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![]() Embargo sur l'agroalimentaire: derrière la riposte russe, une nouvelle carte se dessine 08 août 2014 | Par Amélie Poinssot (Mediapart) Comme il l'avait annoncé, le Kremlin a pris des mesures de rétorsion en réponse à la politique de sanctions menée par les États-Unis et l'Union européenne à l'égard de la Russie. Depuis ce jeudi 7 août, tous les produits agroalimentaires en provenance des pays à l'origine des sanctions sont interdits sur le sol russe. La tension est à son comble entre Bruxelles et Washington d'un côté, Moscou de l'autre – qui se tourne, désormais, vers l'Amérique du Sud. La réponse russe ne s'est pas fait attendre : après la signature ce mercredi, par Vladimir Poutine, d'un décret « sur l'application de certaines mesures économiques spéciales pour assurer la sécurité de la Fédération russe » , le premier ministre Dmitri Medvedev a proclamé ce jeudi une « interdiction totale » de la plupart des produits alimentaires en provenance de l'Union européenne, des États-Unis, de l'Australie, du Canada et de la Norvège – autrement dit, tous les pays ayant pris des mesures ces dernières semaines à l'encontre de la Russie. À Bruxelles, cette politique de sanctions graduées avait été mise au point au moment de l'annexion de la Crimée, en mars, et elle était passée de mesures touchant des individus à des sanctions économiques ciblant des secteurs plus larges après le crash de la Malaysia Airlines, le 17 juillet 2014. La liste des produits, sous embargo pour un an, a été publiée sur le site du gouvernement russe ce jeudi 7 août 2014 : sont interdits, dès à présent, bœuf, porc, volaille, poisson, fromage, lait et produits laitiers, légumes et fruits en provenance des Vingt-Huit, des États-Unis, du Canada, de l'Australie et de la Norvège. Les aliments pour bébé sont toutefois exclus de l'embargo. « Pendant longtemps, la Russie n'a pas répondu aux dites sanctions déclarées contre elle par certains pays. Jusqu'au dernier moment, nous avons espéré que nos collègues étrangers allaient réaliser que les sanctions conduisaient à une impasse aveugle, et que personne n'allait en bénéficier. Mais ils n'ont pas compris cela, et à présent nous sommes forcés de répondre » , s'est justifié le premier ministre russe, tout en précisant : « Mais si nos partenaires font preuve d'une approche constructive en termes de coopération, alors le gouvernement sera prêt à réviser les échéances spécifiques pour la mise en place de ces mesures. » Dmitri Medvedev menace cependant de prendre de nouvelles mesures, comme une interdiction de vol pour la compagnie Ukrainian Airlines au-dessus de l'espace aérien russe ou même la suppression de l'usage du couloir transsibérien pour toutes les compagnies européennes et américaines. Une mesure qui contraindrait à d'importants détours les vols à destination de l'Asie et aurait un impact sur leur consommation de carburant. « Nous ne voulions pas que cela arrive , a toutefois temporisé le premier ministre russe, et j'espère sincèrement que le pragmatisme économique de nos partenaires va prévaloir sur des considérations politiques malveillantes, qu'ils vont penser autrement que vouloir intimider ou imposer des restrictions à la Russie, et que le commerce mutuellement bénéfique et la coopération économique seront restaurés à leur niveau antérieur. » Dmitri Medvedev détaille, ce jeudi 7 août, la liste des produits sous embargo Conséquence immédiate de cet embargo « total » , pour les supermarchés russes : de nombreux rayons vont se vider et les commerçants vont devoir trouver de nouvelles sources d'approvisionnement. Comme l'indique ce reportage télévisé de la BBC, plus de 60 % des produits alimentaires à Moscou seraient importés. À titre d'exemple, le journaliste remplit un caddie avec des haricots de Grande-Bretagne, du fromage de Lituanie, des nectarines de Grèce, des tomates des Pays-Bas, et du bacon espagnol. De fait, la Russie est déjà à la recherche de circuits alternatifs : dès jeudi, elle s'est tournée vers l'Amérique latine pour négocier une augmentation de ses exportations, et en particulier vers le Brésil, le Chili, l’Argentine et l’Équateur avec qui elle a déjà entamé des discussions. Pour ces pays, c'est une aubaine : « Il est évident que nous avons devant nous de nouvelles opportunités commerciales, reconnaît Sebastian Pillado, attaché commercial de l’ambassade du Chili à Moscou, cité par RFI. Le Chili est déjà un fournisseur important d’aliments et de boissons pour la Russie, mais nous pourrions désormais élargir notre offre en produits et en volume. » Sachant que les importations russes en produits agroalimentaires ont représenté au total près de 17 milliards de dollars pour les cinq premiers mois 2014, comme le précise l'antenne francophone, il y a effectivement des parts de marché à conquérir pour ces pays du sous-continent américain… En réalité, le président russe préparait ses arrières depuis quelque temps. À la mi-juillet, il avait effectué une tournée en Amérique latine et il s'était rendu, comme le rappelle le site d'information francophone sur l'Amérique latine, Actu Latino, au Nicaragua, à Cuba, en Argentine et au Brésil – cherchant de nouveaux appuis tandis qu'il se trouvait de plus en plus isolé sur la scène internationale. « Nous sommes intéressés par une Amérique latine unie, forte, économiquement viable et politiquement indépendante, qui est en train de devenir une partie importante du monde polycentrique émergent » , avait alors déclaré Vladimir Poutine. À noter que la présidente de l'Argentine, Cristina Kirchner, n'a jamais condamné l'annexion de la Crimée par la Fédération de Russie. Après le simulacre de référendum organisé à une vitesse éclair par Moscou en mars dernier, Cristina Kirchner a en effet choisi de condamner plutôt « les doubles standards de l’Occident » , qui d'un côté avait reconnu le référendum sur les îles Malouines en 2013 (qui a eu pour résultat le maintien du statut de territoire britannique d'outre-mer) et, de l'autre, rejetait celui sur la péninsule ukrainienne... À Cuba, Poutine a par ailleurs annoncé l'annulation de 90 % de la dette de l'île envers l'ex-URSS, ce qui représente quelque 31 milliards de dollars, et il a promis des investissements dans le port de La Havane pour développer les échanges avec la Fédération de Russie. Inquiétude en France C'est donc une nouvelle carte des échanges qui se dessine à l'aune de cette guerre économique que se livrent désormais Bruxelles et Washington d'un côté, Moscou de l'autre. Aujourd'hui, l'Union européenne risque bel et bien de se voir confisquer le marché russe par l'Asie ou l'Amérique latine. D'après le représentant de l'UE à Moscou, cité par l'agence de presse progouvernementale Ria Novosti, les pertes pour l'Union européenne découlant de cet embargo pourraient s'élever à 12 milliards d'euros. « Les produits agroalimentaires constituent 10 % de nos exportations vers la Russie » , a déclaré Vygaudas Ušackas, le délégué permanent de l'UE dans la capitale russe. Les produits touchés en première ligne ? Le saumon norvégien et les pommes polonaises, entre autres. Mais la France, gros producteur agricole, ne sortira pas indemne de cet embargo et l'inquiétude est de mise chez les professionnels du secteur. En 2013, la France se plaçait en effet au 9e rang des fournisseurs en agroalimentaire de la Russie derrière l'Allemagne et la Pologne et devant l'Italie et l'Espagne. Selon un document du ministère de l'agriculture qui reprend des statistiques russes, l'Hexagone a exporté en 2013 vers la Russie plus d'un milliard d'euros de produits alimentaires. Le président de la FNSEA, le grand syndicat agricole français, a ainsi demandé ce jeudi à rencontrer « dans les meilleurs délais » François Hollande, à qui il a adressé un courrier, cité par l'AFP, dans lequel il souligne que « ces exportations annulées vont se traduire par la commercialisation de produits initialement destinés au marché russe dans les pays européens, dont la France » . Autrement dit, le marché risque d'être saturé, ce qui pourrait tirer les prix vers le bas, et les pertes des parts de marché en Russie au profit de nouveaux partenaires comme les pays asiatiques ou latino-américains nécessiteront des années pour se reconquérir, même après la levée de l'embargo. La France pourrait toutefois être relativement épargnée par rapport à ses voisins : la majorité des exportations françaises vers la Russie sont en effet constituées de vins et de spiritueux, qui ne sont pas touchés, pour l'heure, par l'interdiction russe (ils représentaient 145 millions d'euros en 2012 selon Ubifrance, l'organisme chargé d'aider au développement des entreprises françaises à l'international). Les principaux fournisseurs de la Russie, par Radio Free Europe, d'après des chiffres de Reuters Certains pays que l'on pourrait penser les plus touchés par la riposte russe jouent au contraire l'apaisement. Ainsi l'éditorialiste de Verslo žinios, journal économique lituanien, persuadé que l'embargo russe aura peu d'impact, écrit-il ce vendredi 8 août : « Le bilan économique de la Lituanie est positif, ce qui n'a pas été souvent le cas dans l'histoire récente du pays. Si 20 % des exportations lituaniennes sont destinées à la Russie, 15 % de celles-ci reviennent ensuite en Lituanie sous forme de réexportations. La Lituanie exporte principalement des produits alimentaires vers la Russie, mais aussi des matériaux de construction, du papier et de la nourriture pour chats. Dans le cas de réelles perturbations des relations commerciales, seuls certains secteurs et entreprises connaîtraient de véritables difficultés. » Côté américain, on joue l'indifférence. Dans une déclaration reprise par l'AFP, David Cohen, secrétaire adjoint au Trésor chargé du terrorisme, a estimé que les mesures annoncées par la Russie auraient un impact « insignifiant » sur l'économie américaine. Pour le journal critique Novaïa Gazeta, c'est en définitive une guerre économique mondiale qui s'annonce, et qui profitera surtout à la Chine et aux États-Unis. « Nous sommes à l'aube de la première guerre économique mondiale, dans laquelle des protagonistes du monde entier se sont laissé entraîner par leurs actions irresponsables et hostiles, écrit la journaliste Julia Latynina dans l'édition du 7 août 2014. Dans cette guerre, au lieu des canons il y aura des sanctions, et tout comme les canons, elles nuiront aux deux camps. Il est évident que c'est la Russie qui en pâtira le plus. La Chine profitera le plus de cette guerre économique mondiale, ainsi que tous les autres pays qui n'y sont pas impliqués. Un autre profiteur, qui avait déjà largement bénéficié des deux guerres mondiales, sera l'Amérique. D'une part parce que l'économie et le système bancaire s'y portent mieux qu'en Europe, de l'autre parce que l'échec de la Russie et la faiblesse de l'UE généreront une fuite des cerveaux vers les États-Unis. » Les autorités russes, elles, estiment que les conséquences de l'embargo seront minimes sur son marché intérieur. Outre le développement des liens avec l'Amérique du Sud, elle entend booster la production nationale et, sans surprise, renforcer les échanges avec son fidèle voisin, la Biélorussie, qui est déjà son premier fournisseur de nourriture (à hauteur de 2,7 milliards de dollars par an). D'après la radio gouvernementale "La Voix de la Russie", le premier vice-ministre de l’agriculture et de l'alimentation biélorusse Leonid Marinitch a déclaré que son pays était prêt à livrer à la Russie les produits agroalimentaires à la place des pays frappés par les sanctions de Moscou. Minsk peut notamment augmenter ses exportations de fromages, viande et lait, mais aussi de légumes et de fruits. « Nous allons remplacer les pommes de terre hollandaises et les pommes polonaises » , a-t-il assuré. |
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Xuan |
![]() "D’une façon générale, ni les dirigeants de Kiev (et leur irresponsable illusion d’une solution militaire au conflit ukrainien) , ni les aventuriers armés de la partie orientale du pays (qui plongent chaque jour un peu plus profondément la population de la région dans une dramatique impasse) ne méritent notre confiance ou notre sympathie. C’est d’abord à leur niveau que se situe la cause des derniers développements du plus grand désastre que notre continent ait connu depuis la guerre en ex-Yougoslavie" . Lire aussi le commentaire de Bernard Trannoy sur le torchon de Francis Wirtz dans l'Humanité Dimanche "Ukraine : la négociation ou le chaos" Il ressort que la ligne éditoriale de l'Humanité change aussi vite que la météo de cet été pourri . Quand le parti révisionniste sera décidé et cessera de renvoyer les deux camps dos à dos on avisera mais actuellement il ne soutient absolument pas les insurgés du Dombass. |
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Xuan |
![]() Sur 'zone militaire - apex 360.com' : "L’activité des bombardiers russes augmente près de l’Alaska tandis que Moscou dit avoir chassé un sous-marin américain en mer de Barents" |
Xuan |
![]() En ce qui concerne la guerre économique, Ria Novosti publie un article intéressant où il ressort que c'est l'Europe qui est la plus touchée. Il est remarquable qu'aussitôt après le retour de bâton russe Obama ne se manifeste pas et intervient ailleurs : dans l'adversité le faible s'en prend souvent à plus faible que lui. Le conflit commercial accélère le rapprochement des pays du Tiers Monde et des BRICS. Le Brésil s'est dit prêt à fournir 150 000 tonnes de viande de volaille supplémentaires au courant de l'année (la Russie en importe actuellement près de 60 000 tonnes par an). Et les autorités russes sont en consultations sur l’élargissement des importations avec des représentants commerciaux d'Argentine, du Brésil, de Chili et de l'Equateur. En représailles l'Europe cherche à punir la Russie au sein de l'OMC. Inévitablement cela précipitera un regroupement économique parallèle et concurrent à l'OMC si les impérialismes occidentaux conservent leur mainmise sur cette organisation. Un nouveau visage du monde se dessine. A lire aussi l'article de Xinhua Embargo russe : le président français évoque les conséquences sur les filières agroalimentaires du pays __________________ Guerre des sanctions: les gagnants sont au-dessus de la mêlée Alexander Kryazhev MOSCOU, 7 août - La Voix de la Russie/RIA Novosti Poussée par les États-Unis, l’Europe s’est retrouvée à l’avant-garde de la guerre des sanctions avec la Russie. Or, on sait qu’à la guerre, c’est l’avant-garde qui subit les plus lourdes pertes, estime Hasan Selim Özertem, du Centre turc d’études stratégiques internationales. "Il est évident que les pertes subies par les États - Unis seront insignifiantes parce que les échanges russo -américains représentent 40 milliards de dollars tout au plus. Par contre, la valeur des échanges entre l’Europe et la Russie est de l’ordre de 450 milliards de dollars et, par conséquent, les sanctions frapperont de plein fouet l’Europe et la Russie. Certes, les pertes en question se répartiront inégalement suivant les pays. Comme la Russie entretient les relations très serrées avec l’Allemagne, la France et l’Italie, les sanctions les pénaliseront en tout premier lieu" . Les sanctions imposées par l’UE qui prévoient l’interdiction des livraisons des produits duales, des équipements et du matériel de production de pétrole, affectent aussi le secteur financier russe. En effet, 5 banques russes à savoir Sberbank, VTB, Gazprombank, VEB et Rosselkhozbank sont touchées par les sanctions. Pourtant, selon Ali Ari, directeur du Centre d’études européennes de l’Université Kirklareli, c’est la City de Londres et d’autres grandes places financières qui subiront le contrecoup des sanctions imposées aux banques russes. "Ces mesures se répercuteront surtout sur le marché britannique des valeurs et sur le secteur financier français et allemand. C’est pour cette raison qu’on peut dire que les sanctions auront un impact négatif tant sur l’économie russe que sur celle de l’UE. J’attire cependant votre attention sur le fait que les sanctions ne touchent pas le secteur de l’énergie et l’importation du gaz naturel qui est le volet de loin le plus important des échanges entre la Russie et l’UE. Les sanctions européennes évitent soigneusement la vache sacrée que représente le gaz russe pour la bonne raison que l’Europe ne veut pas se nuire. J’en conclus que l’effet des sanctions européennes sera limité" . En décrétant des sanctions contre la Russie, les États-Unis et l’Europe déclarent qu’elles sont appelées à résorber " la crise en Ukraine " et à faire cesser le bain de sang dans ce pays. Selon monsieur Ali Ari, les sanctions n’ont en réalité rien à voir avec la guerre en Ukraine. C’est que d’aucuns voulaient absolument imposer des sanctions contre la Russie et ceci sous n’importe quel prétexte. En même temps, les conséquences politiques de ce jeu peuvent être diamétralement opposées à l’objectif initial. Edité le 09-08-2014 à 20:23:40 par Xuan |
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