Sujet :

MANIFESTE DU PARTI OUVRIER (7)

robertbibeau
   Posté le 23-07-2014 à 22:22:34   

robertbibeau@hotmail.com

http://www.les7duquebec.com/7-au-front/manifeste-du-parti-ouvrier-7/


Nous poursuivons la publication d’une série de neuf (9) articles portant sur quatre questions fondamentales pour la gauche internationale :

1) Nous avons traité de la question du sectarisme-entrisme-dogmatisme, cette maladie qui sévit depuis des décennies parmi la gauche.
2) En prolongement du sujet précédent – nous avons abordé la question de l’unité des forces de la gauche. Peut-on construire l’unité de la gauche militante? Disponibles à cette adresse : http://www.les7duquebec.com/author/robertbibeau/
3) Nous complétons aujourd’hui avec la troisième instance de la lutte de classe, l’instance idéologique.
4) Enfin, à l’approche du 97e anniversaire de la Révolution d’Octobre 1917, nous présenterons cinq leçons de la Révolution bolchévique.

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CH 3 : TROIS INSTANCES DANS LA LUTTE DE CLASSE (suite-3)

Lutte de classe dans l’instance idéologique

Pour conclure à propos des relations qui attachent la bataille sur le front économique et politique de la lutte de classes, Rosa Luxembourg a écrit : «Le mouvement dans son ensemble ne s’oriente pas uniquement dans le sens d’un passage de l’économique au politique, mais aussi dans le sens inverse. Chacune des grandes actions de masse politiques se transforme, après avoir atteint son apogée, en une foule de grèves économiques. Ceci ne vaut pas seulement pour chacune des grandes grèves, mais aussi pour la révolution dans son ensemble. Lorsque la lutte politique s’étend, se clarifie et s’intensifie, non seulement la lutte revendicative (lutte de résistance et lutte gréviste défensive, NDLR) ne disparait pas, mais elle s’étend, s’organise et s’intensifie parallèlement. Il y a interaction complète entre les deux.» (1)

Depuis la trahison de la Révolution prolétarienne d’Octobre 1917 et le développement du capitalisme monopoliste d’État en URSS; depuis l’élimination progressive de l’Opposition de Gauche de toutes les organisations communistes, la classe ouvrière tout en poursuivant invariablement sa lutte résistance sur le front économique, combat qui connait ses phases de flux et de reflux, a bien peu de présence dans l’instance politique et pour que cela change il est impératif que nous menions la guerre de classe sur le front idéologique. Car c’est bien sur ce front théorique et idéologique que la bourgeoisie a d’abord fait porter ses efforts pour discréditer l’alternative prolétarienne.

La classe capitaliste monopoliste est parfaitement consciente de cette problématique et pour que jamais la classe ouvrière ne gouverne il lui est nécessaire d’engager la lutte de classe en amont du front politique – dans l’instance idéologique, c’est-à-dire au niveau de l’information et des communications et surtout sur le font de la théorie révolutionnaire et de l’analyse scientifique de la société contemporaine et de la compréhension de l’évolution des sociétés, des modes de production et des rapports sociaux de production. Car sans théorie révolutionnaire pas de parti révolutionnaire, et sans parti révolutionnaire pas de conquête du pouvoir d’État par les soviets ouvriers disait Rosa Luxembourg.

Intellectuels gauchisants et petits-bourgeois progressistes de service galvaudent le mouvement ouvrier depuis des années afin d’expliquer le peu d’estime dans lequel ils tiennent la théorie le socialisme scientifique, le matérialisme dialectique et la méthode marxiste toujours prompts à vilipendé le militant « borné », distribuant allègrement l’anathème de dogmatique et de sectaire à quiconque défend ces principes que ces énergumènes souhaiteraient ravalée au rang d’outils optionnels et encombrants.

Le Parti ouvrier a l’impératif devoir de défendre, de maitriser et d’utiliser les concepts, les principes et la méthode du socialisme scientifique, du matérialisme dialectique et historique et la méthode du marxisme révolutionnaire pour analyser concrètement la situation économique, politique et idéologique afin de transformer cette réalité à l’avantage de la classe ouvrière.

Les élections démocratiques bourgeoises

À l’époque de l’impérialisme moderne il n’est plus de mise d’accréditer la légitimité des élections bourgeoises en participant à quelque forme d’élection organiser par le capital pour désarmer idéologiquement et politiquement le prolétariat révolutionnaire. Dans nombre de pays, d’instinct les ouvriers ont compris – envers et contre l’avis de la bourgeoisie électoraliste – que ces mascarades électorales n’étaient que salmigondis et tartufferies ou la voix du prolétariat ne pourra jamais être entendue, affirmée, ni respectée. Et quand bien même un parti, soi-disant prolétarien, s’emparait du parlement des marchands, des industriels, des financiers et des banquiers cela ne lui donnerait aucune prise sur les corps policiers, l’armée, les universités, les moyens de production, de commercialisation et de communication ni sur le système de justice des riches et il serait balayé après quelques mois ou quelques années. Dans toutes les constitutions des pays capitalistes il est un article non écrit qui transcende tous les autres et qui se lit comme suit « Jamais la classe ouvrière ne portera atteinte à l’intégrité du pouvoir bourgeois et à la légalité de la propriété privée des moyens de production, d’échange et de communication ». En vertu de cet article gravé sous le palimpseste de la constitution, les institutions juridiques et militaires s’attribuent le droit d’imposer la dictature bourgeoise.

Il en serait exactement de même pour des militants communistes qui s’empareraient du contrôle des appareils syndicaux, 5e colonne de la bourgeoisie dans le camp prolétarien. Un syndicat révolutionnaire serait discrédité par sa centrale et disqualifié par l’État bourgeois si ces officiers s’entêtaient à diriger la lutte de classe gréviste de ses membres au lieu de négocier la vente de leur force de travail au plus offrant.

L’ouvrier qui répudie toute participation aux élections bidon a totalement raison d’affirmer ainsi que ce n’est pas de cette façon que sa classe s’emparera du pouvoir d’État et ce n’est pas ainsi que son parti imposera l’expropriation sans compensation de tous les moyens de production, d’échange et de communication au bénéfice de la classe ouvrière et des salariés.

À ceux de la petite bourgeoisie qui partagent le lit de la grande bourgeoisie, il n’est rien à ajouter. Aux autres, à tous ceux qui souhaitent contribuer à la conquête du pouvoir d’État sous l’hégémonie du prolétariat, il est demandé de craindre de dévier d’un iota des enseignements durement acquis par l’expérience révolutionnaire de nos paires de la Commune (1871) et de la Révolution bolchévique d’Octobre (1917). Si malheureusement les acquis politiques et économiques de ces révolutions nous ont été confisqués et si aujourd’hui tant de travail reste à faire pour reconstruire de véritables partis politiques ouvriers révolutionnaires, sur le plan théorique et idéologique cependant l’intégralité des conquêtes, des acquis, des savoirs, de la mémoire des luttes et des connaissances scientifiques des théoriciens révolutionnaires sont à notre portée. Nombre de camarades n’imaginent même pas l’importance de cet héritage qui constitue un facteur décisif pour l’avancement de la révolution socialiste (2).

Ce savoir nous permet d’analyser, de comprendre, de démontrer et d’anticiper (les quatre activités fondamentales qui définissent une science) l’évolution du mode de production impérialiste moderne. Nul économiste – politicien – intellectuel bourgeois ne dispose d’une telle arme scientifique. C’est la raison pour laquelle ils errent de-ci de-là et pontifient à propos de l’avenir de l’Euro, de «l’étalon»-or, du dollar, du crédit désordonné, de l’inflation, de la dette souveraine gargantuesque, du système bancaire débonnaire, des finances publiques catastrophiques, de l’industrie délocalisée et de l’économie en déroute sans rien comprendre, sans rien expliquer, sans rien anticiper, que la « reprise » économique illusoire.

C'est au militant de s’emparer de cet héritage de loyauté et de l’étudier et, surtout, de l’appliquer concrètement à la situation concrète de chaque milieu de résistance. Prenez garde cependant avant de tenter d’inventer de nouveaux principes théoriques prétendument créatifs, ou de prétendre bidouiller le socialisme scientifique centenaire à une quelconque situation supposément unique et extraordinaire. Assurez-vous de ne pas vous engagez dans le marais de l’opportunisme, du réformisme, du trotskyste, du révisionnisme, du maoïsme, du national-socialisme, de l’eurocommunisme, de l’idéalisme, du social démocratisme, du crétinisme parlementaire, du titisme, de l’altermondialisme, de l’écosocialisme et de moult autres contrefaçons. Méfiez-vous de cette littérature pédante et ignorante pseudo marxiste, mais véritablement opportuniste et idéaliste.

Parce que la lutte de classe dans les instances économique, politique et idéologique évolue chacune à un rythme différent, de façon concomitante et interdépendante cependant, il est et il restera indispensable que les communistes appliquent le centralisme démocratique (droit de parole, d’opinion et de vote au sein de l’organisation), couplé à la dictature du prolétariat dans le parti révolutionnaire et que les Soviets ouvriers disposent du contrôle de l’ensemble de l’État du prolétariat, du pouvoir juridique, policier et militaire, du contrôle sur les institutions du pouvoir économique, et enfin sur le pouvoir et les institutions de l’instance idéologique.

Les alliés des ouvriers

Le « peuple » est constitué d’un amalgame de classes et de segments de classes tels que la paysannerie pauvre (en pays néo-colonisés seulement, car il ne reste aucun reliquat de la paysannerie pauvre en régime impérialiste moderne dominant), les artisans, les petits commerçants non monopolistes et la petite bourgeoisie, un segment de classe dans chaque pays impérialiste amalgame que les idéologues bourgeois appellent frauduleusement la « classe moyenne », source inépuisable d’idées, de théories, de concepts idéalistes – mystiques – métaphysique – utopistes – réactionnaires – contre-révolutionnaires et qui fournit, vague après vague, les contingents de soldats d’avant-garde du capital dans sa lutte acharnée contre l’armée de classe du prolétariat.

Tous les concepts que ces idéalistes éclectiques qualifient de « spontanés », de « créateurs », d’« originaux », d’« inédits », de « non dogmatiques », de « non conformistes » et même de « guides pour l’action » foisonnent dans leur cerveau désœuvré. Ces concepts sont repris et diffusés avec enthousiasme par les médias à la solde et ils contaminent la pensée des militants de toutes les classes sociales, y compris la pensée des militants communistes ouvriers. C’est la raison pour laquelle le combat de classe sur le front théorique et idéologique est toujours aussi incisif et décisif et ne doit jamais être relâché.

Pour schématiser grossièrement, nous pourrions dire comme Rosa Luxembourg que la lutte de classe commence dans l’instance économique, se propage dans l’instance politique et envahie l’instance idéologique, puis, retour du niveau idéologique vers le niveau politique et économique, et ce processus s’enchevêtre et se poursuit inlassablement, mais il repose toujours sur les fondements économiques – sur la production et l’échange des moyens de subsistance et sur le processus de reproduction des classes sociales forgeant l’espèce humaine contemporaine (dans la situation historique concrète propre à chaque époque chaque mode de production).

Face à la crise du mode de production impérialiste moderne entraînant la faillite du capital financier – dont les banqueroutes de la petite bourgeoisie – de la paysannerie – des artisans et des petits commerçants ne sont que les tristes préludes – ces classes et ces segments de classe se présentent sur l’avant-scène pour protester contre la détérioration de leurs conditions de vie et de travail. Les verts, les altermondialistes, les néo-libéraux compassés, la « société civile citoyenne » désemparée, les ONG subventionnées, les trotskystes agités, les anarchistes surexcités, les révisionnistes anciennes façon, les révisionnistes maoïstes nouvelle formule, les socialistes d’opérettes, les nationaux-socialistes hystériques, leurs amis islamistes-djihadistes, les nationalistes chauvins et les autres réformistes de tout acabit se sont donnés rendez-vous sur la place publique afin de remplir leur mission au nom de la bourgeoisie, celle de fourvoyer la classe ouvrière afin que jamais elle ne s’élève de la lutte de classe sur la plan économique pour remettre en question la dictature de la bourgeoisie dans les instances politique (l’État) et idéologique (le système éducatif, de recherche, culturel et religieux); que jamais elle ne pose la question de la révolution prolétarienne et du renversement du régime impérialiste moderne.

Développement inégal et déphasé

Le développement inégal – déphasé et combinée de la lutte de classe dans les trois instances économiques – politique – idéologique a pour conséquence qu’après la prise de pouvoir par la classe ouvrière, au niveau économique et politique, la conscience de la population, du prolétariat et de ses alliés, sera toujours empreinte d’idées, de concepts, de théories idéalistes anti-scientifiques, narcissiques, individualistes, réactionnaires et contre-révolutionnaires issus directement des centaines d’années de pratiques sociales, économiques, politiques et idéologiques bourgeoises (éducation, formation, recherche, information, communication, arts, culture, vie morale et religieuse). Ces mentalités héritées du passé ne disparaitront pas en même temps que s’éteignent le droit bourgeois, la propriété privée des ressources et des moyens de production, d’échanges et de communication et l’éradication de l’expropriation de la plus-value ouvrière.

Il faudra du temps, de nouvelles praxis sociales, de nouveaux rapports de production issus d’un nouveau mode de production avant que les mentalités, les consciences de classe, collective et individuelle, soient totalement transformées pour s’adapter au nouveau mode de production socialiste (phase de transition) puis communiste. Pendant cette lente transformation collective et individuelle, les reliquats des rapports sociaux individualistes et vénaux bourgeois seront prégnants – obsédants et toujours présents dans la conscience des hommes et des femmes venus du passé. Le pouvoir du prolétariat assurera la démocratie et le droit de parole et de représentation pour la population avec plein droit de révocation des élus (accrédités pour un temps limité, non renouvelable) qui ne défendraient pas les droits collectifs socialistes puis communistes.

Pour les organisations politiques réformistes et opportunistes, c’est la superstructure politique et idéologique qui commande à l’infrastructure économique comme le cerveau humain commande au corps du «citoyen». Donc, l’infrastructure économique obéit aux décisions des politiciens, des théoriciens, des théologiens et aux désidératas des citoyens qu’il suffit de mobiliser en grand nombre pour que par la puissance de leur bulletin de vote ils imposent leurs diktats aux fusils des bourgeois.

Ce sophisme permet ensuite de justifier le prêchi-prêcha des socialistes utopistes et des réformistes qui, patiemment, tentent de convaincre la foule mouvante d’adhérer à leurs politiques qui une fois qu’ils seront en mesure de les appliquées – seulement quand la puissante classe capitaliste leur laissera temporairement la gouvernance des affaires de l’État s’ils ont présenté «pattes blanches» – s’avèreront tout aussi catastrophiques que celles des partis d’opposition. Gauche ou droite c’est du pareil au même fini par comprendre l’ouvrier éclairé. C’est le rôle des bureaucrates syndicaux, de l’intelligentsia, et des politiciens bourgeois de convaincre les ouvriers du contraire.

Convenons toutefois que les changements de mentalité, les transformations morales, intellectuelles et sociales ont leur propre temporalité et se modifient plus lentement et de manière plus complexe, dialectiquement, que les vecteurs économiques, politiques, juridiques ou militaires. La société socialiste devra avoir évolué – se transformer dans la durée – pour qu’émerge l’Homme et la Femme communiste nouvelle, débarrassée des artefacts de la pensée idéaliste bourgeoise. Ce processus de décontamination des idées – des théories – de l’idéologie bourgeoise – sera long fastidieux et périlleux.

Pour y avoir échoué après quelques années de lutte de classe acharnée le Parti bolchévique a été incapable d’empêcher l’édification du capitalisme d’État en Union soviétique. Voilà un exemple concret ou l’infrastructure économique n’était pas en phase avec la superstructure idéologique et politique ce qui a entraîné un renversement du pouvoir soviétique (l’abolition des soviets) et du mode de propriété des moyens de production pour enfin établir le mode de production capitaliste monopoliste d’État.

Étant donné que la base économique – l’infrastructure productive de la société soviétique retardait et n’avait eu ni l’opportunité ni le temps de se développer suffisamment pour assurer le principe communiste « De chacun selon ses capacités – à chacun selon ses besoins » le mode de production retardait à éliminer les reliquats des rapports de production bourgeois-capitalistes qui alimentaient la base sociale capitaliste à l’intérieur de l’État et de la société soviétique, si bien qu’il advint ce dont chacun se souvient. Il aura suffi de quelques années pour que l’édifice soviétique se contamine et dégénère. La suite la semaine prochaine.



(1) Luxembourg Rosa (1906) https://www.marxists.org/francais/luxembur/gr_p_s/greve4.htm
(2) Vous trouverez une grande quantité d’ouvrages édités et publiés en version numérique sur ces quelques sites informatiques : http://www.collectif-smolny.org/ et aussi http://marxisme.fr/ également http://www.marxists.org/francais/ et aussi http://classiques.uqac.ca/



À LIRE EN COMPLÉMENT : http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520