniste et son principal promoteur Khrouchtchev.

Voici un courrier émanant aussi d'un ancien dirigeant du PCF dont je ne cite pas le nom, n'ayant pas son autorisation formelle :


Je suis d'accord avec le fait que la dérive du PCF remonte bien avant 2000 et encore beaucoup plus avant. Il est tout aussi certain qu'on ne peut faire abstraction du contexte, de ce que furent les avancées et les reculs du rapport des forces international, des victoires et des défaites et d'une façon plus générale du réarmement militaire et idéologique des forces du Capital après la fin des années 60, la victoire au Vietnam, les succès des luttes de libération nationale, la crise capitaliste comme dans les pays du socialisme réel, etc..

Le problème est que les leçons tirées de cette période fertile ont conduit à privilégier une vision de l'accès au pouvoir par l'adaptation et le respect des règles du jeu fixés par la bourgeoisie plutôt que par l'affirmation de positions de classes indépendantes,
fondés sur anti capitalisme et d'un anti impérialisme conséquent. L'eurocommunisme en a été l'aboutissement. A été privilégié ensuite la recherche d'alliances et donc de compromis plutôt que la relation aux masses, dont la situation matérielle comme la conscience d'appartenir à une classe allait en s'érodant. Les succès électoraux provisoires, l'activisme du PCF, la flatterie a son égard ont contribué à masquer la dérive.

On s'est accommodé de cette situation. On a ainsi fait cohabiter un mode d'organisation et des principes théoriquement léninistes y compris dans le choix des cadres du parti avec des orientations, et un opportunisme qui découlaient de ce qui précède.

Le PCF s'est d'ailleurs libéré à partir du 22e congrès de la dictature du prolétariat, puis du centralisme démocratique, du marxisme léninisme et même de la référence au socialisme et donc fort logiquement du travail politique dans les entreprises et de l'internationalisme sur lequel pourtant s'était fondé son prestige, la recherche théorique a été liquidé au bénéfice non plus d'opinions communistes mais de celles d'autres mais prétendument expertes.

La CGT a d'ailleurs fait le choix d'une route assez parallèle en particulier à partir du Congrès de Grenoble en 1977 qui nous a conduit là ou nous en sommes aujourd'hui. Bref nous avons commis bien des erreurs souvent par opportunisme, et finalement beaucoup trop. L'identité communiste est devenue une auberge espagnole et non plus un repère ou une référence politique.

J'ai vécu toute cette période comme un jeune dirigeant du PCF j'ai été élu à xx ans au CC. J'étais devenu précédemment un responsable national de la CGT. J'assume donc ma part de responsabilité individuelle et collective sans rougir. J'ai eu comme beaucoup de nombreuses réserves en particulier sur notre participation aux gouvernements et nos fluctuantes adaptations au gré des évènements en particulier dans le travail aux entreprises et l'international, l'Europe et sur la vie du parti.

Pour ma part je m'en suis expliqué à cette époque et depuis et à plusieurs reprises dans une forme d'auto critique. J'en ai aussi tiré les conséquences politiques par honnêteté, j'ai quitté le PCF .
Pour ma part je l'ai fait! et je l'assume. Georges Marchais avec qui j'ai eu la chance de militer comme avec d'autres dirigeants du PCF et de la CGT avait l'habitude de dire que le parti n'existe pas pour lui même mais pour être utile aux combats de classe que doivent mener les travailleurs et le peuple. Cela n'est plus le cas, et logiquement pour ma part j'en ai tirer les conséquences.

Aujourd'hui, le PCF tend à n'exister que pour lui-même. Je dis cela sans acrimonie et sans sous-estimer l'engagement et la sincérité des membres du parti en accord ou en désaccord. J'ai un trop grand respect pour eux. Ils sont ceux qui m'ont éduqué à la politique et à la fraternité et je leur dois une part importante de ce que fût ma vie. Je ne le regrette pas. C'est aussi grâce à eux que je me considère toujours communiste.
Mais, je constate par ailleurs et quoi qu'en disent bien des camarades que le dernier congrès a changé très peu de choses pour ne pas dire qu'il n'a rien changé. Il y a des côtés schizophréniques qui se poursuivent dans la politique du PCF et qui sont devenues insupportables.
Comment s'étonner alors que la grande masse des gens n'y comprennent rien. La lecture de l'Humanité en est un très bon exemple et d'ailleurs de journal du PCF(SFIC), il est passé à journal communiste à journal fondé par Jean Jaures. Je trouve cette évolution significative mais aussi pathétique!

Je m'en tiendrai là. C'est un propos qui je l'admet demeure très superficiel j'espère qu'on ne me le reprochera pas, il est sincère!

Bien fraternellement, salutations communistes,

...
Finimore
marquetalia a écrit :

Mai 68 était au départ une manifestation du PCF récupéree par les abats et autres gauchistes, ainsi que tous ces crapules de pédophiles,de hippies,et d opportunistes de tout poil


Là, tu racontes vraiment n'importe quoi !!! Evite d'écrire quand tu as picolé, essaie de mieux te renseigner sur cette période, même des bouquins comme celui de Brice Couturier (qui est passé de l'extrême gauche à anti-communiste) dans son livre "1969 année fatidique" donne des éléments intéressants. Lire également le livre de Jean-Paul Salles "La ligue communiste révolutionnaire (1968-1981) Instrument du Grand Soir ou lieu d'apprentissage ?. Dans ce livre les débats, internes et externes sur le sujet des drogues ou de la sexualité (voir l'influence des thèses de W. Reich) sont abordés sans détour.


Edité le 07-06-2020 à 09:42:20 par Finimore


Plaristes
Le PCF a ensuite été renseigné par les Russes qui ont appelé à ne pas faire grève, risque de manipulation des américains.

Il y a un documentaire que je recommande Mai 68 :
Nie Farce ni tragédie qui fait le bilan de tut ce que mai 68 a rendu de possible.

Mais de rappeler le dicton "Un mai 68 peut en cacher un autre !"

"Le « gauchisme » désigne du point de vue léniniste une position « de gauche » en apparence mais de droite en réalité."

C'est ça, mais il y a des exceptions. Car il y a une gauche du capital. Donc une droite pour un socialiste, et le positions anarchistes.
Xuan
marquetalia a écrit :

Mai 68 était au départ une manifestation du PCF récupéree par les abats et autres gauchistes, ainsi que tous ces crapules de pédophiles,de hippies,et d opportunistes de tout poil


Mai 68 n'était pas "au départ" une manifestation du pcf et ce que tu dis ne correspond absolument pas aux faits.

___________________


D'abord à propos du « gauchisme »
Le « gauchisme » désigne du point de vue léniniste une position « de gauche » en apparence mais de droite en réalité.

Ce terme a été utilisé par le PCF, en particulier en 68, (et repris par le presse bourgeoise) pour désigner indifféremment tous ceux qui critiquaient ses propres positions, c’est-à-dire à la fois les marxistes-léninistes organisés depuis décembre 1967 dans le PCMLF ainsi que l’UJCML, mais aussi les divers courants trotskistes et anarchistes.
Or la ligne du PCF n’était déjà pas marxiste-léniniste mais suivait les positions de Khrouchtchev sur le passage pacifique au socialisme par les élections bourgeoises, et la « coexistence pacifique » fondée sur l’équilibre nucléaire.
La direction du PCF se tenait déjà sur des positions révisionnistes, opportunistes de droite, et n’était donc nullement qualifiée pour désigner ce qui se situait à droite ou à gauche du léninisme.

___________________



Aux origines de mai 68
On peut remonter jusqu'en 67 si on veut faire la liste de toutes les grèves et actions anti impérialistes qui ont précédé mai 68.
On peut y ajouter le mouvement du 22 mars à Nanterre et Cohn Bendit aux contours anarchistes, qui se conclut le 2 mai par la fermeture de la fac de Nanterre.

Mais historiquement, mai 68 a commencé à cause de la guerre du Vietnam .
Depuis des mois les anti impérialistes s'opposaient aux fascistes pro US en diffusant le Courrier du Vietnam, en tenant des meetings et en organisant des manifestations au cri de "FNL vaincra !"
A cette époque la direction du PCF voulait imposer le mot d'ordre "paix au Vietnam"
Le 21 février s'étaient déroulés une manifestation autorisée du Comité Vietnam National (CVN) et de l’Unef, un meeting de la J.-C. (jeunesse communiste) et une manifestation clandestine des Comités Vietnam de Base (CVB) regroupant 2 à 3000 personnes qui convergent vers 19h30 à l’ambassade du Sud-Vietnam sur laquelle un drapeau du FNL est hissé.
Ci-dessous les tracts des CVB, de l'UNEF et du Comité Vietnam National. On constate que tous se trouvent sur la position FNL vaincra et non "paix au Vietnam".





___________________


La chronologie :
Le 28 avril la branche militaire de l'UJCml intervient contre l'exposition sur les "crimes" des Vietcongs organisée par le Front uni de soutien au Sud-Viêtnam dirigé par Roger Holeindre qui se tient, 44, rue de Rennes, au siège de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Occident déclare vouloir se venger

Le 3 mai, contre l'intervention d'Occident, le rassemblement des différents services d'ordre des organisations d'extrême gauche dans la cour de la Sorbonne a provoqué l'intervention de la police et 600 arrestations.
La Sorbonne est évacuée et le soir même les premières barricades sont dressées.
Les bagarres de rue avec la police entraînent un large soutien populaire dirigé contre le pouvoir gaulliste et le déclenchement de la grève générale.

Le 13 mai 68 une immense manifestation traverse Paris aux cris de "dix ans ça suffit!"
La Sorbonne est occupée, tout le pays est en grève et les usines sont occupées.

Bien que le mouvement du 22 mars ait investi Nanterre les semaines précédentes, c'est la lutte politique entre fascisme et anti impérialisme qui a servi d'étincelle à un mouvement à la fois étudiant et ouvrier qui est dirigé alors contre le pouvoir gaulliste.

Alors que l'espoir d'une révolution traversait tous les esprits des manifestants et des grévistes, le PCF s'opposa avec la dernière énergie au rapprochement entre étudiants qualifiés de "gauchistes" et ouvriers, et s'employa à cantonner la grève aux objectifs économiques d'une part, d'autre part à préparer les élections, qui échouèrent inévitablement puisqu'elle ne pouvaient se dérouler qu'en "temps de paix", c'est-à-dire après la fin du mouvement.

Privé d'une direction révolutionnaire reconnue, mai 68 fut aussi le terrain de prédilection de toutes les tendances réformistes ou gauchistes, des divers socialistes aux anarchistes, C'est ce dernier courant qui fut mis en avant par les médias, donnant à mai 68 l'image d'une révolte libertaire. La direction du PCF avait lui aussi agité la pancarte du "gauchisme" pour se prémunir de toute critique.
Ainsi mai 68 est devenu un symbole de la révolte petite-bourgeoise, de la liberté sexuelle, de la "contestation" de toute autorité, de la mythologie œdipienne, et d'un anticommunisme larvé commun à la social-démocratie et à l'anarchisme.
C'est ce tableau que la bourgeoisie a laissé en pâture à la jeunesse afin d'écarter le risque d'une vraie révolution.
Après mai 68, ceci reflétait une partie de la réalité mais non l'ensemble des mouvements sociaux où tous les courants de pensée se confrontaient, avec pour point commun l'opposition au pouvoir de la bourgeoisie.

___________________


En fait mai 68 fut très différent de cette image d'Epinal, et des années durant, pratiquement jusqu'à l'élection de Mitterrand, le combat contre le pouvoir bourgeois s'est poursuivi tant dans les usines que dans les écoles et les facultés.

Malgré l'échec politique dû d'une part à la menace d'une intervention de l'armée, et d'autre part aux manœuvres électoralistes de la social-démocratie et à la ligne révisionniste du PCF (et non aux courants gauchistes qui ne "dirigeaient" pas réellement les étudiants - ces derniers aspiraient à s'unir au combat de la classe ouvrière), la grève fut un immense succès contre le patronat, et le mouvement a généré une intense mobilisation politique de longue durée contre le pouvoir bourgeois.

Pour les salariés :
Le SMIG augmente de 35 %, et de +56 % pour les salariés agricoles. Les salaires augmentent de 10 % en moyenne. La section syndicale d’entreprise et l’exercice du droit syndical dans l’entreprise sont reconnus par la loi. Le passage par étapes de 48 heures aux 40 heures de travail hebdomadaire est acté. Les conventions collectives sont révisées. La part des primes dans la rémunération diminue au profit de celle du salaire. L’accès au remboursement des soins (ticket modérateur des visites et consultations) par la Sécurité sociale passe de 35 à 25 %.


Edité le 06-06-2020 à 21:29:17 par Xuan


marquetalia
Mai 68 était au départ une manifestation du PCF récupéree par les abats et autres gauchistes, ainsi que tous ces crapules de pédophiles,de hippies,et d opportunistes de tout poil
Plaristes
Clouscard en audio gratuitement :
https://youtu.be/9_nvEuIO_PQ

Néofascisme de l'idéologie du désir !


Edité le 19-05-2020 à 02:04:31 par Plaristes


Plaristes
"Une marchandise paraît au premier coup d'œil quelque chose de trivial et qui se comprend de soi-même. Notre analyse a montré au contraire que c'est une chose très complexe, pleine de subtilités métaphysiques et d'arguties théologiques."

Karl Marx Das kapital I.1.4

Voilà ce dont clouscard s'inspire.
Plaristes
https://youtu.be/1OhfD3x2bwM?list=PL_QDU_D-exBL4BNYyqLKzzv1P1UPXcXaK

Profites de la quarantaine !!!
Plaristes
"a/ La production de série et la consommation de
masse

Quelle est la plus réussie, l'idéale contre-révolution
libérale ? C'est celle qui se proclame anti-réactionnaire et
même progressiste : Mai 68. Ses héritiers peuvent aller
jusqu'à désigner « les nouveaux réactionnaires ». Il faut bien
situer le jeu dialectique et historique des trois composantes
essentielles qui interviennent dès les Trente Glorieuses et qui
ont constitué le fondement même de l'idéologie et de la
stratégie du libéralisme libertaire.

Alors que le réactionnaire veut revenir en arrière,
restaurer, le libéral va de l'avant pour réaliser plus vite que le
progressiste ce que celui-ci a rêvé. Avec, en prime, la plus-
value ! Alors que les deux processus - libéral et social - sont,
en termes de logique en relation inversement
proportionnelle, la propagande publicitaire et médiatique a
pu associer la promotion du libéralisme et le développement
progressiste, imposer la confusion des contraires, pour en
venir à leur identification. C'est l'histoire du diable qui se fait
bon diable et qui passe son temps à expliquer qu'il n'existe
pas : l'histoire du réformisme. "


Alors Xuan.. as-tu compris?
 
Retour au forum
 
créer forum