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Xuan
La Chine n’est pas une superpuissance financière

à partir de Claude Meyer (première partie)
06 août




Source : histoire et société


Hier nous avons publié un article traduit par Marianne de la Pravda, le journal du Parti communiste de la Fédération de Russie, il insistait sur le fait que la Chine désormais en situation de devenir la première puissance économique mondiale demeurait une économie socialiste dont les priorités étaient dirigées par le parti communiste.
L’article ci-dessous approfondit ce thème mais insiste sur l’originalité de la situation chinoise et mondiale.
Effectivement l’orientation chinoise est dirigée par des priorités qui ne sont pas celles du capitalisme, mais bien le fait que la Chine demeure un pays sous-développé et il s’agit moins pour ce pays de conquérir une hégémonie comme les Etats-Unis que vaincre ce sous-développement dans une situation d’équilibre instable où la marche en avant est imposée par des contraintes dont la moindre n’est pas qu’elle doit nourrir une population de plus d’un milliard quatre cent mille individus.
(note de Danielle Bleitrach)

Problèmes économiques, la documentation française, n°3114,deuxième quinzaine de juin 2015 pp 24-32

L’extraordinaire capacité d’épargne des entreprises et des ménages chinois – qui représente 30% du stock mondial d’épargne – ainsi que le montant considérable des réserves de change – supérieur au produit intérieur brut (PIB) annuel de l’Allemagne – constituent les principaux atouts financiers de la Chine, devenue à la fois bailleur de fonds et troisième investisseur mondial derrière les Etats-Unis et le Japon.

Le pays n’est pas pour autant une superpuissance financière. La gestion des réserves de change pose en effet problème aux autorités chinoises, qui doivent concilier meilleur rendement possible et maintien de la valeur de ces réserves en yuans.
Jusqu’à présent, Pékin a opté pour la prudence, en plaçant 70% des réserves en dollars aux Etats-Unis. Mais le pays devra à l’avenir, pour éviter les risques liés à la dépréciation du billet vert par rapport au yuan, diversifier ses placements.

Début 2014, trois opérations réalisées coup sur coup par des investisseurs chinois :

> L’entrée de la société d’Etat chinoise Dongfeng au capital du constructeur automobile Peugeot-Citroen.
> Le rachat du premier assureur portugais par le groupe Fosun
> L’acquisition de Motorola et des serveurs IBM par Lenovo

Exemples emblématiques d’une évolution majeure de la stratégie internationale de la Chine :

Forte de réserves de change supérieures au Produit Intérieur Brut (PIB) de l’Allemagne, elle n’exporte plus seulement des biens manufacturés, mais aussi des capitaux.
Après le rouleau compresseur des exportations, déferlante chinoise sur la finance : Pékin deviendrait en quelque sorte le banquier du monde, à la fois comme investisseur et bailleur de fonds.

1. Investisseur : stratégie d’acquisition, ressources naturelles, sociétés technologiques, immobilier.

2. Prêteur, la Chine premier créancier des Etats-Unis, au chevet de l’Europe dans la crise de l’euro, et devenue banque de développement pour certains pays en développement, une nouvelle Banque mondiale.

Nombreuses questions :
quels sont les objectifs de la Chine? volonté de domination dans des secteurs clés de l’économie mondiale? Pourquoi une expansion financière, alors qu’une importante partie de la population reste très pauvre?
La chine ne figure qu’au 101e rang mondial pour l’indice de développement humain. Déjà première puissance industrielle mondiale, quelle sera son hégémonie si elle est une puissance financière?

Investir et prêter à l’étranger, un impératif pour Pékin

A ce stade, l’expansion financière chinoise vise plus à pallier des vulnérabilités de son économie qu’à affirmer une volonté de suprématie mondiale.
Les performances de la Chine sont impressionnantes, mais il ne faut pas sous-estimer ses vulnérabilités.

Le géant chinois souffre souvent d’une dépendance excessive à l’égard de l’étranger. D’amont en aval son système productif est tributaire du reste du monde à un triple niveau :

1. Les matières premières. Les importantes ressources naturelles du pays restent très insuffisantes pour alimenter une croissance rapide et peu économe. La Chine absorbe 21% de l‘énergie primaire produite dans le monde alors qu’elle ne représente que 11% du PIB mondial.
2. Les importations : en matière de technologie, plus de 60% de l’arsenal technique de l’industrie chinoise est d’origine étrangère.
3. Troisième dépendance, le pays est fortement tributaire de la demande mondiale : lorsque ses principaux marchés d’exportation faiblissent, la croissance s’essouffle.

Pour réduire ces vulnérabilités majeures sur la croissance chinoise, la stratégie des dirigeants chinois est de mobiliser une partie des colossales réserves de change pour un triple objectif :

1. Sécuriser l’accès aux ressources naturelles de la planète
2. Racheter des entreprises étrangères riches en technologies
3. Internationaliser les sociétés chinoises pas assez riches encore en technologie

D’où l’envolée des investissements directs à l’étranger (IDE) qui ont atteint 500 milliards de dollars fin 2013. Il s’agit cependant d’une part modeste des réserves de change chinoises – 3820 milliards de dollars fin 2013 – le solde étant utilisé pour des placements et prêts à l’étranger.

L’envolée des investissements directs à l’étranger

La Chine est devenue en 2013 le troisième investisseur international derrière les Etats-Unis et le Japon, mais ce stock d’investissement direct à l’étranger ne représente que 6% du total mondial, c’est peu par rapport au poids réel du pays dans le monde :
21% pour la population et 11,5% du PIB. Mais il y a l’amorce d’un mouvement puissant qui fait que ce pourcentage de 6% pourrait être multiplié par trois ou quatre d’ici à 2020.

La rentabilité n’est pas l’essentiel, mais l’essentiel est de réduire les vulnérabilités majeures précédemment définies. Nous avons donc là un effet qui n’est pas directement capitaliste.

Les acteurs de cette ouverture vers l’étranger :

L’Etat-parti joue un rôle central : comme stratège, il oriente les investissements étrangers des entreprises vers les secteurs prioritaires, mais il intervient aussi directement à travers les sociétés d’Etat que le Parti communiste chinois (PCC) contrôle étroitement.

Les plus importantes d’entre elles, qui bénéficient d’un quasi-monopole dans les secteurs stratégiques, sont la figure de proue de cette offensive et ont réalisé les trois quarts des investissements à l’étranger. Les crédits nécessaires leur sont octroyés presque sans limite par les grandes banques commerciales publiques dont les dirigeants sont eux-mêmes des hauts cadres du PCC.

De plus, deux banques gouvernementales Eximbank et China Developpement interviennent dans les grands projets à l’étranger et prêtent massivement aux pays d’accueil. Sociétés d’Etat et banques publiques sont ainsi le bras armé de l’Etat pour la mise en œuvre de cette ouverture internationale destinée à palier certains handicaps économiques.

La stratégie chinoise paraît donc mûrie et déterminée, mais en fait les sociétés chinoises n’en sont qu’à leur début d’expansion à l’étranger, elles manquent encore d’expérience et ont connu de nombreux échecs, tant dans leur gestion que dans l’attitude des pays d’accueil.

La Chine ne rachète pas le monde, elle rachète ce qui lui manque.

Les investissements étrangers ont été orientés en priorité absolue vers les ressources naturelles.
Le pouvoir chinois est hanté par la pénurie en énergie et minerai. Ces deux grands secteurs, chasse gardée des grands groupes étatiques, monopolisent deux tiers des investissements à l’étranger.
Mais la situation devrait évoluer dans une deuxième vague qui elle cible les ressources technologiques (tels Volvo et PSA).
Parallèlement les sociétés privées chinoises devraient progressivement rattraper leur retard sur les entreprises d’Etat, car elles sont en pointe dans l’innovation technologique.

Les destinations actuelles résultent du primat accordé jusqu’ici aux ressources naturelles énergie et mine.
L’Amérique du Nord et l’Asie (y compris Russie) sont en tête (18% chacune du total), puis l’Amérique latine et l’Océanie (17% chacune)L’Afrique est en cinquième position (12%) suivie de l’Europe (10%). En revanche la Chine a peu accès au Moyen-Orient verrouillé par les occidentaux.

Les investissements chinois se heurtent souvent à la méfiance des pays d’accueil face à l’Etat parti et aux craintes d’une stratégie politique surtout s’il s’agit d’enjeux stratégiques, blocage ainsi aux Etats-Unis et en Australie.

L’impact des investissements chinois est différent s’il s’agit de pays développés ou sous-développés.
Dans le cas des pays sous développé, l’exemple type étant l’Afrique, l’échange matière première contre produits manufacturés a été dénoncé comme un nouveau colonialisme. C’est vrai que cela encourage une économie de rente, mais les retombées positives de l’expansion chinoise sont loin d’être négligeables dans ces régions. Le prix des matières premières a explosé grâce à la demande chinoise et la Chine finance des infrastructures dont l’absence était un goulot d’étranglement pour le développement de ces pays.

Dans les pays développés l’impact n’est pas le même car les investissements chinois sont plus diversifiés. Effets bénéfiques, l’apport de capitaux et la création d’emploi. Mais il y a les risques d’une perte de position stratégique dans les transferts de technologie.

La Chine cherche à renforcer sa puissance militaire

La Chine cherche à renforcer sa puissance militaire et cela est particulièrement clair dans les transferts de technologie à usage civil mais aussi militaire. Si les marchés européens et américains sont ouverts aux investissements étrangers, ce n’est pas le cas pour le marché chinois où ils sont soumis à de multiples restrictions. Des négociations ont été entamées sur ce point entre l’UE et la Chine, longues et difficiles, parce que cette question touche à la politique industrielle de l’Etat parti et au contrôle centralisé de l’économie.
(à Suivre)


Edité le 14-08-2015 à 23:45:01 par Xuan


 
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